(B2) Un pays voisin menacé de stabilité, plusieurs pays européens sous le coup d’attaques apparemment séparées mais en réalité bien coordonnées… C’est le scénario de l’exercice important de gestion de crise, que lancent aujourd’hui l’Union européenne, et l’OTAN
Faire face à une crise complexe de nature hybride
Cet exercice, dénommé en terminologie militaire, »EU-HEX-ML 18 (PACE) » (1), a pour objectif d’améliorer la capacité de l’UE à faire « face à une crise complexe de nature hybride comportant une dimension interne et une dimension externe ». Précisons tout de suite qu’il ne s’agit pas d’un exercice réel, avec déploiement d’hommes et matériels sur le terrain, mais d’un exercice d’état-major, destiné à tester les circuits politico-militaires de réaction, et qu’il implique autant les structures civiles (voire plus) que les structures militaires proprement dite.
Toute ressemblance avec des faits existants ou ayant existé n’est pas tout à fait fortuite
Un pays voisin menacé de stabilité lance un appel à l’aide à l’UE
Le scénario comme dans tout ce type d’exercices est à la fois imaginaire mais aussi tout proche de certaines réalités passées. Le pays attaqué n’est pas « si loin de l’Union européenne » confie une source européenne. Il est confronté « à une menace majeure pour la sécurité » qui compromet « sa stabilité » et a demandé l’aide de l’Union européenne. Les Européens réfléchissent donc à déployer une « mission [d’assistance ou de stabilisation] au titre de la PSDC [la politique de sécurité et de défense commune] ».
Différents évènements simultanés
Dans le même temps, différentes attaques de nature hybride ont lieu dans plusieurs États membres : cyber attaques, menaces sur la santé, risque de coupure d’approvisionnement énergétique, diffusion de fausse nouvelle. Des « évènements apparemment non connectés » mais qui interviennent de façon quasi-simultanée, et semblent tous reliés à la volonté européenne de stabiliser ce pays…
Tout le monde l’aura reconnu, on pense beaucoup à la Russie et à l’Ukraine, aux cyberattaques de sites officiels, à l’attaque de Salisbury ou aux menaces de coupure des gazoducs vers les pays clients du gaz russe.
La moitié des DG de la Commission européenne impliquées
C’est la première fois que l’Union européenne mène un exercice de gestion de crise et de réaction de cette envergure. Il va impliquer, en effet, non seulement les spécialistes militaires, mais tous les services et dispositifs européens qui ont à gérer des crises. Pas moins de 14 directions générales (DG) de la Commission sont ainsi mobilisés, tout comme le mécanisme de protection civile de l’UE, le Corps européen de garde-frontières (Frontex) à Varsovie et Europol à la Haye, le service de crise consulaire de l’UE (2) les experts des 28 Etats membres. Deux pays non membres participent à l’exercice : la Norvège (pays tiers) et la Suisse (observateur).
Un exercice coordonné avec l’OTAN
Cet exercice est mené en parallèle à un exercice de poste de commandement d’état-major de l’OTAN. L’objectif est de tester les interactions entre les deux organisations en matière d’appréhension de la situation, de cyberréaction, de gestion de crises ou de communication stratégique en situation de crise. Du personnel de l’OTAN va être ainsi déployé au sein du centre de gestion de crises de l’UE et des différentes structures européennes. Un tel exercice ‘parallèle et coordonné’ avait été mené pour la première fois en 2017 (3), l’OTAN conduisant l’exercice et l’UE menant un exercice plus petit en parallèle. Cette année, c’est l’inverse, c’est « l’UE qui mobilise ses instruments et l’OTAN qui est l’invité » explique un haut diplomate européen, un brin fiérot.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) La réunion conjointe des ministres des affaires étrangères et de la défense de l’UE (lundi après midi) devrait être une réunion importante, marquée par plusieurs avancées vers ce qu’on pourrait dénommer l’Union européenne de défense.
(crédit : EUTM Mali)
Ce n’est pas le grand soir annoncé par certains (1). Mais c’est une étape intéressante permettant à différents projets mis sur la table depuis un ou deux ans de progresser. Dans un domaine aussi sensible que la défense, où le poids de l’histoire, des intérêts nationaux et l’instinct de souveraineté, sont patents, on peut dire que ces progrès sont notable.
