(B2) Si aucun incident grave n’a été constaté, les attaques des Houthis continuent à faire feux de tous bois, essentiellement avec des drones navals de surface qui devient leur mode de prédilection d’attaque. Moins cher qu’un missile, plus difficilement interceptable.
Triple attaque combinée mer-air-terre
Lundi (15 juillet), un navire marchand, le Bentley I, fait l’objet d’une attaque combinée. Tout d’abord, il est poursuivi par trois petits navires, de couleur bleue et blanche, signale le centre maritime britannique UKMTO. Deux navires sont armés par trois personnes à bord, le troisième est un drone de surface. Celui-ci percute le navire à deux reprises. Sans faire de dégâts. Deux hommes font feu. Le navire réussit à échapper à ses poursuivants qui abandonnent la chasse au bout de quinze minutes. Peu après, un missile explose à proximité du navire, puis deux autres missiles, 45 minutes plus tard. Sans dégâts ni blessés à bord.
Un tanker atteint
Le même jour, un pétrolier battant pavillon libérien, le Chios Lion, est heurté par un drone de surface, lancé par les Houthis. Sans blessé mais avec quelques dégâts légers. Mais peu après, les satellites observent un début de marée noire.
Attaque combinée mer-air
Samedi (20 juillet), un navire marchand est visé simultanément par un drone aérien qui explose à proximité du navire ainsi qu’un drone naval de surface, qui percute le navire mais sans exploser, en mer Rouge, à 64 nautiques au nord-ouest du port yéménite Al Mukha. Dommages mineurs et aucun blessé.
Faute de mieux, des escortes par les navires d’Aspides
Le destroyer français présenté dans la zone a assuré « avec succès » la protection rapprochée d’un pétrolier, le Semeru battant pavillon maltais, dans la « zone d’opération » (face aux attaques des Houthis), signale le QG de l’opération maritime européenne Aspides, jeudi (18 juillet). Une autre escorte, cette fois d’un porte-containers, a eu lieu une semaine plus tard, vendredi (26 juillet).
L’action des forces américaines
Les forces américaines continuent leur action soit en visant des lanceurs au Yémen, soit en interceptant des engins en mer Rouge. Elles ont ainsi détruit un drone aérien au-dessus de la mer Rouge samedi (20 juillet), quatre drones de surface et un drone aérien, dimanche (21 juillet) et trois drones de surface sont abattus au large des côtes du Yémen, vendredi (26 juillet), indique le commandement central US (CentCom).
NB : des actions offensives à un rythme régulier, mais qui n’arrivent pas à durablement diminuer la volonté d’action des Houthis qui utilisent certes moins de missiles qu’au début de leur action dans les premiers mois de 2024, mais recourent désormais davantage à des moyens navaux.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Dans cet essai, Richard Werly, correspondant pour Blick.ch, et François d’Alençon, grand reporter et ancien chef du service étranger de La Croix, dépouillent les difficultés de la France à exister entre volonté de grandeur passée et réalité géopolitique. Prisonnière de son ambivalence traditionnelle envers l’Europe, Paris oscille entre agenda de souveraineté nationale et agenda de souveraineté européenne, écrivent-ils.
« Le bal des illusions. Ce que la France croit, ce que le monde voit », François d’Alançon, Richard Werly, Éditions Grasset, collection Essai, 27 mars 2024, 22 euros
(B2) La fête du 14 juillet était un peu en avance … vendredi (12 juillet) à Bruxelles. Mais elle a compté un invité d’honneur, Robert Metsola, l’actuelle présidente du Parlement européen.
Candidate à son renouvellement. La Maltaise, qui s’exprimait en français avec un charming accent anglais, a délivré un discours plutôt fort politiquement, mettant l’accent sur trois éléments : le soutien à l’Ukraine, la défense et le marché unique. Et avec des résonances dans l’actualité du moment, notamment la montée des nationalistes ou d’extrême-droite en Europe (1) comme la visite de Viktor Orbán en Russie. Sa poignée de main et ses sourires lors de sa rencontre Vladimir Poutine au Kremlin apparaissant comme une trahison pour nombre de pays européens.
La liberté, c’est résister à l’agression russe
« Nous ne pouvons pas parler de la liberté aujourd’hui sans évoquer la guerre de l’agression menée par la Russie en Ukraine, guerre illégale. […] Comme toujours, l’Europe défendra la paix » a défendu Roberta Metsola.
Bâtir une architecture de sécurité et de défense
« Nous devons développer une nouvelle architecture de sécurité et de défense. C’est essentiel ! Nous avons déjà fait des premiers pas… Mais si nous voulons garder une longueur d’avance et accroître notre autonomie stratégique, il faut ce que la France réclame depuis longtemps, une base industrielle solide. »
Défendre le marché unique
« Cette base industrielle solide n’est viable qu’avec une autre ambition : notre compétitivité. […] notre marché unique doivent aussi être approfondi ».
Enfin, il faut « garder à l’esprit la promesse des Pères fondateurs : « faire face aux périls et défis de nos temps – ensemble ». C’est une question de « fraternité, de symbole européen. C’est cette réponse qui permettra de venir à bout du populisme et des natioonalismes. »
Une Europe trop incompréhensible… sauf pour les Français ?
Et de conclure en citant Madelaine Albright, l’ancienne secrétaire d’État US (du temps de Bill Clinton) : « Pour comprendre l’Europe, vous devez être un génie ou … être français ». De quoi ravir la salle passée aux anges.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) La frégate grecque HS Psara de l’opération maritime européenne Eunavfor Aspides a mené « avec succès » une opération de protection rapprochée d’un navire marchand dans le golfe d’Aden, indique mercredi (3 juillet), le QG d’Eunavfor Aspides. Il s’agit d’un porte-conteneurs de la compagnie maritime gênoise, Linea Messina.
Une frégate en route vers Djibouti
Une frégate sur laquelle doit se rendre le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, qui sera à Djibouti ce week-end avec le ministre grec de la Défense, Nikos Dendias. Il est à Larissa samedi (6 juillet) pour visiter le quartier général de l’opération maritime de l’UE en mer Rouge, EUNAVFOR Aspides.
Petit rappel
« Les navires marchands doivent s’inscrire au système de déclaration des navires MSCHoA, conformément à la recommandation sur la carte de sécurité maritime Q6099, dès que possible, au plus tard 72 heures avant d’entrer dans la zone de déclaration », rappelle l’opération.
Trois sites radars Houthis détruits au Yémen
De son côté, le commandement américain (CentCom) annonce, mercredi aussi, avoir détruit, au cours des dernières 24 heures, « deux sites radar Houthis dans les zones contrôlées par les Houthis au Yémen » ainsi que « deux drones navals (USV) en mer Rouge ». Il avait annoncé, lundi (1er juillet), avoir déjà détruit un autre radar houthi au Yémen.
(NGV)
(B2) Cette semaine a été plus calme que la précédente (lire : Lire aussi : [Actualité] Les Houthis continuent leurs attaques en mer Rouge. Un autre navire à la dérive) dans le détroit de Bab-el-Mandeb. Plusieurs missiles ou drones de surface navals
Lundi (24 juin), à 04h44 UTC, une explosion de missile a été signalée à 50 mètres d’un navire marchand dans le golfe d’Aden, à 246 miles marins de Nishtun (Yémen).
Le lendemain, mardi (25 juin), à 17h00 UTC, à 52 milles marins au sud d’Aden, un missile a survolé le navire marchand, de tribord à bâbord avant de tomber à l’eau à environ 500 mètres. Sans dégâts.
