(B2) La journaliste allemande Mesale Tolu Çorlu a enfin été libérée lundi, selon les autorités allemandes. Mais cette liberté n’est pas totale. Après avoir passé plus de sept mois en détention préventive en Turquie, elle a l’interdiction de quitter le pays et devra se présenter toutes les semaines au commissariat. La procédure judiciaire engagée à son encontre pour appartenance supposée à une organisation terroriste se poursuit. Le procès reprendra fin avril.
« La procédure n’est pas abandonnée, mais un premier pas, un grand pas est fait », s’est réjoui le ministre allemand des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel. Le gouvernement allemand veut continuer à faire pression pour que le procès soit annulé et pour que la journaliste puisse rentrer en Allemagne.
Plusieurs autres Allemands sont toujours détenus, sans raisons très claires, en Turquie dont le correspondant du quotidien « Die Welt », Deniz Yücel. Parmi eux, le correspondant du quotidien Die Welt, Deniz Yücel. Depuis le coup d’État manqué du 15 juillet 2016, les relations entre Ankara et Berlin ne sont pas vraiment au beau fixe. Et le pouvoir turc est soupçonné de prendre, en otages, les journalistes arrêtés pour faire pression sur le gouvernement.
Uber veut toujours attirer de nouveaux chauffeurs (crédit : site web Uber)
(B2) La Cour de justice européenne vient ce mardi (20 décembre) de trancher une question essentielle. Uber a-t-il raison quand il prétend ne pas être un service de transport ou de taxi, mais une simple ‘appli’ téléphonique ou internet et donc, ne pas être tenu de respecter la législation sur les taxis ?
Un acte de concurrence déloyale ?
Tout part, d’un recours de l’association professionnelle de chauffeurs de taxi de Barcelone qui porte plainte devant le tribunal de commerce de Barcelone. Ces Catalans estiment que les pratiques de Uber dans leur ville, constituent « des pratiques trompeuses et des actes de concurrence déloyale » ; Uber utilisant des chauffeurs non professionnels sans disposer des licences et des agréments prévus pour les taxis. Uber bien sûr le contraire, estimant n’être qu’une plate-forme électronique, qui ne fait qu’exercer son droit à la libre prestation de services garantie dans toute l’Union européenne et ne peut être soumise en fait qu’à la directive sur le commerce électronique.
La Grande Chambre de la Cour saisie
Bref, les avocats du géant américain s’appuyaient sur une législation européenne pour contrecarrer une obligation nationale ou locale. Les juges européens ont, donc, fort logiquement été saisis, pour avis. Et leur jugement est intéressant à plus d’un titre. Car la question à propos de la légalité du fonctionnement d’Uber se pose dans plusieurs pays européens : en France, au Royaume-Uni, en Belgique, en Allemagne… C’est aussi logiquement que les juges européens se sont réunis dans une des formations les plus solennelles de la Cour de justice : la Grande Chambre.
Un raisonnement en trois temps
Les juges européens sont partis de la réalité des services fournis par Uber, les qualifiant à chaque étape, pour permettre ainsi d’arriver à une conclusion : Uber est avant tout un service de transport et non pas un service internet.
Premièrement, le service fourni « ne se résume pas à un service d’intermédiation consistant à mettre en relation, au moyen d’une application pour téléphone intelligent, un chauffeur non professionnel utilisant son propre véhicule et une personne qui souhaite effectuer un déplacement urbain ». Il « crée en même temps une offre de services de transport urbain, qu’il rend accessible notamment par des outils informatiques et dont il organise le fonctionnement général en faveur des personnes désireuses de recourir à cette offre aux fins d’un déplacement urbain ».
Deuxièmement, l’application fournie par Uber est « indispensable tant pour les chauffeurs que pour les personnes désireuses d’effectuer un déplacement urbain » relève la Cour.
Troisièmement, Uber « exerce une influence décisive sur les conditions de la prestation des chauffeurs ».
Tous ces éléments prouvent, selon la Cour que « ce service d’intermédiation » doit être considéré comme faisant « partie intégrante d’un service global dont l’élément principal est un service de transport ». Il répond ainsi à la qualification « non pas de service de la société de l’information », mais de « service dans le domaine des transports ».
Conclusion : force est à la loi locale
Précision supplémentaire de la Cour européenne, les services de transport urbain non collectif ainsi que les services qui leur sont indissociablement liés ( comme celui fourni par Uber), « n’ont pas donné lieu à l’adoption de règles sur le fondement de cette politique » au niveau européen. Cela signifie que « en l’état actuel du droit de l’Union », ce sont « aux États membres de réglementer les conditions de prestation de tels services ». Ils peuvent le faire, à une condition essentielle : respecter « les règles générales du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».