Parlera-t-on de l’armée européenne ?
Le mot sera sur toutes les lèvres, à la cafétéria certainement, histoire de se distraire, ou dans les commentaires à la presse. Mais autour de la table, le sujet ne figure pas à l’agenda. Tout simplement car si cette terminologie a été utilisée tour à tour par le président français Emmanuel Macron et la Chancelière allemande Angela Merkel, dans ces derniers jours (1), on en est resté pour l’instant au bon mot, sans aucun détail, ni feuille de route et encore moins plan d’action. Mieux, côté français, on rétropédale ; les diplomates français s’évertuent à préciser que leur président n’a pas vraiment voulu dire une armée européenne, il pensait plutôt à l’initiative européenne d’intervention, et au fonds de défense, aux projets en cours de défense etc. On fait appel à la manne du discours de Sorbonne pour expliquer le président est toujours dans la même veine. Bref, on n’assume pas.
Quelles sont les avancées précises ?
Première avancée, le mini-QG militaire, dénommé en termes techniques la MPCC ou capacité de planification et de conduite militaire (l’équivalent européen du CPCO français) va être renforcé d’ici 2020 à la fois en personnel et dans ses fonctions. Concrètement il pourra désormais conduire une opération militaire de l’Union européenne (sous mandat ONU ou mandat UE) d’une taille modeste (2500 hommes).
Deuxième avancée, les missions de la PDSC civile. Les ’28’ conviennent qu’il faut renforcer. Ces missions (police, justice, douanes, état de droit) qui mettent beaucoup de temps à se déployer, souffrent d’un déficit de personnel lacunaire, et souvent peinent à être efficaces. Les ’28’ se sont ainsi engagés à pouvoir déployer une mission de 200 personnes maximum en 30 jours maximum… « à compter de la décision » politique de lancement. Espérons que cet engagement (qui n’est pas le premier du genre) ne finira pas dans un beau tiroir.
Troisième avancée (et non des moindres), le Fonds européen de défense proposé par la Commission européenne en juin dernier progresse à bonne vitesse. Les ministres adoptent leur ‘approche générale’, ce qu’on pourrait considérer comme une ‘première lecture provisoire’. Aux parlementaires européens désormais de fixer leur position. Ce qui sera fait dans les jours prochains. L’objectif d’arriver à un accord avant le printemps et les élections européennes est désormais possible.
Quatrième avancée, la coopération structurée permanente en matière de défense (PESCO) n’a pas encore montré ses premiers résultats. Mais elle se renforce et complète petit à petit. Après avoir lancé une première vague de projets (en mars), adopté des règles sur la manière de vérifier les engagements de chacun (en juin), les ministres de la Défense adoptent une seconde vague de projets, qui comprend notamment le drone européen MALE (moyenne altitude, longue endurance), projet mené par le quatuor de la PESCO (France, Allemagne, Espagne, Italie).
Sur quoi est-ce plus difficile ?
L’opération Sophia, cela bloque. On est dans un jeu de poker menteur, où chacun tient la barbichette de l’autre, en espérant que l’autre va céder. L’Italie ne veut pas accueillir tous les migrants de manière automatique et souhaite une solution spécifique pour faciliter une rotation entre les ports de débarquement, les autres pays ne veulent pas de cette solution. Et chacun attend. En attendant le compteur tourne, les bateaux engagés sur l’opération se font plus rares. Et la date fatidique du 31 décembre se rapproche.
La facilité européenne de paix, un instrument financier pour les opérations, ne suscite pas encore un plein consensus. Les difficultés sont multiples. Et de nombreux points restent à discuter pour aboutir un compromis. « Il faudra un peu de temps » concède un diplomate à B2.
La coopération OTAN-UE. L’ambiance est meilleure entre les deux organisations. C’est sûr. Mais, malgré une auto-célébration réciproque, quand on regarde dans les détails, l’ambiance parait moins ludique. Par exemple, pour la mobilité militaire, les priorités des uns (OTAN) ne coïncident pas avec les priorités des autres (Union européenne).