Jeudi (27 juin), à 06h44 UTC, un navire marchand a été pris pour cible par un drone de surface naval (USV) en mer Rouge, à 83 miles marins au sud-ouest d’Al-Hudaydah, causant quelques dégâts « mineurs » et aucun blessé. À 08h17 UTC, un missile anti-navire (ASBM) a atterri à proximité d’un navire marchand. Sans dégât. Une attaque revendiquée par les Houthis sur Xtwitter. Deux opérations militaires ont été mises en œuvre : la première, « en coopération avec la Résistance islamique irakienne, a visé une cible vitale dans le port de Haïfa ; la seconde a visé le navire (SEAJOY) en mer Rouge avec un bateau drone et un certain nombre de missiles et de drones ».
Vendredi (28 juin), un nouvel incident a eu lieu à 150 milles marins au nord-ouest d’Al Hudaydah, au Yémen. Cinq missiles ont atterri à proximité immédiate d’un navire marchand.
(B2) Même si aucun participant ne veut l’admettre, planera sur ce sommet qui s’ouvre ce jeudi (27 juin) à Bruxelles comme une ombre, celle des élections françaises. Une « crise politique », reconnait un diplomate européen, dont les autres dirigeants se seraient bien passés.
L’arrivée possible d’un parti d’extrême-droite sinon au pouvoir, du moins en position de déstabiliser celui-ci n’est plus aujourd’hui une hypothèse de papier. Voir ainsi un des principaux pays de l’Union européenne, au plan économique comme démographique, paralysé dans une cohabitation sournoise n’est pas du goût ni l’habitude européenne qui ne comprennent pas le choix délibéré du président français.
La France n’est en effet pas n’importe quel pays. Outre son poids naturel, elle est une puissance militaire (la seule puissance nucléaire des 27 aujourd’hui) et a hérité de son rôle de pays fondateur de la construction européen, un rôle inénarrable de propulseur d’idées, d’initiateurs de projets. Un rôle qui pourrait être largement amoindri dans le futur. Le fonctionnement de l’Union européenne pourrait en pâtir.
Le président français, Emmanuel Macron, devra certainement utiliser toute sa fougue et son savoir-faire pour tenter de convaincre ses interlocuteurs que sa parole restera libre et qu’il pourra engager la France lors des réunions futures de façon aussi certaine qu’aujourd’hui. Mais cela pourrait bien ne pas suffire. Quoi qu’il en soit, la position française, demain et dans les mois prochains, pourrait bien être affaiblie.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi :
(B2) La situation en mer Rouge et dans le détroit de Bab-el-Mandeb reste très tendue. Et les navires marchands continuent de subir des attaques
Dimanche (23 juin), vers 4 heures du matin (heure Sanaa), le MV Trans World Navigator, un vraquier grec, battant pavillon libérien, a été atteint par un système aérien sans équipage (UAS). L’équipage a signalé des blessures mineures et des dommages modérés au navire, mais le navire a pu continuer sa route vers l’Égypte.
Le même jour, un appel de détresse émanant d’un navire en position 14°29 053°08′ Est, à 96 nautiques au sud-est de Nishtun, au Yémen. La navire aurait subi « une inondation impossible à contenir. Cela a contraint le capitaine et l’équipage à abandonner le navire. Ils ont été récupérés par un navire d’assistance », explique le centre britannique d’assistance (UKMTO) dans un bulletin d’alerte. La cause du naufrage reste non indiquée. Le navire abandonné reste à la dérive à la position 14 ̊31’ N 053 ̊08’ E.
D’autres attaques ont lieu récemment, signale le commandement central US (CentCom) Mercredi (19 juin), deux USV ont été détruits mercredi (19 juin) en mer Rouge. Jeudi (20 juin), quatre USV en mer Rouge et deux UAS ont été détruits au-dessus de la mer Rouge. Aucun blessé ni dommage n’a été signalé ».
Dimanche (16 juin), à 01h32 UTC, un navire marchand a été visé par deux missiles en mer Rouge. Le navire marchand n’a pas été touché. A 02:02 Zoulou, le même jour, le navire marchand a signalé deux explosions (probablement deux missiles antinavires ABSM) près du côté tribord. Aucun blessé ni dommage n’a été signalé.
En revanche, le vraquier Tutor, propriété d’une compagnie grecque battant pavillon libérien, avec à son bord un équipage philippin, attaqué le 12 juin à 66 miles marins au sud-ouest d’Al-Huaydah, a bel et bien sombré, mardi (18 juin). Attaque qui a fait un mort parmi l’équipage (lire : [En bref] Les tirs houthis font mouche sur deux navires. Le Karel Doormans évacue un blessé).
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Un navire marchand grec a été gravement atteint en mer Rouge mercredi (12 juin). L’équipage contraint d’évacuer. Le lendemain, un autre navire ukraino-polonais a été atteint, moins gravement. Mais un marin a dû être évacué.
Le MV Tutor, atteint par un navire suicide
La veille, mercredi (12 juin), un incident plus grave a été observé. Le MV Tutor, un vraquier battant pavillon libérien, détenu et exploité par des Grecs, a été atteint par un bateau suicide — un navire de surface sans équipage (USV), rempli d’explosifs — alors qu’il se situait près de la côte érythréenne (à 24 miles marins), à 66 miles marins au sud-ouest de Al Hudaydah, en mer Rouge. Le navire attaquant faisait entre 5 à 7 mètres de long et de couleur blanche, et il a heurté le MV Tutor par l’arrière, précise le centre britannique de surveillance maritime (UKMTO).
… le navire abandonné, un mort
L’attaque provoque « de graves inondations et des dommages à la salle des machines », indique le commandement américain (CentCom). Un marin a été « porté disparu suite à l’attaque ». C’est un des premiers marins victimes directement d’un tir Houthi. L’équipage décide alors d’abandonner le navire. Il est secouru par un navire de guerre américain, l‘USS Philippine Sea (CG 58) et d’autres forces. Quant au navire, parti à la dérive, il « prend lentement l’eau », indique le commandement US, le 14 juin, et pourrait couler.
Le MV Verbena, touché également
Un autre navire marchand, le MV Verbena, battant pavillon de Palau, propriété ukrainienne, exploité par une société polonaise, a été atteint jeudi (13 juin), par deux missiles tirés par les Houthis, alors qu’il naviguait à 70 miles de Djibouti.
Incendie important à bord
Les tirs ont provoqué un incendie. Les informations sont ensuite contradictoires. Tout d’abord, le 14 juin, le commandement américain CentCom a indiqué que l’équipage du MV Verbena « a éteint l’incendie » et a « repris son transit dans le golfe d’Aden ». Mais le lendemain (15 juin), le message du commandement américain est beaucoup alarmant.
Incendie non maitrisé, l’équipage abandonne
En fait, l’équipage a lancé un signal de détresse. Un autre navire marchand, le MV Anna Meta a répondu « à l’appel à l’aide a récupéré les marins pour les amener en lieu sûr ». L’équipage a « dû abandonné le navire en raison des incendies persistants et de l’incapacité de les contrôler » indique le CentCom. Et les Américains de préciser que la frégate iranienne IRIN Jamaran, qui se trouvait tout près, « à huit milles marins du MV Verbena, n’a pas répondu à l’appel de détresse ».
Un blessé évacué
Ce qui est sûr c’est qu’un des marins du MV Verbena a été gravement blessé, un Népalais. L’hélicoptère de bord du Karel Doormans, le navire néerlandais de soutien de l’opération Aspides, est alors intervenu. Le marin blessé a reçu des premiers soins à bord, et opéré, puis transféré vers un hôpital à Djibouti.
