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B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages
Updated: 5 hours 39 min ago

Le SNMG2 prêt à réagir en Méditerranée face à la crise des migrants

Thu, 11/02/2016 - 18:05

Le SNMG n°2 déployé en Méditerranée (Crédit : OTAN / Marcom)

(B2) L’OTAN n’aura pas trop de difficulté pour mettre sur pied une force maritime en mer Egée afin de surveiller les côtes turques (lire : Les navires de l’OTAN en mer Egée. Merci Angela !). Elle s’y trouve déjà ! Le groupe maritime permanent de l’OTAN n°2 (en abrégé, SNMG2) est en effet actuellement dans la zone.

Sous commandement allemand

 

Et le hasard fait bien les choses… Il est placé sous commandement allemand, avec une composition turque. Ce qui correspond bien à l’esprit de l’initiative lancée par la Chancelière Angela Merkel et son homologue turc Hamet Davotoglu. Et aux conditions posées par la Grèce pour l’acceptation de cette mission (lire papier à suivre).

Trois navires

Le contre-amiral Jörg Klein a, en effet, sous son commandement trois navires : le navire de soutien allemand FGS Bonn (A-1413) — qui sert de navire amiral —, la frégate turque TCG Barbaros (F-244) — fabriquée dans les chantiers navals allemands de Hambourg — et la frégate canadienne NCSM Fredericton (FFH-337).

Il vient tout juste de terminer une série d’exercices en mer (interdiction maritime, recherche et sauvetage en mer, défense aérienne et sous-marine, tir direct sur cible etc.) avec une task force turque composée de plusieurs navires : une frégate (le TCG Gökçeada), deux patrouilleurs rapides (le TCG Mizrak et le TCG Zipkin ), une corvette (TCG Bodrum) et un sous-marin (le TCG Atilay). Le tout soutenu par une série de sorties aériennes effectuées par des chasseurs F-16 de la Force aérienne turque.

(NGV)

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Les navires de l’OTAN en mer Egée. Merci Angela !

Thu, 11/02/2016 - 15:00

Un navire de l’OTAN traçant sa route en Méditerranée (crédit : OTAN / Active Endeavour)

(B2) Les réfugiés et passeurs vont pouvoir dire merci à Angela Merkel (la chancelière allemande), Ahmet Davutoğlu (le premier ministre turc) et à l’OTAN. Ils auront désormais à leur porte non seulement l’entrée dans l’espace Schengen mais une sorte de pont maritime vers l’Europe. Une OTAN assistance.

La décision prise aujourd’hui par les ministres de la Défense de l’Alliance atlantique, réunis à Bruxelles, du lancement d’une mission maritime, en mer Egée, au large des côtes turques est certes intéressante. Mais elle risque d’avoir l’effet inverse de celui recherché et de devenir un véritable aspirateur à migrants.

Un aveu de faiblesse européen

L’objectif affiché — contribuer à sécuriser les frontières turques et venir au secours des réfugiés et migrants — est louable. Il n’y a pas trop de navires dans la zone, effectivement. L’idée évoquée un moment par Jean-Claude Juncker d’avoir des patrouilles conjointes gréco-turques a fait long feu. Tandis que l’appel de l’agence Frontex à davantage de moyens maritimes sur la zone n’a pas vraiment rencontré les effectifs espérés. Dans le même temps, les passages ne diminuent pas.

On ne peut cependant s’empêcher de penser que l’appel à l’OTAN ressemble à un aveu de faiblesse généralisée des Européens, incapables d’avoir un minimum de solidarité et de discipline sans le parapluie américain, et d’avoir un peu de fermeté par rapport à Ankara.

De multiples raisons à l’engagement, pas toutes avouables…

Il ne faut pas se leurrer cependant. Si pour l’Allemagne et de nombreux pays européens, il est important d’arrêter le flux des réfugiés et migrants, le plus tôt possible. Si pour la Grèce, il est important d’avoir une assistance plus notable que celle donnée par les Européens, il y a d’autres motifs plus géopolitiques à un tel déploiement.

Cela fait plusieurs années aussi que la Turquie cherche à impliquer davantage l’Alliance dans la protection de ses frontières et dans le conflit latent qu’elle a avec le gouvernement syrien. L’engagement russe, devenu plus opérationnel ces derniers mois en Syrie (du type opération extérieure et non pas seulement soutien en conseils et munitions), n’avait pas suffi à convaincre ses partenaires de se ranger délibérément à ses côtés. La crise des réfugiés fournit aujourd’hui une bonne opportunité à chacun pour avancer.

Cela fait longtemps aussi que l’Alliance atlantique songe à relancer son opération maritime en Méditerranée, Active Endeavour, instaurée depuis les attentats de New-York et Washington de septembre 2001, qui cherchait un second souffle. Sa présence maritime en mer via les groupes permanents maritimes (SNMG*) manquait d’un objectif plus politique. Il faut ajouter à cela la dynamique russe, désormais plus agressive à l’est, en Ukraine comme dans le Caucase. Le renforcement maritime en Méditerranée orientale serait ainsi le versus maritime du renforcement terrestre décidé aujourd’hui par l’OTAN et qui sera endossé au sommet de Varsovie.

De nombreux problèmes à résoudre

Le plus difficile commence maintenant. La marine de l’OTAN va être confrontée aux mêmes problèmes que les autres déploiements en cours, de l’UE en Méditerranée ou de l’OTAN dans l’Océan indien. Mais avec une dimension supplémentaire : les eaux de la mer Egée sont souvent des eaux territoriales – grecque ou turque. Elles engendrent des obligations ou des difficultés tout aussi importantes qu’une action en haute mer.

Que faire si des réfugiés accostent un navire de l’OTAN ? Comment va s’organiser le secours en mer (SAR) ? Les « naufragés » seront-ils refoulés et reconduits en Turquie ? Ou seront-ils accueillis ? Les « naufragés » auront-ils le droit de déposer une demande d’asile directement à bord de ces navires auprès de l’Etat du pavillon ? Etc.

Va se poser également toute une série de questions sur la poursuite des trafiquants d’êtres humains. Comment appréhender les trafiquants ? Et à qui les traduire ? Sous l’égide de quelle loi ? Qui va fournir les premiers éléments d’instruction ? Seront-ils conformes aux critères habituels des droits de l’Homme ?

Aux questions juridiques se superposent souvent des questions plus politiques voire médiatiques. Que va-t-il surtout se passer quand une mère ou un enfant s’accrocheront pour ne pas être refoulés en Turquie ? Pourra-t-on refouler en Turquie des réfugiés se disant kurdes et persécutés en Turquie ? Qui va instruire ces demandes, etc.

Toutes ces questions seront d’autant plus cruciales que certains pavillons (le pavillon allemand…)  risquent d’être plus courus que d’autres et… qu’il reste le poids de l’histoire malgré tout. Je n’ose imaginer la photo d’un marin allemand obligé de refouler en Turquie un bateau de réfugiés …

Une mission vraiment efficace ?

A l’instar d’un diplomate chevronné d’un pays membre de l’OTAN, on peut donc s’interroger sur l’opportunité et l’efficacité d’une telle mission « S’il s’agit d’empêcher le départ de migrants. En quoi  ce serait plus facile qu’un contrôle sur la terre ferme. En quoi les patrouilles maritimes de l’OTAN se distingueraient de Mare Nostrum, qui a été reconnue comme une erreur… »

(Nicolas Gros-Verheyde)

(*) Le SNMG 2 (Standing NATO Maritime Group) qui est sous commandement allemand est actuellement dans la zone.

Lire aussi : Une initiative germano-turque. Que l’OTAN s’implique dans la surveillance des migrations

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Les Six se rebiffent !

Tue, 09/02/2016 - 22:33

(B2) Les six pays fondateurs de l’Union européenne (1) viennent d’approuver ce mardi (9 février) à Rome une déclaration intitulée « Tracer la voie à suivre » afin de « renforcer la cohésion dans l’Union européenne ». Les Six affirment être très « préoccupés par l’état du projet européen ». Mais ils affirment leur volonté de « lutter pour des solutions européennes » et notamment vouloir poursuivre le travail européen d’une « union sans cesse plus étroite ». Une sorte de réponse à ceux qui prônent une union plus lâche.

Une fois n’est pas coutume, B2 retranscrit de façon intégrale cette déclaration qui est, en soi, plus qu’un ultime rappel de certains principes connus mais pourrait amorcer d’autres engagements dans l’avenir.

Alors que l’Europe se rapproche du 60e anniversaire du traité instituant la Communauté économique européenne, le 25 mars 2017, nous sommes préoccupés par l’état du projet européen. En effet, il semble faire face à une période très difficile. Dans ces moments critiques, nous, en tant que membres fondateurs, nous sentons particulièrement appelés.

Une union sans cesse plus étroite

Nous ne devons pas oublier que l’Europe a dû passer par les conflits violents et une histoire douloureuse avant de poursuivre la voie de l’intégration. Pour de nombreuses générations, l’Europe était simplement un rêve de paix et de compréhension, accompagné par l’espoir de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de la primauté du droit et de la solidarité sur le continent. Le projet européen nous a permis de faire de ces principes mêmes la fondation de notre coexistence en Europe. Ils ont été la base de notre sécurité, la stabilité et la prospérité. Ils sont aussi notre capital pour notre avenir commun. Nous croyons fermement que l’Union européenne reste la meilleure réponse que nous avons pour les défis d’aujourd’hui et permet différents chemins de l’intégration. Nous demeurons résolus à poursuivre le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples d’Europe.

Etre prêts à lutter pour des solutions européennes

L’Europe est un succès lorsque nous surmontons (nos) propres intérêts étroits dans l’esprit de solidarité. Nous devons être prêts à lutter pour des solutions européennes. L’UE est bien plus que la somme de ses 28 États membres. Cela vaut également pour la crise des réfugiés, un des plus grands défis auxquels l’Union européenne est actuellement confrontée. La priorité est de mettre pleinement en œuvre nos décisions communes avec efficacité et humanité. Une meilleure gestion des frontières extérieures de l’Union est essentielle pour rendre plus sûres sans entraver la fluidité du mouvement et de l’acquis de Schengen. L’Europe a besoin d’une approche équilibrée et géographiquement globale, fondée sur la solidarité et la responsabilité. Il est crucial de renforcer la coopération globale avec les pays d’origine et de transit, en vue d’endiguer les flux de migrants en situation irrégulière et à la lutte contre les causes profondes de la migration.

Les récentes attaques terroristes ont ciblé les valeurs fondamentales et les droits de l’homme qui sont au cœur de l’Union européenne – la solidarité, la liberté, y compris la liberté d’expression, le pluralisme, la démocratie, la tolérance et la dignité humaine. Tous les citoyens ont le droit de vivre à l’abri de la peur. Nos valeurs communes doivent être protégées et la violence et le racisme doivent être limitées. Il faut faire davantage pour prévenir la radicalisation et de développer un contre-récit. Cela signifie également la lutte contre les ennemis de nos valeurs fondamentales. Nous avons confirmé la nécessité de renforcer encore la lutte contre les menaces terroristes, en pleine conformité avec les droits humains et la primauté du droit.

L’Union un acteur mondial

Nous avons discuté du rôle que l’Union est appelée à fonctionner comme un acteur mondial. La nouvelle stratégie globale de l’UE sur la politique étrangère et de sécurité va doter l’Union d’une vision actualisée et des outils efficaces pour stimuler son action. Il mettra l’accent sur l’importance de la politique de sécurité et de défense européenne au cœur des engagements européens pour la paix et la stabilité dans le monde. Un voisinage démocratique, stable et prospère est une priorité stratégique et dans l’intérêt fondamental de l’UE.

Nous déclarons et confirmons notre engagement fort pour l’Europe et le projet européen et invitons tous les autres États membres à s’y joindre.

(1) Belgique, Allemagne, France, Italie, Luxembourg et Pays-Bas

Traduction effectuée par nos soins, les intertitres sont de la rédaction

Lire notre analyse :  God save the Queen ! L’Europe à la veille d’une révolution politique ?

 

Un général britannique quasiment à la tête d’une division française. Et vice-versa, oh my god !

Tue, 09/02/2016 - 11:25

(B2) Une division française commandée en second par un Britannique. Et vice-versa… C’est non seulement envisageable. Mais ce sera la réalité, d’ici quelques mois, selon nos sources.

