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B2 Le Blog de l'Europe géopolitique. Actualités. Réflexions. Reportages
Updated: 3 hours 1 min ago

Six cas d’abus sexuels en Centrafrique. EUFOR RCA et Sangaris mis en cause par l’ONU

Fri, 29/01/2016 - 12:25

Le camp de M’Poko près de l’aéroport, octobre 2014 (© NGV / B2)

(B2) L’affaire des violences sexuelles en Centrafrique vient de trouver un nouvel épisode. Le Bureau du Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme vient, en effet, de publier son rapport d’enquête sur les évènements qui se sont déroulés en 2014. Elles mettent en cause les militaires des forces internationales (européenne et française) déployées en Centrafrique : les Géorgiens de l’opération de stabilisation EUFOR RCA, ainsi qu’une autre nationalité non confirmée (1), et les militaires français de Sangaris. Toutes deux localisées sur le site de l’aéroport de Bangui, à deux pas du camp de réfugiés de M’Poko.

Des affaires déjà connues

Il ne s’agit pas en soi de nouvelles affaires (comme le dit le bureau du commissaire) mais de la confirmation – par le biais de témoignages des victimes – de faits déjà connus. Notre article publié en avril dernier qui révélait la mise en cause aussi de membres d’EUFOR RCA en témoigne (lire : Soupçons d’abus sexuels en Centrafrique : des Géorgiens de la mission EUFOR RCA mis en cause ?).

Des faits sur des mineurs parfois très jeunes

Mais ces faits sont graves d’après les témoignages recueillis. On parle de viols de pratiques sexuelles avec des jeunes filles et des jeunes garçons, mineurs, parfois très jeunes (de 7 ans à 14 ans) (2). Ces six allégations « ont eu lieu dans les environs ou à l’intérieur du camp de déplacés internes de M’Poko, situé près de l’aéroport dans la capitale, Bangui » confirme lONU. Précisons qu’il s’agit, pour l’instant, de présomptions, reposant uniquement sur des témoignages d’enfants ou d’adolescents, mais qui semblent suffisamment précises pour être prises au sérieux.

Le personnel géorgien (EUFOR Rca) clairement mis en cause

Selon le communiqué publié par les Nations-Unies : « Quatre de ces filles ont indiqué que leurs agresseurs appartenaient à des contingents opérant au sein de la force de l’Union européenne (EUFOR/RCA). Deux des filles interviewées ont déclaré avoir été violées par des soldats de l’EUFOR et les deux autres filles ont dit avoir été payées pour avoir eu des rapports sexuels avec d’autres soldats de l’EUFOR. Bien que la nationalité de certains des soldats ne soit pas clairement établie, trois de ces filles ont déclaré qu’elles pensaient que leurs agresseurs faisaient partie du contingent géorgien de l’EUFOR. Ces quatre filles étaient âgées de 14 à 16 ans au moment des faits présumés. » … ainsi que le personnel français de Sangaris
« Le personnel onusien des droits de l’homme a aussi interviewé une fille et un garçon respectivement âgés de 7 et 9 ans lorsqu’ils auraient été abusés en 2014 par des membres des troupes françaises Sangaris. La fille a dit avoir pratiqué des actes sexuels par voie orale sur des soldats français en échange d’une bouteille d’eau et d’un sachet de biscuits. Elle a déclaré, tout comme son frère de neuf ans, que d’autres enfants avaient été abusés de la même manière lors d’incidents répétés impliquant plusieurs soldats français. »

Des accusations extrêmement graves

Pour le commissaire des Nations-Unies aux droits de l’Homme, « Ces accusations sont extrêmement graves et il est crucial que ces cas fassent l’objet d’une enquête approfondie et urgente » Des enquêtes ont déjà été diligentées côté français, coté géorgien et côté européen. « Je suis encouragé par les réponses initiales reçues des pays concernés et de l’Union européenne; elles montrent qu’ils prennent ces terribles allégations très au sérieux. »

Ne pas laisser ces crimes impunis

Mais il a joute aussi que « bien trop de ces crimes restent impunis, leurs auteurs bénéficiant d’une impunité totale. Cela favorise tout simplement la commission d’autres violations. » et de rappeler « Alors que de plus en plus de cas émergent, impliquant de plus en plus de contingents nationaux, il apparaît clairement que toutes les forces militaires étrangères, qu’elles soient onusiennes ou pas, doivent mener des actions beaucoup plus robustes et efficaces pour empêcher d’autres abus et cas d’exploitation, et cela pas seulement en RCA. » « Les Etats ont l’obligation d’enquêter, de poursuivre les auteurs et de s’assurer que les victimes reçoivent les réparations auxquelles elles ont droit. »

Politique de tolérance zéro du coté UE…

Du coté européen, on a réagi très vite. « L’Union européenne prendre ces allégations très au sérieux » a indiqué le porte-parole de la Haute représentante de l’UE. Nous suivons une « politique de tolérance zéro » sur ce qu’on appelle « une mauvaise conduite sexuelle ou une activité criminelle ». Le service diplomatique européen examine également « toute information relative à l’EUFOR RCA qui pourrait se révéler pertinente » en liaison avec les Etats membres car ce sont eux qui sont responsables au premier chef.

