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B2 Le Blog de l'Europe géopolitique. Actualités. Réflexions. Reportages
Updated: 4 hours 41 min ago

A l’agenda de la ministérielle défense de l’OTAN les 26 et 27 octobre 2016

Tue, 25/10/2016 - 18:54
(B2) Les ministres de la défense de l'Alliance atlantique se retrouvent les mercredi 26 et jeudi 27 octobre à Bruxelles. Une réunion essentiellement destinée à assurer le suivi du sommet de Varsovie de juillet (lire dossier N°40. Le Sommet de l’OTAN de Varsovie, 8 et 9 juillet 2016). Trois séances de travail sont prévues : […]

Les eurodéputés veulent créer une défense commune et remanier la PSDC

Tue, 25/10/2016 - 13:05
(B2) A quelques semaines du conseil 'jumbo', des ministres des Affaires étrangères et de la Défense des 28, décisif en matière d'évolution de la PSDC, les eurodéputés ont voulu lancer un message clair : il faut renforcer l'Union de la défense. L'Union européenne doit « réagi[r] plus rapidement et plus vigoureusement » aux menaces réelles qui […]

Face à la crise des réfugiés syriens, le Fonds MADAD (fiche)

Tue, 25/10/2016 - 10:00
(B2) Depuis le début du conflit syrien en 2011, plus de quatre millions de Syriens ont trouvé refuge dans les pays voisins et 12 millions ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence dans le territoire syrien. Face à ce phénomène, l'Union européenne et l'Italie décident de lancer, le 14 décembre 2014, le premier fonds fiduciaire à portée régionale, […]

L’Egypte a vendu ses Mistral à la Russie dit Macierewicz. Abus de fumette ?

Tue, 25/10/2016 - 07:00

Cérémonie de livraison du premier BPC à l’Egypte, juin 2016 (crédit : DCNS)

(B2) C’est la dernière trouvaille du ministre polonais de la Défense, Antoni Macierewicz, jamais avare d’un coup bas, l’Egypte aurait revendu ses BPC Mistral à la Russie pour 1 $. Cette « information » boiteuse courait depuis plusieurs jours. Le ministre l’a reprise à son compte et confirmée officiellement à la Diète polonaise jeudi dernier (20 octobre), répondant à un des députés de la représentation nationale.

« Il est vrai que les Mistral ont été vendus à l’Égypte. Et il est vrai que ces derniers jours, ils ont été de facto transférés à la Fédération de Russie pour un dollar. Cette opération a effectivement eu lieu. Et sa relation avec [la vente des hélicoptères] Caracal justifie la [saisine] du Bureau Central Anti-corruption [qui aura lieu] bientôt. Je vous assure qu’il y aura une belle explication pour savoir qui était responsable au sein de l’État ». Voir la déclaration (polonais *)

Une information qui mérite des détails

Le ministre n’a pas voulu détailler de ces informations mais il a confirmé à nos collègues de la télévision polonaise avoir « une très bonne source »… Si cette information est vraiment attestée, le ministre de la Défense polonais devrait en dire davantage, ne serait-ce que par solidarité avec ses alliés de l’OTAN. Cette transaction n’est pas anodine et peut effectivement changer la donne sur la sécurité européenne. Si cette information est fausse, il doit la démentir rapidement. Laisser courir de telles allégations sur la foi d’une simple rumeur n’est vraiment pas très sérieux et pas digne d’un ministre de la Défense d’un des pays qui n’est pas le moindre en Europe de l’Est, et dont la fiabilité avait, jusqu’ici, été sans tâche.

Un danger pour la réputation polonaise si l’information est fausse

Si le ministre s’entête à ne rien dire et que l’information s’avérerait totalement ou grossièrement fausse (ce qui semble être le cas), elle représenterait un très grave discrédit pour le gouvernement de Varsovie. Et un danger à terme pour la sécurité polonaise. A force de hurler au loup, quand celui-ci n’y est pas… quand le loup sera vraiment là, plus personne ne prendra au sérieux les déclarations de Macierewicz, qui n’a déjà pas vraiment beaucoup de crédit auprès des différents alliés européens de l’Alliance.

Du grand n’importe quoi

Selon plusieurs sources consultées par B2, l’information du ministre de la Défense polonais est en effet « originale », « ridicule », « du grand n’importe quoi »…. Vous pouvez ajouter tous les adjectifs que vous voulez. Je n’ai trouvé personne pour me donner même le plus petit début de confirmation. En gros, l’information serait totalement « bidon » au point qu’on peut se demander si le ministre ne s’est pas laissé intoxiqué par ses propres services dans un seul but : le discréditer. Même du côté des diplomates polonais, on se refile la patate chaude : « voyez avec le ministère » m’a dit l’un d’eux. Celui-ci consulté par mes soins (par mail) n’a pas encore jugé bon de me répondre…

Chercher la logique ?

Effectivement, quand on connait les Égyptiens, on peut se demander quel intérêt ils auraient à revendre pour 1 $ des navires acquis contre monnaie sonnante et trébuchante … alors qu’ils sont en train de terminer la formation de leurs équipages (1) et de compléter l’équipement de ces portes-aéronefs et que cet équipement constitue pour eux un saut qualitatif par rapport à leurs voisins (Israéliens, Golfe, Turquie, etc.). Ce type de décisions ne se prend pas à la légère.

Quelques points pour éclairer

Le choix de l’Égypte agréé par Moscou

Certes la Russie veille sur le feu des BPC Mistral – renommés Gamal Abdel Nasser et Anouar El Sadate en honneur des deux présidents égyptiens — . La vente au Caire a été effectivement autorisée par les Russes. Ils ne souhaitaient pas que cet équipement, commandé par la Russie et en partie financé par eux (même s’il y a eu un remboursement des sommes + une indemnisation) puisse profiter à un pays qu’ils n’auraient pas agréé  ou qui se révélerait contraire à leurs intérêts stratégiques. L’Égypte qui a une politique équilibrée d’achats militaires (aux Américains, aux Européens, aux Russes) templir ainsi leurs critères.

