(B2) Depuis la mise en oeuvre du traité de Lisbonne, en 2009, un article est resté lettre morte. L’article 222, ou plutôt son dernier alinéa, qui prévoit un examen régulier par les Chefs d’Etat et de Gouvernement des menaces qui pèsent sur l’Union européenne.
« 4. Afin de permettre à l’Union et à ses États membres d’agir d’une manière efficace, le
Conseil européen procède à une évaluation régulière des menaces auxquelles l’Union est confrontée. »
Pourtant que ce soit en matière de terrorisme, de flux migratoires, de position agressive, ou même de catastrophe naturelle ou technologique, les menaces ne manquent pas. Et les réunions du Conseil européen non plus. Cette analyse pourrait être utile pour éviter d’agir totalement à chaud.
Une réflexion ensemble utile
Cependant, que ce soit sous le temps de Herman Van Rompuy ou de Donald Tusk, personne n’a jamais pensé à mettre ce sujet à l’ordre du jour. Un dispositif qui coûte — rappelons-le 0 euros au budget européen. Il ne s’agit pas, en effet, d’ajouter une nouvelle structure ni d’engager de nouvelles dépenses mais simplement de réfléchir ensemble, sérieusement, aux principales menaces, d’arriver à une analyse commune et ainsi de pouvoir devancer les crises. Du moins on l’espère…
Le Conseil européen en carence institutionnelle
Seulement rien. Au moment où les 28 doivent aborder jeudi (20 octobre) la question du conflit syrien et des relations avec la Syrie, j’ai demandé à un haut diplomate européen pourquoi il en était ainsi et quand ce sujet serait à l’ordre du jour du Sommet. La réponse qui est venue est illustrative d’une vraie carence institutionnelle : « je ne connais pas cette disposition »…
Sans commentaire
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi : Défense européenne : ce qu’on peut faire… ensemble
(BRUXELLES2) Les scènes de crime n’ont plus de secret pour les sous-officiers de la Police nationale malienne. Prélèvement d’empreintes, photographie d’une scène de crime, examen des traces numériques… ont été au cœur de la formation de trois semaines organisée par la mission européenne EUCAP Sahel Mali. Les stagiaires ont obtenu le statut d’experts de la Police technique et scientifique (PTS).
Faire parler les « témoins muets »
Investigation, méthodologie, mesures sur place, prélèvements d’empreintes sur un objet ou une personne, conditionnements et stockage ont été au centre de la formation. « L’indice est un témoin muet qui ne ment pas. Il doit être correctement observé et judicieusement interprété » explique un des formateurs européens. Les stagiaires ont été chargés de l’affaire pour élucider le mystère autour du meurtre de Monsieur X, et parvenir à trouver un éventuel suspect.
L’enquête les a conduit à l’examen de trois lieux : l’appartement de la victime, un parking avec un véhicule abandonné et l’appartement d’un suspect. Ainsi, des véhicules, des armes, le corps de la victime ont été étudiés « très minutieusement ». L’exercice a permis de mettre l’accent sur la photographie de la scène de crime, le stockage des indices prélevés, et les traces numériques avec l’examen des téléphones portables, des antennes relais et du trafic internet.
… et laisser place à la justice
Les indices ayant parlé, place au procès-verbal, pièce qui servira à la justice. La bonne rédaction de ce document, absolument nécessaire afin d’éviter que la procédure ne soit invalidée, a concentré une bonne partie de la formation.
(Leonor Hubaut)
(BRUXELLES2) Le premier exercice maritime de protection des frontières, menée par la nouvelle agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes a été menée à Split (Croatie), mardi (11 octobre). L’objectif était de tester l’interopérabilité des différents services sur deux scénarios différents : le premier face à des migrants clandestins à bord du navire et le second face à un acte de terrorisme maritime. Ont participé à l’exercice le Centre des opérations de la Marine et le Centre des opérations de la Garde côtière, le Centre de sauvetage maritime de coordination (MRCC) de Rijeka, les forces spéciales de la police, la police et la navires de la Garde côtière et les avions des Forces armées croates.