La responsabilité des Etats au final

Comme le rappelle l’UE, « la responsabilité de toute enquête, action disciplinaire ou pénale reste dans les mains des États » contribuant à la mission. L’Union européenne – comme tout Etat qui participe à une mission ou opération militaire dans un pays tiers – prend bien soin de signer avec les autorités du pays concerné un accord, qui le statut de convention internationale, permettant d’exempter de toute responsabilité pénale sur le territoire où les faits sont commis les agents et militaires engagés sur le terrain. Cela ne signifie pas une exonération totale. Les actes peuvent être poursuivis dans l’Etat d’origine (lire notre analyse sur l’accord conclu en RCA : L’accord sur le statut de la force EUFOR avec la RCA. Détails).

Salir le drapeau, c’est trahir

Du côté français, on n’a pas encore officiellement réagi à cette nouvelle mise en accusation. Mais on se rappelle les propos très durs tenus par le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian à l’encontre de ce type de faits. « Si les faits sont avérés, je ne mesurerai pas ma colère, parce que lorsque le soldat français est en mission, il est la France. Si d’aventure un seul d’entre eux a commis de tels actes, qu’il se dénonce immédiatement — avait-il affirmé dans une interview donnée au Journal du dimanche, début mai 2015. « Si quelqu’un a sali le drapeau, parce que c’est de cela qu’il s’agit, il faut qu’il le dise dès à présent, car cela revient à trahir ses camarades, l’image de la France et la mission des armées. »

La justice, saisie, doit suivre son cours

Le ministre de la Défense assurait d’ailleurs « immédiatement transmis le rapport à la justice » dès qu’il avait eu connaissance des faits, fin juillet 2014, soit très tôt avant que les faits prennent l’ampleur médiatique que l’on connait. Une enquête compliquée par l’éloignement des faits dans le temps et dans le lieu, le départ des soldats impliqués du théâtre, et l’absence d’éléments formels permettant d’identifier de façon précise certains auteurs… Mais, d’après les sources de B2, on estime que l’institution militaire a fait son travail, c’est à la justice de faire le sien désormais.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Selon nos données, il pourrait s’agit soit tout simplement de Français placés sous commandement EUFOR RCA, soit d’Estoniens qui sont parmi les premiers à être arrivés sur place.

(2) On ne peut pas parler de prostitution même s’il apparait y avoir eu des rapports consentis en échange d’argent ou de biens, l’âge des victimes présumées ne permettant pas de faire prévaloir un quelconque accord de leur part.

Que l’Europe retrouve le sens de l’hospitalité. Une demande irlandaise

Wed, 27/01/2016 - 21:49

La réception des ambassadeurs à Dublin (crédit : présidence Irlandaise)

(B2) Dans son discours aux ambassadeurs, le président de la République irlandaise, Michael D. Higgins, a averti aujourd’hui (27 janvier) les Européens du risque que présentait pour l’Europe la crise des réfugiés. Un risque qui n’est pas uniquement celui de Schengen ou du principe de libre circulation, avertit-il. Mais tout simplement nos valeurs (*).

« The risk is not just that this refugee crisis has the potential to undermine Schengen and the principle of free circulation within the European Union. It also has the potential to undermine the values at the basis of that humanistic spirit to which Europeans recommitted themselves after the devastation of WWII. The issue of migration touches upon some of the most divisive and sensitive aspects of European identity: our relationship to the outside world, to the South, and to the Muslim world »

Avec « humilité », le président irlandaise se permet d’insister demandant à tous « nos ambassadeurs européens ici de faire tout ce qui est en leur pouvoir de faire que cette crise devienne une opportunité de raviver un ethos européen de dignité humaine, liberté et solidarité, une opportunité peut-être de forger une cohérente politique commune sur l’asile. Je leur demande de donner un sens à ce qui est un concept partagé dans toutes les croyances et les cultures: l’hospitalité. »

« Again I would, with humility, urge all of our European Ambassadors here to do everything that is in their power to ensure that this crisis becomes an opportunity to rekindle a European ethos of human dignity, freedom and solidarity; an opportunity – perhaps – to forge a coherent common policy on asylum. I urge them to give meaning to the most shared concept across all belief systems and cultures – ‘hospitality’; ‘care for the stranger not yet a friend. »

(Nicolas Gros-Verheyde)

traduit par nos soins

(*) NB : Il ne s’agit pas que d’un discours. L’Irlande a montré un certain sens de la solidarité. le gouvernement irlandais (qui ne fait pas partie de l’espace Schengen) a offert de participer volontairement au processus de relocalisation et a aussi envoyé plusieurs navires en Méditerranée, durant six mois, permettant le sauvetage de 8.500 personnes ces derniers mois (selon Dublin), soit quasiment autant que la seule marine allemande….

Le coup de gueule salutaire de Big LouLou sur la loi danoise

Tue, 26/01/2016 - 21:10

(B2) Au Parlement européen, en commission Libe (Libertés publiques), il y avait de l’ambiance aujourd’hui. Louis Michel a pointé, avec émotion, la loi danoise qui permet la saisie des biens des réfugiés. Certains observateurs n’ont retenu que l’image d’un Louis Michel, un peu en colère. Je dirais plutôt que c’est un bon coup de gueule, salutaire, qui sort un peu du ronron, où on défend des valeurs fondamentales sur le même ton qu’un amendement technique dans une directive portuaire… Heureusement que les vieux briscards le réveillent de temps en temps.

