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Diplomacy & Crisis News

Helmut Kohl (1930-2017)

Politique étrangère (IFRI) - Fri, 16/06/2017 - 18:04

Helmut Kohl vient de disparaître.

Nous venons d’apprendre la disparition de l’ancien homme politique allemand Helmut Kohl. Chancelier fédéral de 1982 à 1998, il avait été l’un des principaux artisans de la réunification allemande.

Helmut Kohl avait écrit deux articles dans la revue Politique étrangère, disponible sur la plateforme Persée. Le premier, en 1981, avait trait à l’Ostpolitik. Le second, en 1989, portait sur « la question allemande et la responsabilité européenne ». Il se ponctuait par un vibrant appel à la coopération franco-allemande :

« L’Europe de l’avenir ne peut se faire sans une étroite concertation franco-allemande. Dans la période de l’après-guerre, la France et l’Allemagne ont fourni l’exemple unique de deux peuples voisins ayant parcouru qui les a menés d’une rivalité destructrice pour l’Europe entière à une entente également bénéfique pour les autres partenaires européens. Ce chemin, nous continuerons de le parcourir à l’avenir. »

Son ouvrage L’Europe est notre destin. Discours actuels (Éditions de Fallois, 1989) a par ailleurs fait l’objet d’une recension écrite par Jean Klein dans notre revue (Politique étrangère, n° 1/1990).

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Migrations, une nouvelle donne

Politique étrangère (IFRI) - Fri, 16/06/2017 - 12:02

Cette recension a été publiée dans le numéro d’été de Politique étrangère (n°2/2017). Corinne Balleix, chargée de la politique européenne d’immigration et d’asile au ministère des Affaires étrangères et enseignante à Sciences Po Paris, propose une analyse croisée de l’ouvrage de Catherine Wihtol de Wenden, Migrations, une nouvelle donne (FMSH Éditions, 2016, 184 pages), et de l’ouvrage dirigé par Cris Beauchemin et Mathieu Ichou, Au-delà de la crise des migrants : décentrer le regard (Karthala, 2016, 200 pages).

Dans un contexte électoral propice aux surenchères populistes sur les questions migratoires, les ouvrages de la spécialiste française des migrations Catherine Wihtol de Wenden, et de chercheurs de l’Institut national d’études démographiques (INED), Cris Beauchemin et Mathieu Ichou, fournissent, par un décentrement du regard sur les chiffres, l’histoire et la géographie des migrations, des clés salutaires de compréhension de la « crise des migrants » actuelle.

Ces deux livres s’attaquent d’abord à certaines idées reçues sur les migrations. La première est celle de l’invasion. Or, les 244 millions de migrants actuellement recensés dans le monde ne représentent que 3,5 % de la population mondiale, contre 5 % au début du xxe siècle. Les immigrants représentent en 2015 les trois quarts de la population au Koweït ou au Qatar, 15 % en Australie, 10 % en Amérique du Nord et dans l’Union européenne, et 12 % en France. Que les Français évaluent à 30 % la part des migrants dans la population témoigne donc d’une formidable distorsion. Plus de la moitié des migrants en Europe sont des Européens (52 % en 2015), 27 % sont africains, 20 % sont asiatiques. S’agissant des réfugiés, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) estimait qu’en 2014 l’Union européenne accueillait 11 % des 13,7 millions de réfugiés, chiffres inférieurs à ceux de l’année 2000, où l’Europe accueillait 22 % des réfugiés de la planète, le nombre maximum (18 millions) ayant été atteint en 1992. Parallèlement, l’Europe détient en 2016 un triste record, les trois quarts des disparitions de migrants étant intervenues en Méditerranée.

Les chercheurs de l’INED montrent en outre – en dépit de lacunes statistiques sur les migrations de retour et de « re-migrations » – que les migrations ne sont pas si permanentes que cela, 20 à 50 % des migrants repartant dans les cinq années suivant leur arrivée. En France, le solde migratoire de 2013 (140 000) a diminué par rapport à celui de 2006 (164 000). Les retours sont motivés notamment par l’atteinte d’un montant suffisant d’économies, ou de l’âge de la retraite, ou encore par l’évolution de la situation socio-économique et politique dans le pays d’origine ou d’accueil. Cependant, la fermeture des frontières produit une « trappe migratoire » conduisant à la sédentarisation des migrants dans leur pays de destination, en particulier quand ils ont un statut irrégulier.

