(B2) Des gardes-frontières turcs ont tiré sur des demandeurs d’asile syriens qui tentaient de rejoindre la Turquie ou les ont roué de coups, entraînant la mort ou des blessures sérieuses, dénonce aujourd’hui Human Rights Watch, témoignages vidéos à l’appui.
5 demandeurs d’asile tués et 14 autres blessés graves
En mars et avril, des gardes-frontières turcs ont eu recours à la violence contre les demandeurs d’asile syriens et les passeurs, tuant cinq personnes dont un enfant et en blessant gravement 14 autres selon les victimes, témoins et habitants locaux syriens interrogés par l’ONG.
Six des incidents décrits par les témoins syriens ont eu lieu près du passage frontalier de Khurbat al Juz-Güveççi, à environ 50 kilomètres au sud de la ville turque d’Antakya. Le septième est survenu près de la ville-frontière syrienne d’al-Duriya.
Sept des blessés ont déclaré être brièvement restés dans le camp pour personnes déplacées de Salaheddin situé dans le village de Khurbat al Juz, surplombant le mur sur la frontière turque nouvellement édifié à proximité.
La majorité d’entre eux et d’autres qui s’étaient rendu directement à la frontière ont déclaré avoir récemment fui les combats menés à et autour d’Alep.
Attention on va vous tirer dessus
Un représentant du camp de Khirmash a déclaré à l’ONG que, le 13 avril, des gardes-frontières turcs dans les tours de guet situées à proximité avaient utilisé des haut-parleurs pour annoncer en arabe que quiconque s’approcherait de la frontière malgré l’interdiction se ferait tirer dessus.
Détention, Refoulement28 autres demandeurs d’asile syriens — interrogés par l’ONG (entre le 12 et le 20 avril) — ont décrit les gardes-frontières les interceptant tandis qu’ils passaient la frontière accompagnés de passeurs entre février et la mi-avril. Ils ont dit que les gardes les avaient détenus parfois une journée entière, puis les avaient refoulés en Syrie avec des dizaines — voire des centaines — d’autres personnes. Certains vivaient dans le camp de déplacés de Khirmash à l’ouest de la ville syrienne de Bidama.
L’objectif de 2% de défense est pour nombre de pays plus difficile que de franchir un sommet en Himalaya, quasiment irréalisable, sauf un effort surhumain, sans oxygène… (crédit : MOD Pays-Bas / Archives B2 – expédition néerlandaise vers la Manuslu)
(B2) L’objectif de consacrer 2% du PiB à la Défense est répété régulièrement, par plusieurs responsables européens. Barack Obama l’a rappelé lors de son passage à Hambourg. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg ne se fait pas faute de le répéter régulièrement. Et cet objectif devrait être à nouveau réaffirmé comme nécessaire par les chefs de gouvernement ou d’Etat lors du sommet de Varsovie en juillet prochain (comme il l’avait été lors de celui du Pays de Galles en septembre 2014).
Des mots aux actes… il y a un pas !
Dans les conditions actuelles économiques, atteindre cet objectif parait difficile pour plusieurs pays. Même étalé sur plusieurs années sur 10 ans, cela paraît difficilement soutenable. En fait, l’objectif est « irréaliste », sauf à avoir une politique décidée, volontariste, menée sur une longue durée (au moins 5 ou 10 ans). Une étude très intéressante, menée par deux chercheurs, Frederic Mauro et Klaus Thoma, pour le compte du Parlement européen, le démontre (1).
L’Allemagne devrait dépenser 6 milliards de plus sur 5 ans pour rattraper son retard
Pour atteindre cet objectif, l’Allemagne devrait dépenser 31 milliards $ de plus, soit doubler son budget (dont 9 milliards $ pour l’équipement). Ce qui, même ramené sur une durée de 10 ans, supposerait un effort continu de + 3 milliards $ par an à trouver dans le budget fédéral. Même pour un pays « riche », ce n’est pas si évident que cela.
