Jean-Claude Juncker et Emmanuel Macron à Tallinn, en prise forte, sous le regard, perdu, de Theresa May (UK). En arrière plan, Charles Michel (BE) et Xavier Bettel (Lux) admiratifs de ce nouveau couple (crédit : Commission européenne)
(B2) Entre le discours de l’état de l’Union prononcé par Juncker le 13 septembre (lire : Juncker appelle à l’audace. Ses propositions pour l’Europe politique) et les propositions de Emmanuel Macron à la Sorbonne le 27 septembre (lire : L’Europe de 2024 selon Macron : souveraine, stratégique, autonome), il existe de singulières « convergences » que ce soit sur le commerce ou la justice, la sécurité et la défense ou le marché unique, et les institutions.
C’est la conclusion à laquelle arrive le Centre européen de stratégie politique (ESPC), le think-tank de la Commission, dans un papier (non signé), qui se livre à une courte étude comparée, secteur par secteur, des deux discours et des propositions qu’ils contiennent. Sur nombre de secteurs, les différences sont infimes ; on peut davantage parler de « nuances » ou de « compléments » plutôt que de contradictions d’ailleurs.
Les principales différences se marquent sur la zone euro : Macron propose un budget et une assemblée pour la Zone Euro, ainsi qu’un ministre doté de larges compétences, ce qui nécessite une modification des Traités. Un point qui ne rebute pas le président français, au contraire. Sur la défense, on note aussi que le président français va plus loin proposant une force commune, dotée d’un budget et d’une culture stratégique commune (article à suivre).
(NGV)
Télécharger l’étude de l’ESPC
(B2 – exclusif) Les ambassadeurs des 28 ont été convoqués ce matin à 10h30 pour une réunion spéciale… L’opération AIFOS déployée en Méditerranée contre les trafics d’êtres humains (1) vient d’être victime de cyber-attaques. Et ce n’est pas la première fois. La situation est tendue. L’Union européenne est en butte depuis « le mois d’août » à des cyberattaques de plus en plus pointues. Les spécialistes du renseignement ont fait passer le message : ces attaques seraient attribuées à Froterre, un pays « quasi-démocratique », « de plus en plus attentif à son pouvoir économique mondial potentiel et à sa force militaire ». Etc. Voilà le pitch (le thème) qui est au centre de l’exercice qui rassemble les 28 aujourd’hui.
Un exercice qui met en jeu, tout le monde l’aura reconnu, la Russie (alias Froterre, cf. encadré), un mouvement extrémiste religieux type Daesh (alias Nexsta, comme Newborn Extremist State), et un mouvement anti-globalisation AGG qui accuse l’Union européenne de militariser la Méditerranée et contrôle plusieurs ONG. Car dans les jours prochains, le rythme des crises va s’accélérer. Durant plusieurs jours, des « incidents » de type cyberattaques frappent l’opération en Méditerranée, et ses centres de commandement. Les médias sociaux s’en sont emparés diffusant des « fausses nouvelles ». Depuis, le trafic pétrolier est perturbé.
Deux en un
C’est l’originalité de cet exercice. Il se déroule, pour la première fois, des deux côtés de Bruxelles, autour du rond point Schuman (côté UE) et du boulevard Léopold (côté OTAN), de façon « simultanée et coordonnée », selon la terminologie officielle avec l’exercice annuel de l’OTAN « CMX17 ». D’où le nom de PACE donné à l’exercice européen, comme Parallel And Coordinated Exercice.
Les deux organisations viennent « injecter » dans l’exercice de l’autre divers incidents, destinés à tester à la fois la solidité du processus de décision et la bonne coopération entre les deux organisations. Chacun tient ses réunions et répond aux évènements, selon ses propres procédures internes, mais ils s’échangent des informations et interagissent.
Du côté de l’UE, ce ne sont pas seulement les structures politico-militaires habituelles (état-major de l’UE, ambassadeurs du COPS, services de planification du SEAE, la cellule de fusion hybride) qui sont appelées à jouer leur rôle. Il s’agit de tester aussi le système de coordination des États membres (dit IPCR comme Integrated Political Crisis Response) comme le dispositif de réponse de crises de la Commission européenne, pour l’aspect économique ou civil (le système ARGUS d’alerte rapide et le mécanisme de protection civile) y compris les services chargés de la communication (StratComm ou porte-paroles). Un exercice similaire est prévu entre ambassadeurs de l’OTAN début octobre, appelé à se dérouler durant une vingtaine d’heures.