Un général britannique, Nick Nottingham, va ainsi être nommé adjoint du commandant de la Première division de Besançon (ou Etat-Major de forces EMF n°1). Tandis qu’un général français fera le trajet inverse, devenant l’adjoint de la 1ère division de York (Angleterre) qui a 14.000 hommes/femmes sous ses ordres. C’est le premier échange de la sorte, à ce niveau opérationnel.

Il illustre pour Paris et Londres le rapprochement entamé depuis les accords de Lancaster House signés en novembre 2010 par Nicolas Sarkozy et David Cameron. Les Britanniques viennent d’entamer ce type d’échange avec l’US Army. Le général Michael Tarsa est ainsi devenu le premier Américain à être commandant en second de la 3e division britannique, nous apprend notre collègue du Telegraph qui titre avec humour « sacre bleu ! ».

(NGV)

God save the Queen ! L’Europe à la veille d’une révolution politique ?

Tue, 09/02/2016 - 07:00

Le musée Nemo à Amsterdam (© NGV / B2)

(B2) Les crises successives — la crise financière et économique, plus profonde que prévue, la crise des réfugiés et des migrants de Méditerranée, plus longue et intense qu’envisagée, la résurgence d’un terrorisme — secouent non seulement le bateau européen aujourd’hui mais ils l’interpellent également sur l’essence de la construction européenne et son avenir. Les prises de position s’enchainent. Les « pères » de l’Europe se succèdent, avertissant du drame qui se prépare. Tous plus tragiques que les autres. Dans une tonalité finalement assez défaitiste. Effectivement, l’Europe de « papa » est morte. Mais l’Europe n’est pas morte. C’est une vraie révolution, au sens géophysique, qui se profile effectivement. Elle est, pour l’instant, finalement douce, invisible. Mais insensible et continue. L’éloignement britannique, conçu de manière tactique par David Cameron pour s’imposer, apparait ainsi comme un nouveau symptôme qui pourrait tout autant être un déclencheur. Il pourrait revenir comme un boomerang à ses concepteurs, faire éclater l’Europe ou, au contraire, la faire repartir en avant…

Retour en arrière, c’était l’Europe de papa ?

Le temps de la construction par étapes est-il révolu ?

Revenons quelques années en arrière… avant la crise. L’Europe se construisait par strates successives à partir de politiques sectorielles, juxtaposées d’une certaine façon les unes aux autres : l’agriculture, les transports, le commerce des biens, figurent parmi ces politiques relativement intégrées… et réussies. Avec des à coups et des coups de mous. Mais bon an, mal an, cela avançait.

Le principe était assez simple : on bâtissait un cadre juridique avec, au besoin, des instruments financiers de soutien, et un ou deux instruments de pression. La construction se faisait alors par cercles concentriques. Un premier filet permettait d’empêcher de faire diverger les législations nationales et de commencer à les rapprocher. Puis par vagues successives (paquets de libéralisation, de réformes), le filet se resserrait permettant de compléter le dispositif, de manière à faire disparaitre les grosses divergences, avec un système d’auto-contrôle à peu près accepté (procédure en manquement, arrêt de la Cour, application).

Au fil des ‘incidents’ de parcours (catastrophes naturelles ou humaines, dérapages des Etats membres), on complétait ou réparait le dispositif en optant pour un système plus ou moins intégré. Et s’il y avait un problème, on le laissait de côté, reportant sa solution à plus tard, en espérant que le temps faisant son affaire. Une solution finirait par surgir, à la faveur d’une crise ou d’une bonne conjonction politique.

Un élargissement empirique

En parallèle, s’est poursuivi un élargissement géographique, assez désordonné, en fait. Il s’est déroulé en fonction des opportunités politiques : la fin des dictatures au Portugal, Espagne et Grèce ; le besoin de rejoindre un marché européen des nordiques, l’écroulement du mur de Berlin et l’ouverture des frontières entre l’Est et l’Ouest.

Chacun a adhéré pour des motifs, finalement assez différents, à la construction européenne. Les uns cherchant des débouchés économiques, les autres l’assurance d’un développement économique, loin de l’esprit politique des fondateurs. L’organisation européenne s’est adaptée à cette nouvelle donne mais uniquement au plan institutionnel (efficacité du mécanisme décisionnel, transposition des règles existantes…), pas au plan politique ni de la population.

Un château de cartes fragile

Ce dispositif s’est doublement écroulé à la fin des années 2010 tout d’abord car la construction intégrée s’est peu à peu stoppée. Le marché intérieur était réalisé, indiquait-on. Nul besoin de législations nouvelles. Nul besoin de contrôle non plus.

C’était alors le règne du « moins légiférer », du « red tape » (cher aux Britanniques et à d’autres), des codes de conduite volontaires à peine édictés et aussitôt oubliés. Les industries, les Etats étaient mûrs pour s’auto-organiser, c’était le terme le plus à la mode. L’Union était réalisée. On allait se doter d’une « Constitution ». C’était oublier que les tendances centrifuges n’avaient pas diminué, que l’application des règles communautaires n’était pas toujours réalisée, que le marché intérieur était dans certains points assez théorique, que le travail était loin d’être terminé dans les pays qui venaient d’adhérer mais aussi dans les Etats fondateurs, et qu’il n’y avait toujours pas de « gouvernement » ni de « responsabilité » européenne au sens politique du terme.

L’esprit européen interpellé

Quant à l’esprit européen, il ne s’est pas adapté à la nouvelle donne d’une Europe à 25, 27, 28 Etats membres. Certains objectifs ne sont que peu partagés. Pour les Européens de l’ouest, l’élargissement à l’Est signifiait, plus ou moins, le dernier, la fin du parcours. Pour les Européens de l’est, qui n’ont jamais supporté d’être en « frontière », c’était le début de l’intégration de leurs voisins… de l’est (Moldavie, Ukraine…).

Le sens de solidarité et de partage s’est effacé au fil du temps. De façon assez symbolique, le nom même de Communauté européenne s’est effacé au profit de l’Union européenne, annoncé comme plus politique mais finalement plus flou dans ses obligations.

Quand la crise économique est venue, l’Europe était alors démunie tant au sens administratif que politique. Elle a réagi tardivement, avec un effet de retard qui a lui-même accentué la crise financière et encouragé la crise politique interne.

Une succession de crises qui interpellent la notion de pouvoir

Les crises qui frappent l’Europe sont de nature différente mais elles interpellent, toutes, la notion même de pouvoir, d’autorité étatique. Ce n’est pas seulement une crise européenne, c’est une crise des Etats qui la composent qui s’interrogent sur leur devenir et leur capacité d’action… La réalité aujourd’hui, c’est qu’il est difficile pour un seul Etat de faire face seul à toutes les crises… Après quelques tergiversations, qui ont duré et parfois contribué à prolonger une crise, l’Europe a réagi (ou est en train de réagir), transformant ainsi la réalité politique, sans parfois changer un iota aux traités de base.

La Monnaie et le Budget

Avec la crise en Grèce, la Zone Euro et la Commission européenne se sont dotées de moyens, de type fédéral, qui n’étaient pas prévus à l’origine. Des moyens de surveillance, contestés car ils ne s’accompagnent de l’élément indispensable de l’exercice de la contrainte, une certaine légitimité démocratique. Certes, ce sont les gouvernements — et leurs parlements — qui ont consenti à ce glissement de souveraineté. Mais il manque une représentation européenne de cette légitimité, un parlement de la Zone Euro.

Les frontières

La crise des migrants et des réfugiés, qui devient une crise des frontières, va obliger les Européens à se doter d’un dispositif commun non seulement en matière d’asile (répartition des réfugiés sur tout le territoire européen) ou d’immigration, mais aussi de surveillance et de contrôle des frontières extérieures. C’est le sens de la proposition faite par la Commission européenne en décembre 2015. Lire notre dossier : N°30. Garder les frontières de l’Europe. Vers un corps européen de garde-côtes et garde-frontières

Le terrorisme

Les attentats successifs de Paris, Copenhague, de Sousse, Bamako, Istanbul, Ouagadougou… montrent que le terrorisme n’est pas un épiphénomène. (lire notre dossier : N°32. L’Europe face à une nouvelle vague de terrorisme). Il puise à la fois à l’intérieur des sociétés et à l’extérieur. Chacun des pays perçoit bien qu’il ne peut faire face et lutter tout seul face à ce phénomène. Quand une arme des Balkans est désactivée en Slovaquie, revendue en République Tchèque ou en Belgique pour devenir une arme à disposition de terroristes, passés par plusieurs pays européens, pour commettre leur crime à Paris, on voit bien que la problématique est européenne.

La défense

Les menaces aux portes de l’Europe obligent à une réflexion identique en matière de défense. L’invocation de la clause de l’article 42.7 par la France est un signal politique. Les Européens feraient bien de s’en saisir et d’avoir, d’ici quatre ou cinq ans, une vraie capacité de défense. Car les moyens sont aujourd’hui très éparpillés, sans de réelle coordination politique. Face à un danger, les Européens en sont toujours réduits à faire appel au gentil tonton d’Amérique pour fournir hommes et matériels pour être stationnés en Europe, drones, avions de transport stratégique ou moyens de reconnaissance, voire même… réparer une piste d’aéroport ! (je n’invente rien ! Lire :  Les Etats-Unis veulent quadrupler leur budget de présence en Europe. Faute d’Européens). L’Europe en matière de défense est un enfant qui suce son pouce et veut rester dans sa poussette alors qu’il devrait être adulte.

L’Etat membre

Enfin, il y a des interrogations purement politiques. La tentation conservatrice, nationaliste, de plusieurs Etats membres doit inquiéter. Les références à certaines valeurs ne sont plus évidentes aujourd’hui. Elles sont même discutées. La solidarité européenne n’est plus naturelle aujourd’hui. Elle devient même exceptionnelle. Des mouvements néo-nazis se développent au grand jour (y compris en Allemagne pas qu’on croyait vacciné contre de tels agissements). Certains pays qui paraissaient « solides » (Royaume-Uni, Espagne) voient en leur sein se développer une tentation séparatiste, douce, très différente de celle qu’ils ont connu dans le passé (IRA pour l’un, ETA pour l’autre) mais bien réelle. Cette tentation séparatiste pourrait atteindre d’autres pays. Il ne faut pas croire, par exemple, que la France en pourrait être absente par exemple. Ce qui amènera inévitablement une interrogation sur l’organisation de l’Union européenne.

Un renversement de compétences en gestation

L’absence d’une réponse européenne pèse

De ces différentes crises, de type et sociologie très différentes, c’est la notion même d’Etat Nation qui est interpelée. Ses moyens d’action (monnaie, police, frontières…) semblent diminués du fait d’une combinaison de facteurs (économique, politique…) et n’ont pas été remplacés par d’autres. L’absence d’une structure étatique européenne pèse. Ce n’est pas le trop d’Europe qui est problématique, c’est le moins d’Europe.

Certes des instruments ont été mis en place au niveau européen. Mais ils reposent sur du sable. Car ils n’ont pas été construits et prévus pour subir des crises fortes. En gros, pour reprendre une image maritime. On a utilisé des péniches prévues pour naviguer sur les fleuves, et on les a fait navigué en haute mer, en oubliant que la tempête pouvait subvenir. Il faut désormais bâtir un navire « tout temps ». Utiliser des bateaux de sauvetage est une solution, pour rejoindre la terre ferme. Mais cela ne résout pas le problème.

L’affaiblissement relatif des Etats européens

La tentation du repli sur soi, au niveau national, parait la solution la plus facile a priori. C’est rassurant. Cela peut être efficace à court terme (quelques mois voire quelques années). Mais très vite elle trouvera ces limites. Car la réalité du monde européen d’aujourd’hui, c’est que l’Europe est faible parce que ses Etats eux-mêmes sont faibles. Il faut le dire et le répéter aux Français, Britanniques ou Allemands qui se croient (encore) les rois du monde. Ce temps là est terminé ! Et il ne semble pas prêt de revenir.

L’affaiblissement relatif des Etats européens, tant au plan économique que l’échiquier international, se poursuivra, de façon inéluctable, s’il n’est pas contre-carré par une solidarité plus importante entre les Etats membres. Le reste du monde est en cours de développement — après l’Asie et l’Amérique latine, l’Afrique émerge lentement — même avec quelques soubresauts. Et la multiplication des crises oblige à des réponses multiples, auxquels plus aucun Etat européen n’a la capacité de répondre seul.