Une contravention flagrante aux valeurs européennes

L’ancien ministre des Affaires étrangères a dénoncé un « simulacre de débat » particulièrement grave car il met en cause les valeurs européennes. C’est « l’exemple le plus scandaleux, de déshonneur pour le Parlement européen. Vous avez en une heure et vingt donné la parole en quelques secondes à quelques intervenants. Il n’y a pas eu d’échanges de vues, il n’y a pas eu de débat, il n’y a pas eu même de dialogue. (…) Je suis absolument scandalisé. J’ai entendu les réponses des ministres (danois). Ces réponses ne nous satisfont absolument pas. Ces réponses sont en contravention flagrante avec les traités et avec les valeurs européennes… »

Comment définir une valeur sentimentale

« Je peux comprendre beaucoup de choses » dénonce Louis Michel mettant en évidence, les incohérences de la loi danoise qui permet la saisie de biens sauf ceux qui ont une « valeur sentimentale ». « On n’a pas répondu à une question. Quelle est la valeur sentimentale d’un bien ? Personne n’a répondu à cela. Ce sont les policiers qui vont évaluer comme çà ce que ça représente. Je suis scandalisé. Je suis honteux en tant que parlementaire européen d’avoir assisté à un simulacre de débat ».

Sortez ou je fais un malheur !

La présidente des débats, la Hongroise Kinga Gál (member de la Fidesz, le parti de gouvernement de Viktor Orban *) protestant un peu, il s’emporte alors et répète. Non « Il n’y a pas eu de débat ». Kinga Gal bien de répliquer. Il enchaîne : « Cela vous embarrasse. Vous n’aimez pas qu’on parle de la Hongrie. Vous n’aimez pas qu’on parle de la Pologne. Vous ne voulez pas discuter de la Hongrie. Et aujourd’hui vous n’aimez pas que l’on parle du Danemark. Ça vous met mal à l’aise. Et ça, c’est scandaleux ».  « Je ne peux pas l’admettre. Je ne peux l’admettre Ce que vous avez organisé n’est pas un débat démocratique » lance-t-il, répétant trois fois « ce n’est pas un débat démocratique ». « Vous avez fini… » lance Kinga Gál. « Non je n’ai pas fini » réplique-t-il. « Alors sortez » lui lance la présidente, qui lui coupe le micro et en appelle à Me Wikstrom, la coordinatrice des Libéraux pour le faire taire. Pas vraiment très réussi a priori…

Kinga Gal qui présidait la séance a eu bien du mal à faire taire Louis Michel (crédit : Europarl TV)

NB : la demande de Me Gál à Louis Michel de sortir de la salle est assez étonnante (pour être gentil). Si le ton de Louis Michel est incisif, voire virulent, il n’est pas insultant. Il s’agit de libre expression politique. Et qu’un président de séance demande à un député de sortir de la salle est tout à fait inapproprié et pas vraiment le moyen de faire taire un Louis Michel qui en a vu d’autres. De plus, sur le fond Louis Michel a totalement raison. J’ajouterai même qu’il est assez étonnant de voir ouvrir une procédure de dialogue sur l' »Etat de droit » pour la Pologne et pas pour le Danemark. Allez Big Loulou !

(Nicolas Gros-Verheyde)

(*) Kinga Gál est représentante de la minorité hongroise de Roumanie. Elle est née elle-même à ce qui est appelé aujourd’hui Cluj-Napoca (Kolozsvár)

Crise des réfugiés. Arrêtez de taper sur la Grèce, aidez-nous !

Tue, 26/01/2016 - 19:50

Ioannis Mouzalas et Nikos Toskas, ministres grecs délégués l’un à la Migration, l’autre à la protection civile, à Amsterdam (© NGV / B2)

(B2) C’est une violente charge à laquelle s’est livrée à Amsterdam, le Ministre grec délégué à la politique migratoire, Ioannis Mouzalas, et son collègue chargé de la protection civile Nikos Toskas (un ancien général à la retraite). « Beaucoup de mensonges sont dits » dénonce Ioannis Mouzalas, mettant en cause de façon quasi-directe plusieurs Etats membres qui « blâment la Grèce ». Chacun en prend cependant pour son grade : les autres Etats membres notamment qui accusent la Grèce de ne rien faire mais ne sont pas vraiment solidaires, voire mettent des bâtons dans les roues de la relocalisation, l’agence Frontex qui ne joue pas son rôle… Mais « pas les institutions européennes. Elles font leur travail ».

Un retard… mea culpa

C’est vrai que la Grèce est « en retard » sur certaines questions. « Nous sommes en retard sur les hotspots ». Ils auraient dû être en place en février. Ce « ne sera pas le cas. Nous avons du retard pour construire les bâtiments de réception, de la police. C’est vrai ». Mais « il n’y a pas de problème d’identification – contrairement à ce qu’on dit —. La prise des empreintes digitales et l’inscription dans la base Eurodac fonctionnent dans les autres places en Grèce. »

Pour prendre les empreintes digitales, encore faut-il avoir des machines

« C’est vrai que l’on a eu des problèmes au début avec la prise des empreintes ». Mais c’est simple, cela est dû au manque de moyens plaide le ministre. « Dans les 7 premiers mois, nous n’avions que 12 machines seulement pour prendre les empreintes digitales alors que nous avions un flot continu de 6-1200 migrants par jour dans de petites iles. On a réussi à atteindre ensuite un chiffre de 50% de prises d’empreintes digitales. Avec les 68 machines acquises derniers mois, on atteint les 80%-90%. La semaine dernière, nous avons reçu de l’argent et pu acheter une centaine de machines, le problème est en passe d’être résolu. » C’est vraiment trop facile de blâmer la Grèce de ne pas prendre les empreintes digitales et de ne pas voir pourquoi nous ne les avons pas pris.