Par ailleurs, les Subsahariens qui, en 2012, représentaient 12 % des ressortissants de pays tiers en Europe n’abusent pas du regroupement familial. Beaucoup optent en effet pour un mode de vie familial transnational, la venue en France de leur famille leur paraissant coûteuse, tandis que les familles africaines, plus solidaires, s’opposent souvent au départ des enfants et de l’épouse, qu’elles considèrent comme des ressources. Ainsi, dix ans après leur départ en Europe, 49 % des Congolais avaient retrouvé leurs enfants en rentrant chez eux, et 27 % avaient été rejoints par leurs enfants en Europe.

De même, les capacités d’intégration des pays de destination sont plus grandes qu’il n’y paraît. En 1939, environ 500 000 Espagnols fuyant le franquisme se sont réfugiés en France. Initialement mal accueillis car perçus comme trop à gauche, ils se sont pourtant parfaitement intégrés, grâce, notamment à leur participation à la résistance contre le nazisme. De même, en 1962 – certes dans la période des Trente Glorieuses – 600 000 « pieds noirs » ont été rapatriés d’Algérie et ont bénéficié d’une politique volontariste d’intégration motivée en particulier par la dette coloniale. Enfin, en 1975, alors même que l’immigration de travail était officiellement terminée depuis 1974, la France a réinstallé et intégré activement 120 000 réfugiés d’Indochine présentés comme victimes du communisme.

« L’arrivée de migrants n’a au pire, aucun effet sur l’économie, et, au mieux, un effet légèrement positif », car elle augmente la demande et crée de nouvelles opportunités économiques. Les migrants, qui sont souvent plus éduqués que la moyenne de la population de leur pays d’origine, peuvent apporter leurs contributions fiscales aux systèmes sociaux quand ils sont en situation régulière. L’immigration irrégulière, elle, répond à un fort besoin de main-d’œuvre peu qualifiée dans des secteurs d’activité souvent désertés par les populations locales. Ainsi, en Floride, l’économie a-t-elle mis cinq années pour absorber un flux de 125 000 Cubains arrivés en 1980 ; en Israël, l’immigration en provenance de Russie a entraîné une augmentation de 4 % de la population en 1990, mais pas de baisse des salaires ; en Turquie, la vague de réfugiés syriens de 2015 rend certes plus difficile l’accès au marché informel de l’emploi pour les Turcs, mais reste sans effet sur les salaires. […]

Pour lire la recension de Corinne Balleix dans son intégralité, cliquez ici.

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Qui a peur du wolof ?

Le Monde Diplomatique - Fri, 16/06/2017 - 10:31

La promotion de la langue française et de la diversité culturelle et linguistique figure en tête des missions de l'Organisation internationale de la francophonie. Écrivain sénégalais d'expression française, Boubacar Boris Diop écrit également en wolof depuis 2003. Il interpelle les auteurs africains : Prenez la francophonie au mot ! Défendez aussi les langues du continent noir !

Au Sénégal, ma génération a été dans les années 1960 — aussitôt après l'indépendance — la première à étudier ce qu'on appelle, d'un terme vague et quasi insaisissable, la « littérature africaine ». En passant d'Arthur Rimbaud et Honoré de Balzac à Léopold Sédar Senghor et Mongo Beti, nous avions le sentiment de lâcher enfin, pour ainsi dire, l'ombre pour la proie. Même si nous aimions certains de nos nouveaux auteurs bien plus que d'autres, tous ont forgé, chacun à sa façon, notre caractère. En ce temps-là, les frontières de l'Afrique étaient plus mentales que géographiques, on n'avait pas besoin d'y être né pour être accepté comme un de ses fils à part entière ; je ne me souviens pas d'avoir entendu l'un de mes camarades s'interroger, par exemple, sur l'africanité d'Aimé Césaire : c'eût été aussi incongru que de se demander si Frantz Fanon (1) était algérien. Tous deux — le premier, surtout — étaient omniprésents dans les cours, pour notre plus grand bonheur. En revanche, les écrivains anglophones, lusophones et d'Afrique du Nord brillaient par leur absence. On pouvait certes croiser au détour d'une page Mohammed Dib ou Kateb Yacine, Amos Tutuola ou Chinua Achebe, mais ils n'étaient là, j'en ai bien peur, que pour faire bonne mesure. Au pays de Senghor, nous étions déjà au cœur d'une francophonie littéraire dont il allait, sa vie durant, se faire le griot.

À Ibadan ou à l'université Makerere (Kampala), les jeunes Nigérians et Ougandais de notre âge n'avaient d'autre choix que de se résigner, eux aussi, à cette confusion systématique entre la partie et le tout. Lorsque Jane Wilkinson mitonne en 1992 son célèbre Talking with African Writers (« Causeries avec les écrivains africains ») (2), c'est avec les anglophones Tsitsi Dangarembga, Wole Soyinka, Essop Patel et Mongane Wally Serote qu'elle entre longuement en conversation. En somme, les soleils des indépendances s'étaient à peine levés que leurs rayons se tournaient déjà le dos. Ce que Cheikh Hamidou Kane appellera plus tard le « premier matin de l'Occident » en Afrique était vécu comme le choc initial, l'événement hors duquel rien ne méritait d'être pris en compte.