Un choix à faire

Les Européens ont un choix aujourd’hui : soit continuer comme avant gentiment, subir les crises seuls dans leur coin, et faire une législation sur les OGM ou sur la protection des données, développer Erasmus ou mener de par le monde des projets de développement, des domaines importants sans doute mais pas fondamentaux pour l’avenir européen ; soit renverser la vapeur, transformer ces crises en opportunité pour avancer (comme dans le passé), choisir d’approfondir ensemble, de réagir.

Une introspection rapide

L’Europe elle-même va devoir faire une introspection sur elle-même. A-t–elle vocation à s’occuper  du « marché », de « l’agriculture », des « transports » ? Ou doit-elle cogérer également certaines fonctions régaliennes où les Etats sont dépassés ? Comment gérer ces dispositifs, demain, en sachant que la méthode « de papa », des petits pas, du royaume des experts, parait difficile à tenir aujourd’hui, d’autant plus quand on touche à des domaines de haute sensibilité ou de souveraineté. Cette introspection, il n’est pas question de la traîner sur des années… il faudra la faire rapidement.

Des compétences à rétrocéder ?

Il y a une révolution politique aujourd’hui à accomplir : définir ce qu’il est important de faire ensemble, ce qui est nécessaire et ce qui l’est moins. Il faudra sans doute choisir d’abandonner certaines compétences, les partager, les déléguer, les retourner aux Etats (du moins à ceux qui le demandent). Après tout, est-ce vraiment du domaine européen que d’avoir des normes de déchets communes à toute l’Europe ? En 1975 c’était bien, aujourd’hui ?

Des compétences à développer

Il faudra aussi définir les compétences où il importe, rapidement, de combler les vides, de compléter les instruments et les législations. Cela supposera éventuellement des ajustements de compétences, dans un sens et dans un autre. Il faudra aussi les expliquer, les justifier à la population. Un effort démocratique sera nécessaire. Même si on peut tempêter parfois contre les demandes du Parlement européen, ou certaines intransigeances (sur le PNR par exemple), elles ne sont pas hors du commun mais plutôt nécessaires.

Vive l’Europe à la carte

Tous les Etats ne voudront sûrement pas consentir à ces ajustements. Il faudra en tirer parti et ne pas hésiter à le dire. Ils ne sont pas tenus aux nouvelles règles. Mais ce sera sans eux que cela se fera. L’Europe ne peut plus attendre éternellement le ou les 2-3 mauvais joueurs qui retardent tous les autres. C’est de cette façon que l’Europe a avancé ces derniers temps : pour la Zone Euro, pour l’espace de sécurité et de justice, on est loin d’avoir tous les Etats à bord. La récente proposition de Donald Tusk est intéressante en ce sens. Elle exempte le Royaume-Uni de l’intégration politique et acte d’une Europe à plusieurs vitesses.

Vive le Royaume-Uni

Cette Europe à la carte, parfois honnie, doit être au contraire célébrée. Personne n’est obligé. Mais ceux qui le veulent, peuvent et doivent aller de l’avant. La renégociation britannique offre une opportunité formidable. Il faut s’en saisir…

Vive l’Europe. Et … God save the Queen !

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nous avons vu « Les chevaliers blancs »

Sun, 07/02/2016 - 20:11

(B2) Le film ‘Les chevaliers blancs’ de Joachim Lafosse retrace une histoire connue des lecteurs de notre blog, celle de l’Arche de Zoé.

Elle n’illustre cependant qu’une période et une partie de cette ‘épopée tragique’, l’arrivée sur place au Tchad de l’équipe de l’ONG jusqu’à son arrestation par les forces tchadiennes, avec une trame essentiellement psychologique : les déchirements au sein de l’équipe dont une partie découvre peu à peu toute l’ampleur du projet (*). Des personnages extrêmement bien joués, qui balancent à chaque fois entre le blanc et le noir et retracent en grande partie la réalité.

Les observateurs relativement connaisseurs du terrain auront assez vite remarqué quelques incongruités. Il fait un peu plus chaud au fin fond du Tchad à Abéché. La piste de l’aéroport est un peu super moderne par rapport à ce qu’elle est en réalité… Et, mise à part une séquence au début, la présence militaire française reste assez limitée. En revanche, on voit arriver des forces européenne d’EUFOR qui arrêtent un moment les ‘zozos’ en pleine prospection dans les villages. L’officier d’EUFOR est très bien campé dans la peau d’un Britannique. Cela c’est pour le roman. Car nous savons tous que les ressortissants de Gracieuse majesté étaient plutôt en nombre limité dans l’opération (2… si mes souvenirs sont bons et davantage dans l’état-major que sur le terrain), contrairement aux Irlandais ou Polonais. Pour l’image, certainement, il valait mieux un Britannique…

(NGV)

Lire aussi le témoignage que nous avions recueilli à l’époque : Témoignage du pilote Belge de l’opération Arche de Zoé / Children Rescue au Tchad

 

Un peu d’amour dans un monde de brutes. La radio Opex de l’armée allemande

Sun, 07/02/2016 - 10:00

(B2) La Bundeswehr a lancé une campagne pour la Saint-Valentin sur sa radio spéciale à destination de ses troupes.

Les amoureux peuvent souhaiter à leur alter ego engagé(e) en opération extérieure (Opex) en mer (Méditerranée), au Kosovo, en Afghanistan, au Mali ou ailleurs, toute leur preuve d’amour.

Elle consacrera sa journée du 14 février, de 10 à 12 h et de 18 à 20h aux messages d’amour.

 

C’est la crise à Morghia. Les Européens interviennent. Une love affair démarre

Sat, 06/02/2016 - 21:18

extrait de Love Affair 1994, remake du film Elle et lui, produit par Warren Beaty avec Annette Bening and Katharine Hepburn

(B2) C’est la crise. Les élections présidentielle et législatives qui viennent d’avoir lieu à Morghia, un nouvel Etat au voisinage de l’Europe, tournent mal. Les tensions montent. Les manifestations dérapent. Le pays est au bord de la guerre civile… Que faire ? C’est le scénario sur lequel les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont planché, ce vendredi (5 février) en fin d’après-midi, dans le musée maritime d’Amsterdam où il étaient réunis pour leur traditionnel ‘gymnich‘ (la réunion informelle des ministres).

Un jeu-scénario développé par les Néerlandais

Ce « jeu de rôle » était une innovation de la présidence néerlandaise qui voulait tester et voir les réactions des différents chefs de diplomatie européenne. Trois séries de film ont ainsi été projetées dans la salle des ministres. Des films « très réalistes et très bien joués » ont expliqué à B2 plusieurs responsables qui ont permis d’illustrer tous les stades de la crise : de la montée de la crise au paroxysme et à la stabilisation.

Une certaine volonté européenne

« Ce qui est intéressant est de voir que, parmi les ministres, la position très dominante prévalait la volonté commune de faire participer l’Union européenne très tôt à la crise. Un certain nombre de participants étaient même prêts à envoyer un battlegroup » a relaté à quelques journalistes, dont B2, Didier Reynders, le ministre belge des Affaires étrangères. Ce qui, en soi, est une première vu toutes les difficultés qu’on connait aujourd’hui à seulement prononcer le mot de ‘battlegroup’ dans une gestion de crises. « Ce n’est jamais le bon moment ni le bon battlegroup ». Finalement tout est bien qui fini bien. L’Union européenne est intervenu rapidement. Et en un moins, on pouvait se féliciter du retour à la normale… Ce qui reste relativement rare en ce moment.

Une love affair à suivre

Restait cependant une interrogation parmi certains ministres. Dans la dernière séquence, la journaliste (présente dans le film) s’était insensiblement rapprochée du chef d’observation de la mission de l’UE qui avait été déployée sur place (*). Un rapprochement qui semblait dépasser le côté professionnel de part et d’autre. « Nous sommes demandés si cette ‘love affair’ qui semblait bien entamée se concluerait. On attend la suite » a confié, sur le ton de l’humour, un des participants au jeu. Le saura-t-on un jour… La suite dans la Saison 2 de Morghia, à Bratislava au second semestre ?

Un niveau politique à accélérer

Au-delà de l’anecdote, cet exercice était intéressant. Car, bien souvent, dans une gestion de crise, ce n’est pas au niveau militaire ou des planificateurs que cela coince ni même le manque de moyens. C’est le niveau politique qui reste indécis et bloque ainsi ou retard toute réaction de crise. A plusieurs reprises, j’ai eu ainsi des échos de différents responsables de la gestion de crise comme de planificateurs de terrain qui n’avaient pas de direction sur les options à préparer ou, pire, ne décidaient pas entre les options présentées. « Planifier, déployer, vite au besoin, on peut le faire. Encore faut-il qu’on décide. Et le plus vite sera le mieux » m’avait fait remarquer un expert de ces questions lors de ces crises où le niveau politique se tâtait. « Nous militaires, on l’habitude de se débrouiller. Si on nous donne l’ordre, on peut aller vite. Mais plus on tarde, plus c’est difficile » regrettait un second.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(*) Toute ressemblance bien entendu avec une situation ayant existé ou existant est totalement fortuite, comme on dit dans les génériques de film. Ceci est une oeuvre de fiction.

Ursula et Jeanine sur un bateau

Thu, 04/02/2016 - 23:58

La signature de la lettre d’intention (© NGV / B2)

(B2 à Amsterdam) Ca y est. C’est signé ! Les deux ministres de la Défense, allemande et néerlandaise, Ursula von der Leyen et Jeanine Hennis-Plaeschaert, ont apposé leur paraphe, ce matin, sur leur projet de coopération maritime à bord du navire de soutien néerlandais Karel Doorman. Ce qui n’est pour l’instant qu’une lettre d’intention permettra, quand il sera entériné par les deux parlements, d’ici 2018 l’utilisation par les Allemands du navire de soutien amphibie et l’intégration des troupes de marine allemandes au sein du bataillon néerlandais.

La force de la confiance mutuelle

« L’Allemagne et les Pays-Bas montrent comment on peut faire l’intégration des forces en Europe » a commenté la ministre allemande qui s’exprimait à l’ombre de deux chars Leopard 2A6. « Notre accord démontre la force de notre partenariat. Mais il montre aussi la grande confiance mutuelle. Allemands et Néerlandais vivront, travailleront, se formeront ensemble et fusionneront ainsi en une seule entité. »

Une combinaison des moyens maritimes

La marine allemande pourra, en effet, utiliser toute la capacité du Karel Doorman dès 2018. De l’autre côté, les 800 hommes (et femmes) du bataillon maritime allemand de Eckernförde, spécialisé dans la protection des navires et les évacuations seront intégrés dans la marine néerlandaise. « Nous innovons en termes de l’intégration des forces armées en Europe. » (lire aussi :  Rapprochement maritime germano-néerlandais).

Des avantages réciproques à ouvrir à d’autres

Ce partenariat « offre des avantages significatifs à nos pays — a renchéri Jeannine Hennis-Plasschaert —. Nous augmentons la capacité de déploiement, partageons des connaissances et augmentons notre impact. Je pense que nous pouvons collaborer avec d’autres partenaires à l’avenir dans ce domaine ». Un appel du pied aux Belges notamment (avec qui les Néerlandais ont partagé une partie de leur marine) mais aussi des Danois.

Une division blindée multinationale en 2021

Les deux pays avaient déjà annoncé la création d’une unité commune terrestre. Ils poursuivent aujourd’hui par la marine. Et ils ne comptent pas s’arrêter là. « Notre objectif est beaucoup plus grand » a confirmé Ursula von der Leyen. « Nous voulons mettre en place une division blindées multinationale l’année prochaine. » L’objectif est d’atteindre une unité pouvant aller « jusqu’à 20.000 soldats », qui devrait être opérationnelle « en 2021 », a-t-elle ajouté.

Vers une Union européenne de la défense

C’est un « excellent exemple de la construction d’une Union européenne de défense » a-t-elle ajouté employant sciemment certains termes, indiquant que loin de la théorie Berlin et La Haye, entendent bien montrer un exemple qui puisse être rejoint par d’autres. « Nous voulons que l’UE soit plus efficace » souligne-t-elle. Certes il y a des situations « où nous avons besoin les forces armées », a-t-elle conclu. Mais « la stabilisation, le processus de réconciliation et de reconstruction économique doivent (toujours) suivre les opérations militaires. » L’Union européenne a un avantage qualitatif sur ce point, selon von der Leyen : sa capacité « à combiner le civil et le militaire ».

