(B2) S’exprimant à Malte, lors de l’assemblée parlementaire sur la politique de défense européenne, le député français (socialiste) Joaquim Pueyo n’a pas mâché ses mots sur l’action de l’Union européenne au Sahel. Un sujet qu’il connait bien pour avoir été à Bamako l’année dernière « afin d’évaluer les missions EUTM Mali et EUCAP Sahel Mali » dont l’objectif est la formation de l’armée et des forces de sécurité intérieure maliennes.
Un contexte juridique qui interpelle
« Même si l’implication de leur personnel doit être saluée, ces deux missions et en particulier EUTM Mali s’exercent dans un contexte juridique qui doit nous interpeller. L’UE ne peut juridiquement financer les dépenses militaires. Elle forme les soldats maliens mais ne peut leur fournir les armes et munitions nécessaires à leur entraînement » a expliqué le député de l’Orne.
Une formation sans équipement
« Pire encore, une fois formés, ceux-ci rejoignent une armée malienne sans équipement, l’État malien n’ayant pas les moyens de les acheter. Le Mali mais aussi le Tchad ou le Niger, veulent des armes, des munitions, mais aussi des moyens de transmission, des véhicules blindés, des équipements de vision nocturne, etc. afin de combattre, avec les forces françaises de l’opération Barkhane, les groupes terroristes qui les menacent et nous menacent. Et l’Europe est incapable de les leur fournir. »
L’Europe incapable même de payer des trousses de premier secours !
« Sans aller jusqu’à fournir des armes et des munitions, il me semble nécessaire que l’Union finance certaines dépenses ayant un objet militaire. Pour ne prendre qu’un exemple édifiant, les trousses de premiers secours fournies aux militaires maliens dans le cadre d’EUTM Mali ont dû être payées par… le Luxembourg ! » explique le député.
Une initiative CBSD en deçà des enjeux
Une problématique que l’on connait bien au niveau de l’Union européenne. C’est tout le sens de l’initiative, dénommée CBSD (1), proposée en juillet 2016, et actuellement en discussion devant le Parlement européen. Elle vise à permettre le financement d’un minimum d’équipement (non létal) pour les forces armées. Mais cette initiative se heurte encore à quelques résistances, assez surréalistes parfois, comme l’ont prouvé les derniers débats au Parlement européen (lire : Pas de confusion, la CBSD n’est pas soumise aux critères « DAC »). Et, selon le député Pueyo, elle est insuffisante. « L’initiative CBSD est une première réponse mais elle n’est pas encore actée. Elle restera malheureusement en deçà des enjeux et des demandes de nos partenaires africains. »
(Nicolas Gros-Verheyde)
(1) Capacity building in support of security and development. Un acronyme anglais intraduisible en français courant. J’offre un café à celui qui m’offre une traduction en français compréhensible dans le sens commun !
(B2) L’armée américaine a relocalisé à Poznan, en Pologne, une centaine d’hommes, afin de mettre en place un QG tactique « de niveau de division », pour l’opération Atlantic Resolve. Il assurera ainsi le commandement des 6000 militaires redéployés dans les différents pays d’Europe de l’Est, de l’Estonie à la Bulgarie. Cet « élément de commandement de la mission » (MCE), mis en place en février 2015 à Baumholder (Allemagne). Cette relocalisation en Pologne va permettre « de projeter rapidement des forces de combat sur le théâtre européen à l’appui des alliés et partenaires de l’OTAN et d’augmenter la capacité de dissuasion [comme] de se défendre contre toute menace » indique l’armée américaine. Les Américains ont déployé 2017 en Europe une équipe de brigade blindée déployée par rotation en Europe, une brigade d’aviation de chasse et une force logistique d’appui.
(NGV)
En détail : le site US de l’opération Atlantic Resolve
(B2 à Illkirch) La ministre de la Défense allemande, Ursula von der Leyen, est arrivée en tout début d’après-midi au quartier Leclerc, à Illkirch-Graffenstaden (sud de Strasbourg) pour une mise au point sur les valeurs de l’armée allemande.