La relocalisation a du retard… Les Etats inventent d’autres critères

« Il y a du retard sur les camps de relocalisation. Nous assumons ce retard. Nous avons créé 20.000 places dans des appartements loués et 5000 dans d’autres structures (sur les 45.000 prévues) » Mais on ne peut rendre les Grecs responsables de l’échec de la relocalisation. « La relocalisation ne fonctionne pas parce que nous n’avons pas les 45.000 places. Mais parce que l’on a placé d’autres critères, accuse-t-il. Et d’énoncer les critères posés par certains pays : « certains ne veulent pas des Noirs, d’autres pas des familles nombreuses, d’autres veulent que tous soient safe ». Et « seuls 15 des 28 pays ont donné des places pour la relocalisation ».

La solidarité en mer : limitée !

Il est « faux de dire que la Grèce ne veut pas d’aide de Frontex. Au contraire. Nous avons demandé 1500 personnes, on a obtenu 800 personnes. » Certains Etats préfèrent envoyer leurs effectifs en ex république yougoslave de Macédoine (Fyrom). « Ils préfèrent aider un Etat non membre qu’un Etat membre » regrette-t-il. Athènes a également demandé des garde-côtes et des navires. « On a demandé 28 navires, ils en ont envoyé 6 ». « Si cela fonctionnait, on n’aurait pas eu ces noyades comme celle de la semaine dernière où 48 personnes sont mortes. » NB : vendredi dernier 22 janvier, suite à plusieurs naufrages en mer Egée.

Peu d’aide en matière de protection civile

« Nous avons fait des demandes au niveau européen en matière de protection civile » soulignent les ministres grecs. « Nous avons demandé 26 ambulance, on nous en a envoyé 0 ; 47 véhicules, on nous en a envoyé 0 ; 900 containers, on nous en a envoyé 0 ; nous avons demandé 4000 lits, on nous en a envoyé 500 lits ! Alors, avant de jouer au « blame game », vérifiez … »

Le système de réadmission ne marche pas : le Pakistan en accusation

Et les débatteurs mettent un doigt sur un problème majeur : les retours ne fonctionnent pas. « Le Pakistan, le Maroc n’accepte pas les réadmissions. Nous avons envoyé un avion au Pakistan et ils nous l’ont renvoyé. Même chose pour (un avion de) Frontex. Est-ce la responsabilité de la Grèce ? — s’interroge-t-il — ou la responsabilité de l’Europe qui n’exerce pas de pressions sur le Pakistan d’œuvrer sur la réadmission ? »

La Turquie n’en fait pas assez non plus

Avec la Turquie, il y a « de très petits progrès. On a obtenu 130 réadmissions récemment. Durant ce temps, 60.000 nouvelles personnes sont arrivées en Grèce. Vous croyez que c’est fair play. » Il faut « aider la Turquie à stopper le flot » ajoute-t-il. Mais il faut que celle-ci joue le jeu.

Que voulez-vous que l’on fasse : couler les bateaux ?

« Nous essayons de sécuriser nos frontières » argumente le ministre. Mais il faut bien comprendre notre situation. La côte turque n’est pas à des centaines de miles. « Nous sommes à peine à quelques miles (nautiques) » intervient Toskas. Et la Grèce se doit de respecter les normes : « Il  y a la loi internationale, la loi en mer, convention réfugiés, la loi européenne, la loi grecque » qui oblige à porter secours aux réfugiés en mer. Et d’ajouter « Si un Etat a des propositions à nous faire, qu’il l’exprime clairement. Car je ne peux pas m’imaginer qu’ils nous demandent de couler les navires ou de les repousser. »

L’Europe doit faire davantage

Et le ministre de conclure en dénonçant un certain irréalisme de la position européenne. A force de fermer les portes de voies légales, les migrants et réfugiés passeront pas d’autres voies illégales. Quant à la possible exclusion de la Grèce de Schengen, il dénonce toute tentative pour ce faire. « Plus que jamais nous sommes en Europe et les actes unilatéraux font moins d’Europe. Nous n’avons aucune possibilité et aucune capacité de prendre tous ces réfugiés en Grèce. Pensez-vous que c’est un problème uniquement grec ou un problème européen ? » Et d’appeler l’Europe à se ressaisir faire plus « pour la relocalisation » des réfugiés arrivés en Italie et Grèce, « pour la réinstallation » de ceux arrivés en « Turquie, Jordanie, Liban ».

(Nicolas Gros-Verheyde, à Amsterdam)

Le flux de migrants et réfugiés continue, malgré l’hiver

Mon, 25/01/2016 - 09:23

(B2) Malgré l’hiver, « des milliers de migrants ont continué à arriver en Grèce et en Italie » souligne l’agence Frontex dans son dernier rapport. Le nombre total de détections dans les deux pays a atteint 1,04 million en 2015. Soit près de cinq fois le chiffre de l’année précédente. En 2015, il y a eu 1,83 million de passages frontaliers illégaux détectés (*) aux frontières extérieures de l’UE par rapport au chiffre de 283.500 de 2014.

La route de Méditerranée orientale (Grèce)

En décembre, 108 000 migrants ont ainsi été détectés (*) en Grèce, contre 155 000 le mois précédent. Une légère baisse mais qui représente encore 40 fois le chiffre de décembre 2014. Cela porte le nombre total d’arrivées de migrants en Grèce en 2015 à 880 000.  Les îles de Lesbos, Chios et de Samos accueillent le plus grand nombre de personnes. Les Syriens sont la nationalité la plus importante. NB : on note que Chypre n’est pas touché par cette vague. Les migrants nous contournent car « nous ne faisons pas partie de Schengen » note un Chypriote.