A suivre…
(Nicolas Gros-Verheyde)
NB : les ministres de la Défense s’étaient livrés, sur le même thème, à une petite simulation lors de leur réunion informelle à Tallinn, début septembre. Lire : A Tallinn, les ministres jouent à la guerre cyber hybride (V2)
Un exercice tourné contre la menace russe
Le descriptif de l’Etat « Froterre » dans les documents distribués par les Européens ne fait aucun doute sur la ressemblance avec la Russie. FROTERRE est un « pays quasi-démocratique de plus en plus attentif à son pouvoir économique mondial potentiel et à sa force militaire ». Il « recherche donc un rôle géopolitique accru, mais ses intérêts économiques et ses valeurs sont opposés à ceux de l’UE et du reste du monde occidental ». Le gouvernement FROTERRE dispose « de capacités cybernétiques offensives très avancées et contrôle les pirates informatiques, des hacktivistes et des médias nationaux ». Ces groupes diffusent « des outils de développement de la propagande pour les agences de renseignement et piratent des réseaux et des bases de données à l’appui des objectifs de sécurité de FROTERRE ». Froterre est « fréquemment accusé de procéder à des attaques hybrides / cyberespécifiques pour harceler les pays occidentaux et affaiblir leur influence économique et géopolitique ». Mais « la plupart de ces attaques sont bien inférieures au seuil d’une guerre hybride / cybernétique ». (NB. Ce qui rend toute réaction à haut niveau difficile). La ressemblance est poussée à l’extrême, y compris dans le calendrier politique. « Dans le but d’accroître sa légitimité vis-à-vis de la communauté internationale, le président de FROTERRE a déclaré que les élections auront lieu en 2018. Mais il n’y a qu’une opposition limitée qui, dans une large mesure, est contrôlée par le gouvernement. » Etc.
(1) Tout le monde aura reconnu l’anagramme de l’opération Sophia,
(2) Tout n’est pas encore tout à fait fluide entre les deux organisations. Ainsi la note de l’exercice de l’OTAN n’a pas été diffusée à tous les États membres de l’UE… Question chypriote oblige. La Turquie bloque toujours les échanges d’informations et la coopération institutionnelle entre les deux organisations.
Un stage d’aguerrissement en forêt tropicale (crédit : DICOD / EMA)
(B2) C’est une accusation portée de temps à autre, particulièrement à gauche ou chez les alternatifs, l’Union européenne serait « en voie de militarisation rampante ». Accusation reprise de temps à autre, même la plus sérieuse. Un slogan ou une réalité ? B2 a essayé d’y voir plus clair.
Que vise-t-on par militarisation ?
Cette assertion ne vise pas certains projets – qui pourraient être jugés attentatoires aux libertés publiques, comme les échanges d’information, le contrôle aux frontières, le déploiement de forces de police dans les rues ou le financement de certaines actions de sécurité par l’Union européenne (1). Non. Il vise en fait les derniers projets présentés par la Commission européenne et de la Haute représentante, deux en particulier, qui doivent être financés sur les fonds communautaires : 1° la CBSD (qui vise à financer les équipements des armées de pays tiers) ; 2° le fonds européen de défense, et en particulier le programme proposé par la Commission européenne, le 7 juin dernier pour développer un programme de soutien à la recherche et développement dans le domaine de la défense.
Y-a-t-il militarisation de l’Union européenne en général ?
La sécurité et de la défense est devenue aujourd’hui une des principales priorités européennes. Ce qu’elle n’était pas avant (ou à de très rares reprises). C’est un fait incontestable. Dans tous les discours des responsables européens, qu’il s’agisse de l’exécutif (Commission européenne ou Haut représentant), des États membres ou des parlements (nationaux et Parlement européen), cette priorité est affichée comme une volonté nouvelle, de résilience, face aux menaces qui sont montées en flèche (Est et Sud, États faillis, terrorisme, crise migratoire), et comme une volonté d’afficher un renouveau de l’intégration européenne, face à certaines remises en cause (Brexit, entrisme de pays tiers, etc.). Ce n’est donc pas vraiment une militarisation qui est visée mais une plus grande sécurité, une plus grande protection. Un domaine où l’Europe affichait peu sa présence.
Peut-on parler de militarisation… pour le projet de CBSD ?
C’est plutôt audacieux voire tendancieux. Tout d’abord, la CBSD, c’est un projet de « capacity building » (renforcement des capacités) pour réformer les forces de sécurité des États tiers (la fameuse RSS qui est une des doctrines phares de l’ONU en matière de démocratie et de paix).