(Photo : EUNAVFOR Aspides)D’autres attaques signalées
Le même jour, jeudi (13 juin) à 11 h 27 UTC, un navire marchand a signalé une explosion de missile à proximité du navire en mer Rouge. Par ailleurs, les forces américaines ont réussi à détruire un navire de surface sans équipage (USV° ainsi qu’un système aérien sans pilote (UAS) en mer Rouge.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Oubliés le discours de la Sorbonne, les cérémonies du 6 juin, les grands et beaux discours, le président français apparait aujourd’hui largement affaibli. Non seulement en France, mais aussi dans les couloirs européens. En cause, sa propre décision de dissoudre l’Assemblée nationale.
Une décision incompréhensible…
Quand il arrivera à la réunion des leaders au G7 dans les Pouilles, le 13 juin, puis au Conseil européen, le 17 juin, l’accueil que recevra Emmanuel Macron ne sera sûrement plus le même qu’avant le 9 juin. La France restant la France, il sera reçu avec élégance. Mais pour l’influence, c’est autre chose. Le président français aura fort à faire pour convaincre de la pertinence de son choix de dissoudre l’Assemblée nationale. Décision jugée inconséquente pour l’équilibre européen et surtout incompréhensible !
… que rien ne justifiait
Le résultat de la liste Renaissance (14%) est certes très mauvais : deux fois moins que le Rassemblement national et à quasi-égalité avec la liste du PS (envoyant le même nombre de députés au Parlement européen : 13 élus). Mais ce résultat était attendu et, d’une certaine manière, anticipé. Ce n’est pas la première fois qu’un parti de gouvernement boit la tasse dans un vote européen (élection ou référendum). Cela n’a jamais entraîné une telle crise politique. D’autant que les centristes français gardent un poids notable dans leur groupe (la première délégation) et comptent nombre de personnalités bien au fait des dossiers (N. Loiseau, P. Canfin, C. Grudler, etc.) qui permettront de compenser un effectif plus faible.
… transformée en crise politique majeure
En dissolvant l’Assemblée nationale, le président se tire une balle dans le pied. Il ouvre une période d’incertitude. Ce que la plupart des Européens détestent. Nul ne sait si la France sera gouvernable demain, quel sera le profil de la future assemblée, et donc du futur gouvernement. Ou plutôt chacun pressent que cette assemblée pourrait très bien être bleue foncée à l’image du Rassemblement national. Jamais le parti d’extrême-droite n’ayant été aussi proche du pouvoir. Nul ne peut prédire ce que sera l’avenir après le 7 juillet. Macron jouera-t-il le jeu de la cohabitation ou préférera-t-il remettre en jeu son mandat de président ? et démissionner ?
Une faiblesse européenne
De manière quasi-automatique, le poids de la France va être réduit. A la fois pour des raisons psychologiques et politiques. Comment faire confiance à un président qui pourrait ne plus être en position de décider le lendemain, qui est démonétisé en quelque sorte. D’autant qu’Emmanuel Macron a commis une erreur politique notable. Trop confiant dans son aura, il a mené une campagne quasi-publique contre le renouvellement de Ursula von der Leyen, par presse interposée ou via le commissaire européen (1). Or l’Allemande — dont le parti, le PPE, a gagné quelques sièges — est bien partie aujourd’hui pour trouver les voix nécessaires au Parlement européen à sa reconduction. Et aucun candidat alternatif ne se présente vraiment.
Malheur au vaincu
Cramé, Thierry Breton va pouvoir faire ses valises (2). Un nouveau nom devra être proposé par Paris : un homme ou une femme (3). Mais quelle que soit la personnalité, au sein du futur exécutif européen, la France ne sera pas assurée de récupérer un portfolio aussi majeur (marché intérieur, électronique, défense et services) que celui détenu depuis 2019. Il va falloir choisir de façon subtile le bon secteur. D’autres pays, tels l’Italie ou la Pologne notamment, sont à la recherche d’une place plus importante.
Double solitude à Bruxelles
Cette bataille perdue se double d’un certain isolement au Conseil européen. Le Français avait déjà perdu la compagnie de son ami luxembourgeois Xavier Bettel, il va perdre celles du Néerlandais Mark Rutte comme du Belge Alexander De Croo, sévèrement étrillé lors des élections belges et qui a présenté sa démission au Roi. Les « trois mousquetaires » libéraux sortis, la majorité au Conseil européen bascule au profit des conservateurs ou souverainistes devenus, après les démocrates-chrétiens, le second groupe en importance (lire : [Fiche-Mémo] Un Conseil européen à droite toute).
Un suicide politique ?
Autant dire que, dans un panorama déjà compliqué, l’annonce de la dissolution — qui apparait surtout guidée par une blessure d’amour-propre mal digérée — s’apparente à une faute, qui pourrait affaiblir durablement la position française. Effacées les belles propositions du discours de la Sorbonne et autres déclarations des cérémonies du débarquement aux côtés de l’Américain Joe Biden ou de l’Ukrainien Volodymyr Zelensky. Ce véritable coup de poker, sauf réussite peu évidente, pourrait apparaitre alors comme un véritable suicide politique.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Beaucoup a été fait déjà ces dernières années dans le sens d’un sursaut européen en matière de défense, mais il reste encore beaucoup plus à faire pour répondre aux menaces auxquelles nous sommes confrontés dans un environnement géopolitique qui se dégrade rapidement. Un bond en avant en matière de défense nécessite un changement des mentalités.
Le haut représentant de l’Union pour la politique étrangère et de sécurité commune, Josep Borrell, signe ainsi une préface, fort intéressante, à notre ouvrage sur la défense européenne à l’heure de la guerre en Ukraine qui parait dans quelques jours
Le retour des “vieilles” guerres conventionnelles
« En 2019, lorsque j’ai pris mes fonctions de Haut représentant, j’avais expliqué que l’Europe devait apprendre à « parler le langage de la puissance ». J’étais déjà convaincu à l’époque que la sécurité devait devenir une priorité majeure pour l’Union. Je n’imaginais cependant pas l’ampleur des menaces qui pèseraient sur l’Europe au cours des années suivantes.
« Nous assistons à la fois au retour des “vieilles” guerres conventionnelles et à l’émergence de “nouvelles” guerres hybrides caractérisées par des cyberattaques et par l’utilisation de toutes les formes d’interaction au service du rapport de force, qu’il s’agisse du commerce, des investissements, de la finance, de l’information ou encore des migrations.
Une menace existentielle pour l’Union
« À l’heure où l’implication américaine dans la défense de l’Europe devient moins certaine à terme, la guerre d’agression russe contre l’Ukraine constitue une menace existentielle pour l’Union. Si Poutine parvenait à détruire l’indépendance de l’Ukraine, il ne s’arrêterait pas là. S’il l’emportait, le signal serait désastreux quant à notre capacité à défendre ce en quoi nous croyons.
« Cette profonde détérioration de notre environnement géopolitique implique un changement de paradigme pour l’Union européenne. Notre Union s’est construite en effet jusque-là autour du marché intérieur et de l’économie. Cela a permis d’apporter la paix aux peuples européens après les deux guerres dévastatrices du XXème siècle. Mais nous avons, du coup, délégué trop longtemps notre sécurité extérieure aux États-Unis. Après la chute du mur de Berlin, nous avons même organisé ce qu’on peut qualifier de « désarmement silencieux » de l’Europe.