La route de Méditerranée centrale (Italie, Malte) en diminution

Dans le même temps, le nombre de migrants utilisant la voie centrale vers l’Italie en Décembre augmenté de 50% : près de 9 700 ont franchi la mer. En cause : de bonnes conditions météorologiques, malgré le début de l’hiver, et les flux continus de migrants vers la Libye. Pour l’année, le bilan se monte à 157 000 (soit une baisse de de 8% par rapport à 2014). Si on regarde les nationalités, le mois dernier, ce sont les Nigérians qui ont représenté la plus grande part des migrants arrivant en Italie.

Les raisons de cette baisse sont dues à deux facteurs essentiels : les Syriens passent davantage par la route de la Méditerranée orientale (Grèce) et les passeurs font face à « une pénurie de bateaux disponibles ». NB : D’où l’importance de la destruction systématique des bateaux pneumatiques ou en bois, utilisés par les migrants, engagée par les forces européennes en mer sous la bannière d’EUNAVFOR Med.

Balkans occidentaux 

La route des Balkans de l’Ouest continue d’être « directement affectée par le nombre sans précédent de migrants qui entrent d’abord en Grèce pour continuer plus tard leur voyage à travers sa frontière nord » note Frontex. Le nombre de passages illégaux (**) de la frontière en décembre à 2015 est tombé à 97.000 contre 156.000 le mois précédent. Ce qui représente un chiffre encore 16 fois plus élevé qu’en décembre 2014. De nouvelles politiques plus restrictives ont été mises en œuvre, notamment en Macédoine (Fyrom) pour limiter les entrées de la Grèce à trois nationalités : Syriens, Afghans et Irakiens.

(NGV)

(*) On parle de détection aux frontières. Le chiffre réel peut être inférieur. Car nombre de personnes peuvent être « détectées » plusieurs fois. La plupart des migrants « détectés » aux frontières dans les Balkans occidentaux ont déjà été détectés en Grèce. A l’inverse, certaines personnes peuvent ne pas être « détectées ».

(**) Il s’agit bien de passages « illégaux » au sens juridique du terme. Cela ne fait pas des « migrants » des « illégaux », certains pouvant être des demandeurs d’asile.

Le Cavour reprend le commandement de EUNAVFOR Med. Rotations espagnole et allemande

Sun, 24/01/2016 - 15:10

(crédit : EUNAVFOR Med)

(B2) Le porte-aéronef italien Cavour a repris le commandement cette semaine de l’opération européenne de lutte contre les trafiquants en Méditerranée (EUNAVFOR Med / Op. Sophia) remplaçant son alter ego Garibaldi. L’état-major de force de 50 militaires de 22 Etats membres ont embarqué à bord. 

La frégate espagnole ESPS Numancia (F-83) remplace son alter ego l’ESPS Canarias (F-86), tous deux de la classe Santa Maria, après presque 4 mois d’engagement en mer tandis que la corvette allemande FGS Ludwigshafen am Rhein (F-264) et le navire auxiliaire FGS Frankfurt am Main ont relayé, respectivement, le chasseur de mines FGS Weilheim, présent depuis 2 mois sur zone, et le navire de soutien FGS Berlin, engagé dans l’opéraiton depuis plus de 100 jours.

Durant ces deux mois d’engagement, les deux hélicoptères de bord EH 101 du Garibaldi ont effectué 27 missions de surveillance et de patrouille, volant plus de 58 heures pour « recueillir des éléments d’information sur les activités suspectes en mer » souligne-t-on au QG de l’opération européenne.

(NGV)

Le ‘Berlin’ vient au secours de 245 réfugiés

Sat, 23/01/2016 - 14:23

(BRUXELLES2) Le navire de soutien allemand « Berlin » a secouru, vendredi (22 janvier), 245 personnes — y compris 17 femmes dont trois enceintes et un enfant. A 7h48, il avait été informé par le MRCC italien qu’un navire était en détresse à environ 87 km au nord-ouest de la côte libyenne. Durant le sauvetage, un autre bateau en détresse a été découvert à environ six km et ses passagers secourus. Après le sauvetage, les canots ont été coulés, considérés comme un obstacle à la navigation. Les migrants et réfugiés ont été débarqués à Lampedusa. Depuis le 7 mai dernier et l’engagement de la marine allemande en Méditerranée, 10.773 personnes ont été ainsi récupérées et sauvées.

Les défenseurs des droits humains emprisonnés en Egypte doivent être libérés pour EuroMed Droits

Thu, 21/01/2016 - 20:56

Ahmed Said

(B2) La campagne Human Rights Behind Bars in Egypt que vient de lancer l’ONG EuroMedRights avec le Cairo Institute pour libérer les activistes des droits humains en Egypte vient rappeler fort à propos que l’Egypte ne respecte pas toujours vraiment les droits de l’Homme. Un point sur lequel l’Union européenne garde un silence prudent, préférant une bonne stabilisation à une liberté parfaite.

Les activistes des droits humains égyptiens sont « constamment ciblés, menacés, poursuivis et condamnés à l’emprisonnement » souligne l’ONG. Ces jeunes de la Révolution sont toujours détenus en prison depuis des mois voire des années ». Elle lance une pétition qui exhorte le Conseil des Ministres des Affaires Etrangères de l’Union Européenne à faire pression sur le Président égyptien pour une relaxe immédiate des activistes des droits humains.

L’ONG cite 4 cas emblématiques de toute une génération de personnes arrêtées.