Ensuite, les montants engagés pour la CBSD (qui vise à renforcer les capacités des forces des pays tiers) sont plus que modestes (30 millions d’euros par an en moyenne). A comparer au budget engagé pour les développement (environ 8 milliards par an !) on est dans un ratio de 1 à 250. Ce montant n’est d’ailleurs pas pris sur le budget « développement » mais sur l’instrument de stabilité qui d’ores-et-déjà pour objectif plus sécuritaire que de développement (2).
Peut-on préciser également que cet argent ne sera pas destiné directement aux pays tiers, il ira à des organismes internationaux ou européens (les délégations de l’UE, les missions PSDC) ou nationaux (comme Expertise France ou le GIZ allemand) à charge pour eux de contribuer à renforcer les capacités. Tout cela sous le contrôle tant du Parlement européen que de la Cour des comptes européenne.
Enfin, l’octroi de cet argent n’est pas destiné est entouré de conditions assez strictes. Il a ainsi pour objectif de fournir des équipements non létaux, destinés à renforcer la structure et le commandement des forces de défense ou de sécurité intérieure. Un certain nombre de garde-fous ont été mis en place, interdisant expressément les équipements livrés ne peuvent pas être offensifs ou létaux. On n’a jamais tué avec un gilet pare-balles ou un hôpital de campagne !
Certes, on pourrait objecter qu’en soutenant ainsi les forces de sécurité, on favorise indirectement la militarisation. Mais jusqu’à présent les Hommes n’ont pas eu vraiment besoin de gilets pare-balles ou de systèmes informatiques pour aller massacrer leurs semblables à la machette, à l’arme automatique ou à l’explosif.
Peut-on parler de militarisation… pour le fonds de défense ?
Le fonds de défense a un objectif fondamental : soutenir directement la recherche et le développement pour l’industrie de défense en Europe. C’est une nouveauté, un vrai tabou qui est tombé. Il y a là un vrai débat de société. L’Union européenne doit-elle se cantonner à la politique agricole ou à la politique régionale ou a-t-elle une vocation plus générale, qui englobe tous les sujets, notamment tenant à la sécurité de ses citoyens ? L’Europe doit-elle avoir une défense autonome, dépendre des Américains ou de l’OTAN, ou pas de défense du tout ? L’Union européenne a-t-elle un rôle à jouer, en matière de soutien ou de financement, ou doit-elle laisser tout le pouvoir aux États ? A-t-elle la possibilité, le rôle de faciliter la naissance de champions européens ? Peut-elle concourir à des économies à la marge, ou une plus grande efficacité ? Tous ces questions méritent d’être analysées et débattues. Mais parler de militarisation au niveau européen est assez original quand on sait que ce type de débat a très peu court dans chaque pays alors que ceux-ci ont une armée nationale…
Les sommes annoncées sont-elles exagérées ?
Il faut aussi mettre en relation les sommes mises sur la table restent relativement modestes. Le budget annoncé pour 2019-2020 est, pour l’instant, modeste : 250 millions d’euros par an pour la phase pré-industrielle et 30 millions pour la recherche pure. Soit 280 millions d’euros au total par an. A mettre en relation avec un budget de l’ordre de 158 milliards d’euros, on est dans l’ordre de 0,18% du budget. Parler de militarisation est assez osé ! A l’horizon 2021, les montants (annoncés) devraient être plus importants : on prévoit un montant de 1,5 milliard d’euros par an au total sur ces deux volets (3). Rapporté au budget européen, cela reste raisonnable : environ 1% du budget. On est bien loin de l’objectif politique défini par les pays de l’Alliance atlantique.
Les montants vont-ils financer les équipements ?
Non. Cet argent ne sera pas consacré à l’équipement des armées mais à développer des technologies à usage militaire (mais qui pourraient tout aussi bien être utiles pour les civils, cf. internet), dont l’Europe manque actuellement. La problématique actuelle, c’est que le continent devient de plus en plus dépendant de l’extérieur (USA, Israël, voire Russie) pour sa défense propre et que chaque État est incapable de consacrer beaucoup plus d’argent à la recherche.
(Nicolas Gros-Verheyde
(1) L’Europe finance déjà – au titre notamment du Fonds de sécurité intérieure – des projets à forte intensité sécuritaire : le renforcement des frontières — notamment avec la vidéo-surveillance ou les grillages aux frontières de l’espace Schengen –, des projets anti-terroristes (avec équipement, y compris en armements létaux des polices des pays membres), etc.
(2) A noter que les mouvements sont plutôt inverses : le budget PESC (qui finance des actions de maintien de la paix de l’UE, la PSDC) a ainsi été ponctionné en 2016 comme en 2017 de 85 millions d’euros une année vers l’instrument de voisinage, l’autre année vers l’instrument de pré-adhésion.