Un saut à la fois quantitatif et qualitatif à réaliser d’urgence
« Pour corriger le tir, nous devons maintenant réaliser d’urgence un saut à la fois quantitatif et qualitatif en matière tant de défense que d’industrie de défense. Nous avons commencé à prendre ce tournant en nous appuyant sur la Boussole stratégique adoptée il y a deux ans, le premier livre blanc sur la défense européenne endossé par les leaders de l’Union. Cette analyse partagée des menaces était associée à 80 actions concrètes assorties d’échéances précises qui continuent de guider notre action. Mais beaucoup reste à faire.
Des tabous bousculés
« Comme le souligne cet ouvrage, la guerre d’agression russe contre l’Ukraine nous a déjà poussé à bousculer des tabous, notamment en apportant pour la première fois une aide militaire à un pays en guerre.
« En 2021, nous avions créé la Facilité européenne pour la paix (FEP), un fonds intergouvernemental, pour nous permettre de fournir à nos partenaires des équipements militaires, ce qui n’était pas possible via le budget de l’UE. Nous avions commencé avec 5 milliards d’euros ; trois ans plus tard, le plafond de ce fonds s’élève désormais à 17 milliards d’euros. Bien qu’elle n’ait pas été créée à l’origine dans ce but, la Facilité a été l’épine dorsale de notre soutien militaire à l’Ukraine avec 6,1 milliards d’euros provenant de ce fonds utilisés pour inciter les États membres de l’UE à soutenir l’Ukraine. Avec ses États membres, l’UE a fourni ainsi 32 milliards d’euros de soutien militaire à l’Ukraine depuis le début de la guerre. Et ce chiffre augmente chaque jour.
« Grâce à la plus grosse mission militaire de l’histoire de l’UE, EUMAM Ukraine, lancée en novembre 2022, nous aurons notamment formé 60 000 soldats ukrainiens d’ici l’été 2024. Et d’ici la fin de l’année, nous aurons fait don de plus d’un million d’obus d’artillerie à l’Ukraine. L’industrie européenne de la défense, qui augmente constamment ses capacités de production (1.4 million d’obus par an fin 2024 et 2 millions en 2025), lui fournit en outre 400 000 obus dans le cadre de contrats commerciaux. L’initiative tchèque visant à acheter des munitions en dehors de l’UE vient s’ajouter à ces efforts.
Un effort supplémentaire nécessaire
« Cependant, dans un contexte où le soutien américain est devenu plus incertain, cela reste insuffisant. Nous devons augmenter à la fois nos capacités de production et les ressources financières consacrées au soutien de l’Ukraine. C’est pourquoi, lors du Conseil des affaires étrangères de mars, nous avons créé un nouveau fonds spécifique d’assistance à l’Ukraine au sein de la FEP, doté de 5 milliards d’euros, afin de pouvoir continuer à soutenir l’Ukraine sur le plan militaire dans la durée. J’ai également proposé au Conseil de réorienter 90 % des recettes provenant des actifs russes immobilisés vers la FEP, afin d’accroître notre capacité financière pour soutenir militairement l’Ukraine.
Assumer notre responsabilité stratégique
« Mais c’est aussi chez nous que nous devons répondre à des défis pressants. Nous devons en effet assumer désormais notre responsabilité stratégique en devenant capables de défendre l’Europe par nous-mêmes, et construire pour cela un pilier européen fort au sein de l’OTAN. Nous devons effectuer ce bond en avant dans un laps de temps très court.
« Non pas parce que nous aurions l’intention de faire la guerre, mais au contraire, pour pouvoir l’éviter en nous dotant des moyens à la fois de dissuader de manière crédible tout agresseur potentiel et de continuer à soutenir l’Ukraine au niveau indispensable pendant tout le temps nécessaire.
Pas une armée européenne, mais investir
« Cela ne signifie pas que nous serions sur le point de créer une armée européenne. La défense est et restera dans un avenir prévisible une compétence exclusive de nos États membres. Il s’agit d’abord d’investir davantage dans la défense au niveau national. En 2023, nous avons dépensé en moyenne 1,7 % de notre PIB pour la défense, ce pourcentage doit passer à plus de 2 %. Nous n’avons pas le choix si l’on considère l’ampleur des besoins tant pour soutenir l’Ukraine que pour permettre à nos États membres de reconstituer leurs stocks et d’acquérir les nouveaux équipements indispensables. Mais, surtout, il s’agit de dépenser ensemble pour combler les lacunes, éviter les doublons et accroître l’interopérabilité de nos équipements. Seuls 18 % des achats d’équipements par nos armées sont actuellement effectués en coopération. Alors que nous nous étions fixé en 2007, il y a 17 ans, un objectif de 35 %. Nous devons également faire faire un bond en avant à notre industrie de défense. Depuis le début de la guerre contre l’Ukraine, les armées européennes ont acheté 78 % de leurs nouveaux équipements en dehors de l’UE.
Avoir une industrie européenne de défense autonome
« Nous devons nous doter d’une industrie européenne de défense capable de répondre à nos propres besoins. Nous sommes confrontés à des défis quantitatifs mais aussi qualitatifs dans les nouvelles technologies militaires comme les drones ou l’Intelligence artificielle. Nous devons en outre développer nos capacités à répondre à des cyberattaques et à protéger nos infrastructures essentielles. L’un des principaux enseignements de la guerre contre l’Ukraine est que la supériorité technologique est essentielle. En particulier, face à un adversaire qui n’a cure des pertes humaines, y compris les siennes.
« C’est la raison pour laquelle j’ai présenté en mars, avec la Commission, la toute première stratégie industrielle européenne en matière de défense. Nous devons encourager la passation de marchés en commun, mieux garantir la sécurité de nos approvisionnements, et organiser une montée en puissance massive de cette industrie. Nous devons également rattraper notre retard en matière de nouvelles technologies militaires. Avec son pôle d’innovation, l’Agence européenne de défense continuera à jouer un rôle clé dans ces efforts.
Arrimer l’industrie ukrainienne
« Nous souhaitons également arrimer dès maintenant l’industrie ukrainienne à l’industrie de défense européenne. C’est pour cela que nous avons proposé de traiter l’Ukraine comme si elle était déjà quasiment un État membre, en lui permettant de participer à des projets d’acquisition conjointe ou de soutenir son industrie via nos instruments dédiés pour l’aider à produire davantage.
« Pour atteindre ces objectifs, nous devons investir massivement. Pour cela nous devrions modifier la politique de prêt de la Banque européenne d’investissement pour lui permettre d’investir dans le secteur de la défense et émettre une dette commune, comme nous l’avons fait avec succès pour faire face à la pandémie de Covid-19. Ces discussions n’en sont toutefois qu’à leurs débuts parmi nos États membres et il est essentiel d’obtenir l’adhésion de tous.
Un bond en avant signifie un changement des mentalités
« Ce bond en avant en matière de défense nécessite également un changement des mentalités. Des industriels de l’armement m’ont expliqué qu’ils avaient des difficultés à recruter les ingénieurs les plus brillants. De même, les investisseurs privés sont souvent dissuadés d’investir dans des entreprises du secteur de la défense. Chaque Européen doit comprendre qu’une défense efficace est la condition sine qua non de la survie de notre modèle social, environnemental et démocratique.
« Beaucoup a été fait déjà ces dernières années dans le sens d’un sursaut européen en matière de défense, mais il reste encore beaucoup plus à faire pour répondre aux menaces auxquelles nous sommes confrontés dans un environnement géopolitique qui se dégrade rapidement. »
Josep Borrell Fontelles Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Vice-président de la Commission européenne.