C’est ici que le militaire allemand Franco A, soupçonné de vouloir commettre un attentat, était affecté, au 291e bataillon de chasseurs de la brigade franco-allemande (BFA) (lire : Mélange des genres. Un militaire allemand de la BFA soupçonné de préparer un attentat raciste). Une visite décidée la veille dans l’urgence (annulant au passage un voyage prévu aux États-Unis) afin de renforcer le message de la ministre, soumise à forte critiques sur la scène nationale, notamment auprès des forces armées. Récit…
Un message fort : des défaillances internes à résoudre
Accompagnée de l’inspecteur général Volker Wieker (le chef d’état-major de l’armée allemande) et de l’inspecteur général Jörg Vollmer (patron de l’armée de terre), Ursula von der Leyen a voulu faire passer un message clair. Si « la grande majorité des soldats [allemands] ont tout le respect » de la ministre, « il est important de creuser plus profondément si quelque chose a mal tourné ». « Nous sommes au début d’un long processus. » Il y a « encore beaucoup à venir, mais ça vaut le coup » assure la ministre. Et elle compte s’y mettre rapidement.
Des faiblesses dans la direction de l’armée
Dès demain, jeudi 4 mai, elle rencontrera à Berlin une centaine de hauts gradés de l’armée allemande pour évoquer « la formation, au vu des récents scandales et leurs conséquences ». A Illkirch, Von der Leyen a annoncé également une révision du Code de discipline militaire. La ministre a aussi confirmé les propos tenus dans une interview au quotidien Bild, où elle dénonçait des « faiblesses de direction » dans l’armée et un « esprit de corps mal placé » conduisant à minimiser les dérives.
Opération de com’ politique
Von der Leyen est venue, en personne, pour se faire une idée de l’avancement de l’enquête qu’elle a elle-même ordonné la semaine passée. Mais la visite était aussi (et surtout) une opération de com’ pour redorer le blason de la ministre, mise en mal dans ce début de campagne électorale (en Allemagne).
Une revue de paquetage… dans le détail
Arrivée vers 14h, la ministre n’est restée dans la base que quelques heures. Pourtant, le tour a été minutieux. Et la presse tenue à bonne distance de la ministre pour éviter toute question intempestive. Après une première rencontre avec les hauts gradés allemands, elle a tenu à rencontrer plusieurs soldats. Elle a également visité le lieu de travail de Franco A. ainsi que les différentes zones de vie des soldats allemands.
Des décors glorifiant le passé nazi
Dans sa chambre, les enquêteurs ont trouvé une arme décorée d’une croix-gammée, un poster de soldats du IIIe Reich et divers documents à la gloire des nazis. Dans le « bunker », le salon de loisirs des sous-officiers, auquel B2 a eu accès, les murs sont décorés de dessins de soldats rappelant ceux de la Wehrmacht… Un détail que la ministre a d’ailleurs critiqué vertement : « La Wehrmacht n’a rien en commun avec la Bundeswehr. »
Les Français absents
Côté français, le service a été réduit au minimum. Seul le général Nicolas Casanova, chef de la 2ème Brigade blindée (2e BB), a reçu la ministre à son arrivée à l’aéroport de Eintzeim et au quartier Leclerc. Mais il l’a fait surtout en « sa qualité de gouverneur militaire de Strasbourg ». D’ailleurs, la visite de la ministre n’a pas été annoncée par les responsables de presse français. Les médias français se comptaient à peine sur les doigts d’une main. En revanche, côté allemand, une bonne dizaine de télévisions et une quinzaine de journalistes dont certains arrivés dans l’avion de la ministre étaient présents.
(Leonor Hubaut)
(B2) L’affaire fait grand bruit en Allemagne (et bizarrement assez peu en France). Un officier allemand, du 291e bataillon de chasseurs (Jägerbataillon 291) – qui fait partie de la brigade franco-allemande –, basé à Illkirch (près de Strasbourg) (1), est soupçonné d’avoir voulu préparer un attentat.
Soldat le jour, réfugié la nuit
Agé de 28 ans, le lieutenant Franco A menait une double vie. Le jour, il était soldat. La nuit et durant ses périodes de permission, il était David Benjamin (!), chrétien de Syrie, réfugié en Allemagne, vivant dans un foyer de migrants en Hesse… Son statut de demandeur d’asile avait été reconnu en janvier 2016. Une prouesse relativement extraordinaire puisque d’après la presse allemande, il ne parle pas un mot d’arabe. Lors des démarches pour bénéficier du droit d’asile, pour éviter de parler allemand, il a parlé en Français. Une langue apprise en France, à l’école de Saint Cyr, où il a étudié (cf. ci-dessous).