La fourniture en hélicoptères

Les Russes devraient aussi équiper les deux navires en hélicoptères. Le Caire appelé la Russie pour qu’ils équipent leurs navires… en hélicoptères Ka-52 (Hokum B dans la nomenclature OTAN) a indiqué Anatoly Punchuk, directeur adjoint de la coopération militaire et technique russe (FSMTC), jeudi (18 octobre), selon l’agence Spoutnik. La vente des navires par la France ne comprenait pas, en effet, la fourniture des hélicoptères. Il y a là une certaine logique également puisque les Russes avaient déjà étudié la mise en place de ces navires qui avaient été adapté pour ces appareils.

Un contrat rompu après de mûres hésitations

De là à dire que ces navires appartiennent aux Russes. C’est un pas qui ne peut être franchi. Pour Paris, cela constituerait assurément une brèche au contrat. Le contrat des BPC Mistral destiné aux Russes — ils s’appelaient alors le Sébastopol et le Vladivostok — avait été rompu par les Français, après plusieurs mois d’hésitations. Une décision mûrement réfléchie, et sur des considérations d’ordre stratégique. « Il était difficile de donner aux Russes un tel équipement dont ils auraient pu se servir dans leurs diverses activités [notamment d’intimidation] ou opérations » explique une source bien au fait du dossier.

Des pressions importantes

Paris avait subi alors de nombreuses pressions notamment des Américains (lire : Entre Obama et Hollande, un air de Mistral …) mais aussi de plusieurs alliés (nordiques, de l’Est), inquiets de voir un tel équipement vendu aux Russes en pleine annexion de la Crimée et conflit à l’Est de l’Ukraine. Et la décision annoncée juste avant le sommet de l’OTAN au Pays de Galles (lire : La vente du Mistral à la Russie est suspendue (Fr. Hollande)). Voir comme seule cause la vente des hélicoptères à la Pologne est plutôt surestimer ce facteur (même s’il a joué incontestablement) dans une décision qui est avant tout politique et en nature avec la solidarité entre Alliés.

(Nicolas Gros-Verheyde)

* traduit par nos soins

(1) La cérémonie de passation du second navire a eu lieu à la mi-septembre. Et le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, grand artisan de cette vente à l’Égypte, était au Caire fin septembre pour célébrer cet évènement. Et les deux premiers équipages des deux BPC Gamal Abdel Nasser et Anouar-El-Sadat viennent de terminer leur formation à Saint Nazaire.

Lire aussi :

Et sur le blog :

Crash d’un avion opérant pour la défense française à Malte. 5 Français tués (maj4)

Mon, 24/10/2016 - 11:45

(B2) Un petit avion privé (un Fairchild SA227 Merlin IV) s’est écrasé ce matin tôt (7h30 locales, 6h30 heure française) juste après son décollage et tout près de l’aéroport international de Luqa (Malte), sur une route entre Safi et Kirkop. Il y avait cinq personnes à bord, tous décédés, cinq Français, selon les autorités maltaises, deux pilotes et trois passagers, l’avion ayant explosé après le crash, selon Malta Today qui s’appuie sur les informations données par les autorités aéroportuaires.

[Breaking] Unconfirmed new video shows the final moments leading up to the the crash at #Luqa Airport in #Malta. pic.twitter.com/z4K3q00nVh

— Brendan Grainger (@S118869) 24 octobre 2016

Un avion de CAE Aviation

Selon nos informations puisées à la source, il ne s’agit pas d’un avion militaire (comme mentionné par certains médias) mais d’un avion privé appartenant à la compagnie CAE aviation basée au Luxembourg. Une compagnie qui opère régulièrement tant pour l’agence européenne Frontex et l’opération EUNAVFOR que pour différents gouvernements européens (français notamment, etc.). Les équipages de CAE Aviation sont, en effet, composés de professionnels, expérimentés (1). La plupart sont d’anciens officiers d’armée de l’air (Français, Belges, Britanniques) ou du renseignement. Plusieurs pays (notamment la France) recourent à ces services pour des missions « discrètes ».

En mission de surveillance française

En l’occurrence, l’avion opérait bien pour les autorités françaises. La confirmation est venue de plusieurs sources. Il était opéré « pour les douanes françaises dans une mission pour détecter des trafics d’êtres humains ou de drogues » a d’abord assuré par twitter le Premier ministre maltais Joseph Muscat, voulant se dédouaner de toute participation à des opérations secrètes (2). Le vol était « enregistré comme un vol local avec retour à Malte sans atterrir dans un pays tiers » a-t-il ajouté. Ce faisant il semblait démentir certaines informations faisant état d’un vol à destination de Misrata en Libye.

pour le compte du « Ministère de la défense »

Ce propos a cependant été largement nuancé par les autorités françaises. Tout d’abord les Douanes ont démenti avoir certains de ses membres à bord.

[#CP] Nous vous remercions pour vos messages mais aucun #douanier français n’était à bord de l’appareil qui s’est écrasé à #Malte

— Douane Française (@douane_france) 24 octobre 2016

Paris n’a pas confirmé la destination de l’appareil mais a reconnu que les personnels à bord appartenaient bien, en fait, « au ministère de la Défense » dans un communiqué adressé à l’AFP. L’avion « effectuait des missions de reconnaissance en Méditerranée pour le compte du ministère ». La défense utilise généralement ce type d’appareils pour de la collecte discrète d’informations (qui est ensuite redispatchée, ou non, après analyse et selon l’intérêt vers les alliés européens).

en mission discrète sur ou en Libye

Cette mission de reconnaissance pourrait donc plutôt concerner la Libye en elle-même que la mer Méditerranée en soi (d’où l’intérêt d’utiliser un appareil non siglé militaire) plutôt qu’un appareil militaire. De manière habituelle, quand des personnels militaires trouvent la mort, leur corps d’appartenance est mentionné, sauf quand il s’agit de services secrets (DGSE — direction générale de la Sécurité extérieure — ou DRM — direction des renseignements militaires, …). Par défaut, il y a donc confirmation du ministère que cette mission appartenait bien à cette seconde catégorie. Si la mission est secrète, il n’est pas aussi inhabituel de ne pas mentionner la « vraie » destination de l’itinéraire de vol…

Pas d’explosion avant crash

Les causes du crash ne sont pas connues. Il pourrait s’agir d’une panne moteur (mais l’appareil est un bimoteur normalement). Il n’y a « pas eu d’explosion avant l’impact ont témoigné 3 soldats de la caserne toute proche de Safi et deux pilotes de lignes commerciales » a précisé le Premier ministre maltais. L’explosion a eu lieu après le crash (due à la vitesse et à l’embrasement de l’appareil par le pétrole).