Dans l'espace francophone, Force- Bonté, du Sénégalais Bakary Diallo (3), pose en 1926 la toute première borne d'un champ littéraire dont les contours vont se préciser au cours des décennies suivantes. Les Congrès des artistes et écrivains noirs de 1956 (Paris) et 1959 (Rome) en ont été deux repères importants ; Présence africaine — la revue et la maison d'édition — avait vu le jour dix ans plus tôt. En définitive, un héritage a été légué, que l'on voit se perpétuer tant bien que mal. À Dakar ou à Yaoundé, la presse continue à rendre compte de la parution, presque toujours à Paris, de romans ou d'essais d'auteurs africains, spécule sur les lauréats africains potentiels du Renaudot ou du Femina et, relayant les débats académiques, s'interroge gravement : le « malaxage », si réussi chez Ahmadou Kourouma, du français et du malinké, ne serait-il pas, tout bien pesé, l'avenir de notre littérature ? Quid du « réalisme magique » dans Pedro Páramo, du Mexicain Juan Rulfo, et dans Les Sept Solitudes de Lorsa Lopez, du Congolais Sony Labou Tansi ?

Coupés de leurs compatriotes

Les auteurs vivants ne sont pas en reste. On les voit sur tous les podiums et plateaux de télévision, concentrés ou désinvoltes, mais toujours bien décidés à remettre l'Afrique sur ses pieds. Toutefois, ce n'est peut-être là qu'une façon de parler : en « postcolonie », l'inquiétude pour l'avenir du continent n'est plus la chose du monde la mieux partagée, et certains auteurs, on ne sait trop pourquoi, se mettent en position de tir dès qu'ils entendent le mot « identité ». Ce sont les mêmes qui, pourtant, se vantent à l'occasion de pimenter et de faire délirer une langue française un peu trop sage et pâlichonne à leur goût…

En vérité, ils se seraient bien passés de ces cabrioles stylistiques, mais il est si difficile, pour parler comme le poète haïtien Léon Laleau, de « dire avec des mots de France [un] cœur venu du Sénégal »… Si tout écrivain entretient des rapports orageux avec les mots, dans le cas de l'auteur africain, c'est sa langue d'écriture qui est tout entière problématique. On m'a ainsi demandé d'abord : « Pourquoi écrivez-vous en français ? », puis, après la parution de mon roman Doomi Golo : « Pourquoi écrivez-vous en wolof ? » Personne n'a besoin de lire vos livres pour vous poser ces questions, qui charrient toutes les frustrations d'un échange humain avorté, aux antipodes du projet littéraire.

Il se pourrait bien que la névrose linguistique soit une spécificité francophone : si, au Zimbabwe ou au Kenya — deux exemples choisis au hasard —, on ne fait pas de fixation sur le sujet, c'est en partie grâce à la cohabitation, même ambiguë, entre l'anglais et les langues nationales dans les ex-colonies britanniques. Les intellectuels francophones ont, quant à eux, toujours été plus réticents à se faire à l'idée que leurs langues ne sont en rien inférieures à celle de Molière.

Il serait simpliste, voire injuste, d'expliquer cette attitude par on ne sait quel mépris de soi : des auteurs peu suspects de complaisance pour le néocolonialisme français se sont toujours montrés assez réservés à l'égard des langues africaines, surtout par crainte, semble-t-il, de leur charge tribale. Une amie romancière vivant à Paris me dit préférer un « statu quo réaliste » parce que la moindre controverse linguistique mènerait le Cameroun, son pays, au chaos. Rien n'étant simple, elle m'avouera aussi parler de plus en plus mal sa langue maternelle, qu'elle n'a jamais su écrire. Beaucoup d'écrivains africains nés en Occident ou y ayant grandi se trouvent dans la même situation. Il n'y a donc rien d'infamant dans leur préférence pour le français. Peut-être devraient-ils tout juste s'interdire de dénigrer des langues africaines qu'ils connaissent si mal.