Une enquête menée en Autriche, en Allemagne et en France
Durant de longs mois, Franco A. a mené sa double vie sans attirer les soupçons. Ce n’est que début février (le 3), qu’il a été repéré par la police… autrichienne. Il tentait de récupérer une arme à feu chargée, de calibre 7,65 mm, cachée quelques jours plus tôt dans les canalisations des toilettes de l’aéroport de Wien-Schwechat (Autriche). Arme pour laquelle il ne disposait d’aucun port d’arme. Arrêté pour contrôle, il a ensuite été relâché mais placé sous surveillance. Le parquet allemand a alors pris le relais, menant une enquête sur le soupçon d’action violente subversive. L’enquête — impliquant les polices de trois pays (Allemagne, Autriche, France) – a abouti à des perquisitions dans 16 habitations au total dans les trois pays puis à deux arrestations. Franco A a été arrêté, mercredi dernier (26 avril) à Hammelburg (Bavière) où il suivait une instruction militaire, en même temps, qu’un étudiant de 24 ans à Offenbach am Main accusé d’être impliqué.
Un mémoire soutenant des thèses racistes soutenus à Saint Cyr
Les enquêteurs ont d’ailleurs (re)découvert le projet de son mémoire de maitrise, soutenu à Saint Cyr en 2014. Un texte qui — selon le centre des sciences de l’histoire militaire et sociale de la Bundeswehr (ZMSBw) – n’est manifestement pas un travail de qualification académique mais procède d’un nationaliste radical, un appel au racisme, que l’auteur tente de soutenir dans un effort pseudo-scientifique ».
Un réseau d’extrême droite au sein de l’armée ?
Selon notre collègue Thomas Wiegold, de Augengeradeaus, l’enquête en cours semble révéler qu’il ne s’agit pas d’une dérive individuelle. Jusqu’à cinq soldats seraient impliqués et identifiées. Des armes (des Glock G36) auraient été découverts lors de l’enquête, avec des croix gammées.
Une ministre sous le feu des critiques
La ministre Von Der Leyen, qui avait réussi jusqu’ici un parcours sans faute, est sous le feu des critiques. Elle a voulu, à son tour, porté l’estocade mettant en cause l’état-major de l’armée allemande. Sur la ZDF, elle a tenu des propos très durs. « La Bundeswehr un problème d’attitude. Et elle a évidemment une faiblesse de direction à différents niveaux » – mêlant les affaires de harcèlement, de dégradation sexuelle. Ce jeudi (4 mai), les différents responsables militaires sont d’ailleurs convoqués à Berlin – selon mon collègue Thomas Wiegold – pour discuter des conséquences des incidents accumulés par la Bundeswehr depuis plusieurs mois. En attendant, la ministre a décidé d’annuler une visite prévue aux États-Unis et de faire une visite officielle en France, à Illkirch, sur les lieux même où le jeune sous-officier travaillait…
(Nicolas Gros-Verheyde)
A suivre : le reportage de ma collègue Leonor Hubaut qui suit la ministre Von Der Leyen à Illkirch
(1) C’est la seule unité allemande stationnée sur le territoire français. De façon étrange, ce fait n’a été que très peu commenté. Alors que l’individu a suivi une partie de sa scolarité en France, avec des écrits pour le moins peu républicains, résidait en France, les autorités françaises se murent dans une discrétion quasi-totale, laissant la ministre allemande se dépatouiller avec ses ressortissants.
(B2) Le Centre satellitaire de l’UE (SatCen) est particulièrement impliqué dans la surveillance des flux migratoires, à la demande principalement de l’opération Sophia et de Frontex (1).