Mahmoud Hussein : arrêté à 18 ans pour avoir porté un t-shirt contre la torture, « en pré-détention depuis plus de 700 jours sans aucune preuve tangible le liant à des actions violentes ou terroristes ».

Aya Hegazy a fondé l’organisation Belady pour aider les enfants dans la rue. Arrêtée « et condamnée pour organisation d’un groupe à des fins de trafic humain et détention d’enfants pour les exploiter sexuellement ».

Alaa Abdel Fattah : arrêté sous Moubarak, mais « également par tous les régimes qui ont gouverné l’Egypte depuis la révolution en 2011 ». Il « purge actuellement une peine de 5 ans après un procès jugé inéquitable par les observateurs internationaux ».

Ahmed Said : un activiste, chirurgien et poète qui a été arrêté durant une manifestation pacifique. Le 13 décembre 2015, lui et 4 autres ont été condamnés à deux ans de prison ferme pour avoir protesté sans permis.

Si l’Autriche ferme ses frontières, la cata !

Wed, 20/01/2016 - 23:15

(BRUXELLES2) Lundi dernier, le conseil des Affaires étrangères traine sur la fin, nous sommes quelques journalistes autour de Jean (Asselborn), le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères. Un des plus fins observateurs de la scène européenne. Et un des vétérans aussi des combats européens. Ca fait assez longtemps qu’il pratique l’Europe sous toutes les coutures. Il en connait nombre de ressorts, de avatars, de trahisons… ou de succès également. Après coup, il raconte à B2 et aux journalistes présents ce qu’il retient de cette présidence européenne que le Luxembourg a assumé (pas trop mal il faut le reconnaitre vu les circonstances).

Une seule chose à retenir de la présidence ?

« La réunion où on a décidé relocalisation à la majorité qualifiée. Heureusement la Pologne n’avait pas le gouvernement actuel. On tremblait, ce n’était pas évident. Si la Pologne avait hésité, cela aurait eu un effet domino. »

Ce qui vous a marqué ?

« Durant cette période, j’ai vu aussi énormément de misères, de souffrances en Grèce, à Lesbos, en Italie à Lampedusa. Je vois toujours une quarantaine de Soudanais ou d’Erythréens, qui s’étaient brûlés les doigts pour éviter qu’on leur prenne leurs empreintes digitales. Et ces fils de fers, où derrière il y avait les hommes, les enfants, les familles. C’étaient des images impressionnantes.  »

Comment vous voyez la crise actuelle des migrations et des réfugiés ?

« Si cette pression n’est pas maitrisée, ce sera la catastrophe. Les Autrichiens nous disent : on va fermer. S’ils ferment, c’est grave, en amont » (NB : coté allemand ou hongrois) comme en aval (Croatie, Slovénie, Balkans).

Pas rassurant. C’est la zone Schengen qui peut exploser …

(Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde)

MSF dénonce l’attitude inhumaine de l’Union européenne

Wed, 20/01/2016 - 07:14

(B2) « Nous nous souviendrons de cette année comme celle où l’Union européenne a échoué de façon catastrophique dans ses responsabilités de répondre aux besoins urgents d’assistance et de protection de milliers de personnes vulnérables ». Le rapport que vient de publier Médecins Sans Frontières (MSF) est un véritable cri d’alerte.

Migrer vers l’Europe : un parcours du combattant

Pour l’organisation humanitaire — qui a affrété depuis mai un navire en Méditerranée, le Bourbon Argos —, l’Union européenne et ses États membres ont provoqué plus de dangers pour les migrants avec la mise en place de politiques anti-immigration depuis ses 15 dernières années et particulièrement en 2015. Des faits d’ « intimidations policières et militaires, des procédures d’enregistrements complexes et changeant constamment » ont fait de la route des migrants un véritable « parcours du combattant ».

Les recommandations de MSF

MSF exhorte ainsi l’Union européenne à mettre en place un système de secours en mer « au plus près des points de départs des bateaux », à fournir aux migrants les moyens pour les demandeurs d’asile de déposer une demande « y compris aux frontières extérieures comme à Evros, entre la Turquie et la Grèce » et à « investir dans un système de relocalisation intra-européen et la création de passages sûrs ». Elle appelle enfin l’UE à « mettre un terme aux actes de violences des autorités et des groupes criminels ».

(JB)

NB : en 2015, plus d’un million de personnes ont fui vers l’Europe.

Télécharger le rapport « Obstacle Course to Europe » ou à lire sur le site de MSF

La Pologne toujours en solidarité minimale ?

Tue, 19/01/2016 - 09:00

(crédit : MOD Pologne)

(B2 – exclusif) La réponse polonaise à la demande française de solidarité, faite le 17 novembre dernier après les attentats de Paris, au titre de l’article 42.7 du Traité, se fait attendre… Selon les premières informations qui nous sont parvenues (voir notre Carnet 05.01.2016), Varsovie n’envisageait – au départ – qu’un soutien logistique assez léger, sous forme de fourniture de munitions par exemple, pour venir concrétiser le soutien à la France. Ce qui semble assez peu, finalement et même très peu (à peine plus que la Croatie !) (1). Après discussion, le soutien logistique pourrait s’avérer, un peu, plus ciblé et conséquent avec du transport aérien, renseignement… (Carnet (11.01.2016). Mais cela reste à confirmer.

Solidarités contre solidarité

La position du nouveau gouvernement polonais dirigée par le PiS (Droit et Justice) s’appuie sur un élément politique de négociation. D’abord, ses alliés de l’OTAN s’engagent de façon plus ferme, en déployant troupes et matériels, sur le territoire polonais et ceux des autres pays situés à la frontière de la Russie ou de l’Ukraine. Et, ensuite, les Polonais s’engageront dans les opérations extérieures des Alliés. Un point ‘dur’ de négociation dont B2 a eu confirmation coté français.

