(B2) Le jugement rendu par la douzième chambre du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, le 29 juin, le jour du sommet européen est assez hallucinant. Il nous a fait réagir à l’Association des journalistes européens (section française). Au-delà de l’argumentation juridique, il s’agit d’une menace réelle, et inégalitaire, qui plane sur le journalisme européen.
C’est un appel que l’AJE lance donc aux institutions européennes : faites preuve de courage, de cohérence et de lucidité : proposez, adoptez une législation sur les lanceurs d’alerte comme vous en avez proposez une sur le secret d’affaires. Nous demandons également aux organisateurs du Prix Charlemagne de faire preuve d’un peu d’audace et de décerner leur prochain prix aux protagonistes de cette affaire. Ils l’ont bien mérité. Car avec le Luxleaks, ils auront considérablement fait avancer la lutte contre l’évasion fiscale (pardon ! je devrai dire l’optimisation fiscale, qui est tellement légale, que seuls quelques uns peuvent en bénéficier).
Le jugement intervenu cette semaine au Luxembourg, condamnant Antoine Deltour et Raphaël Halet dans l’affaire LuxLeaks interpelle largement les journalistes de l’AJE. Au-delà de l’argumentation juridique, il s’agit d’un symbole très négatif qu’envoie le Luxembourg et l’Union européenne. Les banquiers sont libres. Les lanceurs d’alerte sont condamnés. La liberté de la presse cède le pas devant la liberté des entreprises. L’Europe a des valeurs vacillantes.
Cette condamnation fait peser aujourd’hui une menace sur tous les journalistes et le journalisme européen dans son ensemble. C’est d’ailleurs l’objectif précis de telles procédures. Il ne s’agit pas d’obtenir réparation d’un dommage mais bel et bien d’intimider, de réduire à néant tout esprit d’information. Quel média va se lancer aujourd’hui dans une enquête délicate s’il sait qu’il peut se faire condamner demain par un tribunal ? Comment des ‘sources’ oseront prendront le risque de communiquer des informations importantes si elles savent qu’elles pourront être condamnées pénalement et/ou civilement ? Comment peut-on défendre un journalisme, indépendant, sans sources d’information ? Car, sans sources, le journalisme est un leurre. C’est juste un instrument de reproduction des communiqués de presse comme dans n’importe quel régime autoritaire.
La question n’est pas de savoir si la législation luxembourgeoise est adaptée ou non. La question est européenne. L’AJE lance donc un appel aux institutions européennes, à Jean-Claude Juncker le président de la Commission européenne, à Martin Schulz et aux parlementaires européens, à Donald Tusk, le président du Conseil européen. Vous avez voulu protéger le secret d’affaires, pour des raisons légitimes. Protéger la liberté de la presse et les sources d’information est au moins aussi légitime, sinon davantage. L’AJE demande une nouvelle législation qui permette la protection des lanceurs d’alerte, des sources d’informations partout en Europe. Il ne faut plus tarder aujourd’hui. Il en va du contrôle démocratique. L’Europe n’est pas qu’un simple marché, aux mains des intérêts économiques. Elle doit être un espace démocratique où les valeurs de liberté et d’information sont protégées. L’intérêt particulier ne doit pas l’emporter sur l’intérêt général.
L’AJE-France lance également un appel aux organisations du Prix Charlemagne pour qu’ils réfléchissent à décerner à Antoine Deltour, Raphaël Halet, Edouard Perrin et tous les autres lanceurs d’alerte le prix Charlemagne l’année prochaine. Ils ont agi pour le bien de l’Europe. Ils ont favorisé une prise de conscience. Comme il a été remis au Pape cette année pour avoir favorisé une prise d’opinion sur le droit d’asile. Ce serait juste. Ce serait équitable.
(NGV)
(B2) Il s’appelle Philip (*), est juriste. Il a tout pour plaire. « Brillant, intelligent, attachant » selon ceux qui l’ont côtoyé. En un mot, séduisant. D’origine somalienne — du Somaliland — plus exactement, il parle le Somalien. Et, il est recommandé par Londres qui l’a détaché au sein de la mission européenne. C’est donc la recrue parfaite pour servir au sein de la mission européenne chargée d’aider les Somaliens à remonter leur force de sécurité maritime (EUCAP Nestor).