Une intervention en urgence
Le SatCen est notamment appelé en urgence lorsque d’autres sources avertissent d’une possible traversée d’un groupe de migrants. Aux analystes alors d’apporter une confirmation visuelle. Ils s’appuient pour cela sur la surveillance à long terme, effectuée chaque jour, qui leur permet d’identifier les déplacements « normaux » et de les distinguer de ceux plus exceptionnels des départs en masse. « Il est très difficile de prévoir un évènement comme un départ massif sans connaitre les habitudes de la région. Il faut connaître ce qui est habituel dans la zone pour que, quand on observe quelque chose qui sorte de cette normalité, l’on puisse déclencher une alarme » souligne un analyste.
Une surveillance régulière
Pour chaque zone impliquée dans la crise migratoire, selon que la situation est plus ou moins tendue, les rapports du SatCen peuvent ainsi être mensuels ou hebdomadaires. « Il y a des zones pour lesquelles les demandes d’images – et donc nos rapports – ont été et sont quotidiens », explique-t-il. Ce screening régulier de certaines zones est réalisé notamment pour les points de départ des migrants pour traverser la Méditerranée, aujourd’hui bien connus. Cela permet de faire un décompte régulier des bateaux présents. « Si un jour, les images satellites montrent 14 radeaux gonflables au lieu des 20 décomptés la vieille, la conclusion est qu’il y en a six qui sont partis en mer ». Chaque radeau gonflable peut transporter entre 100 et 150 personnes. Avec ce calcul en main, les analystes préviennent immédiatement les QG de Frontex ou Sophia, qui enclenchent alors leurs protocoles.
(Leonor Hubaut)
(1) Des États membres de l’Est ont également utilisé les services du SatCen pour surveiller la route des Balkans.
Pour aller plus loin :
(B2 à Madrid – exclusif) Qu’il s’agisse d’envoyer de l’aide humanitaire à Kaboul, d’organiser la visite d’observateurs de l’ONU en Syrie, d’intervenir après une catastrophe naturelle comme à Haïti, ou de surveiller les flux des migrants en Libye, toutes ces opérations peuvent passer à un moment donné… par Madrid.
Un bâtiment blanc dans la banlieue madrilène
C’est, en effet, dans la banlieue de la capitale espagnole qu’est établi le Centre satellitaire de l’Union européenne (en abrégé le SatCen). Dans un discret bâtiment blanc, localisé sur la base aérienne de Torrejón de Ardoz, auquel B2 a été autorisé à pénétrer, une quarantaine d’analystes travaillent 24h/24, 7 jours sur 7 pour fournir, quand nécessaire, des analyses du renseignement au Service Européen pour l’Action Extérieure, aux missions et opérations de l’Union européenne, à l’ONU et à l’OSCE.
Des analystes au cœur de l’effervescence
Même s’il n’est que l’un des trois acteurs du cycle du renseignement de l’Union européenne, le SatCen, et les informations qu’il fournit, sont pourtant un élément crucial dans toutes les décisions opérationnelles prises à Bruxelles. Dans le centre, l’effervescence est quotidienne. Ses « clients », et leurs centres d’intérêt, sont si divers qu’il n’y a que peu de jours sans qu’une urgence n’éclate. A cela s’ajoute le travail de longue haleine. Le suivi des flux migratoires au Nord de l’Afrique ou plus à l’Est, en soutien à l’agence Frontex ou à l’opération Sophia, représente un quart de l’activité du centre (lire : Pour surveiller les flux migratoires, le SatCen appelé à la rescousse). La charge de travail est équivalente pour le suivi de la situation en Ukraine, cette fois-ci en soutien à l’OSCE.
Une sécurité de haut niveau
En entrant dans les locaux, on est frappé par les mesures de sécurité, avec de nombreux systèmes de sécurité, de protection, des caméras… y compris des détecteurs de signaux électromagnétiques pour savoir s’il y a des équipements en émissions, qui pourraient transmettre des informations sensibles. Une protection justifiée pour le directeur du centre, Pascal Legai. « Nous manipulons parfois des données classifiées « secret » et, même lorsqu’elles ne sont pas classifiées, elles sont hautement sensibles. […] Un téléphone pourrait être utilisé par n’importe qui pour écouter ce qui se dit dans cette salle. »
La pause café… courte
Chacun est concentré, que ce soit dans la salle d’opération ou dans les divisions IT (technologies de l’information) ou CapDev (capability development). Ici, la pause café est plutôt courte. Pas question de trop traîner. Dans la salle d’opération du SatCen, relativement grande et spacieuse, les équipes sont organisées par îlots, de trois ou quatre bureaux, sans cloison. Tout au fond, se trouve l’équipe en liaison avec les « clients » et les fournisseurs (d’images).