Le gouvernement polonais vient de faire la même démarche avec les Britanniques, promettant un soutien à David Cameron dans sa négociation avec les Européens pour éviter un Brexit, en échange d’un soutien au sommet de Varsovie aux revendications de permanence de l’OTAN vers l’Est.

Un manque de solidarité ? Pas du tout argumente-t-on côté polonais. La Pologne s’est engagée sans rechigner, depuis plus de 10 ans — en Irak, en Afghanistan, au Tchad — sans en avoir de retours notables, indique-t-on en substance à Varsovie du côté gouvernemental.

Une négociation au forceps qui se heurte à un principe de réalité

La ‘demande’ au forceps de Varsovie aura-t-elle pleinement satisfaction ? Cela suffira-t-il pour que Paris tombe la veste immédiatement et se mette à genoux devant la Vierge de Częstochowa ? Pas sûr…

Tout d’abord, la stratégie militaire actuelle des alliés n’est plus de baser des troupes fixes à un endroit, mais au contraire d’avoir des forces « rapides » — « agiles » dit-on à l’Alliance — dotées de fortes capacités et interopérables. « La ligne Maginot n’a pas vraiment été très efficace si je me souviens » ironise un officier. « On n’est pas non plus dans les années 1950 où on calculait sa force en nombre de chars positionnés de part et d’autre du mur » complète un autre.

Ensuite, ce type de ‘demande’ au forceps (‘je réponds à ta demande si tu réponds à la mienne’) ne marche que quand un pays est en position de force, avec une activité généreuse en opération extérieure par exemple (2) ou des capacités précieuses et rares, recherchées par ses partenaires.

La Pologne compte-elle aujourd’hui ?

La Pologne disposait de ce facteur ‘levier’ en 2003 lors de son engagement en Irak. Un moment clé où elle était en plus le ‘chef de file’ des nouveaux Etats membres qui adhéraient à l’Union européenne. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. La Pologne n’est qu’un pays parmi les autres, de taille plutôt moyenne, avec une population qui décroit (3).

Cela fait assez longtemps que ses Mi24 n’ont pas été à l’attaque et que la flotte polonaise n’a pas affronté la haute mer. Pour différentes raisons, justifiables d’ailleurs (4), la Pologne est devenue aujourd’hui un des pays européens qui est le moins engagé à l’extérieur. Ce désengagement stratégique sera visible, ce mercredi à Paris lors de la réunion des ministres de la Défense — qui comptent — dans la lutte anti-Daesh. Sept ministres seront présents (le Britannique, l’Allemand, l’Italien, le Néerlandais…) aux côtés du secrétaire à la défense US… Mais pas de Polonais. Un signe !

De plus, la Pologne n’est pas en situation de faiblesse stratégique — comme les pays baltes (qui n’ont pas d’aviation de chasse). Ce qui justifierait une « aide supplémentaire ». Elle ne bénéficie plus aussi de la sympathie particulière dont elle bénéficiait au lendemain de 1989-1991. L’auréole de Solidarnosc et de la ‘résistance’ aux Soviétiques s’est singulièrement écornée. Les actuels dirigeants du PiS doivent en avoir bien conscience. Les réformes entamées par le gouvernement PiS (tribunal constitutionnel, screening des hauts responsables gouvernementaux, médias, etc.) en sont un signe. Mais, ce n’est pas le plus fondamental, pour les autres capitales, malgré les apparences.

Le nouveau gouvernement irrite ses alliés européens sur quelques dossiers européens. Le plus important est la question de la crise des migrants et des réfugiés. Varsovie rechigne à la solidarité européenne tant dans l’accueil des migrants/réfugiés que dans la lutte contre les trafiquants (aucun moyen polonais en Méditerranée par exemple !).

La demande polonaise de solidarité devra donc être sérieusement revue à la baisse. Sinon le sommet de l’OTAN à Varsovie, en juillet prochain, au lieu d’être une réunion d’unité sera une occasion de déchirement. Ce qui aurait, au final, l’effet le plus désastreux et l’inverse de l’effet recherché par les pays de l’Est. La Russie n’aurait alors qu’à se réjouir du manque de sérieux de l’Alliance. Varsovie devra donc se contenter d’une demi-mesure, habilement déguisée sous quelques mots nouveaux, pour lui permettre de sauver la face au plan national (il est rare que les alliés cherchent à mettre en difficulté un des leurs). Le président Duda en visite à l’OTAN a d’ailleurs déjà amorcé ce léger pas de deux en arrière…

Quelques atouts encore

La Pologne garde cependant quelques atouts dans sa manche. Son armée a quelques vertus : avoir quelques capacités de transport stratégique (via les C-17 de la base de Papa en Hongrie ou les avions russo-ukrainiens du contrat Salis de l’OTAN) ou tactique, des hélicoptères de transport, quelques forces bien aguerries essentiellement au plan terrestre, etc.

Le gouvernement polonais pourrait donc jouer un jeu plus fin, au plan européen, en fournissant une assistance décisive, visible, massive, sur certains terrains extérieurs. Par exemple, 400-500 hommes, forces spéciales comprises et hélicoptères, pour le Mali ou la Centrafrique. Ce que l’armée polonaise sait faire, et qu’elle pourrait faire !