Commentaire : cet accord illustre les deux faces d’une même situation. D’un côté, une certaine gabegie dans les dépenses de défense en Europe. La construction du Karel Doorman a été conçue sans vrai ratio investissement/fonctionnement/utilité. Résultat : un navire qui a coûté cher et risquait d’être totalement sous-employé. De l’autre, un rapprochement nécessaire entre deux forces complémentaires qui devrait engendrer d’autres rapprochements. Au moment où certains budgets de défense repartent à la hausse, il importe de ne pas refaire les erreurs du passé : de dépenser sans prévoir les conditions et possibilités d’engagement, sans réfléchir, et de dupliquer les ressources qu’a déjà le voisin en ne comblant pas les lacunes cependant constatées par tous. Le pire est possible. Mais Berlin et La Haye nous montrent que d’autres voies sont possibles. Maintenant, il faudra voir comment ce rapprochement politique se concrétisera lors des engagements opérationnels.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Fous rires

Au-delà des mots, il y avait indéniablement entre les deux femmes, une vraie complicité, des éclats de rire. Passée la traditionnelle revue des troupes, assurée avec le sérieux, les deux femmes ont été tous sourires, se trompant de parapheur à signer, puis s’interrogeant ensuite — « nous allons où maintenant ».

La demande française de solidarité : un semi flop

Thu, 04/02/2016 - 17:30

Passée l’émotion, bien visible, malgré la gesta politique, le 17 novembre, la solidarité s’est fait attendre (Crédit : CUE)

(B2) Lors de la réunion des ministres de la Défense, le Français Jean-Yves Le Drian, devrait encore demander à ses alliés européens un peu d’aide et d’assistance européenne. Il faut dire que deux mois et demi après l’invocation par la France de l’article 42.7 (la clause d’assistance mutuelle), les Européens ne se bousculent plus vraiment au portillon français. Notre premier sondage, au bout d’un mois, montrait un certain engagement, à confirmer. Six semaines plus tard, on ne peut pas dire qu’il y ait eu de grands mouvements de confirmation. Et notre jugement de plutôt positif s’est affiné pour être à plutôt négatif (si on était dans une agence de classement, on dirait B-). Bien sûr, on pourrait dire que les Européens sont frileux, timides, pusillanimes. Mais, semble-t-il, la responsabilité de ce flop est largement partagé.

Le besoin de la crise des frontières

Tout d’abord, les Européens ont des besoins ailleurs. D’une part, la crise des réfugiés et des frontières oblige à mobiliser des forces importants. Et elle ne semble pas prêt de cesser immédiatement. L’armée est appelée à la rescousse dans plusieurs pays (Allemagne, Autriche, Croatie, Hongrie, Grèce). Et les Etats sont plus que réticents à envoyer leurs troupes au large.

La concurrence de la demande américaine

D’autre part, il faut répondre aussi à la demande américaine. Washington a aussi fait passer leur catalogue de demande pour demander aux Européens de s’impliquer davantage en Irak et en Syrie, dans la lutte contre Daesh. Une demande circonstanciée, accompagnée d’un argument sonnant et trébuchant : Nous nous engageons davantage sur le continent européen, dans les pays proches de la Russie, vous vous engagez davantage. La demande américaine avait l’avantage d’être incisive et claire. Entre soutenir les Américains et les Français, plusieurs pays ont vite fait leur choix. De façon officielle, plusieurs de ces pays (Italie, Pays-Bas) ont affiché qu’ils répondaient ainsi à la demande française. Une politesse toute diplomatique qui ne doit pas cacher que c’est la pression américaine qui a surtout payé pour un engagement supplémentaire au « Levant » (Irak, Syrie).

Une demande française assez floue

La demande française reposait sur un argument de moyens : aidez-nous en Afrique ou au Moyen-orient, pour dégager des moyens nous permettant de les utiliser sur le terrorisme. Une très belle allégorie. Mais une argumentation très difficile à justifier par exemple pour la Centrafrique (d’ailleurs l’offre en nombre de personnel se monte à moins d’une dizaine tout confondus pour ce pays). La France n’a d’ailleurs demandé aucun moyen direct pour lutter contre le terrorisme en France, ce qui aurait eu une valeur autrement plus symbolique et réelle de la solidarité. La complication que cela aurait entraînée en termes de gestion au jour le jour a pesé. Mais aussi un certain sentiment, très national, que la France peut répondre, toute seule, face au terrorisme. A cela, il faut ajouter un sentiment assez généralement répandu que gérer en multinational une opération offre un ratio coûts-avantages négatif. Le message français a ainsi été brouillé.

Le multilatéral (presque) toujours préféré au bilatéral

Enfin, la méthode choisie — le « bilatéralisme » — interroge aussi. Quand on s’appelle les Etats-Unis, cela peut fonctionner. Et encore… Même Washington est passé par un canal « multilatéral » : l’OTAN. Quand on s’appelle la France, qui reste un pays de taille moyenne, cela est plus délicat. Paris a préféré laisser l’institution européenne en dehors de tout canal de coordination et de concertation. A la grande satisfaction de certains responsables européens qui ont, ainsi, pu se laver les mains de tout flop. Or, c’était oublier un principe : hormis le Royaume-Uni (et quelques autres), la majorité des pays ne souhaite pas vraiment s’engager dans une « aventure » bilatérale, et préfère le multilatéralisme — que ce soit au sein de l’OTAN, de l’ONU ou de l’Union européenne — qui lui prodigue une ombrelle de sécurité et lui assure, au plan interne, un soutien politique. On pourra ainsi remarquer que, hormis l’a britannique, tous les engagements annoncés le sont soit dans une mission de l’Union européenne, soit de l’ONU. Un signe…

Une erreur tactique

L’utilisation de l’article 42.7 était une trouvaille intelligente. L’avoir cantonnée à une négociation bilatérale a brouillé les cartes. Les institutions européennes s’en sont désintéressées. Plusieurs pays se sont méfiés ou ont profité pour négocier des contreparties (toujours en discussion pour la Pologne par exemple). Les responsables militaires nationaux n’ont pas vraiment eu envie de s’engager, préférant poursuivre leur planification. Aucune pression extérieure ne se manifestant vraiment, l’effort européen est resté au milieu du gué. De fait, Paris n’a obtenu que deux engagements majeurs : le Royaume-Uni et l’Allemagne qui s’inscrivent tous deux dans une stratégie tout autant nationale que bilatérale, ainsi que quelques miettes d’engagement dans diverses missions européennes. Même les Belges – qui avaient réservé un demi-bataillon à disposition des Français sur le Sahel – semblent revenir sur leur position. Aucun accord n’a été trouvé entre Bruxelles et Paris. Un flop tout autant français donc qu’européen.

Des signes encourageants

Bien sûr, à Paris, on récuse ce terme. Et on préfère voir le verre à moitié rempli que le verre à moitié vide. Dans l’entourage du ministre, que B2 a joint, on préfère déceler dans les différents annonces faites par les Etats membres : « des signes encourageants ». Et on salue « les décisions courageuses des pays partenaires ». La réalité que nous avons perçue semble cependant toute autre. Jusqu’à preuve du contraire, le tour des capitales effectué par B2 (lire : La clause d’assistance mutuelle (42.7) activée. Qui se mobilise ? Comment ? (maj5)) démontre qu’il y a ainsi eu peu d’évolution majeure depuis fin décembre. Une analyse qui se base sur des engagements chiffrés, preuves à l’appui, et non sur des impressions. Pour nombre de pays, la raison d’un engagement extérieur ne peut se résumer à la solidarité avec la France. Il peut le motiver, le justifier. C’est en fait un argument (1), parmi d’autres, mais pas le plus décisif.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Il permet notamment de justifier certains engagements extérieurs, permettant également de convaincre des parlementaires réticents (surtout s’ils appartiennent au parti social-démocratique).

Une « Global strategy » ! Bon, et après on passe aux choses sérieuses ?

Wed, 03/02/2016 - 20:15

© NGV / B2 – dans le jardin attenant au musée maritime d’Amsterdam où se déroule le Gymnich

(BRUXELLES2) Le Landerneau bruxellois et alentours bruisse beaucoup de la future stratégie européenne sur la politique extérieure et de sécurité, renommée « global strategy » (1), que Federica Mogherini entend voir adopter en juin par les Chefs d’Etat et de gouvernement. Les 28 ministres des Affaires étrangères et de la défense auront un déjeuner en commun sur ce sujet vendredi à Amsterdam. A presque 60 autour de la table, je ne suis pas sûr que cela puisse mener très loin…. Et honnêtement, j’ai vraiment du mal à me passionner pour cet exercice qui me parait légèrement éloigné de la réalité…

Une stratégie pour le bien-être ?

Depuis que je couvre les questions européennes, je n’ai jamais vu un responsable politique se référer à une Stratégie pour décider d’une action extérieure européenne, ou la refuser. En revanche, j’ai vu souvent de belles stratégies écrites sur le papier, prévoir tout ce qui était possible ou impossible. Le résultat a été souvent proche du zéro (cf. au Mali en 2013).

4 facteurs de passage à l’action

La réalité, c’est qu’une action politique, surtout en matière de politique étrangère ou défense se décide en fonction de quatre facteurs essentiels, très politiques, qu’on peut résumer ainsi : 1° une menace, 2° un état d’esprit propice parmi les 28, 3° la volonté décidée, et décisive, d’un ou deux responsables politiques, 4° et l’absence de contrariété farouche d’un autre. S’il y a une base juridique, c’est bien. Si elle n’est pas là, on se débrouille. Regardez ce qui s’est passé à l’été 2008 pour la Géorgie. L’Europe bouge (avec Nicolas Sarkozy aux manettes à l’époque) et s’interpose. A l’inverse, avec les mêmes protagonistes, le résultat est négatif pour l’assistance au Congo. C’est assez simple en quelque sorte. La stratégie reste donc un document de papier complémentaire mais non décisionnel.

La politique extérieure évolue au gré des courants

Quant à fixer la ligne directrice d’une politique européenne pour des années, c’est un vrai ‘challenge’ (comme on aime à le dire). Qui pourrait avoir une vision stratégique, aujourd’hui, c’est-à-dire pour les 5 ou 10 ans à venir ? Cette politique évolue (et c’est plutôt un bon signe) en fonction des circonstances. C’est, en cela, que toute la réflexion entamée, à grand effort, par l’Union européenne pour bâtir une nouvelle stratégie de politique étrangère est certes intéressante et estimable. Mais assez peu stimulante au plan opérationnel et même stratégique. Le positionnement géographique, historique, géopolitique des Etats fait qu’une appréhension commune des menaces et des risques parait différente. Au mieux, une stratégie européenne consiste donc à empiler les priorités des Etats membres. Mais pas vraiment à définir une priorité. Ce qui serait l’ambition d’une stratégie normalement.

Une approche plus tactique que stratégique

La réalité de l’approche se fait davantage, au jour le jour, dans les rencontres bilatérales, les réunions ordinaires de ministres, et entre les capitales. Au gré des changements de gouvernements, des rapprochements peuvent intervenir (ou vice-versa). Le donnant-donnant géopolitique est souvent la règle, même s’il est rarement avoué. Sur le mode : tu me soutiens sur l’Est, je te soutiens sur le Sud ; tu me soutiens en Somalie, je te soutiens au Mali, etc. On arrive ainsi à des positionnements sinon communs du moins partagés. Cela n’a rien à voir avec la stratégie. C’est assez tactique en fait. Une position assez prosaïque également constatée sur le terrain : quand un Etat a besoin d’un autre, pour libérer des otages, évacuer ces concitoyens, pour boucler une opération, il lui en sait gré. Ceci ne peut s’écrire dans une stratégie. Mais c’est un versant tout aussi louable de l’esprit de solidarité entre pays européens.