Une étape cruciale
Ce sont eux qui reçoivent les appels et les commandes des « clients ». A eux également de définir, avec les chefs d’équipes, les images nécessaires pour répondre à la commande, et d’appeler les fournisseurs, qui peuvent être civils ou militaires, avec qui une ligne directe est établie 24/24, 7 jours sur 7. Cette étape est cruciale, car tout le travail des analystes va déprendre des images sur lesquelles ils vont travailler. La réactivité est la clé. Pour les demandes les plus expresses, toute cette étape ne prend que quelques minutes. Pour d’autres types de requêtes, pour des analyses sur du long terme, le processus est plus complet, plus mûri…
Du satellite à l’analyse
Les images commandées arrivent également à des rythmes adaptés aux demandes. Une fois les images satellites reçues, les analystes s’affairent. La première étape est surtout informatique. Grâce aux systèmes informatisés, une première analyse est faite. « Une image satellite contient une multitude d’informations ». Des éléments définis comme inutiles sont « discriminés ». Vient ensuite le travail de l’homme. C’est la « véritable » valeur ajoutée du SatCen : sa quarantaine d’experts.
L’expertise humaine, véritable plus-value du SatCen
C’est le travail des analystes, qui sont regroupés selon leurs fonctions. La luminosité de la salle est augmentée par les lueurs des trois ou quatre écrans de chacun des analystes. Le silence n’est rompu que par le bruit des « clics » des doigts sur les claviers et des souris, et quelques échanges entre experts. Ici, la langue anglaise est de mise. Un rapide coup d’oeil sur cet espace ouvert permet de voir les écrans, où circulent une abondante quantité d’informations hautement sensibles. Certaines sont classifiées Top secret. Mais il n’y a pas que l’information confidentielle qui est intéressante. Les analystes s’appuient ainsi de plus en plus sur les sources ouvertes : « Google Earth ou les réseaux sociaux permettent d’avoir accès à d’autres types d’informations », souvent complémentaires.
Des experts multitâches
Français, Allemands, Tchèques, Italiens, Espagnols… et les nationalités s’y côtoient avec un naturel qui pourrait choquer les services de renseignement de n’importe quel pays. La politique du centre est de développer la polyvalence de ses experts. Tous doivent être « multitâches » car avoir un service 24/24 suppose que tout le monde puisse de garde à un moment où un autre. Et tous doivent donc être capables de répondre aux commandes ou questions de chacun des clients.
(Leonor Hubaut)
A suivre… la suite de notre reportage sur le blog et sur le pro
Pour aller plus loin :
L’exemple de la piraterie
Au large de la Somalie, les images satellitaires permettent ainsi de localiser des navires suspects, mais ce n’est qu’avec des information venant du terrain qu’il est possible de savoir que telle ou telle embarcation a une échelle métallique en poupe. « Ce n’est pas très utile pour pêcher mais pour un abordage, c’est autre chose …» Évidemment, la prudence est de mise sur la crédibilité de ces sources dîtes « ouvertes », souvent des photos. C’est pourtant un instrument essentiel. Il permet également de donner à l’utilisateur final une vision plus globale du terrain.
(B2) Lundi 1er mai, les gars de l’opération Sophia ont effectué une saisie d’armes, la première du genre depuis que l’opération européenne en Méditerranée (EUNAVFOR Med) a débuté le contrôle de l’embargo sur les armes, en octobre dernier, conformément à la résolution 2292 du Conseil de sécurité des Nations unies. De quoi démentir notre article publié avant le week-end qui mentionnait zéro saisie d’armes (lire au bilan de l’opération Sophia)
Un navire portant pavillon libyen
Cette prise revient au navire allemand, le navire auxiliaire Rhein, ou plus exactement à son équipe d’abordage lituanienne… Les Lituaniens ont abordé un navire El Mukthar arborant le pavillon libyen. Ils ont découvert à bord un petit arsenal : des mitrailleuses, des fusils AK47 (Kalachnikov), des lanceurs RPG et les grenades, des grenades de mortier et des munitions.