Des missions tout azimut

Deux des avions de CAE Aviation servent au sein de l’opération EUNAVFOR Med / Sophia affrétés par le gouvernement luxembourgeois. Mais le service diplomatique européen (SEAE) a démenti que des officiels européens soient à bord (comme l’avait indiqué une dépêche Reuters par erreur) ou que cet avion ait un lien quelconque avec les activités de l’Union européenne. La Haute représentante de l’Union a assuré, via un communiqué de son porte-parole, « être en contact avec les autorités maltaises » et « suivre étroitement les développements », adressant ses « condoléances » aux familles et membres d’équipages. L’avion « ne comptait pas au nombre des moyens mis en oeuvre par l’opération européenne en Méditerranée » a confirmé à B2 un de ses officiers.

L’île de Malte — son aéroport et ses ports — sert de « hub » pour toutes les opérations de surveillance en Méditerranée et de sauvetage des migrants/réfugiés (forces européennes, ONG, etc.).

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Un point que je peux confirmer directement, pour avoir rencontré quelques équipages, aux Seychelles il y a quelques années, lors de l’opération EUNAVFOR Atalanta. Lire : Reportage (exclusif) avec les avions « luxembourgeois » d’Atalanta aux Seychelles

(2) Une position qu’a confirmé ensuite le ministre maltais de l’intérieur. Carmelo Abela a d’ailleurs insisté sur ce point lors d’une conférence de presse tenue aujourd’hui à Malte : « no foreign military personnel are using Malta as a base from which to conduct overseas operations » a-t-il indiqué selon Malta Today. Les autorités maltaises n’ont qu’un seul souci en fait : démentir que leur île puisse être utilisée par des forces militaires (européennes, américaines, etc.) comme base pour des opérations « discrètes » ou secrètes. Officiellement Malte est, en effet, non aligné militairement. Et cette affaire est embarrassante pour le gouvernement de La Valette

(mis à jour à 12h25 avec les informations du Premier ministre maltais – 15h30 avec le communiqué de la Défense française)

Il y a 60 ans, la révolution de Budapest, une vraie guerre urbaine

Sun, 23/10/2016 - 20:15

Immeuble détruit à Budapest 1956 (archives personnelles © B2 / NGV)

(B2) Le souvenir de la révolution s’est émoussé… Et on oublie que ce qui a commencé le 23 octobre 1956 et a duré juste quelques semaines jusqu’au 4-5 novembre (11 novembre pour les derniers combats) dans les rues de Pest, de Buda et des alentours a été une vraie bataille urbaine, la dernière sans doute du continent européen avant les batailles yougoslaves à l’horizon des années 1990 (1).

Ce ne sont pas seulement quelques étudiants, ouvriers et intellectuels qui se soulèvent (une véritable révolution au sens marxiste du terme). C’est en effet une partie de la police hongroise et de l’armée hongroise (2)(3) qui basculent en quelques heures, quelques jours, avec armes et bagages du coté des insurgés. Seule la police politique fortement armée (AVH) reste fidèle en fait aux forces d’occupation. Les premiers tanks soviétiques font irruption dans la capitale hongroise le 24 octobre à 2 heures du matin alors que les insurgés s’emparent, après des combats, du bâtiment de la radio. Le mouvement militaire avait été préparé quelques jours avant (4). La première intervention militaire soviétique tourne rapidement court. La défaite semble au coin de la rue. Les tanks et troupes soviétiques (5) se heurtent à une résistance, inattendue. Le cocktail Molotov devient une denrée prisée d’autant que les tanks, lourds, sont difficiles à manœuvrer dans les rues étroites. Les quelques cas (rares) de fraternisation ou de réticence à l’intervention des premières troupes intervenant — dont certaines étaient basées en Hongrie — font craindre une certaine débandade. Les troupes se retirent (un peu)…

Une première victoire illusoire

Ce qui apparait alors comme une première victoire des insurgés tient en fait surtout d’une prudente retraite militaire, le temps de reconstituer les forces, de faire venir des renforts (plus sûrs) en nombre, et d’intervenir de façon plus décisive. Toute la négociation politique qui s’ensuivra peut apparaître ainsi factice en fait. La décision de Imre Nagy (le Premier ministre de la révolution) d’ouvrir le pluralisme politique et de proclamer la neutralité de la Hongrie seront un point de non-retour pour le Kremlin. Mais il semble acquis que les décisions militaires ont été largement anticipées pour faire tomber le pouvoir des insurgés.

La prise de contrôle des points stratégiques

La plupart des aéroports du pays (Tököl, Ferihegy, Pápa et Veszprém…) sont gardés ou passent sous le contrôle des soviétiques. Ils permettent notamment d’évacuer les blessés, ainsi que les familles des militaires et les civils ; près de 200 appareils sont mobilisés dans cette opération. Mais surtout ils assurent des points stratégiques pour la suite de l’opération et, au passage, permettent de geler toute possibilité d’action des forces aériennes hongroises.