Mais, en fait, de détaché, Philip, est… très détaché ! Il travaille en solo au sein de la mission. Son poste au sein de Nestor est, en fait, une « couverture » idéale pour mener d’autres activités. Il a ainsi de sa propre initiative fait circuler des analyses juridiques estampillées « UE » dans lesquelles il faisait la part belle aux revendications du Somaliland en matière de « zone économique exclusive » (ZEE). Ce qui a suscité quelques « explications de gravure ». Le gouvernement central somalien était furieux. Et il a fallu aller « au front » pour démentir tout caractère officiel de ces documents.
Comme le confie à B2, une source digne de confiance, « il était très vraisemblablement en contact, au moins occasionnels, avec certains « services », britanniques ou autres… Un jour survient un autre incident plus embêtant pour l’Union européenne. Il est pincé sur le fait par la police de Djibouti, qui n’est pas vraiment réputée pour être laxiste… Seul hic, Philip est normalement basé au Kenya, à plusieurs milliers de km de là et n’a rien à faire à Djibouti, mais vraiment rien à faire là, encore moins à l’hotel Kempinski, l’hôtel de luxe de la capitale djiboutienne.
L’excuse des « vacances pour rencontrer de la famille » ne leurre personne. Il ne faut pas prendre les Djiboutiens pour des c… Ils le mettent au frais au motif « d’atteinte à la sécurité de l’Etat ». L’inculpation est sérieuse. On ne badine pas avec l’Etat dans ce petit coin de la Corne de l’Afrique. Les Djiboutiens ont flairé un lien avec l’affaire Boreh, un homme d’affaires franco-djiboutien, opposant au président Guelleh et condamné par contumace. De fait, Philip a tout bonnement agi, pour le compte d’un cabinet d’avocat britannique, afin trouver quelques contacts et ramasser des éléments permettant de défendre Boreh.
Grillé, Philip n’a pas fait long feu. Il a été « rapatrié » à Londres. Pas pour longtemps. Une autre affectation lui a été trouvée, une couverture plus directe, comme expert sur le Somaliand, au sein de l’UNODC, le programme des nations-unies sur les drogues et la criminalité.
NB : Le fait pour les Etats membres d’avoir au sein des missions des « hommes » (ou des femmes) à eux dans les missions européennes est un fait connu de tous et même accepté. C’est même la raison d’être de certains personnels détachés, qui ont parfois pour objectif principal de « rendre compte » à leur capitale du déroulement de la mission, du contexte local, etc. Etre au sein d’une mission européenne, avec une certaine immunité diplomatique est une excellente couverture. En revanche, mener des opérations « under cover » visant à déstabiliser ou contredire les Etats d’accueil est plus rare et pour le moins dangereux.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(BRUXELLES2 à Bratislava) De passage à Bratislava lors des prochains mois, ne ratez pas l’exposition European Stars- Miró& CoBrA qui vient d’ouvrir (et se déroule jusqu’au 13 novembre). Elle est située un peu en dehors de la ville, au musée Danubiana. Prévoir donc un peu de temps pour y aller *
En ces temps turbulents pour l’Europe, certaines oeuvres exposées prennent une résonance particulière tel ce Banquet des Idoles de Rancinan – revisitant tous ceux qui ont fait la scène médiatique de Jésus à Madonna ou de Mère Théresa à Einstein – ou une « fin du commencement » de Martin Varholik ou un Red Wedge de Jankovic. Quant à la devise de Cobra définie par Constant « we work for tomorrow’s world », elle a une tonalité très actuelle.
Le bâtiment original en forme de bateau est situé au bord du Danube, et plusieurs oeuvres s’insèrent parfaitement dans le paysage, au point qu’on les prendrait pour des peintures ou portraits réalistes. Certaines oeuvres sont placées dans le jardin, d’autres se nichent dans certaines coins, y compris sur le toit du bâtiment.
Outre les oeuvres de Miró (peintures, peintures, sculptures, dessins, gravures, tapisseries…) et celles du groupe CoBrA (Alechinsky, Appel, Constant, Corneille, Niewenhuys, Henning Pedersen, etc.) l’intérêt de la visite est de découvrir les artistes slovaques (Rudolf Fila, Jozef Jankovic, Ivan Pavle…), tchèques, hongrois (Ilona Keserü), macédonien (Kiro Urdin)… qui valent aussi le coup d’oeil attentif. Au total, une centaine d’oeuvres sont ainsi exposées provenant d’un prêt de la famille Joan Miró, de la collection Meulensteen, du Musée de Amstelveen (Pays-Bas).