Il est vrai aussi que des esprits chahutés par l'histoire peuvent avoir le sarcasme facile : un roman en soussou, en sénoufo ou en fon, est-ce bien sérieux ? Qui va donc lire ça ? Cet argument de la rentabilité, brandi en toute occasion, paraît frappé au coin du bon sens. En fait, il est totalement insensé, en ce qu'il présuppose une bonne tenue commerciale, purement imaginaire, de la production en langue française... Pour autant qu'on parle de littérature, il n'existe nulle part un commerçant nommé « public » passant commande de sa fiction à un fournisseur et payant à la livraison. À ce compte, un certain Guy des Cars, qui a sans doute vendu plus de livres que Jean-Paul Sartre et Albert Camus réunis, serait le plus grand romancier français du XXe siècle. Dès lors que la trace est l'enjeu, ce sont les textes qui créent le public, et non l'inverse. Stendhal met en évidence ce pari sur la durée lorsque, comparant l'écriture de son roman Le Rouge et le Noir à l'achat d'un billet de loterie, il conclut : « Le gros lot se réduit à ceci : être lu en 1935. »

À quoi il faut ajouter que le risque pour un texte de tomber dans l'oubli est beaucoup plus faible en 2017 que du temps de Stendhal. Tout pouvant être traduit, il importe peu que l'on écrive pour un milliard de Chinois, onze millions de Grecs ou quatorze millions de Sénégalais. Le seul danger ici serait de n'être à l'écoute que des langues les plus parlées, comme l'anglais ou l'espagnol. Des amis et moi-même avons voulu montrer, en lançant aux éditions Zulma le label Céytu, qu'au rendez-vous des cultures toutes les voix ont une égale dignité. Cette collection a en effet pour vocation de traduire en wolof des titres majeurs de la littérature universelle.

L'Afrique est le continent où l'écart entre les auteurs et leurs compatriotes est le plus grand. On en est même venu à douter de l'aptitude de ses langues à la création littéraire. Un tel préjugé est plus répandu qu'on ne croit. En témoigne la mésaventure d'un jeune et brillant chercheur sénégalais occupé à démontrer dans sa thèse que les fictions en kikuyu ou en wolof ne sauraient être que linéaires et leurs intrigues sans surprises, et qui dut complètement changer d'avis en lisant mon roman Doomi Golo, puis Mbaam Aakimoo, de Cheik Aliou Ndao. Ces deux ouvrages font partie d'une riche production en wolof qui ne se porte pas moins bien que sa sœur francophone, pourtant plus présente dans les médias et en librairie.

De telles avancées n'ont pas pu être réalisées à partir de rien. Le scientifique et historien sénégalais Cheikh Anta Diop, nourri dans son enfance de la poésie wolofal — c'est-à-dire le wolof transcrit avec l'alphabet arabe — de Serigne Mor Kayré et Serigne Moussa Kâ, a réussi à faire le lien entre eux et les intellectuels occidentalisés. C'est à leurs écrits qu'il pense lorsque, en 1948, il exhorte les Africains à ne plus se résigner au viol de leur imaginaire. De Cheikh Anta Diop, on peut dire qu'il a été prophète en son pays, puisque tout ce qui s'y fait dans le domaine des langues nationales résulte de ses travaux. C'est aussi de lui que se réclame la linguiste Arame Fal, à qui l'on doit les publications scientifiques si utiles pour l'enseignement du wolof, en particulier dans le supérieur. L'université Gaston-Berger de Saint-Louis s'y est mise bien plus récemment que celle de Dakar, mais elle a innové en se concentrant sur la prose en pulaar et en wolof.

Ce serait toutefois aller trop vite en besogne que de parler de libération culturelle. L'évolution constatée ne résulte pas d'un quelconque patriotisme linguistique. Les militants qui essaient de suppléer aux défaillances de l'État oscillent sans cesse entre un optimisme quelque peu forcé et un profond découragement. De fait, l'élite sénégalaise continue à respecter et à aimer d'un amour sincère le français, seule langue officielle — la Constitution exige d'ailleurs sa maîtrise pour tout candidat à la présidence de la République ! Abondante et de qualité, la création en pulaar, sérère et wolof reste si invisible que, pour tout le monde, on ne peut être écrivain qu'en langue française. En réalité, seul l'effondrement du système éducatif a pu ouvrir une brèche telle que, pour paraphraser Cheikh Anta Diop, le pays peut basculer à tout moment sur la pente de son destin linguistique.