Mais difficile à affirmer franchement

A cela, il faut ajouter le contexte très diplomatique de l’exercice. Pourrait-on dire exprimer certaines vérités stratégiques. Par exemple, affirmer que la Russie est notre allié nécessaire… ou bien notre ennemi ultime (les 2 versants de la réalité européenne), que faute de solution à deux Etats au Moyen-Orient, on reconnaitra (ou non) l’Etat de Palestine, que la Turquie a vocation (ou non) à adhérer à l’Union européenne, que l’objectif est d’avoir une armée européenne dans 20 ans, etc. Ce ne serait sans doute pas le cadre adapté pour un tel travail officiel. Il faudra donc se contenter d’un texte conformiste, tiède, et d’une longue liste de défis auxquels l’Europe doit répondre. L’utilité de ce texte risque d’être limitée, ne constituant pas réellement le syncrétisme stratégique recherché.

Où est le débat ?

L’objectif affiché est — affirme-t-on — également de provoquer un débat parmi la société européenne. Force est de reconnaitre est que le débat public, s’il a lieu, ne rencontre pas vraiment l’enthousiasme des foules, même les plus érudites. Cet exercice est d’ailleurs si peu concret et si discret qu’il est difficile d’inciter quiconque à y participer. Quel est l’enjeu ? Quels sont les lignes de force ? Qu’entend-t-on défendre ? Interrogé par des étudiants, j’ai eu bien de la peine à y répondre autrement que par un charabia difficile à comprendre, terminé par un lapidaire : « en fait, çà ne sert à rien » Sinon permettre à toute une série de personnes qui entendent réfléchir sur l’avenir européen de s’exprimer. Et c’est déjà bien. Ca occupe l’esprit.

La stratégie du feu de cheminée

Quant à moi, je suis resté assez ‘old school’. Un bon trio de rédacteurs, chevronnés, avec au besoin une plume de la communication, un délai de 24 ou 48 heures, dans une local exigu d’une quelconque institution européenne, voire (le luxe !) une bonne masure de campagne, un feu de cheminée, une petite dose de whisky, devrait suffire largement pour mettre à niveau et remettre à jour la doctrine ‘Solana’ fixée en 2003. Cette doctrine parait un peu datée. Mais, dépoussiérée de quelques incongruités anciennes, et remise à neuf, elle peut encore vraiment tenir dix ans.

Passer aux choses sérieuses

Et nous pourrons ainsi passer à la suite qui est autrement plus sérieuse… Car en matière stratégique il y a de quoi faire : un livre blanc sur la défense (pour mettre un peu d’ordre dans nos priorités et nos dépenses), la définition d’une politique pour l’UE en matière de maintien de la paix (qui parait un peu hétéroclite), un nouveau mécanisme de financement (le manque de finances empêchant souvent la solidarité), des décisions concrètes pour équiper les Etats africains (tout le monde le proclame mais la Commission renâcle encore à lâcher ses sesterces), la traduction en actes concrets des outils fixés dans le Traité de Lisbonne (toujours pas appliquée), la mise sur pied d’une vraie force de réaction rapide (car le dispositif du battlegroup a vécu). Le chantier est immense. Il y a beaucoup à réfléchir, à débattre, à concevoir, à mettre en place…

Le risque : se retrouver à ‘nu’ demain !

Face aux défis et menaces actuelles, le vide sidéral qui règne sur ces sujets est, en effet, (très) inquiétant. Il devrait être comblé rapidement. Afin de ne pas se retrouver « à nu » comme le jour où un président français a invoqué l’article 42.7. Aucun texte, de ligne directrice, de note de service n’avait fixé sur le papier, la conduite à tenir pour l’Union européenne en cas d’invocation de ce qui est normalement « La » clause d’assistance et de défense mutuelle. Une clause de solidarité qui figure dans les traités depuis presque 10 ans tout de même… (2).

Avant de se livrer à un grand exercice de réflexion stratégique, il serait souhaitable qu’au jour le jour, les lacunes doctrinales et opérationnelles soient déjà comblées. Ce serait déjà bien, pour ne pas se retrouver derrière le sempiternel : c’est une absence de volonté politique.

A suivre…

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Normalement on devrait traduire par stratégie mondiale. Tout le monde le traduit par « stratégie globale ».

(2) Le texte du traité de Lisbonne reprend une disposition qui figurait dans le projet de constitution européenne mort-né (une disposition figurant dans le traité de l’UEO datant de… 1948).

L’Europe donne 20 véhicules de plus à l’OSCE

Wed, 03/02/2016 - 19:16

Le chef des observateurs de l’OSCE, Ertugrul Apakan remercie l’ambassadeur de l’UE en Ukraine Jan Tombinski qui se tient aux cotés du numéro 2 de la mission EUAM Ukraine, Hugues Fantou (crédit : OSCE/Evgeniy Maloletka)

(B2) La Mission de surveillance spéciale de l’OSCE en Ukraine (SMM) a reçu 20 véhicules blindés offerts par l’Union européenne (UE). Des véhicules qui étaient auparavant affectés à la mission EUPOL Afghanistan, la mission européenne de soutien à la police afghane qui est actuellement en phase de retrait.

Permettre aux observateurs de circuler en toute sécurité

Ce don a été officialisé ce mercredi (3 février), lors d’une cérémonie de remise officielle qui a eu lieu à proximité du siège de la Mission à Kiev. Les 20 véhicules Mercedes de type G seront déployés pour être utilisé par les équipes dans l’est du pays « dans les prochains jours » annonce l’OSCE.  Cela « permettra davantage d’activités de surveillance en toute sécurité pour les observateurs, qui travaillent dans des conditions de sécurité imprévisibles dans la zone de conflit », a souligné Jan Tombinski, le chef de la délégation (= ambassadeur) de l’UE en Ukraine. Ils représentent une valeur estimée de 685.000 euros au total.

Le second don effectué par l’Union européenne

L’OSCE dispose de 188 véhicules blindés et 132 non blindés déployés à travers l’Ukraine. L’Union européenne avait déjà il y a un an fait don de 24 véhicules.

NB : Un moyen pour l’Union européenne de contribuer à la mission de surveillance en Ukraine comme de trouver une seconde utilisation à des véhicules en surplus ou inutilisés.

(NGV)

Les cinq otages tchèques retenus au Liban sont libres

Tue, 02/02/2016 - 21:29

(B2) Le Libano-Ukrainien Ali Taan Fayyad détenu en république Tchèque ne sera pas extradé vers USA. Il reviendra au Liban. C’est la contrepartie semble-t-il, à la libération des cinq otages tchèques, retenus au Liban depuis près de six mois.

« Les cinq Tchèques, enlevés en juillet l’année dernière au Liban, ont été retrouvés sains et sauf, lundi soir (1er février) », a en effet annoncé le ministère tchèque des Affaires étrangères dans un communiqué. Ils « se trouvent actuellement sous la protection des forces de sécurité libanaises. Et leur état de santé est satisfaisant ». Le ministre Lubomir Zaoralek a chargé l’ambassade de Beyrouth de prendre toutes les dispositions pour assurer « le retour le plus rapide possible des citoyens tchèques. Un avion spécial de la république Tchèque devrait les rapatrier ».

5 Cechu,kteri se od cervna min.roku pohresovali v Libanonu,bylo nalezeno.Jsou v https://t.co/0UqC6DmFV5 nejdrive pro ne posleme let.special.

— Lubomír Zaorálek (@ZaoralekL) 1 Février 2016

Le ministère s’est cependant refusé à donner de « plus amples informations en raison de l’enquête en cours menée par le ÚOOZ » l’unité de lutte contre le crime organisé, ni à confirmer les termes de l’échange.

Les cinq Tchèques (journalistes, avocat et officier) et leur chauffeur avaient disparus, samedi (18 juillet), dans le village de Kefraya, dans la vallée de la Békaa, enlevés par des personnes non identifiées (Lire aussi : Enlèvement de 5 Tchèques au Liban : un rapt criminel ?).

(NGV)

 

Dur, la vie d’un drone dans l’est de l’Ukraine

Mon, 01/02/2016 - 18:00

Image prise par un drone de l’OSCE le 14 janvier 2015, montrant l’impact d’un cratère d’une bombe à Volnovakha, qui avait atteint un bus la veille (crédit : OSCE)

(B2) L’OSCE a bien du mal à imposer ses vols de drones dans l’est de l’Ukraine, pourtant indispensables pour surveiller le cessez-le-feu et la ligne de front. Tour à tour, Ukrainiens et Russes, forces régulières et irrégulières, s’ingénient à entraver le vol de ces engins, non armés, mais équipés de caméras, ce qui est autrement plus dangereux pour les fauteurs de troubles qui sont ainsi souvent pris sur le fait, de mouvements divers de troupes ou faire revenir des armes lourdes vers la ligne de front…

B2 a compté dans les 30 derniers jours, 7 incidents frappant les « ailes » de l’OSCE. La routine selon ce qu’a dit le chef de l’OSCE de passage à Bruxelles.

Le 28 décembre 2015, un mini-drone est atteint par des tirs d’armes légères dans la zone contrôle par les séparatistes de la LPR (république de Louhansk). L’engin revient à sa base, sans dommage. Une « incompréhension » selon représentant russe au centre de contact qui promet que cela ne se reproduira plus…

« An SMM mini-unmanned aerial vehicle (mini-UAV) was caught in small-arms fire. In “LPR”-controlled Yurivka (26km south-west of Luhansk), the SMM heard 20 single shots of small-arms fire and saw that an armed person – 800m south-west of its position – was firing an AK-47 at an SMM mini-UAV, which it was operating to observe a training ground.  The SMM called the mini-UAV back and left the area immediately. The mini-UAV did not sustain any damage. Subsequently, the SMM held a meeting with Ukrainian and Russian Federation representatives of the Joint Centre for Control and Co-ordination (JCCC), where it expressed its concern that the incident happened in spite of the fact that the flight had been notified beforehand with both the JCCC and “LPR” members. Russian Federation representatives of the JCCC stated that due to miscommunication, the “LPR” armed members on the ground had not received necessary information in advance. He added that “LPR” members controlling the area where the incident took place had apologised and given an assurance that such incident would not happen again. (extrait rapport 28.12.2015)

Fin décembre 2015, un militaire séparatiste de la LPR (république de Louhansk) interdit le décollage d’un drone, pour finalement l’autoriser, après avoir reçu un ordre de ses supérieurs (l’OSCE ayant joint le centre joint de contrôle et de coordination)

Armed “LPR” members delayed the SMM launching its unmanned aerial vehicle (UAV) for 30 minutes near “LPR”-controlled Krasnyi Lyman (30km north-west of Luhansk). The “LPR” “commander” initially told the SMM that it could not fly the UAV over the area. The SMM was allowed to conduct the flight after the Joint Centre for Control and Co-ordination intervened and the armed men received instructions from their superiors » (extrait rapport 29.12.2015)

Coup sur coup, les 2 et les 3 janvier, les drones de l’OSCE sont victimes de brouillage dans des zones gouvernementales ukrainiennes.

« SMM unmanned aerial vehicles (UAVs) were subject to jamming on two occasions – on 2 January when flying near the landing site in government-controlled territory and also on 3 January near government-controlled Marinka (22km west of Donetsk city centre) and Maksymilyanivka (30km west of Donetsk city centre). » (extrait rapport 4.1.2016)

Début janvier 2016, un officier ukrainien interdit le déploiement d’un drone pour « raisons de sécurité ».