(Nicolas Gros-Verheyde)
Pour s’y rendre :
Un centre sportif et aquatique avec rafting et autres activités se situe à proximité si vous voulez compléter la découverte artistique par un peu de détente physique.
(BRUXELLES2) L’évènement est passé totalement inaperçu dans la tempête du Brexit. Les ’28’ Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne ont adopté, le 28 juin, une nouvelle stratégie pour la politique extérieure et de sécurité européenne (en abrégé : ‘Stratégie Globale’) suivant en cela la proposition de Federica Mogherini (1). Je dis bien à ’28’ : il ne s’agit pas d’une formule littéraire. David Cameron était bien là lors de cette discussion mais, il est vrai, qu’il avait un peu la tête ailleurs…
Un document qui arrive au terme d’une année de réflexion
Il ne faut pas surestimer ce document. Il ne s’agit que d’un document de réflexion, qui synthétise la pensée politique du moment, au terme de près d’une année de consultations diverses. Ainsi que nous l’avions déjà écrit, nous n’avons jamais vu une action se déclencher ou être empêchée simplement par une Stratégie (lire : Une stratégie ne fait pas le printemps !). Mais il ne faut pas le sous-estimer non plus. Ce document a une valeur importante au plan symbolique et doctrinal. Il fixe la doctrine extérieure de l’Union européenne. Il a une valeur non contestable par les différents Etats membres qui ont été associés et consultés tout au long de l’élaboration de ce document, que ce soit au niveau des parlements nationaux, des gouvernements ou des groupes de travail au sein de l’Union européenne.
Plus important aujourd’hui qu’hier
Lors de la dernière révision, en 2008, les Chefs d’Etat et de gouvernement n’étaient pas arrivés ainsi vraiment à dépasser la stratégie de sécurité de Solana de 2003. De façon paradoxale, au lendemain du Brexit, la Stratégie globale prend une valeur tout autant fondamentale que son contenu. Ce document permet d’affirmer aux yeux de tous, la confiance des Européens dans leur propre modèle et de jouer un rôle dans le monde. Il permet aussi de mettre au jour des mots clés qui étaient auparavant plutôt tabous au niveau européen : une « autonomie stratégique » (lire : Une Europe autonome : le mot clé de la future Stratégie globale), d’avoir des « capacités autonomes »…
(Nicolas Gros-Verheyde)
A télécharger ici (version anglaise pour l’instant, version française en préparation)
(1) Pour être exact, le document n’a pas été adopté mais ‘salué’ par le Conseil européen qui a ainsi remercié la Haute représentante de l’UE pour son travail. Au plan juridique, la différence est à noter. Mais, au plan politique, cela revient au même. Le document est endossé et devient un document officiel de doctrine de l’Union européenne.
Lire aussi nos décryptages :
(BRUXELLES2 à Bratislava) La prise de présidence par la Slovaquie après les Pays-Bas coïncide avec un retour des Etats en force dans le jeu communautaire. Et l’organisation d’un sommet exceptionnel à Bratislava à la mi-septembre ne doit pas être négligée.
Pour Bratislava, avoir la présidence de l’Union européenne, pour la première fois de son histoire est déjà un acte important. Le premier ministre slovaque, Robert Fico, l’a indiqué nettement aujourd’hui devant la presse internationale (dont B2) présente dans la capitale slovaque. « Pour un si petit pays que la Slovaquie, il s’agit d’un évènement exceptionnel. On a fait tout de ce qui est en notre pouvoir pour que cette présidence se développe aussi bien que possible. »
L’organisation d’un sommet de chefs d’Etat et de gouvernement, le 16 septembre à Bratislava, à ’27’ (sans le Royaume-Uni) est cependant tout, sauf anodine.
Depuis le Traité de Nice, tous les sommets sont normalement organisés à Bruxelles. C’est le résultat d’un deal intervenu au bout de la nuit entre Jacques Chirac, le président français qui assurait alors la présidence de l’Union européenne, et Guy Verhofstadt, alors Premier ministre belge, permettant de compenser pour les Belges, le décrochage des voix avec les Pays-Bas, et également d’en finir avec une certaine anarchie, de mouvements autonomes et d’extrême-gauche qui faisaient de chaque réunion formelle ou informelle des Chefs d’Etat et de gouvernement l’occasion d’une confrontation. Cela avait été le cas à Barcelone (sous la présidence espagnole) mais aussi à Gênes pour le G7. Le sommet de Nice n’échappera pas aux échauffourées, aussi sur fond de lacrymos et autres vitres cassées.