Les textes appelés à rendre possible cette révolution culturelle sont en train d'être conçus dans l'ombre par des auteurs peu intéressés par le miroir aux alouettes d'une réception immédiate. Le Sud-Africain J. M. Coetzee, qui n'est certainement pas ce qu'on pourrait appeler un militant des langues africaines, nous conduit pourtant dans Elizabeth Costello à l'exact point de jonction entre l'esthétique et le politique. L'une des nouvelles de l'ouvrage, intitulée « Le roman en Afrique », met en scène Emmanuel Egudu, écrivain nigérian plutôt vaniteux, qui se fait sèchement remettre à sa place par l'héroïne : « Le roman anglais, lui dit-elle, est avant tout écrit par les Anglais pour les Anglais. C'est son essence même, c'est ce qui fait que l'on parle du roman anglais. Le roman russe est écrit par les Russes pour les Russes. Le roman africain, lui, est écrit par les Africains, mais il ne s'adresse pas aux Africains. Certes, les romanciers africains parlent de l'Afrique, décrivent des expériences africaines, mais j'ai l'impression qu'ils sentent tout le temps par-dessus leur épaule le regard des étrangers en train de lire leur texte. Que cela leur plaise au non, ils se sont résignés au rôle d'interprètes ; ils expliquent l'Afrique. Or comment un romancier peut-il explorer un univers humain dans toute sa profondeur s'il lui faut mobiliser autant d'énergie pour l'expliquer à des étrangers ? »

Ce que Coetzee nous rappelle ici, c'est que l'écrivain reçoit sa langue en héritage et, à force de vouloir la plier à sa volonté, la recrée sans cesse. De proche en proche, il change ainsi l'idée qu'une nation se fait d'elle-même, au point de la réinventer. Cela suppose au départ une intimité absolue avec le dire de la société : nous ne parlons pas notre langue maternelle, nous n'en sommes que l'écho. Que peut-il bien se passer, en effet, dans la tête d'un auteur qui travaille avec des mots qu'il n'entend jamais autour de lui, pas même de sa propre bouche ? Il se prive d'une certaine richesse sonore née de la tension entre une parole vivante et les termes inertes du dictionnaire. Cela pourrait bien expliquer le manque de naturel, souvent déploré, d'une littérature afro-française qui, paradoxalement, n'est ni africaine ni française. Habiter cet entre-deux-langues suscite un mal-être en quelque sorte structurant, dans la mesure où il est à l'origine de bien des révolutions formelles en littérature africaine ; cela explique aussi un projet comme celui du Malien Massa Makan Diabaté, qui se faisait fort de « violer la langue française pour lui faire des petits bâtards ».

Mais quelques auteurs de génie ne peuvent à eux seuls nous masquer le manque de caractère de cette littérature devenue peu à peu une vague commodité stratégique pour Paris. Fait unique, la France consent à financer entièrement la littérature de ses ex-colonies parce qu'il lui faut bien tenir son rang, surtout au moment où elle sent le sol se dérober sous ses pas.

Un tel système de domination, porté par la lourde machinerie francophone, est pourtant en train de donner des signes d'essoufflement. La greffe n'a pas pris, et on se rend compte d'un seul coup que la production africaine d'expression française a toujours été, en définitive, une littérature de transition. Au Sénégal, la littérature wolof pourrait se substituer à elle plus tôt qu'on ne croit. Dans vingt ans ? Dans trente ans ? Peu importe : à l'échelle de l'histoire, c'est à peine le temps d'un clin d'œil. Si c'est devenu inéluctable dans ce pays francophile entre tous, c'est que, tôt ou tard, il en sera de même partout ailleurs en Afrique.

En somme, rira bien qui écrira le dernier…

(1) Lire Salima Ghezali, « Rendez-vous avec Frantz Fanon », Le Monde diplomatique, juillet 2012.

(2) Jane Wilkinson, Talking with African Writers : Interviews with African Poets, Playwrights and Novelists, James Currey, Londres, 1992.

(3) Bakary Diallo (1892-1979) relate dans ce livre son expérience de tirailleur sénégalais en 1914-1918.

Arms for the World

German Foreign Policy (DE/FR/EN) - Fri, 16/06/2017 - 00:00
(Own report) - German arms exports are leveling out at a new record high, as indicated by the Arms Export Report for 2016 and the first four months of 2017, published last Wednesday in Berlin. According to the report, the German government has approved €6.85 billion worth of military equipment sales in 2016 - one billion less than in 2015 but significantly more than the fluctuations around five billion in the overall value of arms exports since 2003. The main recipients of German deliveries include countries of the Arab Peninsula, particularly Saudi Arabia and the United Arab Emirates, with the aim of forming a military counterforce to Iran. For over two years, they have been waging war against Yemen - also using German weapons. Berlin has also approved the sale of patrol boats to Saudi Arabia, which can be used to escalate the famine blockade around Yemen. Algeria and Egypt are receiving German warships. A closer cooperation with the navies of these two countries would enable Berlin and Brussels to complete their control over the EU's southern flank. German arms recipients include several countries around the Pacific basin, prone to become Western partners in the event of a conflict with the People's Republic of China.

Energy Security in North Korea: From Defiance to Survival

Foreign Policy Blogs - Thu, 15/06/2017 - 20:50

With our ever-growing needs for electricity and our consumption habits, night time is not like what it was a few decades ago. Now our cities are as illuminated as in the middle of the day. Hence the astonishment in discovering this photograph of North Korea plunged into complete darkness.