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire aussi :
(B2) C’est devenu le leitmotiv des dirigeants français : l’Europe de la défense, « a fait plus de progrès en un an qu’en 60 ans » ont précisé tour à tour Nathalie Loiseau (ministre déléguée aux Affaires européennes) que Florence Parly (ministre française des Armées). Est-ce exact ? Pas vraiment
Une révolution en un an ?
Certes on avance, mais ce n’est pas depuis un an (NB : de façon subliminale, un délai qui correspond à l’arrivée de l’équipe Macron au pouvoir…) C’est depuis trois-quatre ans en fait. L’arrivée de la Commission Juncker a, d’une part, donné une impulsion indéniable aux questions de défense. Elle a ensuite permis de poser une série de projets sur la table, plutôt ambitieux, qui brisent certains tabous (notamment financiers). Le tout sous une pression extérieure et intérieure, et grâce à un certain consensus qui existe désormais au sein de plusieurs États membres comme des institutions européennes (lire : Europe de la défense. Un quintet à l’action).
En soixante ans ?
Des avancées, l’Europe de la Défense en a connu de façon sporadique, à plusieurs reprises, tels des poussées de fièvre. Pour prendre les plus récentes, on peut en cerner trois vagues principales : premièrement, au début des années 1990 avec le traité de Maastricht et la renaissance de l’Union de l’Europe occidentale (UEO), qui devait être l’embryon de l’Europe de la Défense. L’espoir a été vite déçu. Deuxièmement, au début des années 2000 notamment, l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, la nomination d’un premier Haut représentant chargé de la politique étrangère et de sécurité, la mise en place d’une série d’outils au plan politique (COPS) comme militaire (l’état-major de l’UE, l’agence européenne de défense, etc.) et le lancement d’une série d’opérations et missions de la PESD (politique européenne de sécurité et de défense) signe une montée en puissance de cette politique. A fin des années 2000 (2007-2009), l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la mise en place de normes pour le marché intérieur de la défense, la création du Service diplomatique européen (ou service européen pour l’action extérieure), une forte poussée de missions et d’opérations extérieures menées au titre de la PSDC (politique européenne de sécurité et de défense commune). C’est cette mémoire historique qui doit rendre ‘prudent’ face aux enthousiasmes du moment.
Le mouvement est-il terminé ?
Non. Et il ne sera pas vraiment dans un ou deux mois. Les projets les plus ambitieux, comme le fonds européen de défense, n’est pas encore approuvé définitivement. Et son montant n’est pas encore avalisé. Il le sera d’ici fin 2019 (version optimiste) ou 2020 (version réaliste). Il ne produira pas de résultats avant 2024. Quant à la coopération structurée permanente, elle n’a pas encore produit ses premiers résultats. La plupart des autres avancées sont très progressives et fixent des horizons de 2020, 2023, 2025 pour être réalisés.
Ce qui a changé
Ce qui a changé depuis un an est une position française plus affirmée, moins pusillanime, manifestant de retrouver un rôle central sur les questions de défense. Ce n’est pas entièrement nouveau. On avait eu un rôle semblable lors de la présidence française de l’UE, sous Nicolas Sarkozy (dans la première partie de son mandat). Mais c’est indéniable, la France retrouve désormais toute sa place à la table européenne, amenant des initiatives et des idées pour pousser l’Europe de la défense.
La formule ‘plus d’avancées en un an qu’en 60’ pêche non seulement par un ‘léger’ surcroit d’optimisme, mais elle est fausse historiquement et concrètement. C’est davantage un slogan électoral qu’une réalité politique. Elle est dangereuse car elle fait naitre des espoirs, assez vite douchés, quand on explique la réalité. Elle a un avantage : mettre la lumière sur une réalité, il y a des avancées.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) Un nouveau module de formation des garde-côtes et marins libyens a débuté lundi dernier (12 novembre). Ce « cours de base pour les plongeurs de navires» a été lancé au Centre de formation de la marine croate à Split (Croatie).
(crédit : EUNAVFOR Med)
Cinq stagiaires
Les cinq stagiaires ont été sélectionnés par les autorités libyennes compétentes et soumis à un processus de validation approfondi mené à différentes étapes par EUNAVFOR Med, les agences de sécurité des États membres de l’UE participant à l’Opération et des organisations internationales.