Commentaire : une issue logique face à une tentation de saper les fondements de l’État de droit
Cette solution est assez logique et le constat du droit rejoint le constat de la réalité pratiqué tous les jours par le consommateur. Uber fait bien du taxi et non de la fourniture d’un service internet. Ce serait fallacieux de prétendre le contraire. Le géant américain qui avait tenté de contourner les règles habituelles du marché, en s’inventant un ‘hors sol’ juridique bien à lui, doit revenir sur terre.
Son application, en soi révolutionnaire, est intéressante. Sa critique du marché des taxis (sclérosé souvent) peut être entendue. Prétendre que de ce simple fait, on n’est tenu de ne respecter aucune loi (ni sociale ni fiscale ni administrative) revient à contester plusieurs des principes fondamentaux dans lequel est bâti la société européenne.
La position d’Uber est interpellante. L’ambition de cette société (comme celle d’Amazon ou de Google) n’est pas, en effet, simplement de fournir un service, « pour le bien du consommateur », voire de se faire « une petite » place et « un peu » de profit. Il est réellement de casser un marché, de proposer un modèle, de s’assurer une position dominante et, ainsi, ensuite de pouvoir le régenter. Au-delà de la question économique pure, il s’agit bel et bien d’une remise en cause de l’État de droit, et de la démocratie — qui prévoit une loi, équitable, applicable pour tous (grands ou petits) – et de l’économie de marché régulée, toutes valeurs européennes, que veut combattre Uber.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Télécharger l’arrêt de la Cour
La Haute représentante Federica Mogherini (au centre), entourée (de gauche à droite) du général Mikhail Kostarakos (général grec, président du comité militaire de l’UE), Helga Schmid (secrétaire générale du SEAE), Pedro Serrano (sec. gén. adjoint chargé des missions de gestion de crise) et Ken Deane (commandant des missions civiles) (crédit : SEAE).
(B2) C’est désormais devenu un rituel de fin d’année. « Une tradition » comme l’a indiqué la chef de diplomatie européenne, Federica Mogherini, en s’adressant aux 16 représentants des missions et opérations de la PSDC reliés à Bruxelles par vidéoconférence. « Nous vous souhaitons un joyeux Noël et tout le meilleur pour la fin de l’année » a-t-elle indiqué, s’excusant par avance « auprès de vos familles pour vous retenir loin de chez vous ».
Entourée des principaux responsables européens de la gestion de crises, la Haute représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité a tenu à rappeler aux hommes et femmes qui sont sur le terrain (environ 4000), combien ils/elles étaient au cœur des priorités européennes désormais. Elle a ainsi salué « le travail accompli sur le terrain, face aux défis que vous rencontrez, tous les développements positifs ou négatifs que vous pouvez voir. »
Une semaine historique
Cette conférence « survient à un moment historique pour notre sécurité et notre défense » a voulu rappeler la Haute représentante. La mise en place de la MPCC (le mini QG pour les missions de formation EUTM, lire : Le commandement des missions militaires (MPCC)) décidée l’année dernière, tout comme celle de la Coopération structurée permanente (alias PESCO ou l’Union européenne de sécurité et de défense) décidée il y a quelques jours, et l’aboutissement du travail sur la CBSD (l’instrument permettant de financer les formations et les équipements dans les pays tiers, lire : La stratégie d’équipement des armées étrangères) figurent parmi les aspects les plus notables de ce renforcement.
Des forces à compléter
Reste maintenant à ce que ces promesses soient réalisées. Parmi les vingt engagements auxquels ils ont souscrits sur la PESCO, les États membres se sont engagés à fournir aux opérations (EUFOR par exemple) et aux missions (EUTM par exemple) « un appui substantiel, […] comprenant du personnel, des équipements, des actions de formation, un soutien aux exercices, des infrastructures ou autre […] ». C’est l’engagement numéro 12. Ce qu’on appelle la génération de forces reste encore trop souvent lent et long. Certaines missions, comme EUTM RCA à Bangui (Centrafrique), souffrent ainsi encore d’un manque d’effectif. On jaugera dans quelques mois si les pays tiennent leurs promesses, surtout ceux qui ont, pour l’instant, un apport très limité aux missions et opérations de la PSDC en Afrique (Pologne, Hongrie, Roumanie, Bulgarie par exemple).