It is easy to imagine the surprise of astronauts aboard the International Space Station (ISS) when they photographed East Asia and saw a ‘black hole’ between China and South Korea. No, the Sea of Japan has not joined the Yellow Sea by drowning North Korea. According to the NASA: “Coastlines are often very apparent in night imagery, as shown by South Korea’s eastern shoreline. But the coast of North Korea is difficult to detect. These differences are illustrated in per capita power consumption in the two countries, with South Korea at 10, 162 kilowatt hours and North Korea at 739 kilowatt hours.”

How can we explain the total blackness of this country of 25 million inhabitants? In a few words, the legacy of the Kim Dynasty.

Pyongyang, the capital of North Korea (DPRK), offers the surreal spectacle of immense, endless and wide arteries definitely devoid of any traffic, lined with sinister gray buildings and soulless. There are few people in the streets of this capital. Where are the shops? The crowd, the frenzy that one observes in all Asian cities?

One symbol: The Ryugyong Hotel, a sort of stylized Russian mountain that had to peak at 330 meters and offer 360,000 square meters on 105 floors has long offered the spectacle of a desolate concrete blockhouse structure. Started in 1987, the construction was stopped in 1992 due to frequent power cuts as the government was going through a lot of financial hardship. It was during these same years that North Korea went through a severe famine.

How is this possible in a country where resources abound? The industrialization of Korea has essentially served to over-militarize the country. The figures are eloquent: first army in the world in number of military per thousand inhabitants and fifth army in the world in terms of numbers. Moreover, DPRK is now the 9th state to possess nuclear weapons, which raises the concern of the international community.

On the agricultural side, the picture is even more dramatic. North Korea has gone through a series of appalling natural disasters: floods and droughts, but aggravated by the implementation of agrarian reforms in Moscow: massive deforestation, intensive agriculture have washed out and deeply impoverished the soil. To obtain oil at preferential tariffs, North Korea had to trade agricultural commodities. Its situation deteriorated further after the collapse of the USSR. Russia naturally stopped the financial aid provided to the people’s republics during the communist era.

With a mineral resource estimated at 24 times that of South Korea, the DPRK has a major economic asset, particularly with a view to the reunification of the peninsula, since it would restore complementarity between the North (where most of the heavy industries were located in 1945) and the South, which traditionally harbors the best agricultural land.

According to the Bank of South Korea, the mining sector accounted for 8.7% of the DPRK’s gross domestic product in 2004: if energy resources (coal) are the main resource in mining production, North Korea is also rich in several strategic minerals: its reserves of magnesite, tungsten, graphite (2006 production: 32,000 tons, 6% of world reserves), gold (2006 production: 2 tons) and molybdenum (ores) place the DPRK in the first rank worldwide. The North Korean subsoil also contains tungsten, mercury, phosphates, silver, fluorine, titanium and molybdenum.

North Korea is second country in the world (after China) for magnesite reserves, estimated at 490 million tons. Annual production of magnesite (10% of the world total) ranks North Korea third in the world.

In addition, there are offshore oil reserves, not exploited, in the Western Sea, whose location straddles the Chinese and North Korean maritime areas. Coal production (mainly anthracite, with reserves estimated at 1.8 billion tones), or 23 million tones per year, is allocated in 600 mines. It is concentrated in the areas of Kaechon, Pukchang, Sunchon, and Tockchon, in South Pyongan, and Saebyol in North Hamgyong. Some of the production is exported to China (2.27 million tones in January-December 2005, accounting for nearly 10% of China’s coal imports).

Early to mid-1960s the north Korean economy actually outpaced that of South Korea. During this time both sides of the Cold War were pouring aid into both countries in an attempt to show that their system was superior. South Korea grew fast, but North Korea held its own.

Iron resources in 1970 had made the North Korean iron and steel industry the fourth most powerful in Asia, after Japan, China and India. At the end of the 1980s, the extension of the Kim Chaek Iron and Steel Complex had raised the annual steel production to 7 million tons. If energy shortages subsequently affected production capacity, they tend to be restored: in 2007, steel production was estimated at 1.23 million tones (up 16% from 2004) but decreased to 1.079 million tones in 2015. Iron production (5 million tons in 2005) places the DPR Korea at 18th place worldwide.

Copper is produced mainly in the Musan mine (North Hamgyong), the largest in Asia (its reserves are estimated at between 3 and 7 billion tons), which also produces iron, and the Unryul mine (South Hwanghae). Copper ore production amounted to 4.91 million tones in 2005 (of which 1 million tones were exported to China in 2005, compared to 600,000 tones in 2004) and 5.13 million tones in 2007.