(B2) Depuis le premier déploiement d’un navire au centre de la Méditerranée en mai 2015, la marine irlandaise a permis de sauver 13.443 personnes en mer (dont 4.851 depuis janvier 2016). Un chiffre qui n’est pas inclus dans les chiffres de sauvetage des opérations de l’UE car l’Irlande ne participe pas à l’opération Frontex de façon directe (l’Irlande n’est pas membre de l’organisation européenne). « Le déploiement irlandais est réalisé sous forme d’un arrangement bilatéral direct avec l’Italie » a précisé un diplomate irlandais à B2. C’est le Samuel Becket (P-61) qui est en Méditerranée en ce moment. L’engagement irlandais a été un des plus constants depuis le début de la crise migratoire (avec l’engagement allemand, islandais et britannique).
(BRUXELLES2) La décision du gouvernement polonais d’abandonner sans coup férir les négociations menées depuis un an avec Airbus pour l’achat d’hélicoptères Caracal et d’annoncer préférer les hélicoptères Black Hawck de l’Américain Lockheed Martin est souvent rapprochée de celle prise 2002 préférant les F-16 aux Mirage 2000-5. Or le contexte est totalement différent. Si la décision d’acheter les F-16 pouvait se justifier, celle-ci est très difficilement explicable autrement que par des critères politiques et idéologiques. Cette décision du gouvernement de Beata Sydlo révèle aussi un certain orgueil démesuré, une certaine confiance en soi qui n’est pas en prise avec les réalités politiques et géopolitiques qui risque de se retourner contre les Polonais. En un mot, elle est bête… à pleurer.
L’achat manqué du Mirage : une autre affaire
En 2002, la Pologne vient d’adhérer à l’OTAN. Le F-16 est alors l’avion adopté par une bonne demi-douzaine d’armées européennes (Belgique, Pays-Bas, Danemark, Grèce, Norvège, Portugal). Seule la Grèce est équipée en Mirage. En choisissant le premier modèle, Varsovie prenait la « norme OTAN », s’assurait pour un prix raisonnable une certaine possibilité de mutualisation avec d’autres pays sur un standard identique, et permettait de retourner aux partenaires américains la monnaie de leur soutien à cette adhésion. Il y avait une logique politique et opérationnelle évidente (même si on peut ne pas la partager) à choisir le F-16 plutôt qu’un avion français fabriqué en France. Critiquer vertement cette acquisition pour la Pologne et ne pas le faire pour les autres pays — comme le font certains commentateurs — est pour le moins peu logique et légèrement désobligeant pour les Polonais.
L’achat du Caracal : un choix industriel également
En 2016, la situation est légèrement différente. Airbus est un groupe européen, et non pas seulement français. Il a une position de choix sur le marché des hélicoptères. Et même si le Caracal (EC 725 ou H225M) n’a pas été choisi par d’autres alliés, c’est un appareil de choix, déjà testé, vendu dans plusieurs pays dans le monde. Son prédécesseur — le Super Puma — est utilisé par plusieurs aériennes européennes (Allemagne, Espagne, Grèce, Suède). Et sa version civile (H225 Super Puma) est aussi promise à un certain avenir. Le groupe veut investir en Pologne, faire de ce pays un point d’appui pour ses exportations vers l’Est. D’autant que la plupart des pays anciennement du « bloc soviétique » sont équipés d’hélicoptères de fabrication russe de type Mi. Il y a là l’enjeu d’un véritable projet pour la Pologne, chef de file du groupe de Visegrad.
Un montage délicat détruit à coups de buldoozers
Le partage délicat des différents marchés conclus par l’armée polonaise entre les Américains (pour les missiles) et les Européens (pour les hélicoptères) — effectué par le précédent gouvernement — relevait d’un subtil équilibre, soigneusement réfléchi au plan politique, permettant, sans renier l’attachement euro-atlantique de la Pologne, d’ouvrir des portes pour travailler, aussi, en commun entre Européens. Il était même question alors d’une possible montée de Polonais dans le capital d’Airbus. Las… pour de multiples raisons — dont la moindre n’est pas que la décision a été prise par le précédent gouvernement — Varsovie a décidé de rompre les discussions et de passer outre avec un contrat passé avec Lockheed Martin.