Un mouvement tournant

La plupart des tanks soviétiques qui se retirent effectuent en effet un mouvement tournant, se retirant de la capitale hongroise, pour réapparaitre ensuite dans un autre lieu. Des renforts sont appelés en nombre, venant d’Asie centrale notamment, car jugés plus sûrs ou moins acquis à la sensibilité occidentale que ceux stationnés dans les pays du bloc. « Sur la frontière orientale, après deux jours (27 et 28 octobre) d’immobilité relative, de nouveaux mouvements de troupes ont été observés » mentionne le rapport de l’ONU. A Záhony, le poste frontière de Transcarpathie, près de l’actuelle Ukraine « au moins 100 chars étaient situés sur le territoire hongrois, tandis qu’une force considérable d’infanterie motorisée, avec des véhicules d’artillerie et de soutien des unités de chars, se déplace vers l’ouest en direction de Nyíregyháza ». Le lendemain, « 133 chars légers et 80 du dernier modèle de chars lourds [T-54] franchissent la frontière à Záhony, faisant plus que compenser les quelques chars et véhicules d’infanterie [ont fait un mouvement contraire] se déplaçant vers l’est de Nyíregyháza ».

Des renforts plus sûrs…

La seconde intervention, dans la nuit de 3 au 4 novembre, est donc autrement plus conséquente. Le nombre de troupes engagées est conséquent : environ 2500 tanks et 1000 autres véhicules sont ainsi en Hongrie le 3 novembre. Et entre 75.000 et 200.000 hommes sont mobilisés. L’aviation est également mobilisée pour écraser les derniers foyers de révolte (notamment aux alentours des usines de la périphérie de Budapest : Csepel ou Dunapentele). L’hésitation du pouvoir hongrois — compréhensible pour éviter de donner des arguments aux intervenants — a permis au rouleau compresseur soviétique de faire son œuvre rapidement.

A-réaction euroépenne

Les occidentaux ne réagiront pas vraiment autrement qu’en paroles. Les Français et Britanniques sont partis faire le coup de feu à Suez. Les Américains sont occupés à les arrêter. Les Russes auront le champ libre… Le dernier appel de la Radio Kossuth (la radio nationale passée aux mains des insurgés) en anglais, allemand et russe, avant d’être mise hors service résonnera dans le vide.

“This is the Hungarian Writers’ Union! We appeal for help to writers, scholars, writers’ associations, academies, scientific organizations and the leaders of intellectual life all over the world. Our time is limited! You all know the facts, there is no need to explain them. Help Hungary! Help the Hungarian people! Help the Hungarian writers, scholars, workers, peasants and intellectuals! Help! Help! Help!”

Le prix lourd payé par la population, l’armée soviétique violemment touchée

60 ans après, le bilan reste donc encore flou. L’armée soviétique paiera cependant un prix qui parait lourd pour quelques semaines de batailles. Le bilan communément admis est de 700 morts et plusieurs milliers de blessés, dans les rangs soviétiques, en quelques jours. Il serait supérieur selon le rapport récent d’un officier général hongrois, sans atteindre cependant des bilans exagérés donnés sur le moment (6). Côté hongrois, on parle de 2500 à 3000 morts dans tout le pays (dont 1800 / 2000 pour la seule capitale) sur les deux semaines d’insurrection. La majorité sont des jeunes : plus d’un sur cinq a moins de 20 ans, plus d’un sur quatre a entre 20 et 39 ans. En tout, 13.000 personnes auraient été traitées dans le cliniques et hôpitaux hongrois durant les évènements (sans compter donc les blessés légers qui n’ont pas été hospitalisés mais soignés dans les postes infirmiers mobiles). Si on fait un ratio, cela donne donc 1 côté forces armées contre 3 ou 4 coté insurgés. Ce qui donne la valeur de l’intensité des combats et de la résistance.

La très forte intensité des combats illustrée par les bâtiments

Près de 20.000 appartements ont été endommagés à Budapest dont 2200 complètement détruits, soit 4,1% du parc immobilier de la ville selon un bilan établi par la ville en février 1957 (7). La photo illustrant cet article donne une idée de l’intensité des combats. Entre 170.000 et 200.000 Hongrois quittent le pays en quelques jours pour se réfugier dans les pays voisins :l’Autriche en premier lieu ou la Yougoslavie (8).

(Nicolas Gros-Verheyde)

On peut lire avec profit le rapport publié par l’ONU un an après les évènements en 1957, très éclairant, à télécharger ici

(1) Les évènements ont commencé plus tôt notamment à Szeged, ville étudiante du sud du pays, les étudiants manifestant pour obtenir de meilleures conditions de vie, de travail, et la liberté d’expression, dans la foulée de ce qui s’est passé en Pologne.

(2) Lors des premières manifestations, le 23 octobre, on compte 800 cadets de l’académie militaire en uniforme parmi les manifestants.

(3) L’armée hongroise comprend alors neuf divisions d’infanterie, deux divisions blindées «mécanisés», quatre brigades d’artillerie, un bataillon de génie chimique, une brigade de cavalerie, un régiment de signaux, une brigade de communication et trois régiments blindés lourds. Au total 250.000 hommes. La force aérienne dispose de plus de 500 appareils : une division de combat composée de trois régiments, chacun composé de 120 avions, six échelons simples qui équivalent à un régiment de 120 avions, un régiment aérien de 50 avions et un régiment de chasseurs-bombardiers avec 37 avions. La flotte du Danube dispose de deux brigades fluviales et la police de sécurité de plusieurs régiments d’infanterie armée et d’unités blindées.

(4) Les 20-21 octobre, des ponts flottants ont été assemblés à Záhony sur la frontière hongroise-soviétique. Le 21 et 22 octobre, dans les régions voisines de la Roumanie, tous les congés des officiers soviétiques et des officiers de réserve de langue hongroise ont été supprimés. Le 22 octobre, des mouvements de forces basées en Hongrie occidentale sont observés se déplaçant en direction de Budapest.

(5) les Soviétiques avaient deux divisions stationnées en Hongrie avant le soulèvement : la 2e et et la 17e divisions blindées, une force d’environ 20.000 hommes et 600 chars. A ceux-là sont venus s’ajouter des renforts venus de Roumanie voisines, les 32 et 34e divisions blindées basées à Timisoara.

(6) Sans atteindre le chiffre de 7000 Russes tués et 25.000 Hongrois décédés cités par le Premier ministre indien Nehru en décembre 1956.

(7) Un premier bilan mentionnait 40.000 appartements endommagés dont 23.000 sérieusement et 4000 complètement détruits.