Ce sommet est ainsi le symbole d’une double reprise en main. Elle est symptomatique d’une volonté chez les Chefs d’Etat et de gouvernement de reprendre la main, sur les institutions européennes, d’avoir leur mot à dire au-delà des procédures européennes. Citant la crise migratoire et le problème des relocalisations Robert Fico a ainsi plaidé pour « que les Etats membres viennent avec leurs propres initiatives, qui seront ensuite prises en compte » dans le débat.
Pour les dirigeants de l’Est, il s’agit ainsi de ne pas se laisser distancer, de ne pas laisser le couple franco-allemand ou même les pays fondateurs imprimer, seuls, une direction à l’Europe. Robert Fico l’avait dit déjà hier devant la presse : « Les décisions cruciales sur l’avenir de l’Europe ne peuvent pas être définies à deux, trois Etats membres, ni par les Etats fondateurs de l’UE (…) L’avenir de l’UE ne peut plus être déterminé sans la participation active des Etats qui l’ont rejointe en 2004 et en 2007 ». Il a enfoncé le clou aujourd’hui à ceux qui critiquaient les Visegrad pour se concerter entre eux avant chaque réunion au sommet. « La coopération dans le cadre du V4 (le groupe de Visegrad) est unique. Elle est utile pour la coopération régionale. Elle repose sur des valeurs essentielles que nous apprécions. Elle continuera et sera approfondie. Il est tout à fait normal que nous abordions des sujets communs, d’essayer de coordonner nos positions là où c’est possible, pour défendre nos intérêts. »
Cette réunion à Bratislava est essentielle pour les chefs d’Etat et de gouvernement de tous bords, il s’agit enfin de se ménager un espace supplémentaire, en dehors de Bruxelles. « Nos conseils européens sont surchargés de sujets qui sont à l’ordre du jour. Et il faut préparer des conclusions. Car vous journalistes attendez derrière la porte que nous adoptons des conclusions. Nous n’avons pas assez d’espace pour des discussions informelles », autrement dit politiques.
Commentaire : une solution de bon sens à mon avis. Je n’ai jamais été un chaud partisan des sommets dans une ville unique (comme d’ailleurs de la présidence unique). C’est une solution sans doute rationnelle au plan organisationnel. Mais ce qu’on gagne en organisation, on le perd en vivacité, en compréhension, en en puissance politique.
Si certaines fonctions peuvent être « uniques » – pour l’Euro ou la politique extérieure – on ne peut pas déposséder les Etats de tous les symboles de ce que fait l’Europe. Il n’y a pas un peuple unique, un Etat unique, une voix unique, il n’y a pas même de fédération unique, c’est une erreur de croire ceci. Cela participe ainsi d’une fausse croyance que « Bruxelles » décide de tout, selon des critères pour le moins difficiles à comprendre. Il y a des peuples et des Etats rassemblés, unis le plus étroitement possible, qui donnent la légitimité à la construction européenne.
Dire que cela rapprochera l’Europe des citoyens définitivement est sans doute utopique. Mais, au-delà de l’argumentaire philosophique, tenir des sommets dans un pays de la présidence tournante a un gros avantage : il responsabilise les différents gouvernements, de leur réappropriation de la ‘chose européenne. Il participe aussi de la pénétration dans les médias locaux ou nationaux de ces pays qui vont ‘couvrir’ l’évènement, et donc influer sur une certaine connaissance européenne.
En creux, cette réunion marque également un certain affaiblissement des institutions comme la Commission européenne. C’est un fait. Mais l’organisation d’une telle réunion n’est-elle pas plutôt la conséquence de cet affaiblissement, de ses erreurs, avec un entêtement parfois nécessaire mais aussi parfois suranné, que la cause d’un lent effilochement communautaire ?