(B2 à Tbilissi) Ce dimanche, 27 mai, c’était jour de la fête de l’indépendance. À Tbilissi, discours officiels, parade militaire, fête populaire et manifestations ont rythmé cette journée. Comme la rencontre de deux Géorgie, l’une ouverte sur l’Occident, l’autre plus attachée à ses traditions. Parfois les deux en même temps.
Sur la place de la Liberté, le ban et l’arrière ban du gouvernement étaient convoqués pour une longue série de discours, venant des deux principaux protagonistes du pouvoir : la présidente de la République et le gouvernement tenu par le Rêve Géorgien, qui tous deux s’opposent sur un sujet fondamental, l’Europe.
Vivre dans l’Europe
« Personne ne peut forcer la Géorgie d’aujourd’hui à vivre à nouveau avec les croyances, les dogmes et les entraves des autres, […] personne ne pourra jamais ramener la Géorgie vers le passé » a déclaré la présidente géorgienne, Salome Zurabishvili. La première « pierre angulaire de la solution », selon elle, est de sauver l’avenir européen de la Géorgie. « L’Union européenne, dans son essence et son idée, est créée pour la paix. Il n’y a pas de « parti de la guerre » en Europe », a-t-elle ajouté, faisant allusion à la propagande gouvernementale (lire aussi : [Confidentiel] La tension monte d’un cran entre Tbilissi et Bruxelles). « Aucune guerre n’a été déclenchée par l’Europe depuis sa fondation. Le véritable parti de la guerre est le seul et unique parti que nous voyons aujourd’hui dans nos territoires occupés : l’impérialisme russe. » NB : selon les propos traduit en anglais par les journalistes de Civil.ge.
Ou la tradition
Pour le Premier ministre Irakli Kobakhidze, la réalité est toute autre, plus traditionnelle. « La Géorgie s’est engagée sur ce qu’on appelle le « Chemin de Moïse », qui [la] mènera sûrement à la « Terre promise ». Une « Géorgie unie et forte avec ses frères et sœurs abkhazes et ossètes d’ici 2030, lorsque la Géorgie deviendra un membre à part entière de la famille européenne. […] Une Géorgie unie et forte, qui prendra la place qui lui revient dans la famille européenne commune avec souveraineté, dignité et valeurs. » Cette souveraineté a connu « des atteintes nombreuses, notamment ces quatre dernières années, pour la miner ».
Une parade limitée
Des discours clôturés par des chants traditionnels, l’hymne national et une parade militaire. Parade quelque peu limitée, à l’image de la limite des forces de défense géorgiennes. Quelques centaines d’hommes de l’infanterie et de la garde nationale, restés stoïques durant plus d’une heure, ont défilé devant la tribune officielle, ont fait à moitié le tour de la place, avant de se disperser. En l’air, une dizaine d’hélicoptères portant le drapeau géorgien suivis d’avions — les L39 donnés par les Tchèques — ont fermé la marche. La cérémonie officielle terminée, pouvait commencer la fête populaire.
Les activistes tenus à l’œil
Durant toute la cérémonie, la surveillance était au maximum afin que les étudiants et autres manifestants, tentés de venir troubler le bon déroulement du cérémonial, se tiennent cois. Outre les policiers en uniforme, on trouvait par groupes de trois ou quatre, tous les vingt mètres environ, des policiers en civil surveillant la population, prêts à intervenir le cas échéant. Assez reconnaissables, par leur air complètement détachés à l’égard de la cérémonie qui se déroulait, mais au contraire très attentifs à tout mouvement dans la foule. Une jeune activiste un peu trop bruyante s’est ainsi faite rapidement expulsée et amenée à l’écart par des policiers. Les quelques sifflets des opposants ne sont pas arrivées jusqu’à la tribune, hors de portée de la foule. Également couverts par la sono, puissante, mise en œuvre.
Expulsion d’une jeune activiste de la foule (© NGV / B2)Quelques moments d’humour
Les tensions n’ont pas empêché quelques rires ou des joies. Telle cette patrouille de policiers se voulant discrets avec leur chien qui se sont faits prendre à partie par… un chien errant (nombreux à Tbilissi) aboyant et les forçant à accélérer le pas. Non sans quelques éclats de rires et applaudissement des jeunes présents sur place. Ou sitôt la cérémonie terminée, cette déclaration de mariage d’un jeune militaire qui a fait monter sa promise sur son véhicule blindé, un gros bouquet de roses rouges à la main, pour lui déclarer sa flamme. Sous les applaudissements de ses amis, sa famille et des anonymes. Applaudissements plus nourris que pour les discours officiels, écoutés patiemment, mais sans émotion réelle. Si ce n’est la claque des Jeunes du Rêve géorgien, le parti au pouvoir, qui ont rythmé certains des points du discours de leurs applaudissements, bien déclenchés sur commande, ou ont sifflé la présidente.
Les deux Géorgie
Sitôt la cérémonie terminée, s’est ouvert sur l’avenue Rustavelli, une fête plus populaire avec des stands divers et variés : barbes à papa, concours de bras de fer, bières, drapeaux, jeux pour enfants… Tout était réuni pour une fête populaire. Deux sonos puissantes installées face au Parlement géorgien ont transformé la rue en un petit dance floor, où quelques jeunes ados ou les moins jeunes se sont donnés à cœur joie. Un peu plus loin, sur l’avenue Chevarnadze, au Vake Park se rassemblent des milliers de manifestants, beaucoup de jeunes encore, pour une nouvelle marche contre la position du gouvernement sur la loi de transparence, jusqu’à la place de la Liberté, lieu de croisement de toutes les Géorgie.
Une opposition réunie et un gouvernement technique
La présidente Zourabichvili a demandé aux partis d’opposition de se réunir et signer une « Charte géorgienne », s’engageant à soutenir ses nominations pour un nouveau gouvernement technique après les élections en octobre. Objectif : faire tomber le gouvernement du Rêve géorgien et mener des réformes pro-européennes. Un vrai pari. La révolution géorgienne n’est pas terminée.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi : [Analyse] Pourquoi le gouvernement géorgien prend le large de l’Europe ?
(B2, à Tbilissi) Une nouvelle manifestation a réuni plusieurs milliers de personnes vendredi (24 mai). Le cortège parti de la place de la liberté, lieu central de Tbilissi, s’est allongé jusqu’au ministère de l’Intérieur, sévèrement gardé par les forces de maintien de l’ordre.
Avec une volonté : dénoncer la loi sur la transparence étrangère que le parti au pouvoir, Le Rêve géorgien, veut imposer. Mais aussi dénoncer la brutalité policière, les intimidations diverses que subissent les ONG ou les jeunes manifestants. Certains ont reçu des amendes importantes, équivalents à plus de deux mois de salaires.
Les jeunes, les étudiants, les professeurs, les artistes étaient nombreux dans le cortège, très bon enfant. Des sifflets pour siffler le régime. Un groupe de tambours pour rythmer la marche. Même les chiens, errants, étaient de sortie. Les manifestants étaient nombreux (on peut l’estimer à plusieurs milliers de personnes, environ 10-15.000).
Mais la manifestation n’était pas massive, même si les images photographiées (surtout la nuit) peuvent donner une impression de masse. Le cortège n’a pas ainsi atteint l’intensité des précédentes démonstrations. De fait, seule une partie de la société civile continue de s’opposer activement à la loi. Le reste vaquait à ses occupations quotidiennes d’un vendredi soir. C’est sans doute le pari du pouvoir : miser sur l’usure et minoriser le mouvement
Tout le long du cortège, peu de présence de la police. Les quelque policiers en uniforme, au besoin avec des véhicules, étaient davantage là, pour fluidifier la circulation nombreuse à cette heure de pointe dans la capitale géorgienne. Il ne faut pas s’y tromper cependant. De nombreux policiers, en civil, un peu reconnaissables tout de même…, suivaient et surveillaient de près les manifestants.