(8) Lire : Remember 1956 Viktor Orban ! Quand les Européens étaient un peu plus solidaires

Les 26 derniers marins otages des pirates somaliens libres !

Sun, 23/10/2016 - 14:16

(crédit : OBP)

(BRUXELLES2) Après quatre ans et demi de détention, les 26 marins du FV Naham 3 ont été libérés, samedi matin (22 octobre), annonce Ocean Behond Piracy (OBP). Ce sont les derniers otages ‘internationaux’ aux mains des pirates somaliens à être libérés.

Mal nourris et détenus dans des conditions déplorables mais malgré tout sains et saufs

« Ils sont actuellement dans les mains sûres des autorités Galmudug et vont être rapatriés [au Kenya] en utilisant un vol humanitaire de l’ONU, puis dans leur pays d’origine », a souligné John Steed le coordonnateur de OBP. « Ils ont passé plus de quatre ans et demi dans des conditions déplorables loin de leur famille. Ils ont tous été mal nourris. Quatre d’entre eux reçoivent actuellement un traitement médical par un docteur à Galcayo. » Mais « compte tenu de leur épreuve, ils sont dans un état raisonnable. »

Suivi à la trace

Le FV Naham 3, un navire de pêche thaïlandais battant pavillon d’Oman avait été capturé le 20 mars 2012 dans l’océan indien à environ 65 milles nautiques au sud des Seychelles. Il avait été suivi à la trace par les avions de patrouille maritime de EUNAVFOR Atalanta. Ainsi en août 2013, un avion patrouilleur espagnol de la force européenne anti-piraterie avait observé que le bateau de pêche était déplacé de son ancrage initial vers une plage somalienne dans la région de Galmudug (lire : Le FV Naham 3, repéré sans otages).

Une des plus longues détentions

A son bord des marins Taiwanais, Philippins, Indonésiens, Chinois et Vietnamiens. Trois marins sont morts : un lors de l’attaque, deux durant leur captivité. C’est une des plus longues détentions observées de marins aux mains des pirates somaliens. Selon la base de données de B2, les 4 marins du Prantalay 12 ont ainsi été détenus 1774 jours, ceux du FV Naham l’ont été 1671 jours. Les 7 derniers marins en otage du MT Asphalt Venture l’avaient été 1463 jours.

Les marins asiatiques ont payé un prix plus lourd que les occidentaux

De façon générale, ce sont les marins asiatiques (Bengalis, Indiens, Thaïlandais, Vietnamiens, etc.), qui ont payé le prix le plus lourd en durée de détention. Abandonnés en général par leurs armateurs ou propriétaires, ils ont croupi dans des conditions souvent difficiles en Somalie. Les marins occidentaux ont généralement été libérés plus vite. La durée la plus longue observée a été pour les marins danois du MV Leopard qui sont restés plus de 800 jours en détention.

La diminution des attaques pirates

Après une forte augmentation des attaques de pirates entre 2008 et 2011, les patrouilles continues en mer par des navires de plusieurs forces navales (européenne, OTAN, nationales…) comme les mesures d’auto-protection à bord des navires marchands (+ les gardes privées) et l’action à terre, les attaques de pirates basés en Somalie ont « actuellement été supprimées » signale-t-on au QG de l’opération européenne Atalanta.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire :

La méthode du vélo est morte. Le cycliste est tombé !

Sun, 23/10/2016 - 09:42

(BRUXELLES2) L’Union européenne va sérieusement devoir réfléchir à son fonctionnement interne comme sa philosophie. Dans des pays différents, sur des motifs différents, la méthode européenne a subi des revers fondamentaux.

Des défaites successives ?

Cela a commencé en 2005 et 2007 avec trois référendums successifs (France, Pays-Bas, Irlande) sur le futur traité européen. Cela a continué en 2016 avec le référendum négatif aux Pays-Bas en avril sur l’accord d’association avec l’Ukraine (passé totalement inaperçu), avec un référendum sur le Brexit au Royaume-Uni en juin (autrement plus conséquent) et, en dernier lieu, le « Non » du village (gaulois) wallon et bruxellois au CETA, l’accord commercial et économique global avec le Canada. Ces « Non » n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Mais ils devraient interpeller car ils surviennent dans les pays fondateurs ou proches de la fondation (et non dans les récents États membres). La réaction européenne a, jusqu’ici, été très superficielle, comme lors des premiers référendums négatifs de 2005-2007 : on a pleuré un bon coup, s’est lamenté et on est passé à autre chose très vite. Repartir aujourd’hui cahin cahan, sans réel but, serait le pire de tout.

Le peuple, cet imbécile qui ne comprend rien…

Ces signes importants de désamour doivent être pris au sérieux et non pas méprisés sur l’air de « oh mon dieu, ce peuple (ce dirigeant) est vraiment imbécile et ne comprend rien« . La réalité c’est que les Européens ne semblent plus comprendre une Europe qui leur échappe. Alors ils disent non, tout autant par dépit que par incompréhension ou que par refus. Ce n’est pas une hostilité à l’Europe en tant que telle. C’est une crise de confiance, avant tout, parmi les partisans européens. Ce qui est plus grave en quelque sorte…

Comment va l’Europe ? mal. Où va l’Europe ? on ne sait pas

Il va sans doute falloir regarder la vérité en face : l’Europe ne se délite pas parce qu’elle a des opposants de plus en plus déterminés. Mais aussi (et surtout) parce qu’elle a déçu ses partisans.

Un manque de soutien et non pas une opposition farouche

La construction européenne a été un mélange subtil et équilibré de l’approche chrétienne-démocrate, libérale, sociale-démocrate, alternative-verte et même en partie souverainiste (1). C’est ce qui faisait sa richesse et sa force. Un par un, elle a perdu ce qui faisait cette essence pour se replier sur un noyau, de plus en plus étroit, plus proche du lobby que de la citoyenneté. Ce qui s’est passé en Wallonie n’est pas un épiphénomène. Paul Magnette est un vrai connaisseur de la chose européenne et plutôt un modéré au sein des socialistes wallons. Mais la base pousse… fort. Si un référendum aurait été organisé en Wallonie ou Bruxelles, nul doute qu’il aurait amené un résultat identique. Ce qui était impensable avant est devenu réalité aujourd’hui. Même chez les Européens les plus convaincus, la Commission européenne n’apparait plus aujourd’hui comme le défenseur de l’intérêt général. Et l’Europe n’apparait plus aussi nécessaire qu’auparavant.