Le Parquet de Marseille devrait être saisi
Toutes les armes ont été saisies et ensuite transférées à bord du navire allemand pour être vérifiées, comptées et ensuite éliminées par des militaires. Les auteurs des faits délictueux pourraient être poursuivis. Normalement, selon le protocole interne conclu au sein de l’Union européenne, c’est le Parquet de Marseille qui devrait être saisi.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi :
(B2) C’est un anniversaire un peu particulier qui a été célébré au camp de Koulikoro, vendredi 28 avril. La mission européenne de formation des forces armées maliennes (EUTM Mali) a passé le cap des 10.000 soldats entraînés, lors de la cérémonie pour la fin de deux cycles de formation : le cours « formation des formateurs » (TTT-Train the Trainer) et la formation ETIA (Elément Tactique Inter Arme).
300 soldats formés au premier trimestre
Plus de 300 soldats maliens ont été formés dans le cadre de la formation ETIA (Élément tactique inter-arme) entre janvier et avril 2017. Divisés en deux groupes de combat, chacun de la taille d’une compagnie (150 soldats), se sont entraînés simultanément.
Priorité à la formation des formateurs
Les Européens ont mis l’accent sur la formation des formateurs. Ainsi, pendant la première phase de la formation, officiers et sous-officiers ont été séparés de la troupe, pour participer au programme « formation des formateurs » (Train the Trainer). Une formation qu’ils ont mis en pratique pendant la seconde phase puisque ce sont les Maliens eux-même qui, sous le supervision des instructeurs européens, ont dirigé la formation des soldats.
(LH)
(B2) Lors de la réunion informelle des ministres de la Défense, à Malte, le contre-amiral Enrico Credendino, a dressé le bilan des 21 premiers mois de fonctionnement de l’opération européenne en Méditerranée (EUNAVFOR Med / Sophia), qu’il commande.
35000 personnes sauvées
L’opération Sophia a contribué à sauver 35.037 personnes qui franchissaient la mer pour trouver asile en Europe, lors de 241 interventions de secours en mer (SOLAS). Soit 11,8% du total des migrants.
Par ailleurs, 422 bateaux servant au passage des migrants ont été neutralisés (= détruits). Et 109 suspects ont été appréhendés et remis à la justice italienne. C’est relativement peu… d’autant que la plupart des arrestations semble plutôt être du menu fretin. Pour autant à EUNAVFOR Med, on explique que l’opération a eu un effet notable : « Les trafiquants ont perdu leur liberté d’action dans les eaux internationales » (NB : ce qui est exact). Du côté des États membres, on est cependant moins enthousiaste. « L’opération n’a pas vraiment démontré son efficacité » confie une source européenne à B2.
Pas d’effet d’attraction
Du côté de l’opération, on nie catégoriquement tout effet d’attraction sur le trafic. Si les navires de l’opération Sophia « n’étaient pas là, cela n’empêcherait en rien le trafic d’être humains » lance son porte-parole, le cap. de vaisseau Antonello de Renzis Sonnino. Car l’obligation de secours à toute personne en détresse en mer existera toujours. Et le trafic maritime est intense dans la zone. « Chaque jour, près de 50 cargos et navires marchands naviguent en même temps sans compter les navires ONG (une quinzaine selon nos sources). Etant donné la densité du trafic maritime, en Méditerranée centrale, les secours prendraient place même s’il n’y avait pas de présence de EUNAVFOR Med. C’est une obligation légale, une obligation morale. »
Bilan plus contrasté pour l’embargo sur les armes
Du côté de la surveillance de l’embargo sur les armes – une tâche commencée il y a un peu plus de six mois (en octobre 2016) –, le bilan est plus contrasté. 442 vérifications hailing, 44 approches amicales (friendly approach) avec montée à bord avec l’accord du capitaine (« puis-je vous visiter »), une inspection (pour un bateau franchement suspect) et sept enquêtes de pavillon (vérification des papiers à bord de l’équipage, du cargo). Du côté de l’opération, on le reconnait, « on n’a pas encore une image complète, il y a un effet de dissuasion. Mais le trafic d’armes utilise différentes routes. »
Cinq navires en mer
L’opération dispose aujourd’hui de cinq navires en mer : le navire italien de débarquement San Giusto (L-9894), la frégate espagnole multiusages Canarias (F-86), le navire allemand auxiliaire Rhein (A-513), le navire océanographique multirôle britannique Echo (H-87), le patrouilleur de haute mer français Commandant Birot (F-796). Le premier navire sert de navire amiral, les deux suivants (espagnol et allemand) sont plutôt dédiés au sauvetage en mer, les deux derniers (français et britannique) sont plus particulièrement dédiés au contrôle de l’embargo en mer.