Un camouflet à l’intégration européenne
Cet acte est aussi très politique comme le précédent mais largement empreint d’une idéologie et de petits calculs à très court terme. Pour le gouvernement du PiS, il s’agit tout d’abord de revoir la décision du précédent gouvernement. Ce qu’a fait la Plateforme civique (PO) est mauvais, ce qu’a fait PO doit être défait. Au passage, il s’agit d’infliger un camouflet à la France et à l’Allemagne (Paris très impliqué dans cette vente n’est pas tout seul), à Airbus et, plus généralement, à tout ce qui ressemble de près ou de loin à l’intégration européenne qui est honni à Varsovie. En outre, cette décision brave l’autorité européenne l’obligeant à agir — car le nouveau contrat pourrait bien ne pas être conforme aux règles européennes sur les marchés publics (comme l’ont indiqué à B2 certaines sources européennes).
Une erreur d’une bêtise affligeante
Utiliser des méthodes qui ne sont pas dignes d’un gouvernement responsable mais ressemblant davantage à des méthodes de voyous — laisser croire qu’on négocie un contrat tout en négociant en douce avec le concurrent n’est pas tellement fair play — ne sont pas de nature à susciter la confiance pour l’avenir. Fâcher un allié européen (la France) qui n’est pas mineur tant au niveau de l’Union européenne que de l’OTAN, un pays avec qui on partage une certaine organisation de l’Etat (Etat unitaire, majorité/opposition) comme en matière socio-économique (place de l’agriculture dans l’économie, et de l’industrie etc.) et est donc un allié, objectif est une erreur. Le faire au moment où s’entament des négociations avec le Brexit (avec une grosse immigration polonaise présente sur le territoire britannique) ; où commence à se négocier la révision à moyen terme du cadre financier actuel (2014-2020) et où va bientôt s’entamer un nouveau cadre européen de financement pour les années à venir (2021-2027), où la Pologne a tout à perdre (1) relève de la pure idiotie politique.
Un manque de sens historique
De plus, si les Polonais croient s’attirer la bienveillance et la protection américaine, ils se mettent le doigt dans l’œil jusqu’au trognon… Les Etats-Unis n’ont jamais bougé le petit doigt quand la Russie — et dans le temps l’URSS — est intervenue militairement sur le terrain européen : ni en 1968 à Prague et en 1956 à Budapest, ni en 1991-1992 en Moldavie (Transnistrie) et en Géorgie (Abkhazie et Ossétie du Sud), ni en 2008 à nouveau en Géorgie, ni tout récemment en 2014 en Ukraine (Crimée, Dombass), ni même en 2015-2016 en Syrie. Il faut regarder l’histoire et la politique actuelle… Les seules fois où les Etats-Unis sont intervenus, c’est pour soutenir par proxy interposé certaines forces qui s’opposaient aux Russes-Soviétiques, comme en Afghanistan. Le résultat n’est pas extrêmement probant d’un simple point de vue de la sécurité américaine à moyen terme. Il y a là une erreur stratégique que commet Varsovie, illusionné, par un tropisme patriotique échevelé mais qui repose sur du sable…
(Nicolas Gros-Verheyde)
(1) Tous les indicateurs sont au rouge pour la Pologne : 1) Elle est un des principaux bénéficiaires des fonds structurels et fonds agricoles dans la nouvelle mouture européenne mise en place en 2000. 2) il faut compenser le départ britannique (au bas mot 5 milliards d’euros par an en moins) — ce qui implique de serrer les dépenses. 3) Tous les pays ont aujourd’hui besoin d’argent frais européen notamment l’Espagne comme l’Irlande ou l’Italie, et chacun va ‘défendre’ chèrement ses intérêts nationaux. 4) Les Etats contributeurs nets (Allemagne en tête) ne vont plus vouloir payer – sans contrepartie – pour des pays qui ont manqué dans la dernière crise migratoire au premier devoir de solidarité. Etc.