Un moyen devenu un objectif

L’objectif primaire de la construction européenne — « rapprocher les peuples » pour faire que les liens entre les peuples soient si forts qu’ils ne pensent plus à se faire la guerre — a été perdu. Le moyen de cet objectif — « rapprocher les économies » — s’est transformé au passage en « ouvrir les économies » — et est devenu l’objectif ultime de la construction européenne. Espérer « faire aimer l’Europe » avec cet argument est un combat perdu d’avance. Et ce n’est pas en ajoutant quelques ersatz de politiques consuméristes (rebaptisées « citoyennes ») — comme la baisse du tarif du roaming, ou l’octroi plus général de droits au consommateur aérien ou de transport ferroviaire ou Erasmus (qui ne concerne au final qu’une frange limitée d’une génération)— que l’on changera cet état d’esprit. L’Europe ne souffre pas aujourd’hui seulement d’une erreur de conduite mais aussi de certaines malfaçons qui remontent aux années 1990.

La main invisible de l’Europe a cessé

Les politiques européennes conçues dans les années 1980-1990 (marché unique, Euro, espace Schengen, libre circulation) reposaient sur un principe d’optimisme. Elles allaient « marcher toutes seules », sans gendarme, sans régulation, avec la bonne volonté de tous (États, acteurs économiques, population). Même s’il restait quelques frictions, ce modèle a prospéré car le consensus général opérait et que la croissance économique était là. Une sorte de « main invisible européenne » — la fameuse volonté politique — permettait de surmonter les difficultés du moment. Une main qui est à l’Europe ce qu’est la « main invisible du marché » chère à Adam Smith et aux économistes libéraux.

A la première bourrasque un peu forte, le défaut de structure, de contrôle s’est cependant révélé criant. Et l’édifice s’est grippé, menaçant de s’effondrer. L’Europe était nue… Cela a été le cas de l’Euro avec la crise grecque où il a fallu bâtir à la hâte un dispositif de secours (le mécanisme de stabilité) et un dispositif de contrôle (la surveillance budgétaire). Cela a été le cas pour l’espace Schengen avec le Corps européen de garde-frontières. Cela sera le cas pour la politique du marché unique si on n’y prend pas garde. Car les mêmes défauts y sont observables.

Des politiques qui souffrent de graves malfaçons

La politique de détachement des travailleurs est dévoyée par des personnes qui la contournent pour faire du dumping social (2). La politique d’ouverture des marchés de capitaux et de services, ou d’exonération de TVA, est dévoyée par des entreprises (en général très grosses) qui s’établissent dans le pays du moins disant fiscal. Des fraudes importantes privent ainsi les États de ressources. La politique de libre circulation est utilisée par des mouvements de terrorisme et de grande criminalité qui se jouent des frontières. A cela, l’Union européenne n’a quasiment rien à opposer. Son dispositif législatif est figé dans le marbre, sans possibilité de resserrer rapidement « les boulons » en cas de dévoiement observé, à la différence des systèmes nationaux qui disposent de cet outil (décret ou circulaire dans les pays de droit écrit, notice interprétative, jurisprudence). Elle n’a aucun service de contrôle propre : ni répression des fraudes (accessible au commun des mortels), ni harmonisation fiscale, ni inspection du travail pour chasser les fraudeurs, ni service de police fédérale, ni procureur, ni même service au consommateur européen (3). L’objectif lui-même de la construction européenne est confus.

Une construction européenne impossible à cerner

Comment définir aujourd’hui en quelques mots simples la construction européenne ? Où s’arrête l’Europe (ses frontières) ? La politique d’élargissement à tout crin, de signature des accords de libre échange sans limite, a produit une espèce de course en avant. L’Europe, au lieu de produire de la sécurité (de la confiance), a produit de l’insécurité. En promettant à chaque fois des monts et merveilles (emplois, croissance), sur la base d’évaluations plus politiques que scientifiques  (lire : Avec les accords de libre échange, demain on rase gratis !), l’Europe a perdu une partie de sa crédibilité tout comme sa propension à prédire la catastrophe en cas de refus de certaines avancées ou de certains traités.

La razzia de la politique du catastrophisme

Dès qu’un projet européen semble en passe d’être refusé, les structures européennes sonnent l’alarme rouge : c’est la catastrophe prévisible, les économies vont s’effondrer, les entreprises vont fuir, etc. La campagne référendaire en 2005 avait montré les limites de cette tactique. La campagne britannique l’a accentué. On a laissé se développer les argumentations les plus farfelus, sans réagir (comme le gain des allocations sociales) puis on a tout un coup évoqué une argumentation catastrophique, plus proche de la peur que de fondamentaux réels. Au final, la copie ne résistant pas à l’original, le sentiment anti-européen l’emporte…

Comment réagir ?

Il faut redonner du coeur à l’ouvrage aux pro-européens, définir le projet européen (le clarifier), commencer à considérer que la construction européenne peut avoir plusieurs voies, plusieurs menées idéologiques et que le libéralisme n’est pas la seule possibilité de la cette construction européenne.

Remettre du contre pouvoir

Il faudra sans doute que les institutions européennes — à commencer par la principale, la Commission européenne — acceptent et, même, intègrent la critique, qu’ils cessent de traiter de « populiste » (l’insulte à la mode à Bruxelles) ou « d’extrême », ce qui est simplement un questionnement démocratique. L’existence de contre-pouvoirs, forts, efficaces, qui ont le droit de contester une décision, même quand celle-ci parait tout à fait fondée, fait partie de la démocratie… On peut contester l’argumentation de Orban en Hongrie, de Theresa May au Royaume-Uni ou de Magnette en Wallonie. Mais leur légitimité est incontestable. Vouloir comme le prônent certains Européens sanctionner les autres parce qu’on n’est pas d’accord avec eux est le début de la fin.