(3) Les sonneurs d’alarme prennent en joue la somme de 5 milliards d’euros. C’est un chiffre qui est fallacieux (il est vrai utilisé par la Commission européenne elle-même pour gonfler son bilan). Car il comprend à la fois le budget communautaire et les sommes des budgets nationaux qui seraient dépensées en coopération de défense. Lire : L’Europe met 40 milliards pour la défense à partir de 2021 ? Halte au feu
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(B2) L’armée néerlandaise souffre de pénurie, même dans les unités d’élite comme les commandos (Korps Commandotroepen). Selon RTL qui a publié un inventaire confidentiel des forces armées, « il manque à peu près tous les types d’équipement. Véhicules, radios, armes, vision nocturne et munitions, tout est hors d’usage ou pas en stock. » « L’équipement est vieux et usé et donc dangereux. » Une pénurie que certains exercices de tirs ont été réduits. Quant à la formation de nouveaux commandos, elle est interrompue jusqu’au début de l’année prochaine, car il y a trop peu d’équipement pour l’entraînement.
Les opérations extérieures atteintes
Même lors des opérations extérieures, comme en Irak, la situation apparait très tendue. Les Bushmasters (véhicules blindés) ne sont pas utilisables à cause du manque de maintenance et des pièces. Un pistolet lourd de calibre .50, a explosé pendant un exercice.
Une solution : réduction des envois en opération
Le commandant des forces armées Tom Middendorp ne nie pas le problème. « Il existe un vaste problème d’employabilité, qui est connu ». Pour y pallier, actuellement, la solution est simple, selon le général. « Je n’envoie pas de mission ou de façon plus courte, ou avec moins de personnes en opération. Les gens en opération doivent bien faire leur travail ». Des budgets ont été débloqués pour pallier à quelques situation. Mais pour revenir à un niveau correct, il faudra plusieurs années. « Nous avons besoin de toute la période budgétaire pour le faire de manière parfaite ».
NB : les Pays-Bas ont un des plus bas taux de dépenses en matière de défense des pays de l’OTAN (1,17% en 2017). Et côté équipements, la donne n’est pas fameuse. Certes par rapport à 2014, la progression est importante : 16,80% du budget consacré à l’équipement en 2017 contre juste un peu plus de 10% en 2014. Mais il y a du rattrapage à effectuer.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) « Un adjudant du 13e régiment de dragons parachutistes est mort au Levant dans l’accomplissement de sa mission ». Le message émanant de l’état-major des armées est court et succinct et plutôt flou sur la zone de combat (Le Levant est vaste).
Le militaire français est « mort dans un incident au combat au Moyen-Orient » dans le cadre de la « coalition » (conduite par les Américains) complète un communiqué de l’opération Inherent Resolve, parvenu à B2, sans plus de détail sur la zone. Interrogé l’officier de permanence renvoie vers les autorités nationales pour tout détail supplémentaire notamment les circonstances du décès. Un communiqué de l’Elysée a confirmé la notion de combat en restant tout aussi évasif sur le lieu se contentant de préciser le moment, ce samedi 23 septembre « au matin ».
Un engagement dans les combats
C’est la première fois depuis le début de l’intervention militaire française en Irak dans le cadre de la coalition dirigée par les Américains qu’un militaire français meurt au combat dans la région. De manière incidente, on constate ainsi que les militaires français ne font pas que du training (formation) ou du mentoring (encadrement), ou des frappes aériennes, comme souvent mentionnés, mais sont impliqués plus directement au sol, sur le terrain.
Ce n’est pas illogique. ce type d’opérations ne se mène pas sans forces spéciales au sol. Le 13e RDP est un régiment de parachutistes, basé à Souge (Gironde), et spécialisé dans le renseignement.
Intégré dans la brigade des forces spéciales de l’armée de terre, ses hommes ont prêté main forte à toutes les opérations extérieures, que ce soit au Sahel, en Côte d’Ivoire, en Afghanistan ou en Somalie. En général, il opère sous la direction du COS (commandement des opérations spéciales), voire de la DRM (direction du renseignement militaire).
La coalition Inherent Resolve est actuellement engagée sur plusieurs points, notamment à Raqqa en Syrie et à Tal Afar et surtout à Hawijah, ville située dans la vallée de l’Euphrate, en Irak, occupée depuis 2014 par l’état islamique. Les forces de sécurité irakienne, épaulées par les alliés, y ont entamé une vaste offensive depuis jeudi (21 septembre).