Cinq semaines
Le cours, organisé par la marine croate, durera cinq semaines. Il fournira des connaissances et une formation en procédures de plongée, en particulier en techniques connexes et en leçons axées sur les droits de l’homme, les premiers soins de base et la politique en matière d’égalité des sexes. La fin du cours est prévue pour le 14 décembre 2018.
NB : Avec cet effectif, le seuil de plus de 300 membres du personnel des gardes-côtes et de la marine libyens formés par l’opération européenne EUNAVFOR Med sera atteint, indique le QG de l’opération.
(NGV)
(B2) L’état-major des armées a confirmé samedi dans la nuit le crash d’un des drones français de surveillance (de fabrication US) opérés par les Français au Niger.
« Le 17 novembre, vers 1 heure du matin, heure de Paris, le contact a été perdu entre la base aérienne de Niamey et un drone Reaper de la force Barkhane qui rentrait de mission. Le drone s’est écrasé dans une zone désertique à quelques kilomètres de la piste, sans faire aucune victime » indique le communiqué.
Un drone Reaper au Niger (crédit : DICOD / EMA 2015)
« Les raisons exactes de cet accident ne sont pas connues. Une enquête pour en déterminer les causes est ouverte. » On peut noter qu’il s’agit du premier accident d’un drone Reaper français, depuis leur mise en service en janvier 2014 dans l’armée de l’air et au Sahel. « Les drones Reaper ont effectué plus de 23 000 heures de vol depuis leur mise en service opérationnel. »
NB : le crash de ce type d’engin MQ9 (version A Reaper ou B Predator) n’est pas rare. Les Britanniques avaient perdu un de leurs premiers Reaper en Afghanistan en 2008. Les États-Unis en ont perdu deux sur leur base des Seychelles, coup sur coup en 2011 et 2012, et deux autres en Afghanistan en 2015 et 2016. Un avait été détruit dans le nord Syrie lors d’une mission en juillet 2016 puis détruit au sol pour éviter toute réutilisation (lire ici).
(NGV)
Vous êtes journaliste et avez publié un sujet sur l’Europe en 2018 ? Vous êtes en école de journalisme et avez un projet de groupe sur les élections européennes ? Participez au prix Louise Weiss 2018 du journalisme européen !
Organisé par l’Association des journalistes européens (AJE) et soutenu par le ministère des Affaires européennes et la Fondation Hippocrène, le prix Louise Weiss ouvre sa treizième édition.
Décerné par un jury de journalistes, il récompense des articles qui ont traité de l’actualité européenne et ont paru entre le 1er janvier et le 24 décembre 2018.
Trois catégories sont ouvertes :
A noter : en cette année d’élections européennes, la section française de l’Association des journalistes européens tient à sensibiliser les futurs journalistes aux enjeux européens. Il a ainsi été décidé de créer un prix spécial écoles de journalisme.
Les candidatures sont ouvertes jusqu’au 24 décembre 2018, à minuit.
Toutes les infos ici
(B2) C’est la dernière trouvaille des communicants de la Bundeswehr. Une série d’une vingtaine d’épisodes, façon clip, diffusés sur what’s app et youtube. Objectif : faire connaître le commandement des forces spéciales, alias le KSK
(crédit : Bundeswehr)
Une vie quotidienne hors de toute légende
Souvent entouré de mythes et de secrets depuis sa création, le commandement des forces spéciales reste peu connu outre-Rhin, se justifie la Bundeswehr. « Pour la première fois, nous fournissons un aperçu complet de la vie professionnelle quotidienne de la KSK, libre de toute légende, mais toujours en préservant le secret qui est important pour notre survie », explique Dirk von Holleben, chef du marketing de la Bundeswehr.
20 épisodes jusqu’à la mi-décembre
Durant plus de 20 épisodes, qui seront diffusés dans les prochaines semaines, chacun peut alors suivre la vie quotidienne de ces forces. On peut ainsi suivre le personnel de soutien du KSK dans les jungles du Belize ou les commandos lors d’un exercice international des forces spéciales au Danemark. Le tout raconté par le photographe et aventurier Robert Marc Lehmann, qui a accompagné le KSK dans ses déplacements et a prêté son oeil et sa voix, pour décrire leur travail.
(NGV)