Délier le lien avec les lobbys

Les « ennemis » de l’Europe ne sont pas à l’extérieur. Ils sont souvent « à l’intérieur ». La présence permanente des lobbys, initiateurs ou empêchant une législation, autour des institutions européennes sème le trouble. Le passage de Barroso chez Goldman Sachs ou le « sacré » mensonge de Neelie Kroes sont très symboliques d’une époque qui doit être révolue. Le silence désespérant de la Commission européenne sur ces sujets est une grave erreur politique. Si le pantouflage d’anciens commissaires, et surtout d’anciens directeurs généraux, est devenu courant, sinon la norme, cette pratique n’est plus tolérable aujourd’hui. Dans le même esprit, le système de consultation systématique avec les « parties intéressées » avant toute législation européenne est une erreur fondamentale. On ne rédige pas une législation pour les « parties intéressées », on rédige une législation pour le bien public, pour l’intérêt de tous. Il est loisible de consulter des spécialistes du terrain mais pas d’en faire un préalable incontournable et d’autant plus abscons que la consultation a souvent lieu en catimini (4). Ce dispositif doit être supprimé.

Changer l’état d’esprit de ceux qui dirigent l’Europe

Quand on découvre certaines pratiques, certains comportements internes, certains points de vue… on est effaré. L’administration européenne qui était auparavant un modèle envié, d’efficacité, de dynamisme, de compétence est devenu un anti-modèle où le plus important est le respect des procédures et des dossiers bien remplis. Le principe de base est le mépris des autres (administrations des Etats membres, ONG, citoyens, etc.) qui « n’y comprennent rien ». L’administrateur européen — à tous les niveaux — doit revenir à la base : payé avec les impôts publics, il est au service du bien public et non pas de son institution ou de sa carrière. La question des trop hautes rémunérations de cette fonction publique — qui est extraordinaire en ces temps de crise — doit aussi être résolue (5).

Rebâtir une nouvelle Europe

Enfin, le plus important, il va donc falloir rebâtir les politiques européennes, une par une, faire un tri entre celles qui sont nécessaires et celles qui ne le sont plus car elles peuvent tout aussi bien gérées par les Etats voire par les collectivités locales, développer les politiques qui méritent au contraire d’être traitées au niveau européen (le point de vue de J.-C. Juncker est juste). Il faut arrêter un certain pointillisme européen négatif : une TVA différente pour les restaurants n’a jamais été une menace à l’équilibre et au marché unique. De même, la protection des espèces en danger, si elle diffère sensiblement entre la Pologne et l’Allemagne n’est pas en soi un grave problème européen.

Retrouver l’esprit du charbon et de l’acier

Il faut retrouver l’esprit de l’alliance du charbon et de l’acier qui prévalait aux débuts de la construction européenne : avoir des liens économiques tellement forts, tellement interdépendants qu’il est impossible de se faire la guerre.

Il faut développer les projets ambitieux qui structurent la société européenne, suppriment les concurrences entre États (et non le contraire) comme un impôt sur les sociétés, une surveillance commune des frontières, une politique commune énergétique (avec une centrale d’achat commune), des industries de taille européenne sur les principaux secteurs économiques soumis à la concurrence mondiale. Il faut inventer un système de prestations sociales complémentaires à l’échelon européen : la carte Interrail à prix réduit ne doit pas viser que les -18 ans (comme le propose le Parlement européen) mais tous les citoyens européens.

Ce n’est pas en moins réglementant qu’on fera une Europe et qu’on la fera mieux aimer. Au contraire… On favorise la concurrence déloyale et, au final, les nationalismes, bien plus dangereux pour l’Europe que tous les autres comportements.

(Nicolas Gros-Verheyde)

A suivre (We prochain) : Un jeu de réussite pour Juncker ?

Lire aussi :

(1) Il y a une frange non négligeable de souverainistes qui ont pleinement conscience que pour sauvegarder la souveraineté nationale, il faut avoir une souveraineté européenne pour permettre de continuer à exister au niveau mondial. C’était le pari de De Gaulle et la voie suivie encore par de nombreux gaullistes.

(2) Le vers était dans le fruit dès le début. Et dès 1996, quand la directive a été adoptée, un responsable de la Commission européenne (de la DG V – DG en charge de l’emploi) avait identifié une partie des problèmes futurs (cf. colloque à Nanterre).

(3) Le service du Centre Européen des Consommateurs est une vaste fumisterie. Je l’ai testé, je peux en témoigner. Six mois pour avoir une réponse et vous donner le texte de la directive que vous pouvez avoir en 5 mn de recherche sur internet. Et encore trois mois pour dire que vous avez raison mais qu’ils ne peuvent rien faire puis un mois pour dire que la seule solution est une plainte (et encore n’est rien garanti, dixit les mêmes) pour un cas de violation flagrante du droit européen, est léger…

(4) Quelques semaines parfois seulement sont laissées pour une consultation, dans les tréfonds d’un site internet qui nécessite une spécialisation européenne pour le retrouver :-), en anglais uniquement qui ressort plus du charabia administratif que de la langue de Shakespeare, etc.

(5) L’administration européenne vit aujourd’hui largement au-dessus de ses moyens et des moyens européens. Il est difficilement acceptable aujourd’hui qu’une partie non négligeable (jusqu’à 1/6e du personnel dans certaines DG et SEAE) de l’administration européenne touche davantage qu’un président de la république ou un premier ministre, et encore plus anormal qu’un fonctionnaire européen gagne deux à quatre fois plus que son homologue de l’administration fédérale belge (à échelon et valeur égale).