Un effort quasi insurmontable pour l’Italie comme l’Espagne
Pour l’Italie comme pour l’Espagne, l’effort est majeur : 20 milliards de plus à trouver pour Rome et 15 milliards pour Madrid. Autant dire qu’en cette période de disette budgétaire et de réduction des déficits, cet objectif parait insurmontable. Et arriver à 2% devient un objectif illusoire.
Un rattrapage non négligeable pour la Belgique et les Pays-Bas
Pour d’autres pays comme la Haye ou Bruxelles, même si le chiffre n’est pas aussi saisissant, en valeur absolue, il est important en valeur relative pour le budget national et quasi impossible à justifier pour les gouvernements nationaux : + 7,5 milliards pour les Pays-Bas et + 5,5 milliards $ pour la Belgique. Soit pour ce dernier pays une augmentation de presque 10% du budget national ! Difficile à encaisser… et justifier.
Un objectif à portée de main pour la France
Pour la France, l’effort à fournir est relativement faible. Selon les statistiques compilées par l’agence européenne de défense, en 2014, les dépenses de défense représentaient 1,85% du PiB. Ce qui représente un effort à fournir de 4,6 milliards $. Et cela sans compter les rallonges budgétaires consenties en 2015 et 2016. L’objectif du 2% est donc à portée de main… contrairement à ce que laisse sous-entendre Nicolas Sarkozy.
Des Britanniques, presque bons élèves !
A noter que pour le Royaume-uni, il n’y a (pour l’instant) pas d’effort à fournir, Londres atteignant déjà les 2%. La question pour les Britanniques est plutôt de maintenir l’objectif, la tendance récente outre-manche étant à la compression des budgets, il va falloir réinjecter de la livre sterling dans le moteur de la Défense si l’armée de Sa Sainte Majesté veut rester dans les bons élèves…
(Nicolas Gros-Verheyde)
(1) lire aussi : La recherche de défense européenne en panne d’investissement
une réunion du ‘board’ de l’Agence européenne de défense – au niveau ministériel (crédit : EDA)
(B2) a décidé de donner la parole à plusieurs intervenants du secteur. Jean-Pierre Maulny inaugure cette nouvelle série (et rubrique). Le directeur-adjoint de l’IRIS souligne combien l’idée de l’Agence européenne de défense, belle, ambitieuse, au départ, s’est vite retrouvée dévoyée sous le poids des réalités, des divergences des Etats membres. Faute de mieux, la Commission européenne a pris le relais. Ce qui n’est pas automatiquement négatif. J.-P. Maulny propose d’en finir avec les ambigüités — qui sont nombreuses dans la construction européenne de défense — et de transformer carrément l’Agence…
« Il y a 12 ans les pays de l’Union européenne portaient sur les fonts baptismaux l’Agence européenne de défense (AED). L’AED était née dans l’enthousiasme qui régnait au début des années 2000 pour bâtir une Europe de la défense. C’était le dernier étage de la fusée des institutions européennes dans ce domaine.
Le dernier étage de la fusée des institutions européennes
L’idée de sa création avait émergé durant la Convention européenne en 2002 et on n’attendit pas que le nouveau traité (NDLR le traité de Lisbonne a succédé à feu la Constitution) fut adopté pour commencer à faire fonctionner cette agence dès 2004. L’Agence, ce devait être la courroie de transmission qui devait permettre de développer des programmes d’armement européens en partant de l’identification des capacités militaires nécessaires à l’Union européenne en passant par l’organisation de l’industrie d’armement européenne et par la recherche commune de défense.
Une idée ambitieuse d’une entité politique
L’idée était d’autant plus belle et ambitieuse qu’un tel outil, qui reflète la volonté d’existence politique de l’Union, n’existe nulle part dans une autre organisation internationale. L’AED c’était la preuve que l’Union européenne était une entité politique ayant une existence propre contrairement à l’OTAN.