Quatre avions
En l’air, l’opération dispose de quatre avions : deux avions affrétés par le Luxembourg (auprès de la compagnie CAE aviation), un avion espagnol et un avion français de surveillance (Falcon ou autre selon la disponibilité).
(Nicolas Gros-Verheyde, à La Valette)
(B2 sur le San Giusto, à Malte) La formation des garde-côtes et marins libyens commence à entrer dans une phase plus complète, comme l’ont expliqué à quelques journalistes (dont B2) les responsables de l’opération Sophia (EUNAVFOR Med), lors d’un briefing à bord du navire amiral de l’opération, le San Giusto, ancré spécialement, dans le port de Malte, le temps de la réunion informelle des ministres de la Défense.
Trois cycles de formation
La formation des garde-côtes se déroule selon trois cycles, le premier, dit de « formation basique », a permis de former 93 marins sur une durée de 14 semaines, du 26 octobre 2016 au 13 février 2017 sur deux navires, italien et néerlandais. Cette formation vise à donner des rudiments du cadre d’action en mer : le droit international humanitaire, la loi maritime, la recherche et le sauvetage, le contrôle des pêches, la protection maritime de l’environnement, des notions de langue (l’anglais, langue maritime internationale). Un nouveau cycle pourrait avoir lieu « si les Libyens le demandent ».
La second cycle de « perfectionnement » est actuellement en cours. Il dure normalement 14 semaines et concerne des groupes de militaires de différents rangs. Certains cours sont assez théoriques, d’autres plus pratiques. Une première session s’est déroulée du 30 janvier au 9 février en Crête (Grèce) pour 20 officiers expérimentés + 1 tuteur, sur différents points spécialisés théoriques : l’application de la législation maritime (MLE), le renseignement, la collecte de preuves et les enquêtes sur une scène criminelle, l’organisation de la garde-côte, les aspects juridiques, etc. Une seconde session s’est déroulée à Malte du 6 au 17 mars et du 27 mars au 7 avril concernant successivement 12 officiers sur la législation maritime et 8 autres sur la coordination.
L’Italie devrait prendre le relais pour former 255 stagiaires en tout : 65 pour former l’équipage de 5 navires de patrouille, 20 officiers et 25 sous-officiers pour la maintenance, 25 opérateurs de salle d’opération, 8 formateurs, 56 sous-officiers. Une autre série de stages devrait avoir lieu en Espagne pour finaliser ce second cycle, avec une formation plus technique, sur la maintenance, la législation maritime, les visites et inspections de bord pour 36 stagiaires (Visit, board, search, and seizure ou VBSS).
Enfin, le troisième cycle devrait être proprement opérationnel, d’environ huit semaines, en mer, permettant aux équipages et officiers de mettre en pratique toutes les connaissances théoriques, engrangées dans les différents séminaires. Ce, à bord des dix navires de patrouille, remis en condition opérationnelle par les Italiens, et rendus aux autorités libyennes (*).
L’objectif serait ainsi d’avoir d’ici l’été 2017 une garde côte libyenne en état de marche, ou du moins un embryon de garde-côtes, avec dix navires opérationnels, les équipages, les personnels de maintenance et le commandement. Avec cette formation et les nouveaux navires promis par l’Italie, « quelque chose pourrait changer » confirme le porte-parole de l’opération, le capitaine de vaisseau Antonello de Renzis Sonnino. On l’espère…
(Nicolas Gros-Verheyde)
(*) Des navires qui, pour l’essentiel, étaient en maintenance lors de la guerre de 2011 et avaient été saisis dans le cadre de l’embargo mis en place par les Alliés et les Nations Unies