« In government-controlled Pisky (11km north-west of Donetsk), a Ukrainian Armed Forces officer did not allow the SMM to fly its unmanned aerial vehicle (UAV) in the area. He stated that he had been ordered to prevent the launching for security reasons ». (extrait rapport 5.1.2016)

Le 15 janvier 2016, un drone est atteint par des tirs d’armes légères au dessus de la république de Louhansk, il réussit à revenir à sa base, mais devient inopérable…

An SMM UAV was hit by small-arms fire over “LPR”-controlled Stakhanov (49km west of Luhansk) as it attempted to observe a factory complex occupied by armed “LPR” members.* Although the UAV’s observation capacity was lost, it was able to return to the take-off location. The UAV has been rendered inoperable due to the damage sustained. (extrait rapport 16.1.2016)

Le 29 janvier 2016, le vol des drones est restreint dans la république de Donestsk. L’officier russe de contact avertissant que la sécurité ne peut pas être assuré au-delà d’une certaine zone

« A “DPR” member in “DPR”-controlled Horlivka said that flights of the SMM unmanned aerial vehicle (UAV) – in support of facilitating and monitoring adherence to the ceasefire to enable repair works – would be restricted to a small area over the power line and pipeline works only. A Russian Federation Armed Forces officer from the Joint Centre for Control and Co-ordination (JCCC) agreed and claimed that if the UAV deviated from that small area, its safety could not be guaranteed. As a consequence, the UAV was not launched. » (extrait rapport 30.1.2016)

Etre un drone dans l’est de l’Ukraine n’est donc pas une synécure. A suivre…

(Nicolas Gros-Verheyde)

121 personnes récupérées en mer de Libye par le Ludswighagen. Un blessé léger évacué sur le Cavour

Mon, 01/02/2016 - 11:20

Départ du Ludswighahen par RHIIB direction : le Numancia (crédit : Etat-Major espagnol)

(B2) Un migrant, récupéré il y a quelques jours en mer au large de la Libye par la corvette allemande ‘Ludwigshafen‘, a dû soigné sur le navire amiral de l’opération de lutte contre les trafiquants en mer Méditerranée (EUNAVFOR MED / Ops Sophia), le Cavour. Il souffrait d’une fracture à la cheville gauche.

Vers l’hôpital de bord du Cavour

Le migrant avait d’abord été récupéré par la corvette allemande ‘Ludwigshafen‘ (F-254). Mais son état nécessitait des soins rapides. La corvette allemande n’étant pas équipée pour recevoir un hélicoptère, l’homme a d’abord été évacué par mer, vers la frégate espagnole anti-aérienne ‘Numancia’ (F-83), avant d’être placé dans l’hélicoptère de bord AB-212, puis évacué sur le Cavour. Le porte-aéronef italien dispose en effet d’un hôpital de bord (le Role 2), apte à prodiguer l’ensemble des soins courants ou d’urgence.

121 migrants secourus

Cet homme fait partie des 121 migrants secourus en mer par la corvette allemande Ludwigshafen, lors de sa première journée de participation à l’opération européenne (lire : Le Cavour reprend le commandement de EUNAVFOR Med. Rotations espagnole et allemande). C’est un avion luxembourgeois, Seagull Merlin III, qui avait lancé l’alerte jeudi (28 janvier) au matin. Il avait repéré deux canots pneumatiques en détresse « dans les eaux internationales au nord de la côte libyenne » selon le QG d’EUNAVFOR Med. L’information, « immédiatement transmise » au commandement de la force (FHQ), embarqué sur le porte-avions italien Cavour, a été répercutée sur le Centre italien de coordination du sauvetage maritime (MRCC). De façon formelle, c’est lui qui a demandé à la corvette allemande d’intervenir (1). Après été mis au sec, à bord du Ludwigshafen, les migrants ou/et réfugiés ont ensuite été transférés à bord d’un navire de la marine italienne, qui opère dans l’opération Mare Sicuro (2), pour être réapatriés à terre.

(NGV)

(1) C’est la procédure habituelle, les moyens européens sur la zone se coordonnant étroitement (pour le sauvetage en mer) avec le centre italien qui a, toujours, la responsabilité du sauvetage en mer dans la zone. En revanche, pour toute l’action de lutte contre les trafiquants et de surveillance, l’opération EUNAVFOR Med garde une autonomie opérationnelle (en haute mer).

(2) opération de sécurisation similaire à l’opération européenne, mais sous mandat italien

Les besoins augmentent. Il faut réfléchir à d’autres financements, privés (Christos Stylianides)

Sun, 31/01/2016 - 18:21

Chrystos Stylianides à Dadaab (crédit : CE)

(B2 à Dadaab) Depuis 25 ans et le début du conflit somalien, le Kenya et la Somalie doivent gérer une crise des réfugiés. Le commissaire européen à l’Aide humanitaire a voulu se rendre compte sur le terrain avec les acteurs internationaux. Présent sur place, dimanche à mardi (19 au 21 janvier 2016), Christos Stylianides a voulu réaffirmer la mobilisation de l’Europe. Dans un entretien exclusif avec B2, à Dadaab (au Kenya), il évoque, aussi, face à l’augmentation des besoins, la nécessité de trouver d’autres sources de financement, notamment privées.

Vous êtes à Dadaab, considéré comme le plus grand camp de réfugiés du monde. Un camp créé il y a 25 ans. Est ce que cela a encore du sens qu’un camp de réfugiés existe si longtemps ? 

Dadaab est le symbole d’une solution temporaire pour réfugiés qui, jour après jour, devient une solution permanente. Cela renforce ma conviction que chaque crise soit appréhendée dans toute sa globalité et qu’un réel dialogue politique s’instaure le plus vite possible pour amener la paix. Car quand vous décidez de fuir votre pays, c’est très difficile d’y retourner.

« La situation humanitaire reste très critique »

La crise somalienne semble évoluer de façon positive. Une évolution tenable ?

L’évolution de la situation sur le terrain montre, en effet, des signes positifs au regard de la crise des réfugiés, je pense notamment au programme de rapatriement de réfugiés somaliens. En Somalie, le projet d’accord vers un nouveau processus électoral progresse. Mais la situation humanitaire reste, elle, très critique. Près de cinq millions de personnes ont toujours besoin d’une assistance humanitaire. Et plus d’un million de Somaliens sont toujours déplacés à l’intérieur du pays.

La menace terroriste d’Al Shabaab reste forte. Le lendemain de votre visite en Somalie, une nouvelle attaque a frappé des civils à proximité de Mogadiscio. La semaine précédente, des soldats kenyans, engagés depuis 2011 ans dans le cadre de l’AMISOM (mission de l’Union africaine), ont été visés…

Ce regain de violence est sans doute le signe que le développement d’une solution politique en Somalie dérange Al Shabaab. Au travers de cette attaque, ils essayent de retarder ou défaire ce processus essentiel pour rétablir une paix longtemps attendue. La seule à même d’apporter une solution à la crise humanitaire que vit ce pays.

« Le caractère volontaire du retour des réfugiés somaliens (doit être) absolument respecté »

Vous avez évoqué le plan de rapatriement. Vous avez justement rencontré des Somaliens quelques minutes avant qu’ils prennent un bus pour quitter le camp de réfugiés de Dadaab au Kenya pour retourner en Somalie. Aviez-vous besoin d’être rassuré ? 

Ce programme de rapatriement résulte d’un accord tripartite entre la Somalie, le Kenya et le Haut commissariat aux réfugiés (UNHCR). La réussite de sa mise en œuvre suppose que le caractère volontaire du retour des réfugiés somaliens soit absolument respecté. J’ai pu le vérifier. Ensuite, en tant que commissaire à l’aide humanitaire, il m’importe que ces réfugiés puissent disposer, à leur retour, des services sociaux et d’éducation minimum. C’est ce que nous devons continuer à soutenir.

Près de 6000 Somaliens ont pris cette décision ces derniers mois. Est-ce un exemple pour d’autres situations notamment les Syriens en Europe ? 

Je ne crois pas. Il est difficile de faire le parallèle avec d’autres situations, notamment en Syrie. Les conditions sont très différentes ici. Pouvons-nous croire que pour la majorité des réfugiés syriens ayant trouvé refuge en Europe, au Canada ou ailleurs, le retour dans leur pays sera si simple ? Je n’en suis pas certain.

Quelle est l’aide européenne débloquée aujourd’hui ?

Nous avons donc décidé de débloquer une nouvelle aide de 29 millions € pour les Somaliens. Un montant qui s’inscrit dans un effort plus vaste. En 2016, l’Union européenne consacre 77 millions d’euros à la crise humanitaire de la Corne de l’Afrique. 17 millions serviront à l’aide d’urgence pour les plus vulnérables au Kenya (nourriture, soins de santé, eau, assainissement et hygiène, logement, protection et éducation dans les situations d’urgence).

Vous citez l’éducation en situation d’urgence. C’est une nouvelle priorité ? Qu’est ce que cela signifie concrètement ?

Je prendrais un exemple pour l’illustrer, celui de la crise syrienne. Lors de ma première visite en tant que commissaire européen, dans la vallée de Bekaa, au Liban, j’ai vu que la majorité des enfants réfugiés n’étaient pas scolarisés. Plus précisément, nous avons évalué à 80% le nombre de ces enfants n’allant plus à l’école. C’est pourquoi nous avons cherché, avec des partenaires, un moyen d’y remédier. Nous avons mis en place des écoles informelles, mais en collaboration avec les autorités puisque nous utilisons leurs locaux. Dans cette vallée, nous avons déjà réussi à diminuer le nombre d’enfants n’allant pas à l’école, de 80 à 50 %. La philosophie de l’éducation en situation d’urgence, c’est donc cela : quand la situation est telle que l’accès ordinaire à l’école n’est plus possible, nous devons absolument trouver des solutions pour surmonter ces difficultés. L’accès à l’éducation en situation d’urgence est un problème autant qu’un enjeu majeur. Comme je l’ai dit à des jeunes filles et garçons du camp de Dadaab, c’est grâce à l’éducation que chacun doit pouvoir construire son avenir, résister à la radicalisation.

« Je suis persuadé que nous devons aller chercher du coté du secteur privé » de nouveaux moyens

La crise des réfugiés a provoqué une forte hausse du budget humanitaire. Les ONG craignent que cela ne soit aux dépens de l’aide humanitaire en 2016. Ont-elles raison d’avoir peur ?

Nous faisons face à une réalité. Face à une multitude de contextes instables, les besoins augmentent, jour après jour. Et, malheureusement, les fonds diminuent…

…même ceux de l’Union européenne ?

Oui, nos ressources ne sont tout simplement pas illimitées. Je travaille pour trouver les moyens de dépasser cette équation qui ne peut plus tenir. Je suis, pour ma part, persuadé que nous devons aller chercher du coté du secteur privé. Nous devons réfléchir à un nouveau cadre d’instruments mondiaux qui favoriserait l’engagement du secteur privé au regard de ses responsabilités sociales.

Ces nouvelles ressources, ce sera l’un des enjeux du sommet humanitaire mondial d’Istanbul en mai prochain ? 

Nous devons mettre à profit ce sommet pour améliorer l’efficacité dans la réponse aux crises, ce qui suppose l’engagement d’un plus grand nombre de donateurs. Nous devons améliorer la protection des personnes vulnérables, ainsi que des acteurs humanitaires. Ce sont les objectifs sur lesquels je me concentre.

(Propos recueillis par Emmanuelle Stroesser, à Dadaab)

Camp de Dadaab. En partance vers le retour en Somalie

Sun, 31/01/2016 - 16:10

© ES / B2

(BRUXELLES2) Fin janvier 2016, 7211 somalis réfugiés au Kenya sont repartis en Somalie dans le cadre de l’accord de rapatriement lancé un an plus tôt

La plupart étaient arrivés au camp de réfugiés de Dadaab en 2011 ou les mois suivants, fuyant le chaos somalien et la famine. Certains sont arrivés et repartent seuls, comme ce jeune homme, 21 ans à peine, qui explique préférer retrouver sa famille, car ici, son projet d’étudier et trouver du travail est impossible, les conditions de vie trop dures. Cinq ans qu’il vivait ici, « pas de quoi être fier » lâche t-il.

Mohamed Ali Mukhtar, 27 ans, l’un de ses 4 enfants sur les genoux, vit ce retour comme une chance de rebâtir une maison. Mariama est une vieille femme, c’est avec sa fille et sa mère qu’elle va retourner au pays. Elle vient de Mogadiscio mais a choisi Kismayo comme destination. Elle a reçu des nouvelles de là bas qui lui font penser « que les choses ont changé », qu’elle pourra y reprendre une vie pastorale et mieux nourrir sa mère âgée. Elles laisseront au camp le souvenir douloureux de la perte d’une autre fille, seize années de vie ici.

Retours volontaires et accompagnés

 

Les regards sont attentifs, l’attente calme sous ce toit de tôle sous lequel la température commence à monter, le vent incessant. Le commissaire européen à l’aide humanitaire, Christos Stylianides, en visite le 20 janvier 2016 au camp de Dadaab, échange quelques mots avec certains, s’inquiétant à chaque fois qu’ils ont bien choisi de partir, que personne ne les a forcé. Le bruit grandissant de moteurs perturbe la légère torpeur. Lorsque les cars vides arrivent, l’effervescence fait place. Les cinq cars colorés sont pris d’assaut par les réfugiés. Leurs bagages sont déjà entassés sur les toits. En quelques minutes à peine, chacun a trouvé sa place. Les enfants jouent aux fenêtres. Pour beaucoup de ces enfants, c’est la première fois qu’ils quitteront le camp, là où certains sont nés.