Trois chiffres
Douze ans après, le bilan de l’Agence européenne réside dans trois chiffres :
– « 120 » comme le nombre de personnes qui travaille dans cette agence,
– « 30 » pour les 30 millions d’euros de son budget et au maximum 150 à 200 millions d’euros de budget de recherche gérés en son sein,
– « 0 » comme le nombre de programmes d’armement qui sont nés au sein de cette agence même si l’AED joue un rôle utile pour l’achat en commun de matériels comme on a pu le voir dernièrement avec les ravitailleurs.
Pour comparaison la DGA en France compte près de 10.000 personnels et gère 10 milliards d’euros de contrats sur les programmes d’armement.
Un constat d’échec qui ne peut pas s’expliquer par deux causes
Face à ce constat, qu’il faut bien qualifier d’échec, le discours tenu, en France notamment, est sempiternellement le même et pourrait se résumer en deux phrases :
Si le constat sur le blocage britannique n’est pas faux, il ne suffit pas à expliquer la situation actuelle.
Les Etats regardent ailleurs
La vérité est que les Etats qui devaient promouvoir l’AED s’en sont progressivement détournés. Le manque de moyens de l’Agence a certes joué mais l’Agence a souffert de la nécessité de s’entendre à 28 qui est la règle dans cet organe intergouvernemental de la PSDC.
L’incapacité des trois grands Etats, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni à s’accorder sur un rôle ambitieux pour cette structure a fait le reste alors même que certains Etats que l’on n’attendait pas jouait le jeu. C’est le cas de la Pologne, par exemple, qui confia à l’Agence une partie de son budget de recherche de défense.
Le vide rempli par la Commission européenne
De ce fait, c’est progressivement la Commission européenne qui a pris la main sur ces questions. A coup de communications, par le biais de son pouvoir de régulation du marché avec les deux directives sur les marchés de défense et de sécurité et sur les transferts intra-communautaires, la Commission européenne est devenue le centre de gravité en matière d’armement.
L’action préparatoire en matière de recherche de défense parachèvera sans doute cette prise de pouvoir car l’instance communautaire deviendra certainement dans le futur l’institution qui gèrera l’essentiel des fonds européens pour la défense : on pense notamment au 9ème PCRD pour les années 2021-2027 où une ligne de crédits en matière de recherche de défense d’un montant significatif verra le jour.
L’AED en sous-traitance
Et, de fait, on voit aujourd’hui l’AED travailler de plus en plus en sous-traitance de la Commission européenne comme ce sera le cas avec l’action préparatoire en matière de recherche de défense, l’Agence disposant des compétences scientifiques que la commission ne possède pas pour suivre les projets qui seront financés.
Une symbolique du fonctionnement européen
L’histoire de l’Agence européenne de défense est, en réalité, emblématique du fonctionnement de l’Union européenne aujourd’hui. Faute de pouvoir s’entendre entre eux les Etats membres de l’Union délèguent à l’institution communautaire le soin de prendre des initiatives et délaissent les instruments intergouvernementaux qui ont été mis à leur disposition qui ne viendront que constater leur échec à s’entendre.
Le communautaire a un avantage que l’intergouvernemental n’a pas
L’institution communautaire présente à ce niveau un avantage, elle permet aux Etats d’avancer sans avoir à assumer la responsabilité des décisions qui sont prises. Il n’y a que dans le cas de crises graves, celles qui concernent directement l’unité de l’Union et les intérêts essentiels des Etats, que les Etats membres reprennent la main par le biais du Conseil européen, comme on peut le voir aujourd’hui avec les questions de terrorisme et de migration et comme on a pu le voir dans le passé avec la crise grecque.
Une évolution pas négative pour la défense
Pour ce qui est de la défense et de l’armement, l’évolution à laquelle on assiste actuellement n’est pas nécessairement négative dans le sens où le handicap principal de la politique de défense et d’armement européenne est le manque d’harmonisation des politiques nationales dans un secteur où le cadre de référence utile ne peut plus être le cadre national. Plus personne en Europe ne peut relever les défis de sécurité dans le cadre national. On le voit avec la question des migrants ou du terrorisme. Plus personne ne peut bâtir une industrie d’armement au niveau national qui lui permette d’avoir une autonomie stratégique significative.