Nombre de manifestants arboraient drapeaux et signes géorgiens, certains quelques drapeaux européens, mais surtout nombre de drapeaux des USA ont fait leur apparition. Une manière pour les manifestants de célébrer la mise en place annoncée de sanctions par le secrétaire d’État US, Anthony Blinken.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Une
(B2) Le cargo Basilisk, attaqué par des pirates dans le bassin somalien, jeudi 23 mai, a été très vite retrouvé la liberté de ses mouvements. L’intervention d’un navire européen a accéléré le processus.
Battant pavillon libérien, et propriété d’une compagnie suisse, le navire marchand a été attaqué par un groupe de pirates, répartis dans deux skiffs. L’incident a eu lieu à environ 380 milles marins à l’est de Mogadiscio, en Somalie, très exactement à 01°16 Sud et 051°07 Est, entre la côte somalienne et les Seychelles, alors que le Basilisk remontait vers le nord, vers Jebel Alil, aux Émirats arabes unis.
Un des navires de guerre de l’opération européenne EUNAVFOR Atalanta, à proximité, s’est rapproché très vite, prêt à réagir au besoin. La frégate espagnole Canarias, de retour des Seychelles (lire : les six pirates arrêtés remis aux Seychelles) est arrivé sur zone jeudi soir. Les militaires sont montés à bord, de nuit, se laissant glisser le long de cordes depuis l’hélicoptère (selon la technique fast-rope). Les pirates avaient déjà quitté le bord avant leur arrivée, ont confirmé des sources maritimes à B2.
L’équipage est libre, sain et sauf. À une exception. « Lors de l’attaque des pirates, un des membres de l’équipage a été blessé. Il est dans un état stable et a reçu des soins médicaux à bord par l’équipe médicale de bord », indique l’opération. Propriété d’un armateur suisse, localisé à Berne, le navire est géré par une société allemande, Minmarine Shipmanagement. Il venait de Mindelo, au Cap Vert.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Plusieurs attaques de pirates, parfois couronnées de succès, se sont succédé dans l’Océan indien et au large de la Somalie depuis six mois. Et le risque pourrait augmenter dans les mois qui suivent avertissent les responsables de l’opération maritime européenne anti-piraterie.
La fin de la période des moussons = risque redoublé d’attaque
Depuis fin novembre 2023, de multiples incidents de piraterie et de détournements ont eu lieu dans le bassin somalien. Récemment, il y a eu une « augmentation notable des événements signalés ». Et les attaques de piraterie au large des côtes somaliennes pourraient connaitre une embellie avec l’amélioration de la météo. La « fin de la période de mousson pourrait faciliter davantage les activités de piraterie dans la région » avertit le dernier bulletin maritime d’analyse des menaces de l’opération européenne EUNAVFOR Atalanta.
Un risque sérieux
La possibilité d’attaques dans le Golfe d’Aden « ne peut être écartée, principalement dans la partie Est », indique ce bulletin maritime. La menace est aujourd’hui considérée comme « modérée ». Mais elle doit être très sérieusement prise en compte par les navires marchands qui doivent redoubler d’attention dans l’Océan indien et le golfe d’Aden « en particulier ceux se trouvant à moins de 700 milles marins de la côte somalienne ».
Au moins deux groupes pirates
Au moins deux groupes d’action pirates (PAG) sont en ce moment à l’œuvre au large des côtes somaliennes, dans la zone autour de l’île de Socotra (Yémen) et à 500 milles nautiques à l’est de cette île dans la mer d’Arabie. Un boutre iranien, le Al Fajr 2, a été attaqué le 13 mai ; les pirates prenant du carburant et des marchandises avant de fuir la zone en libérant le boutre. Or, il y a souvent des « attaques notables contre des navires marchands dans les douze jours qui suivent les rapports de détournements de boutres ».
Six à sept boutres aux mains des pirates
Ils disposent d’un certain nombre de boutres (ou dhows), qui peuvent leur servir de bateaux-mères. Au moins « 18 boutres en effet ont été détournés ». Certains ont été libérés. Mais « six à sept d’entre eux pourraient encore être entre les mains des pirates ». Les informations sur ces navires sont parcellaires.
Plusieurs camps pirates sur la côte somalienne
L’opération dispose aussi d’informations plus précises en revanche sur les bases pirates en Somalie. Plusieurs camps possibles ont ainsi été identifiés sur les côtes somaliennes « entre Xaafuun et le village de Garacad, avec un point chaud au nord d’Eyl ». Là où le MV Ruen et le MV Abdullah piratés ont été « retenus au mouillage depuis plusieurs semaines ».
Le mode opératoire des pirates
La stratégie typique des pirates implique la saisie et le détournement d’un boutre, qui est ensuite utilisé comme navire-mère. Celui-ci « se fonde ensuite dans le trafic habituel et déploie des skiffs », chacun transportant plusieurs individus armés, doté de moteurs souvent assez puissants. Cette tactique — bateau-mère + skiffs — permet d’attaquer les navires jusqu’à des distances parfois très éloignées des côtes somaliennes. Ils peuvent ainsi « naviguer jusqu’à 600 milles marins ou plus, au large de la côte est de la Somalie ».
Sans réponse ferme d’un navire, les pirates passent à l’assaut
« Si le navire ciblé ne peut pas repousser l’attaque, les pirates peuvent choisir de monter à bord du navire » avertissent les militaires européens. « Une fois qu’un navire est saisi, il est très probablement emmené sur la côte somalienne et y est retenu pendant les négociations pour obtenir une rançon. »
Attention aux rançons, un cercle vicieux peut se créer
Le récent détournement du MV Abdullah s’est ainsi terminé par la libération du navire contre une rançon. Le paiement de rançons pourrait « créer une nouvelle vague de détournements de boutres qui, à leur tour, créeraient de futures attaques de skiffs sur des navires marchands », avertit Atalanta. Le risque d’un nouveau cercle vicieux permettant la renaissance d’une piraterie bien active est donc à prendre au sérieux.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Au bilan, plusieurs attaques ces derniers mois
Trois navires marchands ont été attaqués, dont l’un est resté sous contrôle pirate pendant près d’un mois : le MV Abdullah, capturé le 12 mars, n’a été libéré que le 14 avril. Trois autres navires ont signalé des approches suspectes autour de Socotra et à l’est de l’île en mer d’Arabie.
Une attaque de piraterie a échoué, le 10 mai, contre le Chrystal Arctic, à 100 nautiques au nord de Bossaso (lire : [Actualité] Une attaque pirate au large de la Somalie échoue. Pirates blessés et arrêtés v3).
Un porte-containers, le MV Propel Progress, battant pavillon panaméen, a signalé une approche suspecte, lundi (13 mai), près des côtes somaliennes, au sud-est de Mogadiscio. NB : il est arrivé sain et sauf à Kismayo en Somalie le 15 mai.
(B2) L’opération maritime européenne entre mer Rouge et golfe d’Aden, vient de publier son bilan au bout de trois mois d’action contre les missiles et drones des Houthis yéménites.
En tout, plus de 120 navires marchands de toutes sortes (porte-containers, cargos, tankers) ont été protégés lors du passage du détroit de Bab-el-Mandeb. Douze drones aériens (UAV) et un drone maritime de surface (USV) ont été détruits. Et quatre missiles balistiques ont été interceptés.