Dans des zones limitées

Pour cette année, chaque semaine, 600 réfugiés pourraient ainsi retourner en Somalie, soit par autocars, soit en avion, notamment pour Mogadiscio (quand les conditions le permettent). 

Tous bénéficieront d’un kit d’urgence (couvertures, lampe solaire,…), d’un pécule pour payer le transport une fois passée la frontière somalienne et rejoindre leur destination où ils bénéficieront d’un appui logistique et d’un soutien financier les premiers mois. Le HCR coordonne tout cela, avec l’appui d’ONG.

Kismayo, assez proche de la frontière somalienne, est la première destination choisie par les rapatriés. C’est l’une des 9 zones qui leur sont proposées. Dans ces districts, essentiellement situés dans le sud de la Somalie, l’aide humanitaire et l’aide au développement sont accessibles et réunissent donc les conditions d’un soutien à plus long terme pour les aider à se réintégrer dans les zones qu’ils avaient fuies.

Accord tripartite signé en 2013

C’est en novembre 2013, sur proposition du HCR, qu’un accord tripartite a été signé entre les gouvernements Kenyan, Somalien et le HCR pour ce rapatriement de réfugiés Somaliens volontaires. « Je suis arrivé à Nairobi le jour de l’attentat de Westgate (septembre 2013). J’ai rapidement compris que sans cadre juridique contraignant, nous risquions l’expulsion de somaliens par l’Etat Kenyan », explique Raouf Mazou, représentant du HCR au Kenya. Les critiques d’ONG seront virulentes, le climat politique vis à vis des réfugiés est en effet très rude (voir article les réfugiés au Kenya). Au sein même du HCR, l’accord fera débat, considéré par certains comme prématuré, mais il aboutit sur une signature. L’accord engage le gouvernement Kenyan à continuer à assurer l’asile aux réfugiés, et l’Etat somalien à faciliter le retour des réfugiés. Le HCR organise ces retours des volontaires. Au camp de Dadaab, un bureau d’accueil renseigne les réfugiés et accompagne ceux qui décident de franchir le pas.

Fragilisé en 2015

Dès le départ, le HCR n’a pas, comme dans d’autres pays, vraiment fait la promotion de ce programme auprès des réfugiés. Se contentant d’accompagner les personnes intéressées. Cela se justifie par les conditions encore précaires et incertaines de l’évolution de la situation en Somalie. Seules trois zones sont identifiées comme étant propices pour le retour de réfugiés. Les premiers mois, le programme de rapatriement ne brasse donc pas des foules.

L’accord a par ailleurs faillit capoter, lorsque le gouvernement kenyan a lancé sa politique d’enfermement des somaliens, au printemps 2015, suite à l’attentat du campus de Garrissa. Le gouvernement presse pour que le nombre de départs s’accélère. Menace même de fermer le camp (voir article sur les réfugiés au Kenya).

Soutenir le développement en Somalie

Le programme de rapatriement a démarré en décembre 2014. L’objectif, pour les six premiers mois de la phase pilote, était d’accompagner le retour de 10 000 somaliens, vers trois zones, identifiées alors comme accessibles et où les équipes pouvaient donc prendre le relais du HCR. Depuis juin 2015, six nouvelles zones (dont Mogadiscio), soit au total neuf, sont proposées aux réfugiés intéressés par un retour. Cela multiplie les possibilités donc.

En un an, près de 18 000 réfugiés sont venus se renseigner. A peine plus d’un sur trois a été jusqu’au bout. Plus que l’insécurité, c’est l’absence de services de base (sociaux, éducatifs) qui freine ces retours. « Les conditions d’origine sont telles que les gens peuvent difficilement rentrer en Somalie », explique Catherine Hamon Sharpe, du HCR.

Créer et soutenir la Somalie pour créer ces services de base, cela a été l’enjeu d’une conférence des donateurs à Bruxelles, en octobre 2015, où l’Union européenne avait pour sa part annoncé l’octroi d’une aide de 60 millions d’euros pour les réfugiés somaliens en Somalie et au Kenya. 50 millions d’euros devant servir à la « réintégration durable et pérenne, en Somalie, des réfugiés et des personnes déplacées, par exemple en renforçant l’accès aux services de base, en améliorant les moyens de subsistance et en réduisant la vulnérabilité dans les zones de retour et de départ ».

Autant de départs isolés

D’autres réfugiés sont retournés en Somalie par leurs propres moyens. Leur nombre serait équivalent au nombre de réfugiés rapatriés dans le cadre de cet accord. Depuis que ce plan a été lancé, en revanche, certains reviennent, pour pouvoir en bénéficier pour à nouveau repartir. Une situation ubuesque reconnait Raouf Mazou, représentant du HCR au Kenya, mais qu’il comprend. « Il n’y a pas de raison que nous ne les aidions pas », estime-t-il, coupant court au débat sur le risque d’appel d’air.

Globalement, beaucoup de ceux qui sont repartis n’étaient là que depuis 4 ans. Jusqu’à aujourd’hui, aucun de ces rapatriés n’est revenu, assure le HCR. Signe, selon l’organisation, que leurs décisions étaient bien réfléchies.

(Emmanuelle Stroesser)

Plus d’un demi-million de réfugiés au Kenya. De l’hospitalité à l’enfermement

Sun, 31/01/2016 - 07:10

(BRUXELLES2) Le Kenya accueille plus d’un demi million de réfugiés. Exactement 593.881 fin 2015, selon le Haut commissariat aux réfugiés (HCR).

Un examen de groupe ou individuel

Au Kenya, les Sud soudanais bénéficient du « prima facie », un droit d’asile de groupe. Dès lors que la personne est enregistrée, elle est considérée comme réfugiée. Cela a été étendu aux Somaliens du centre et du sud. Pour tous les autres, l’octroi du statut de réfugié est étudié de façon individuelle. 

Prochains rendez-vous … en 2018

Environ 20.000 personnes (Ethiopiens, Erythréens, Burundais) sont demandeurs d’asile, en attente d’une décision qui peut être très longue. Aujourd’hui, certains rendez-vous ne seront pas donnés avant 2018 ! L’explication est administrative. Pendant des années, le Haut commissariat aux réfugiés a instruit ces demandes pour le compte de l’état kenyan. Une tâche qu’il a continué d’assumer tout en organisant la transition. Il a formé des agents de l’État afin que ce dernier reprenne cette activité et redevienne maitre des décisions. 

Un processus mixte : gouvernemental / HCR

Depuis juillet 2014, la décision finale d’accorder ou non l’asile revient au commissaire du département des réfugiés. Le processus reste conjoint : un agent du HCR ou du gouvernement reçoit le demandeur d’asile. Puis le cas est révisé par le HCR avant une discussion conjointe HCR/département des affaires des réfugiés, précédent l’accord et la signature du commissaire. Tous les réfugiés reconnus depuis cette date ont donc un document officiel kenyan. Une carte d’identification délivrée par les autorités. Là où cela se complique, c’est que cette carte n’est pas encore connue de tous les agents de l’État, et notamment des policiers, qui ont vite fait de croire parfois qu’il s’agit d’un faux.

Campement policy

Depuis 2013, le gouvernement kenyan a durci sa politique. Le contrecoup de la dégradation des conditions de sécurité depuis que les forces kenyanes interviennent en Somalie. Et des premiers attentats revendiqués par le groupe terroriste Al Shabbab sur le territoire kényan, comme l’attentat du centre commercial de Nairobi (68 morts) en septembre 2013. La politique officielle est depuis lors celle du « campement policy » pour les réfugiés. Autrement dit, les réfugiés doivent vivre en camp, et nulle par ailleurs. Résider hors d’un camp est un délit.

En mars 2014, cette politique est réaffirmée avec la désignation, au journal officiel, des deux camps de Dadaab et Kakuma comme lieux de résidences obligatoires. L’enregistrement des demandeurs d’asile est désormais interdit dans les villes. 

Le « coup de balai pour rétablir l’ordre »

En avril 2014, les Somaliens sont les premiers visés par des opérations de sécurité visant à juguler criminalité et terrorisme. Plus crûment, le ministre de l’Intérieur parle d’un « bon coup de balai pour rétablir l’ordre ». Les interpellations se comptent par milliers, ciblant le quartier rebaptisé petit Mogadiscio de Nairobi. Les personnes sont regroupées dans un stade le temps de vérifier leurs papiers. Tout réfugié est renvoyé dans un camp (dont beaucoup reviendront plus tard). Le HCR n’obtient pas d’accéder au stade, malgré les demandes répétées.

Vives critiques des ONG

Cette politique radicale de chasse aux réfugiés provoque de vives critiques d’ONG mais aussi d’autorités judiciaires, dénonçant les atteintes aux droits fondamentaux, à la libre circulation et les exactions des forces de police. L’opinion publique, au départ très favorable, a commencé à douter et contester ces pratiques à mesure que les réseaux sociaux ont joué un travail d’information. L’opération est suspendue en juillet 2014.

Le HCR estime entre 6000 et 8000 le nombre de réfugiés « relocalisés de force » vers les camps de Kakuma ou Dadaab. Sans ménagement ni considération des liens familiaux pouvant expliquer la présence sur Nairobi, ni prendre garde de ne pas séparer des familles… Les ONG et le HCR ont du ainsi prendre en charge près de 300 enfants séparés de leur mère à Nairobi, précise Catherine Hamon Sharpe, adjointe au représentant du HCR au Kenya, en charge de la protection des personnes.

Aucun des Somaliens arrêté n’a été traduit en justice pour opération de terrorisme. Environ 350 somaliens seront expulsés en avion direction Mogadiscio. Des Congolais auraient également été expulsés mais sans que cette information n’ait pu être vérifiée, ni qu’aucun chiffre officiel n’ait été donné.

Le camp de Dadaab en sursis diplomatique

Le ton se durcit de nouveau au printemps 2015, suite à l’attaque du campus de l’Université de Garissa (148 morts). C’est le comté… du camp de Dadaab. Les rapprochements sont vite faits entre terroristes, Somaliens et réfugiés. Le vice président du Kenya somme le HCR de fermer le camp de Dadaab, accusé de servir d’abris aux terroristes. Les enquêtes criminelles démentent les soupçons. Mais le doute reste profond dans l’opinion publique.

Un soutien renforcé humanitaire et de sécurité

Les réactions internationales temporiseront la sommation qui n’a jamais été officiellement formulée. Certains analysent cette menace comme un moyen de rappeler la communauté internationale à ses engagements. Cela se traduira notamment par un soutien renforcé des Américains en matière de politique de renseignement, la relance du programme de rapatriement des réfugiés ou encore l’implication de la communauté internationale en Somalie pour renforcer la sécurité et le développement du pays en services de base. 

Des camps qui restent surpeuplés malgré tout

Le camp de Kakuma conçu pour 125.000 réfugiés en héberge 183.000. Près de 47.000 réfugiés du sud soudan ont rejoint le camp depuis que le conflit au Sud Soudan a repris en 2013. Beaucoup d’enfants seuls.

Les autorités locales (depuis deux ans, des compétences ont été décentralisées aux comtés) ont donné leur aval pour la mise à disposition de terrains par des communautés locales. Un nouveau camp pourrait être conçu sur un modèle plus ouvert sur l’extérieur, permettant des échanges entre les réfugiés et les communautés locales, souvent tout aussi pauvres si ce n’est plus. Le HCR compte sur le résultat d’une étude aux mains de la Banque mondiale pour démontrer l’impact économique que peut avoir un camp de réfugiés intégré à son environnement.

(Emmanuelle Stroesser)

La très grande majorité vivent dans les camps gérés par le HCR.

  • 184 550 dans celui de Kakuma, au nord, près de la frontière soudanaise ; 
  • 347 980 à l’est, dans celui de Dadaab. La proximité de la frontière somalienne (deux heures de route), fait que la population du camp de Dadaab est à plus de 90% somalienne. Les somaliens ne sont qu’un tiers des réfugiés du camp de Kakuma, aux côtés de sud soudanais et soudanais, éthiopiens, RDCongo, etc.
  • Plus de 60 000 (61 351) vivent selon le HCR dans la capitale, Nairobi.