In the case of non-ferrous metals, other production (zinc: production 2006 67,000 tons, lead: production 20,000 tons 2006) is produced in the Komdok mine (South Hamgyong) and refined in Mungyong. Production of fluoride (12,000 tons) ranks North Korea fifteenth in the world.

Given North-South complementarity in the mining sector, this sector has given rise to several inter-Korean projects, carried out on the South side by the state-owned Korea Resources Corporation (KORES), in particular for the exploitation of graphite.

The mining resources of the DPRK are also being developed in partnership with foreign countries, with China and Germany among others, in particular to modernize production structures. In 2005, a Sino-North Korean agreement (between the Chinese Metal Mining Company and the DPRK Ministry of Foreign Trade) was the first in the mining sector outside of a special economic zone. Anthracite mines in Yongtung, whose annual production amounts to 1 million tons. On December 12, 2008, an agreement in the coal and chemical industry was signed between China and North Korea.

The UK’s Ericon Company and the Dancheon mining bureau in North Korea had also agreed to set up a joint management company. According to the agreement, the Ericon Company was to invest about 400 million Euros in a mine, magnesium plant, and the Dancheon Port; however, this project was terminated without any results.

It is difficult for foreign investors to participate in the management of joint companies with North Korea. Foreign investors want to establish their own companies and operate the mines. The rights of investors to ownership, exports, and other key business arrangements related to the North Korea mining industry are unclear. North Korea is not forthcoming about its mining projects and will not provide information without prior investment agreements with foreign companies.

Additionally, the antiquated infrastructure (including power, rail, and ports) and resulting low productivity make mining operations difficult for foreign investors. North Korean groups specialize in production and trade for the mining sector, such as the Korea Kwangsong Trading Corporation and the Korea General Magnesia Clinker Industry Group

Attempt to expand oil capacities

As of March of this year, North Korea has expanded its oil import capacity as Washington seeks to tighten sanctions on its nuclear and ballistic missile programs. The expansion of the oil terminal in Nampo, a port city on the west coast of North Korea, has been under way since October 2015. The report is based on satellite images taken on October 4, 2015, and again on October 4, 2016.

It seems that North Korea has built a second wharf at the oil terminal and the dry land between the two docks should be used for a new oil terminal and storage facilities. North Korea imports 90% of its energy from China and crude oil is considered a vital link for the army and economy of Pyongyang.

Ed Royce, chairman of the Foreign Affairs Committee of the US House of Representatives, introduced in March new legislation to significantly strengthen sanctions against North Korea, including sanctions against those supplying crude oil and other products related to the North.

Seoul welcomed the legislation by saying it could be a “strong message” to exert “tangible pressure” on North Korea.

According to Chinese Customs data, in the first quarter of 2017, imports from China to North Korea increased by 18.4% compared to the same period of last year, while its exports to North Korea increased by 54.5%. From January to March 2017, China’s trade with North Korea amounted to 8.4 billion yuan (1.15 billion euros). China’s trade surplus with North Korea reached 1.52 billion yuan (208 million euros)—an increase of 37.4%.

From 19 February, China suspended imports of North Korean coal. It did not import it at all in March. As a result, in the first quarter of 2017, coal imports from North Korea were only half of what they were a year ago. According to Reuters, following the implementation of this suspension, Beijing ordered commercial companies to return the cargo of coal from North Korea.

As North Korea reach out to new friends late April, it urged Algeria to help it exploit its oil. This is what justifies the visit in the Algerian capital of Sin Hong Chol, the deputy North Korean Minister of Foreign Affairs. The official proposed to the Algerian authorities to look at the opportunities offered by his country, particularly in the field of exploration.

It was also an opportunity for the official to call for the strengthening of energy cooperation between the two countries, while highlighting his country’s skills in the field of hydrocarbon processing. With a total embargo on oil imports because of its nuclear tests, North Korea could, if indeed it received the aid of Algeria, develop a solid hydrocarbon industry in order to emancipate itself from this blockade.

According to the Energy Information Administration (EIA), as of July 2015, North Korea has no proven oil reserves or petroleum and other liquids production. During North Korea’s industrial peak in the 1970’s and 1980’s, the country was able to import oil from China and the Soviet Union at below market prices. Following the end of the Cold War, these deals ended, and North Korea’s oil consumption dropped from 76,000 barrels per day (b/d) in 1991 to 17,000 b/d in 2013.

It is difficult to get an exact estimate of the amount of oil imported into North Korea each year, states the EIA. Some estimates report that North Korea imports more than half of its oil from China and some volumes from Russia. North Korea has the capacity to refine 64 thousand barrels a day, however as a result of the economic decline, has utilization rates below 20 percent. Despite this, North Korea is able to refine enough crude oil to meet some of their domestic demand.