(Nicolas Gros-Verheyde)
Les responsables des 16 missions et opérations déployées sur le terrain en vidéoconférence (crédit : SEAE)
(B2) Irlandais de nationalité, Phil Hogan, l’actuel commissaire européen chargé de l’Agriculture veut entamer dès aujourd’hui le chantier de la future PAC. Une réforme qui vise à redonner aux États une certaine marge de décision et qui intervient en plein débat financier sur l’après Brexit.
Le commissaire européen à l’Agriculture, Phil Hogan © NGV / B2
Le Royaume-Uni s’en va, et l’Europe doit faire face à de nouveaux défis, qui va payer la note au final, les agriculteurs ?
Qui parle de diminuer le budget ? Je n’ai rien entendu de la sorte pour le prochain cadre financier (NB : pour 2021 – 2027). Les États membres, la France, ont une option : augmenter leur contribution. Si les pays veulent soutenir une politique agricole commune forte, ou d’autres politiques, ils sont libres de le faire. La Commission fait une proposition. Mais c’est ensuite à eux et au Parlement européen de décider. Il y a d’autres ressources possibles : des taxes sur l’énergie ou le carbone, le marché des émissions, comme le montre un rapport de Mario Monti.
Vous préparez la prochaine réforme de la PAC. On va enlever le C dans la politique commune craignent certains ?
Non. C’est important de conserver la politique agricole commune, la PAC. C’est un grand succès. Nous avons pu créer beaucoup d’emplois, assurer des exportations. Nous avons toute une série de règles communes pour aider les agriculteurs en difficulté. Il n’est pas question de supprimer la PAC. Je veux construire l’agriculture de 2030, qui ait de meilleurs résultats, soit plus verte, remplisse nos objectifs de changement climatique, avec des règles simplifiées et plus flexible.
La flexibilité, ce n’est pas chacun ses règles ?
Non. Notre politique aujourd’hui est trop complexe. Les agriculteurs ne sont pas contents, les États non plus. Il faut évoluer. Il faut une agriculture plus environnementale. Mais ce ne peut pas être les mêmes politiques en Finlande, en Grèce ou en France. Nous allons donc fixer des objectifs généraux à atteindre, des objectifs communs. Ensuite chaque pays sera libre de déterminer, dans un plan qu’il nous communiquera, comment il compte les atteindre.
Vous avez entamez une réforme du bio, est-ce vraiment une bonne réforme ?
Nous avons décidé de réviser ces règles face à plusieurs scandales, notamment l’importation de produits non biologiques qui mettaient en cause toute la filière. Le niveau de contrôle était insuffisant, les règles aussi. Nous avons donc tenté d’avoir des mesures plus fortes, d’harmoniser les règles en étendant la définition des produits biologiques dans un certain nombre de zones. Pour nous, cela a été une bonne opportunité de mettre des normes biologiques partout au même niveau, y compris pour les produits importés. Nous voulons réduire les résidus de pesticides dans les produits biologiques. C’est un secteur important pour l’agriculture. Et en forte croissance. C’est ce que les consommateurs veulent.
Comment allez-vous assurer le contrôle ?
Nous avons aujourd’hui des technologies, comme les satellites, permettant d’assurer le contrôle sans paperasse. Si les objectifs ne sont pas appliqués, nous récupérerons l‘argent qui n’aura pas été bien versé. On pourra aussi suspendre les paiements.
Avant la PAC, le glyphosate. Vous avez proposé de reconduire l’autorisation de ce pesticide pour cinq ans, décision approuvée par les États membres. Une bonne option ?
J’adorerais une agriculture du futur, sans pesticide et sans produit chimique. Bien sûr ! Mais ce n’est pas une option réaliste aujourd’hui. Nous avons décidé de réautoriser le glyphosate pour cinq ans, car cette mesure a été approuvée par deux agences scientifiques indépendantes — l’EFSA (l’Agence européenne pour les produits alimentaires) et l’Agence européenne pour les produits chimiques…
Le président français Emmanuel Macron a, pourtant, annoncé son intention de mettre fin, dans les trois ans…
C’est un objectif vraiment très ambitieux. Si un État veut aller plus vite, il a parfaitement le choix de le faire. Ce qui est important, c’est d’avoir un produit efficace, alternatif au glyphosate, dans les jardins comme pour toutes les cultures.
Finalement, whisky ou vin ?
Je vous l’avoue, je préfère le vin rouge (et la bière). J’aime bien le Château Barton par exemple…
(Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde, à Bruxelles)
interview réalisée en tête-à-tête dans le bureau du commissaire à Bruxelles. Version enrichie et complétée d’une interview parue dans Sud-Ouest le décembre