 

Au camp de Dadaab (Kenya), près de 350.000 réfugiés sous perfusion humanitaire

Sat, 30/01/2016 - 16:00

(BRUXELLES2) Paradis pour touristes occidentaux et asiatiques venant fouler les plages de sable blanc de Lamu, toucher la neige du Mont Kenya ou s’aventurer dans les réserves et parcs animaliers, le Kenya est aussi, pour près d’un demi million de personnes, un pays refuge de la Corne de l’Afrique. C’est ici que le commissaire européen à l’action humanitaire, Christos Stylianides, s’est rendu, il y a quelques jours. B2 y était…

Dans le comté de Garissa, à l’est du Kenya, en zone aride où la terre rouge vole au moindre pas, s’étale le plus grand camp de réfugiés du monde, Dadaab. Fin janvier, il accueillait près de 350.000 réfugiés. Le flux d’entrées s’est calmé en 2015 tandis que depuis un an un programme accompagne les retours vers la Somalie (lire article à paraitre).

Un complexe de 5 camps

Plutôt que de camp, il faut parler de complexe. Dadaab est composé de 5 camps. Ifo, le plus ancien, a été ouvert en 1991 par le Haut commissariat aux réfugiés, à la demande du gouvernement Kenyan pour répondre à la fuite de milliers de somaliens traversant la frontière à deux heures de route de là. C’était le début de la guerre civile somalienne. Ont suivi Dagahaley et Hagadera en 1992, puis Ifo 2 et Kambioos, plus récemment, en 2011, pour décongestionner les camps plus anciens face au nouvel afflux de réfugiés somaliens. Plus de neuf réfugiés sur dix sont Somaliens.

Zoom sur le plus grand de ces camps : Hagadera

Le camp de Hagadera est le plus grand. 8,7 km2. 106.765 personnes y vivent, parfois depuis des générations. C’est là que le commissaire européen à l’action humanitaire et la gestion de crise s’est rendu le 20 janvier. Des écoles aux help desk (lieux d’information), en passant par la distribution alimentaire, le centre pédiatrique, la maternité, l’hôpital, le centre de traitement du choléra, un forage alimenté par des panneaux solaires, le commissaire a pu se rendre compte du « bon usage » des fonds européens. Si les infrastructures feraient pâlir d’envie des réfugiés vivant dans des conditions bien plus misérables dans les pays voisins, Dadaab reste un camp où les gens sont totalement dépendant de l’aide humanitaire de la communauté internationale. La faute à une situation qui en Somalie ne s’est pas améliorée, aux catastrophes climatiques qui ont ajouté de la misère aux violences dans la Corne de l’Afrique.

Dépendance humanitaire

Les humanitaires n’ont pas relâché leurs interventions, le commissaire a d’ailleurs confirmé que l’Union européenne continuerait d’apporter son soutien financier. Près de 17 organisations interviennent à Hagadera. L’aide alimentaire est principalement assurée par le Programme alimentaire mondial. Le International Rescue committee (IRC) assure des soins de santé, l’accès à l’eau potable. Le Haut commissariat aux réfugiés coordonne l’intervention de ces acteurs. Sans eux, « tout s’arrête ». Les réfugiés n’ont pas vraiment le droit de travailler. Ni d’autres ressources que celles que leurs familles peuvent leur envoyer.

Une durée qui met à épreuve les donateurs

La longévité de ce camp met à l’épreuve les donateurs. Les organisations des Nations Unies et les ONG doivent faire face à une réduction de leurs crédits. La répercussion est directe sur l’aide apportée aux réfugiés et les conditions de vie qui restent en dehors des standards humanitaires. Le programme alimentaire mondial a dû réduire ses portions alimentaires d’un tiers l’an dernier. Elles ont été rétablies depuis suite à un nouvel appel aux donateurs, mais avec prudence. Seuls les petits ménages ont récupéré 100% des rations. Les autres ménages (moyens et grands) doivent se contenter de rations réduites à 85 ou 70%. Les latrines ne sont pas en nombre suffisant ni les points d’eau (chaque point est partagé par 123 personnes quand le standard est de 80 personnes). Les 4 cliniques et un hôpital soignent en moyenne 454 personnes par jour selon le HCR. Le dispositif de santé est lui aussi en dessous des standards.

L’éducation : prioritaire

S’agissant de l’éducation, une priorité du commissaire européen Christos Stylianides (lire article à paraitre), Hagadera compte 7 écoles primaires, deux secondaires, un centre d’alphabétisation pour adultes, un centre de formation professionnelle et un centre de formation aux technologies de l’information et de la communication (TIC), une appellation pompeuse pour une salle de classe dotée d’ordinateurs, mais où internet n’arrive pas encore. Quand les standards sont de 40 écoliers par classe, ici, la jauge grimpe entre 100 et 120. De même, à peine un tiers des enfants sont scolarisés, le taux dégringole à 15% pour les secondaires. Comme le commissaire l’a relevé, le nombre de filles scolarisées est bien inférieur à celui des garçons. En témoignant ces trois rangées de garçon, contre une rangée de filles, réunis sous un chapiteau étouffant pour accueillir le commissaire. Certains arrivent malgré tout à poursuivre leurs études, rejoindre l’université. A peine quelques uns.

Vulnérabilité accrue aux épidémies

La progression de l’épidémie de Choléra qui a atteint Dadaab le 18 novembre 2015 témoigne de la grande précarité des conditions de vie. Le comté de Garissa où est établi le camp est le 22è comté Kenyan à avoir été touché par l’épidémie qui s’est déclarée dans le pays en décembre 2014. L’impact a été ici fulgurant. Entre novembre 2015 et janvier 2016, près de 1500 personnes ont été contaminées, 11 décédées, une majorité d’enfants. Lors de la précédente épidémie de Choléra au camp, en 2011, 1245 personnes avaient été touchées en cinq mois, le temps que l’épidémie soit stoppée.

L’insécurité latente

L’insécurité est une autre plaie de Dadaab. Plusieurs humanitaires l’ont payé de leur vie. La visite du commissaire se faisait d’ailleurs sous bonne garde. Notamment celle des policiers en charge de la sécurité du camp (75 officiers répartis dans trois postes). L’immensité du site est en cause. Dans certains endroits, personne ne se rend depuis bien longtemps. Les services sont regroupés dans des blocs, souvent protégés de portail, de barbelés. A l’extérieur, là où les ilots d’habitation s’éparpillent sur des km2, « on ne sait pas ce qu’il s’y passe ».

Banditisme et prostitution

Au-delà du terrorisme (voir article sur les réfugiés au Kenya), c’est surtout de banditisme et de criminalité ordinaire dont souffre le camp. La prostitution en échange de nourriture est une réalité. Sur une affiche, un slogan explique d’ailleurs aux jeunes femmes que leurs corps n’est pas une monnaie d’échange. « Mais quand il faut nourrir la famille, certaines n’ont pas d’autre choix », réagit une humanitaire.

Le besoin d’un nouveau modèle

Quand les premiers camps ont été créés pour porter assistance à la population réfugiée, l’approche était que : « cela ne durerait pas ». Cela dure pourtant depuis 25 ans. Tous les mécanismes mis en place l’ont été sur le principe d’un départ « demain ». Comme le résume Raouf Mazou, représentant du HCR au Kenya, l’action humanitaire « n’y est plus soutenable ». Jean-Marc Jouineau, du bureau de l’office européen d’aide humanitaire (ECHO) de Nairobi, renchérit : « être ici depuis 25 ans est une anomalie, pour autant il n’est pas question de partir, mais de trouver autre chose ».

Une interrogation

La durée de ce camp oblige les humanitaires à au moins s’interroger sur leur intervention, et à imaginer de nouvelles réponses. L’urgence est aussi financière. C’est notamment ce qui a conduit le Programme alimentaire mondial à introduire des bons d’achat virtuel  sous forme de monnaie électronique. L’enjeu est à la fois de diversifier l’alimentation des réfugiés, réduire le marché noir des rations distribuées, et de soutenir l’économie locale.

Développer l’économie informelle

« Il y a une économie informelle ici, rendons la formelle. Favorisons le développement. Cela ne veut pas dire que l’on maintiendra davantage les gens ici, au moins on perdra moins d’énergie, on laissera moins les gens s’enfermer dans la dépendance, et les inégalités se creuser avec les populations locales » conclut Raouf Mazou. Un projet est à l’étude par le HCR, il pourrait voir le jour dans l’autre camp de réfugiés de Kakuma, au nord du pays, dans la région du Turkana. Un projet suivi de près par l’Office européen d’aide humanitaire.

(Emmanuelle Stroesser)

Lire la suite du reportage, à paraitre dans les jours à venir :

  • Camp de Dadaab. En partance vers le retour en Somalie
  • Plus d’un demi-million de réfugiés au Kenya. De l’hospitalité à l’enfermement
  • Les besoins augmentent. Il faut réfléchir à d’autres financements, privés (Christos Stylianides)

Aucun pays n’est et ne sera exclu de Schengen

Fri, 29/01/2016 - 14:00

(B2) L’affolement est à son comble aujourd’hui face aux frontières qui se ferment en cascade. Et les mots fusent : l’exclusion de la Grèce de Schengen es proche, la fin de Schengen programmée, la catastrophe voire la fin de l’Europe en arrière-plan, etc. Dans ces paroles, il faut distinguer ce qui ressort d’un élément médiatique, de pression psychologique politique, destinée à faire prendre conscience aux Européens qu’il faut agir, vite et de façon décisive, et les réels problèmes.

De la même façon que pour la Zone Euro et la Grèce, on agite le pire pour obtenir le meilleur. Mais l’inquiétude est aussi bien réelle. Le sujet est sensible. Et l’Europe semble de moins en moins résiliente face aux crises qui se succèdent. Celle-ci étant la plus grave de toutes car elle touche aux valeurs même européennes. « Nous sommes au bord du gouffre » est la phrase souvent entendue, dans des milieux européens.

Pour revenir sur terre, j’ai cherché en savoir plus sur la réalité de ce qui est reproché à la Grèce aujourd’hui et ce que prépare la Commission européenne pour préserver Schengen. Entretien avec Natasha Bertaud, la porte-parole du commissaire européen chargé des Migrations, Dimitris Avramopoulos, réalisé pour Sud Ouest *.  

La Commission a préparé un rapport sur la Grèce, très sévère. Que reprochez-vous ?

Ce rapport, c’est le résultat d’inspections à la frontière terrestre entre la Grèce et la Turquie et sur les îles de Chios et Samos, faites par des experts des Etats membres. Ils ont constaté les efforts des autorités grecques. Mais il y a encore des problèmes, importants. Les migrants en situation irrégulière ne sont pas identifiés et enregistrés efficacement. Leurs empreintes digitales ne sont pas systématiquement saisies. Et on ne vérifie pas systématiquement leur présence dans les bases de données de sécurité. Ce sont des manquements graves auxquels la Grèce doit remédier.

La Grèce sera-t-elle exclue de Schengen?

Non. Aucun pays-membre ne sera exclu de Schengen. Et nous n’allons pas non plus suspendre Schengen. Il serait même irresponsable de prétendre que ce soit possible. Le régime de Schengen ne prévoit pas cette option. Ce que nous voulons éviter par dessus tout, c’est nous retrouver dans la situation où chaque pays réintroduirait des mesures au niveau national en dehors du cadre européen. On n’en est pas là … En publiant ce rapport, nous préservons au contraire Schengen.

L’Allemagne et d’autres pays ont réintroduit des contrôles aux frontières intérieures. C’est la fin de Schengen ?

Au contraire. C’est parfaitement en ligne avec le code Schengen. Mais ces contrôles sont temporaires. Ils ne peuvent pas être prolongés plus de 8 mois, soit jusqu’au 13 mai pour l’Allemagne. Après, on dispose encore d’une procédure dite « de dernier recours », l’article 26 du code Schengen, qui permet de prolonger les contrôles, jusqu’à 2 ans supplémentaires. Ce qui donne du temps pour corriger les insuffisances. Une nouvelle inspection part bientôt en Grèce pour vérifier cela.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi notre fiche-mémo complète sur La procédure de l’article 26 du Code Schengen,

(*) Papier paru dans Sud Ouest ce matin

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