(Nicolas Gros-Verheyde)
Au QG tactique (crédit : DICOD / EMA)
(B2) Britanniques, Français et Néerlandais viennent de lancer l’opération commune pour faire face aux ouragans en cascade qui ont frappé les Caraïbes. Objectif affiché de l’opération « Albatros » : « mieux coordonner leurs efforts face au défi logistique auquel ils sont confrontés », dans leurs territoires respectifs (1).
Un gros hub logistique
Cette structure, baptisée Multinational Caribbean Coordination Cell (MNCCC), entend « établir et suivre en temps réel la situation logistique dans la zone ». Le but est « d’identifier des options de mutualisation et d’optimisation au profit des différentes opérations nationales en cours » ainsi que de tous les autres acteurs sur place (organes publics, organisations internationales et ONG), comme l’explique un communiqué des armées françaises. En pratique, on va dresser la liste des moyens disponibles sur place (navires, aéronefs et hélicoptères), ainsi que les transports stratégiques (mer, air) venant d’Europe, pour éviter des frais inutiles et avoir plus de poids sur place.
Un QG au niveau stratégique
Deux quartiers généraux vont être ainsi établis. Le premier sera établi au niveau « stratégique » (politico-militaire), chargé de « centraliser et suivre les informations concernant les mouvements ‘longue distance’, entre l’Europe et les Caraïbes. Il pourrait être établi en liaison étroite avec le QG d’EATC, le centre de commandement du transport européen, établi à Eindhoven aux Pays-Bas et qui regroupe six pays européens (mais pas le Royaume-Uni). Il diffusera ce qu’on appelle en termes militaires une « Full Logistic Strategic Picture (FLSP) » à l’échelon opérationnel.
Un PC tactique à Curaçao
Le second sera établi au niveau opérationnel, à Curaçao sur le site de la base navale néerlandaise de Parera. Ce petit PC de coordination, qui fonctionne déjà de manière temporaire, selon nos informations, aura pour mission d’assurer « la synthèse et le suivi des déploiements, dispositifs, ressources et mouvements militaires sur l’ensemble des Caraïbes ». Il aura ainsi la faculté de répondre en temps réel « à des besoins exprimés par les autorités nationales » en repérant au préalable les moyens de transport disponibles. Ce PC sera placé sous les ordres d’un colonel français et rassemblera une vingtaine de militaires en provenance des armées des trois nations impliquées.
Une décision prise au niveau politique
La décision de créer cette structure de coordination a été prise, très récemment, cette semaine, en marge de l’assemblée générale des Nations unies. Mais elle suit quelques entretiens entre ministres, notamment à Tallinn, en marge du gymnich, la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères le 7 septembre.
Une première capacité opérationnelle est attendue pour le 24 septembre, la pleine capacité est attendue, elle, pour le 27 septembre. La durée de la mission devrait être d’un à deux mois.
Une étape importante
C’est une « étape importante » pour le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Bert Koenders. « On peut se mettre d’accord sur tout au niveau des gouvernements, mais c’est l’aide sur place qui est le principal. Il y a des petites îles avec beaucoup de questions pratiques et spécifiques. » a-t-il souligné au micro de la chaîne de télévision NOS. Le Néerlandais reconnait cependant qu’entre les deux parties de l’ile de Saint-Martin, française et néerlandaise, on ne se parle pas vraiment beaucoup. « Entre les Français et les Néerlandais, les relations sont bonnes, mais historiquement il y a eu des tensions entre elles, parce qu’elles sont gouvernées différemment. Nous devons améliorer la coopération. »
Commentaire : ENFIN !
Pour des ouragans et tornades plutôt prévisibles, il a fallu bien du temps, pour que les trois pays se décident à coordonner leurs efforts. Jusqu’à présent, c’était un peu chacun pour soi. L’ampleur des dégâts mais aussi le souffle des critiques qui ont couru dans les opinions publiques nationales, en France, mais aussi au Royaume-Uni (lire : La Royal Navy rame) et même aux Pays-Bas (2) ont eu raison des petits égoïsmes nationaux. Cette structure de coordination est une sorte de test pour le projet européen de hub logistique, prévue dans le cadre de la coopération structurée permanente, ou d’une coordination plus affirmée d’une réponse aux désastres.
(Nicolas Gros-Verheyde)
(1) Citons notamment St Martin et St Barthélémy, Guadeloupe et Martinique, coté français ; Aruba, Bonaire et Curaçao Saint-Martin, Saba et Saint-Eustache coté néerlandais ; Antigua et Barbuda ancienne possession britannique.
(2) Dans le quotidien NRC Handelsblad, le Premier ministre de Saint Martin, William Marlin, avait eu ce mot dur pour les fusiliers marins néerlandais. « On a été pillé. Les marines ont regardé et n’ont rien fait. »