Une tentation de divergences qui demeure
Reste que la transition actuelle se déroule sans que les Etats n’aient vraiment avalisé cette évolution ni même qu’ils en aient réellement conscience. Reste aussi que ces Etats n’ont pas toujours des options identiques en matière de politique étrangère, qu’ils ne partagent pas toujours les mêmes intérêts de sécurité et qu’ils n’ont pas toujours la même vision de ce que doit être l’autonomie stratégique, c’est-à-dire in fine le degré d’indépendance et d’ambition de l’Union européenne en tant qu’acteur sur la scène internationale.
Une nécessité : lever les ambiguïtés, faire évoluer les statuts
Toutes ces ambiguïtés devront être levées dans les années qui viennent, à 28 ou dans un cadre plus restreint. Car s’il est nécessaire d’aller de l’avant dans un cadre collectif en matière de défense et d’armement, il faut savoir où on veut aller, comment et avec qui. Quant à l’Agence européenne de défense, et si on continue dans la perspective actuelle, il faudra envisager de faire évoluer son statut vers celui d’une agence déléguée de l’institution communautaire. »
Jean-Pierre Maulny
directeur-adjoint de l’IRIS (l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques)
et membre du board d’ARES group (groupe de réflexion sur l’industrie de la défense et de l’armement)
Les propos tenus n’engagent que son auteur – intertitres et mise en page de la rédaction
(B2) Un voilier battant pavillon turc, le Talay 1, avec 52 migrants à bord, a été secouru jeudi (4 mai) par la Garde côtière italienne au large de Leuca — une ville portuaire située dans le talon de la ‘botte’ italienne, faisant face à l’Albanie et la Grèce.
Au large de Leuca un appel de détresse
Un appel est parvenu à l’aide du centre des opérations de la Garde côtière, selon la presse italienne qui relate l’affaire : « Nous sommes au milieu de la mer, venez nous sauver ». Deux vedettes de Gallipoli et Santa Maria de Leuca se sont alors portées au secours du bateau à environ 11 miles à l’est de Capo di Leuca. Il a fallu un peu de temps, la mer étant agitée, avant que les garde-côtes puissent prendre pied à bord, pour pouvoir ensuite remorquer le voilier à terre.
50 personnes sauvées, deux passeurs arrêtés
Les 52 personnes qui étaient à bord — 23 hommes, 8 femmes (dont 3 enceintes) et 21 mineurs (dont 7 enfants — ont été récupérées saines et sauves et ramenées en Italie au centre Don Tonino Bello de Otranto. Elles viennent essentiellement de Somalie, Syrie, Pakistan et Afghanistan. Parmi eux, deux Géorgiens. Ils ont rapidement été suspectés de n’être pas des migrants mais des passeurs. Le procureur de Lecce, la ville voisine a ouvert une enquête, selon le quotidien local LeccePrima. Un homme âgé de 43 ans, nommé David Barkaia, a été arrêté. Il aurait conclu le contrat de location du bateau. L’autre, un jeune homme de 23 ans, supposé être son complice, a été expulsé.
Deux navires secourus dans les quatre derniers mois
Cette arrivée est-elle un épiphénomène ou le symptôme de l’ouverture de ces fameuses « voies alternatives » évoquées de temps à autre ? Pour nos collègues italiens, l’arrivée dans ces parages reste assez épisodique. Le dernier épisode connu remonte au 31 mars. Ce jour-là un bateau transportant environ 20 migrants de diverses nationalités avait été secouru par la Guardia di Finanza et les Carabinieri. Deux trafiquants avaient été arrêtés — un Albanais et un Grec, ainsi qu’un Syrien en possession de faux documents. Un autre bateau avait été localisé en janvier. L’aventure avait fini tragiquement avec la mort d’une femme nigériane.
(NGV)