Le Werra à la rescousse de ressortissants arrêtés par les garde-côtes libyens

Sat, 22/10/2016 - 11:00

Transfert des deux marins libérés à bord du Sea-Eye par les marins du Werra (crédit : Sea-Eye)

(BRUXELLES2) C’est un évènement qui n’a pas vraiment été commenté dans la presse francophone. Le ravitailleur allemand Werra a dû quitter, temporairement, selon nos informations, l’opération européenne de lutte contre le trafic d’êtres humains en Méditerranée (EUNAVFOR Med / Sophia) à la mi-septembre pour assurer en Libye une opération nationale de récupération de deux ressortissants allemands appartenant à l’ONG « Sea-Eye ».

Entre Libyens et Allemands un langage différent

Les deux hommes (Dittmar Kania et Michael Herbke) ont été interpellés vendredi (9 septembre),  par les garde-côtes libyens au large de la Libye et ramenés sur la côte au port libyen de Zawia. « Ils ont été arrêtés dans les eaux territoriales, ont tenté de fuir mais ont été stoppés par un tir d’avertissement des garde-côtes » explique le quotidien en ligne libya herald. Une version démentie par les intéressés qui nient être entrés dans la zone territoriale. « Ils étaient hors de la zone des 12 miles. Ceci est également confirmé par les équipages des autres organisations de secours européens qui étaient non loin » explique un porte-parole de l’organisation. « Nos deux marins ont été contraints par la Garde côtière libyenne sous la menace d’armes de revenir à un port libyen » précise Hans-Peter Buschheuer, au quotidien local d’Augsburg*.

La crainte de pirates

De fait, selon le témoignage d’un des marins arrêtés, il y a bien eu « fuite » mais pour une raison compréhensible. « Nous étions au courant de la présence de pirates dans la région (1). Quand j’ai vu un hors-bord arriver à grande vitesse sur nous, nous avons alors accéléré » raconte Dittmar Kania à la radio bavaroise Bayerischen Rundfunks*. Mais l’autre bateau « était trop rapide et nous a rattrapé ». Les hommes à bord avaient des armes et ont tiré en l’air. « Quand nous avons vu qu’ils portaient des uniformes, c’était clair pour nous que ce devait être la Garde côtière. » Les marins de l’ONG ont alors stoppé et se sont laissés arrêtés.

Bien traités par les autorités libyennes

Ramenés au port de Zawia en Libye, les deux Allemands ont été d’abord placés en garde à vue et entendus durant six heures. Puis ils ont été amenés dans la demeure du commandant des garde-côtes. « Une situation des plus bizarres — selon le marin —. Nous sommes arrivés dans la résidence du commandant, qui était d’environ 1.000 mètres carrés, avec paddock et écuries. Nous avons été très bien traités et avons pu dormir sur des matelas dans la même pièce que le commandant. »

L’intervention diplomatique

Très vite les autorités allemandes — le ministère des Affaires étrangères, l’ambassadeur en Libye, Christian Buck (présent en Tunisie) sont intervenues et ont pu obtenir leur libération qui est intervenu dès le lundi (12 septembre). Pour aller les récupérer, la marine allemande a dépêché un de ses navires, le Werra, pour faire jonction avec les garde-côtes libyens. Les deux marins libérés ont ensuite été transférés en haute mer sur le Sea-Eye puis rapatriés à Malte, base de la plupart des ONG pour le sauvetage en mer. On ne connait pas en revanche les conditions de cette libération (si celle-ci notamment a nécessité le versement d’une « caution »).

Une des nombreuses ONG présentes sur la côte

L’ONG Sea-Eye a été fondée par un Allemand, Michael Buschheuer et sa famille (2). Ils ont acquis un vieux bateau de pêche, long de 24 mètres, le Sternhai, renommé MS Sea Eye, pour venir en aide aux personnes qui fuient à travers la Méditerranée. Début août, ils ont mis en place une vedette légère (de type Parker 1600 Interceptor). Basé en Tunisie, à Zarzis, le « Speedy » permet d’intervenir de façon « plus rapide, pour sauver les gens de la noyade ». A ce jour, selon leur propre décompte, ils ont sauvé près de 4000 personnes. Long de 15 mètres, il peut accueillir jusqu’à 4 membres d’équipage et au moins 26 rescapés. « Notre navire (Sea-Eye) qui peut transporter des tonnes d’équipement de sauvetage, d’eau et de nourriture va trop lentement » explique l’organisation *.

Le navire aux mains des Libyens

Le Speedy est cependant resté aux mains des Libyens. Le responsable de l’ONG, M. Buschheuer soupçonne en quelque sorte une forme de piratage étatique, a-t-il indiqué à la Radio bavaroise*. Le personnel de la Garde côtière libyenne pouvant être « intéressé pour récupérer un bateau moderne ».

Le Speedy au large de la Tunisie, début août (source : Sea-Eye)

Commentaire : cette intervention libyenne peut s’expliquer par plusieurs raisons (pas automatiquement contradictoires). La volonté, farouche, des Libyens de préserver l’intégrité de leurs côtes est réelle. Les Libyens très sensibles à leur souveraineté voient d’un mauvais oeil ces navires étrangers ‘tourner’ autour de leurs côtes quitte à déborder légèrement de leurs 12 miles. . Mener ce genre d’opérations est une manière d’affirmer leur souveraineté. La crainte de l’espionnage qui était une donnée permanente du temps de Kadhafi reste aussi très présente. On ne peut exclure non plus qu’il s’agit d’un moyen de pression sur les Européens pour qu’ils accélèrent l’équipement de la garde-côte libyenne (mais le procédé pourrait être plutôt contre-productif).A cela peuvent s’ajouter des éléments plus locaux. L’autorité libyenne n’est pas encore très affirmée. Et l’autonomie de chacune de ses forces est notable. Des éléments de règlement comptes intra-libyens peuvent non plus ne pas être absents de ces interventions contre les navires des ONG.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) La crainte d’attaques a été avivée par l’attaque au mois d’août sur le Bourbon Argos de MSF suivie par une tentative sur le Sea-Eye lui-même. Et les ONG qui travaillent dans le secteur ont été avertis de ce fait. Lire : Le Bourbon Argos attaqué au large des côtes libyennes (maj2)

(2) Télécharger le dossier de présentation de l’ONG (en anglais)

(*) traduit de l’allemand par nos soins

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