(Nicolas Gros-Verheyde)
(BRUXELLES2) C’est toute l’ironie de l’histoire. Au moment même où les Britanniques s’apprêtent à quitter l’Union, celle-ci aura, dans les six mois à venir, à compter du 1er juillet, une force de réaction rapide (battlegroup) sous commandement britannique et constituée en grande partie de sujets de Sa Gracieuse majesté (avec des Nordiques, des Irlandais et des Baltes).
La fameuse invasion du Royaume-Uni par l’armée européenne comme le disait le Daily mail il y a quelques jours (après avoir beaucoup fumé et beaucoup bu) n’aura certainement pas lieu (Lire : Big news ! L’armée européenne existe. Le Daily Mail l’a rencontrée). Mais ce serait plutôt un sacré retournement si, pour la première fois, où l’Union européenne engage à l’extérieur un battlegroup, ce soient des Britanniques qui aillent battre le pavé ou volet dans le sable sous le drapeau bleu à 12 étoiles.
Cela reste de la théorie pour l’instant… Car jusqu’à présent, même quand les conditions semblaient réunies, les ministres de la Défense de l’Union européenne ont toujours hésité à passer de la théorie à la pratique. Si j’étais bookmakeur, après avoir beaucoup perdu sur les sondages du Brexit, je ne jouerai donc pas, pour me remplumer, sur ce genre d’engagement, ou alors à au moins 100 contre 1 !
(Nicolas Gros-Verheyde)
(BRUXELLES2) François Hollande a adressé hier à l’issue du sommet européen, consacrant d’une certaine façon le fonctionnement d’une Europe à 27, sans le Royaume-Uni, à la fois un avertissement et une invitation à la finance établie au Royaume-Uni.
Mon amie est la finance
L’ironie à fleur de peau, le président français en a appelé aux mânes du Bourget. « La finance peut se faire du mal à elle-même. Ce n’est pas la France, ni le discours du Bourget, qui a provoqué le Brexit, je dois modestement en convenir. Ce sont les Britanniques qui se sont posé la question de savoir s’ils voulaient rester, ou non, dans l’UE ». Et de lancer un avertissement : l’Euro pour la City c’est fini !
Les avantages exorbitants pour la City : c’est fini
« La City pouvait faire des compensation en euros, qui était la monnaie d’échange, de transaction ou de compensation. Cela n’allait pas de soi. C’était une situation déjà assez exorbitante. N’étant pas dans l’Euro, le Royaume-Uni pouvait utiliser l’Euro. Il a fallu toute une procédure pour que le Royaume-Uni puisse garder cette situation exorbitante (…) Dès lors que le RU ne sera plus dans le marché unique, il n’y a aucune raison pour l’Europe et encore moins de la zone euro de permettre à un pays qui n’est plus membre de l’UE et qui n’a jamais été membre de la zone euro de continuer à faire opération en euro. Alors après ou irait ces transactions. Il y’a des places financières en Europe. »
Le beurre et l’argent du beurre…
« Il n’est pas possible de garder ces avantages acquis. Pour des libéraux, cela n’a pas l’air facile à admettre » a ajouté François Hollande sur un ton de plus en plus sarcastique : « Tout ce qui est à nous est à nous, tout ce qui est à vous est négociable ? Ben non, ça ne marche pas comme ça ».
Bienvenue chez nous !
Où iraient les transactions ? s’interroge le Président sans même qu’on lui pose la question : « J’imagine que ces transactions se feraient sur les places financières européennes. Nous n’en sommes pas encore là. Nous sommes au début du processus (…) (Mais) ce qui compte c’est que l’économie puisse se financer, fonctionner. » Et de lancer cet appel : « Je souhaite c’est que les places européennes se préparent, comme elles devaient le faire, à ce que des opérations qui ne puissent plus se faire à terme au Royaume-Uni ».
Commentaire : un appel à la fuite ?
Un propos qui pourrait être tempéré lors de la négociation. Le président français veut frapper, là où il sait la finance, fragile : l’incertitude. En agitant un éventuel changement des règles financières, il agite un mouchoir en direction des Britanniques : attention ne traînez pas trop. Sinon les marchés dicteront leur rythme… Au passage, ils vantent le bien-fondé de la place financière mais aussi de la place luxembourgeoise ou allemande, pour profiter de la situation et gagner quelques parts de marché. « Pas de sentiment de revanche » précise-t-il. Heureusement… car on sent comme un petit instant de dégustation.
(Nicolas Gros-Verheyde)