La dernière attaque a été contrée, le 6 mai, par la frégate italienne ITS Fasan. Alors qu’elle assurait la protection rapprochée d’un navire marchand dans le golfe d’Aden, elle a repoussé les attaques de drones des Houthis au Yémen et abattu un drone, au sud-est d’Aden (Yémen), à 11°40 nautiques Nord et 045°44 Est.
L’opération EUNAVFOR Aspides compte près de 1000 marins et officiers, répartis dans cinq navires :
— Le navire néerlandais de soutien et de ravitaillement HNLMS Karel Doorman (A-833), vient d’arriver sur zone, il y a quelques jours, après un passage par la base maritime de l’OTAN en Grèce, à Souda, pour escale et entraînement. Le retard aura été finalement plus léger qu’annoncé (lire : [Actualité] Relève en mer Rouge pour l’opération Aspides). Il vient s’ajouter aux quatre frégates déjà présentes.
— la frégate italienne ITS Virginio Fasan (F-591), une frégate multi-missions de type FREMM, qui sert de navire amiral ;
— la frégate française Lorraine (D-657), également frégate multi-missions de type FREMM ;
— la frégate grecque Hydra (F-452), sur place depuis le début de l’opération ;
— la frégate belge Louise-Marie (F-931).
Les Houthis maintiennent cependant un rythme assez régulier d’attaque. La dernière en date ayant touché, de façon assez divine, un pétrolier grec transportant du brut de Russie vers la Chine (lire : [Actualité] Un pétrolier grec venant de Russie atteint par un missile des Houthis).
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi :
(B2) Les Houthis ont atteint un pétrolier grec, battant pavillon panaméen, samedi (18 mai).
Le MT Wind a été atteint en mer Rouge vers 1 heure du matin (heure de Sanaa) par un missile balistique anti-navire (ASBM), à 7§ nautiques au nord-ouest de Al Houdeidah (Yémen). L’impact du missile a provoqué des inondations qui ont entraîné une perte de propulsion et de direction.
Un navire de la coalition a immédiatement répondu à l’appel de détresse du tanker, mais aucune assistance n’a été nécessaire, indique le commandement central US (USCENTCOM). L’équipage a pu rétablir la propulsion et la direction, et aucune victime n’a été signalée. Le MT Wind a ensuite repris sa route par ses propres moyens.
Le navire atteint est géré par une société grecque (SR navigation) et propriété d’une compagnie grecque (Longitude Maritime Cie). Mais il a récemment accosté en Russie à destination de la Chine. En clair, il pourrait s’agir de livraison de pétrole russe, qui ne soit pas tout à fait conforme aux règles de l’embargo occidental.
Cette attaque prouve que malgré les efforts des forces coalisées, les missiles ou drones houthis arrivent à passer les lignes de protection… du moins quand ils visent du pétrole russe. Les forces américaines ont détruit, entre le 10 et le 13 mai, un missile et cinq drones envoyés par les Houthis, en mer Rouge et dans le Golfe d’Aden.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Les militaires européens ont remis, mardi soir (14 mai), les six pirates impliqués dans l’attaque du Chrystal Arctic aux autorités des Seychelles
Remise effectuée dans le cadre de l’accord juridique que l’Union européenne a conclu avec les Seychelles en 2009 (lire : Les accords Ue avec les Seychelles signés).
Le QG d‘opération Eunavfor ATALANTA, situé à La Rota, a confirmé mercredi (15 mai), la remise aux autorités des Seychelles des six pirates présumés qui ont mené l’attaque contre le navire marchand battant pavillon des Îles Marshall, Chrystal Arctic, le 10 mai (lire : [Actualité] Une attaque pirate au large de la Somalie échoue. Pirates blessés et arrêtés).
Des faits incriminés, documentés
Avant cela, une commission composée du ministre de l’Intérieur des Seychelles, d’un représentant du centre national de coordination du partage d’informations et de membres de la police seychelloise ainsi que de trois représentants de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), est montée à bord de la frégate espagnole Canarias, pour un point d’information. Ils ont « été informés des circonstances de l’affaire » et des différents faits collectés par les militaires européens sur place. Les six prévenus sont désormais en détention et en attente de jugement. L’ambassade de l’UE à l’ïle Maurice (qui assure la représentation européenne aux Seychelles) a également contribué à la coordination avec les autorités seychelloises.
Un accord conclu il y a près de quinze ans
Cette remise s’inscrit dans un accord juridique, toujours en vigueur, conclu par l’Union européenne, avec les Seychelles, en 2009, qui permet de juger les pirates présumés arrêtés par les navires de guerre qui participent à l’opération EUNAVFOR Atalanta (lire : l’accord provisoire de transfert). Peu importe la nationalité du navire
Un acte de dissuasion
C’est un des points essentiels de l’action européenne contre les pirates. Les Européens ont en effet tenu, dès le début, à se doter d’un cadre juridique performant, permettant non seulement d’arrêter les pirates, mais aussi de pouvoir les poursuivre en justice, « conformément au droit international ». Puis, les condamner ensuite à une peine de détention, graduée, selon leur implication dans l’acte. Ce qui a participé, sans nul doute, à la « dissuasion » des actes de piraterie.
Seychelles, pays volontaire
En tout, entre 2008 et 2012, plus de 2000 suspects ont ainsi été arrêtés par les différentes forces présentes dans la zone (européennes, régionales, autres pays), selon notre base de données. Plus de la moitié (environ 1000) ont été poursuivis en justice, soit en Somalie, soit dans les pays européens ou occidentaux, soit dans des pays partenaires (Seychelles, ile Maurice, Kenya, Tanzanie). Les Seychelles ont été un des pays tiers les plus actifs dans ce processus, avec le Kenya, traitant ainsi une centaine de pirates. En échange, la petite île de l’Océan indien, a reçu une aide notable européenne, notamment en termes financiers, afin d’agrandir et mettre aux standards européens la prison locale.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Dans une introduction à notre ouvrage sur la défense européenne à l’heure de la guerre en Ukraine, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a tenu à avertir : il ne faut pas relâcher les efforts face à la « Ligue des autoritaires », qui rassemble Russie, Chine et Iran.
traduction assurée par B2 (texte original en anglais au-dessous). Titre et intertitres sont de la rédaction
L’intervention russe de 2022 a brisé nos illusions
Dans la première moitié de cette décennie, de nombreuses illusions ont été brisées en Europe. L’illusion que la paix sur notre continent a été réalisée une fois pour toutes. L’illusion selon laquelle la prospérité pourrait être plus importante pour Poutine que la guerre et ses rêves délirants d’empire. L’illusion selon laquelle l’Europe, à elle seule, en faisait assez en matière de sécurité qu’elle soit économique ou militaire, conventionnelle ou cybernétique. Aujourd’hui, il n’y a plus de temps pour les illusions. Poutine a dilapidé les dividendes de la paix pour préparer sa guerre contre l’Ukraine. Au final, le monde est plus dangereux qu’il ne l’a été depuis des générations. L’Europe doit se lever pour faire face à cette réalité.
Une nouvelle ligue d’autoritaires en constitution
La seconde moitié de la décennie sera probablement encore plus sujette aux conflits. La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine va encore plus bouleverser la géopolitique. Le niveau de la coordination stratégique entre la Russie et la Chine augmente. Et cela s’accompagne d’une coopération plus étroite avec la Corée du Nord et l’Iran. C’est une nouvelle ligue d’autoritaires. Dans le même temps, nous et nos partenaires du monde entier sommes confrontés à de multiples épreuves. Avec les conflits en Europe et au Moyen- Orient et les tensions vives en Extrême-Orient, même une grande base industrielle de défense – comme celle des États-Unis – peut être confrontée à des défis. Quel que soit le prochain président américain, nous devrions tenir pour acquis le niveau actuel d’engagement américain dans notre région.