Patricia Schouker is an energy analyst based in Washington DC and an Associate Member of New College at Oxford University. Twitter: @Patricia_Energy.

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‘All of us can and must be prepared to speak out’ to halt abuse of older persons – UN rights expert

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 18:39
Many older persons are at risk of being abused by their own relatives, a United Nations human rights expert has warned, urging greater vigilance and more reporting of suspected cases, especially since many fear on the part of older persons may not speak up for fear of reprisals – or to protect family members from criminal prosecution.

Yemen: As humanitarian crisis deepens, Security Council urges all parties to engage in peace talks

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
Expressing grave concern about the humanitarian situation in Yemen, the United Nations Security Council today adopted a Presidential Statement calling on all parties to engage constructively and in good faith to find a peaceful solution to the conflict in that country.

General Assembly approves creation of new UN Counter-Terrorism Office

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
The General Assembly today approved the establishment of a new United Nations office to help Member States implement the Organization&#39s global counter-terrorism strategy.

One in five children in rich countries lives in poverty, UNICEF 'wake-up call' report shows

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
One in five children in high-income countries lives in relative income poverty, and an average of one in eight faces food insecurity, according to a new report released today by the United Nations Children&#39s Fund (UNICEF).

Syria: UN disarmament chief reports progress in destroying chemical weapons facilities

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
The United Nations High Representative for Disarmament Affairs, Izumi Nakamitsu, reported to the Security Council that "some progress" has been made over the past month in the implementation of its 2013 resolution on the elimination of chemical weapons in Syria.

Independent UN probe reveals 'cruel and brutal nature' of human rights violations in Burundi

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
A United Nations-appointed panel of experts investigating human rights violations in Burundi today released the latest findings of their probe, noting that their initial fears concerning the scope and gravity of these abuses since April 2015 have been confirmed.

Switzerland tops world innovation index; India and other emerging markets on the rise – UN agency

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
Innovation is a key development tool that could boost economies and provide a way out of the growing squeeze on the world&#39s food resources &#8211 one of the major challenges of the 21st century &#8211 according to a new United Nations report.

UN cooperation with African Union must be institutionalized, less 'ad hoc,' Security Council told

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
The United Nations must move towards a more institutionalized approach for the joint planning, mandating, financing and supporting of African Union (AU) peace-support operations, the Secretary-General&#39s Chef de Cabinet told the Security Council today.

UN envoy strongly condemns attack on popular restaurant in Somali capital

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
The United Nations envoy for Somalia today strongly condemned last night&#39s attack on a pizza restaurant and an adjacent hotel in Mogadishu that reportedly killed at least 19 people.

UN expert urges 'bold action' to address raft of human rights abuses in Eritrea

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
Actions against severe human rights abuses meted out to Eritrean citizens must not be delayed, a United Nations rights expert has warned in a new report to the Geneva-based UN Human Rights Council.

Myanmar: UN expert urges Government to do more to protect rights of all children

UN News Centre - Thu, 15/06/2017 - 07:00
A United Nations human rights expert today urged the Government of Myanmar to do more to protect children in the country, citing cases of detention and alleged incidents of child labour and marriage.

Security Council briefed on proposal to reduce number of AU-UN troops in Darfur

UN News Centre - Wed, 14/06/2017 - 07:00
The African Union (AU) and the United Nations are proposing 44 per cent and 30 per cent reductions in their troop and police presence in Sudan&#39s Darfur region as a step towards an eventual exit, a senior UN peacekeeping official told the Security Council.

Political will, financial support needed to bolster new approach to cholera in Haiti – UN deputy chief

UN News Centre - Wed, 14/06/2017 - 07:00
The United Nations deputy chief today called on Member States to fund the Organization&#39s new strategy to counter cholera in Haiti, stressing that the initiative is facing a critical shortage of resources.

Closing gender gap at work can open doors to incredible benefits, UN report shows

UN News Centre - Wed, 14/06/2017 - 07:00
Reducing gender disparities at workplaces by 25 per cent by 2025 could inject nearly $5.8 trillion into the global economy and boost tax revenues, a new report released today by the United Nations International Labour Organization (ILO) has revealed.

Hundreds of thousands in eastern Ukraine at grave risk after water supplies disrupted – UN aid chief

UN News Centre - Wed, 14/06/2017 - 07:00
Raising alarm over lack of safe drinking water for hundreds of thousands of people on both sides of the so called contact line in Donetsk Oblast of eastern Ukraine since 11 June, the top United Nations relief official today called on all parties to the conflict to abide by their obligations under international law and ensure that civilian areas and infrastructure are not targeted.

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