Soutenir Kiev : un intérêt stratégique pour les Européens
Les conséquences pour l’Europe sont claires. Il est dans notre intérêt stratégique de soutenir Kiev dans cette guerre, aussi longtemps qu’il le faudra. L’Ukraine est un futur membre de notre Union. Sa frontière avec la Russie sera la frontière de notre Union. Sa capacité à dissuader une future attaque russe contribuera à notre sécurité. Plus largement, nous sommes déjà appelés à jouer un rôle plus important dans notre région et au-delà. Je pense par exemple à l’opération navale de l’Union dans l’océan Indien et en mer Rouge, l’opération Aspides, visant à protéger les routes commerciales mondiales vitales et nos chaînes d’approvisionnement contre les terroristes houthis soutenus par l’Iran. Tout cela crée un nouveau type de responsabilité pour notre Union, que j’appelle responsabilité stratégique.
Agir de manière plus coordonnée, une nécessité
Nous, Européens, devons être sur nos gardes. Cela signifie que les États membres et les États membres doivent agir de manière coordonnée. La responsabilité stratégique appelle également une contribution européenne plus forte au sein et à l’OTAN. Depuis le début de la guerre d’agression à grande échelle de la Russie, l’idée de responsabilité stratégique a guidé notre travail en matière de défense. Comme le montre ce livre (lire : La défense européenne à l’heure de la guerre en Ukraine. Des tabous tombent ?), de nombreux tabous sont tombés. Pour la première fois, l’Europe apporte une assistance militaire à un pays attaqué. Pour la première fois, nous entraînons des troupes impliquées dans une guerre interétatique européenne. Pour la première fois, nous mobilisons l’industrie de défense européenne pour soutenir l’effort de guerre d’un pays. Par exemple, avec notre nouvelle loi de soutien à la production de munitions, nous avons contribué à quadrupler la capacité de production européenne de munitions. Et nous étendons désormais une approche similaire à d’autres lignes d’approvisionnement industrielles critiques. Nous demandons à notre industrie de défense de passer en mode guerre, afin que le reste de l’Europe n’ait pas à le faire.
Investir en Européens, une obligation
Avant la guerre, en 2021, nos États membres dépensaient 214 milliards d’euros pour la défense. En 2024, cela atteindra près de 300 milliards d’euros. Mais comment cet argent est-il dépensé ? L’année dernière, près de 80 % d’entre eux sont allés hors de l’UE. Ce n’est tout simplement pas durable. L’argent de nos contribuables devrait être utilisé pour améliorer notre propre compétitivité et créer davantage d’emplois ici même en Europe. Nous avons besoin d’une nouvelle mentalité européenne de la part de l’UE, mais aussi de la part de l’industrie et des investisseurs. Pour persuader nos États membres d’acheter en Europe, nous avons besoin que l’industrie européenne de la défense intensifie ses efforts. Cela signifie que nous devons établir des chaînes d’approvisionnement robustes et fiables en cas de crise. Afin qu’une demande croissante puisse être satisfaite par une offre croissante de capacités de défense fabriquées en Europe.
Un nouvel état d’esprit pour notre industrie de défense
Nous avons également besoin d’un nouvel état d’esprit au-delà de notre industrie de défense. Après la Seconde Guerre mondiale, l’intégration européenne a commencé comme un projet de paix, mais aussi comme un projet de sécurité. Sa genèse industrielle, avec le charbon et l’acier, avait une dimension sécuritaire centrale. Au fil des décennies, cette dimension sécuritaire n’a cessé de croître – car la paix exige la sécurité. La plupart des politiques de notre Union ont des implications directes en matière de sécurité : du commerce à la recherche, de l’énergie aux communications. En période de menaces sans précédent, nous devons recentrer notre attention sur la dimension sécuritaire de tout ce que nous faisons. Nous devons une fois de plus penser notre Union comme, intrinsèquement, un projet de sécurité. C’est le véritable changement de paradigme dont l’Europe a encore besoin, vers une véritable Union européenne de la défense.
(Ursula von der Leyen)
Présidente de la Commission européenne
(texte original)
In the first half of this decade, many illusions have been shattered in Europe. The illusion that peace in our continent was achieved once and for all. The illusion that prosperity might matter more to Putin than war and his delusional dreams of empire. The illusion that Europe on its own was doing enough on security – be it economic or military, conventional or cyber. Today there is no time for any more illusions. Putin squandered the peace dividend to prepare for his war against Ukraine. As a result, the world is more dangerous than it has been for generations. Europe must rise to meet this reality.
The second half of the decade will likely be even more conflict-prone. Russia’s war against Ukraine has put geopolitics further into flux. There is a growing level of strategic coordination between Russia and China. And it is coupled with stronger cooperation with North Korea and Iran. It is a new league of authoritarians. At the same time, we and our partners across the globe face multiple tests. With conflict in both Europe and the Middle East, and tensions running high in the Far East, even a large defence industrial base – like that of the US – can face challenges. Whoever the next US President will be, we should take for granted the current level of US engagement in our region.
The consequences for Europe are clear. It is in our strategic interest to support Kyiv in this war, for as long as it takes. Ukraine is a future member of our Union. Its border with Russia will be our Union’s border. Its capacity to deter a future Russian attack will contribute to our security. More broadly, we are already being called to play a stronger role in our region and beyond. I think for instance of the Union’s naval operation in the Red Sea and the Indian Ocean, Operation Aspides, to protect vital global trade routes and our supply chains from Iran-backed Houthi terrorists. All of this creates a new kind of responsibility for our Union – which I call strategic responsibility.
We Europeans must be on guard. This means for Member States and Member States to step up coordinated. Strategic responsibility also calls for a stronger European contribution within and to NATO. Since the beginning of Russia’s full-scale war of aggression, the idea of strategic responsibility has driven our work on defence. As this book shows, many taboos have fallen. For the first time ever, Europe is giving military assistance to a country under attack. For the first time ever, we are training troops involved in an inter-state European war. For the first time ever, we are mobilising Europe’s defence industry to sustain a country’s war effort. For instance, with our new Act to Support Ammunition Production, we have contributed to quadrupling Europe’s production capacity for ammunition. And we are now extending a similar approach to other critical industrial supply lines, too. We are asking our defence industry to switch to war-time mode, so that the rest of Europe doesn’t have to.
Before the war, in 2021, our Member States spent €214 billion on defence. In 2024, that will rise to almost €300 billion. But how is this money being spent? Last year, almost 80% went outside the EU. This is simply not sustainable. Our taxpayers’ money should be used to improve our own competitiveness, and to create more jobs right here in Europe. We need a new European mind-set from the EU, but also from industry and investors. To persuade our Member States to buy in Europe, we need the European defence industry to step up. This means that we must establish robust supply chains that can be trusted in crisis. So that a rising demand can be met by a rising supply of made-in-Europe defence capabilities.
We also need a new mind-set beyond our defence industry. After World War Two, European integration started as a peace project, but also as a security project. Its industrial genesis, with coal and steel, had a central security dimension. Through the decades, this security dimension has continued to grow – because peace requires security. Most of our Union’s policies have direct security implications: from trade to research, from energy to communications. At times of unprecedented threats, we must refocus our attention on the security dimension of everything we do. We must once again think about our Union as, intrinsically, a security project. This is the true change of paradigm that Europe still needs, towards a true European Defence Union.
Ursula von der Leyen
President of the European Commission