Au passage, Varsovie aurait marqué un ‘vrai’ point, indiquant qu’il est un allié « qui compte ». Elle aurait ainsi obligé, en retour, la France et d’autres alliés à jouer la solidarité avec elle. Malgré une évidente sympathie et histoire commune avec l’Angleterre, son avenir est sur le continent et non pas à sa marge…

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) On peut remarquer que quand on l’avait interrogé sur la solidarité européenne, François Hollande s’était bien gardé de citer la Pologne parmi les pays solidaires ou potentiellement solidaires. Lire : Quels pays ont répondu à l’appel de la France ? François confirme les infos B2 !

(2) Le Burundi très présent dans l’AMISOM en Somalie dispose, par exemple, de ce levier.

(3) Trois raisons peuvent être évoquées dans ce sens : 1° l’engagement en Irak en 2003, hasardeux, couteux, qui n’a rien produit de tangible pour les Polonais ; 2° la menace de la Russie qui nécessite une présence renforcée sur le territoire ; 3° la réforme en cours des armées. Mais d’un autre côté, le pays a une certaine bonne santé économique et un budget de défense bien établi (autour de 2%). Ce que n’ont pas nombre de pays européens.

(4) L’écart entre la Pologne et l’Espagne, deux pays de taille comparable au moment de la négociation des traités européens s’est singulièrement creusé. Selon Eurostat, il est de 7,5 millions habitants environ, là où il n’était que de 1,5 millions d’habitants en 2001. Un détail qui n’est pas mineur à terme sur le nombre de députés européens notamment.

Lire aussi : La clause d’assistance mutuelle déclenchée par la France : bilan un mois après (enquête)

Le Burkina Faso à son tour frappé par le terrorisme. Plusieurs victimes européennes

Sat, 16/01/2016 - 23:55

(crédit : DICOD / EMA)

(B2) L’attaque perpétrée à Ouagadougou (Burkina-Faso) contre plusieurs bars ou restaurants, fréquentés par les expatriés, et l’Hotel Splendid, vendredi soir (15 janvier) a fait au moins 29 morts.

Parmi les victimes (18 nationalités au moins) :

  • deux Français (selon le Quai d’Orsay,
  • deux Suisses (l’ancien patron de la Poste Jean-Noël Rey et un ancien député du Valais Georgie Lamon, selon la RTS),
  • un Néerlandais (un homme de 67 ans, bénévole international, selon le ministère néerlandais des Affaires étrangères)
  • un Américain (un missionnaire Mike Riddering, qui travaillait à l’orphelinat Les Ailes de Refuge),
  • six Canadiens (du Québec).

Une trentaine de personnes ont également été blessées, dont une Franco-Marocaine (la photographe Leila Alaoui).

Les forces de sécurité du Burkina, épaulées par des militaires français et des américains, ont permis de libérer environ 150 otages. La police technique et scientifique et la sous direction anti-terroriste de la police nationale ont envoyé des éléments sur place pour participer à l’enquête, tout comme la Gendarmerie nationale qui a envoyé six experts de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Un attentat revendiqué par Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI). Trois des attaquants sont morts sur place.

(NGV)

Le dispositif de solidarité entre Etats membres « réfugiés » marche-t-il ?

Thu, 14/01/2016 - 09:39

Si le sauvetage des migrants ou réfugiés en Méditerranée fonctionne bien, une fois à terre, les problèmes commencent (crédit : MOD Espagne)

(B2) Le bilan des actions entreprises par les Etats membres au titre du plan « réfugiés » adopté l’année dernière n’est pas glorieux si on en croit le dernier bilan dressé par la Commission européenne, ce mercredi (13 janvier).

1. La relocalisation (*) : 272 personnes, seulement, qui se trouvaient en Italie et en Grèce ont été accueillies dans les autres Etats membres sur le chiffre de 160.000 défini en septembre par les 28.

2. La réinstallation (*) : À la fin de l’année dernière, la Commission a reçu la confirmation que seulement 779 avaient été effectivement réinstallées sur les 5331 personnes que les Etats membres s’étaient engagés à prendre en charge en 2015. Les Etats se sont engagés à réinstaller un total de 22.504 demandeurs d’asile  d’ici la fin de 2017.

3. Les hotspots (centres d’accueil et de tri) : sur les 5 hotspots identifiés en Grèce, 1 seulement « est pleinement opérationnel (Lesbos). Sur les 6 hotspots prévus en Italie, 2 sont opérationnels à ce jour (Lampedusa et Trapani).

4. Les « retours » (= expulsions) : L‘Europe a « besoin d’augmenter le taux de retour des personnes qui ne possèdent pas le droit de rester en Europe, vers leurs pays d’origine, en mettant en œuvre le plan d’action de retour et en avançant sur les accords de réadmission et de négociations » souligne la Commission européenne.

Commentaire : c’est un cercle vicieux ! Les hotspots doivent être pleinement opérationnels pour mener à bien la relocalisation. Les deux Etats concernés attendent que le dispositif de relocalisation fonctionne craignant la mise en place de hotspots, aimantant les migrants et demandeurs d’asile, et se retrouvant ensuite dans une situation impossible à gérer. Tout le monde estime qu’il faut augmenter le rythme des retours. Mais les pays d’origine ou de transit ne sont pas pressés de reprendre leurs nationaux (à supposer qu’on puisse identifier le pays d’origine…).

(NGV)

(*) La relocalisation concerne la prise en charge au sein de l’Union européenne de demandeurs d’asile ou personnes ayant besoin d’une protection internationale arrivés dans un des pays membres de la « ligne de front », nommément désignés : l’Italie et la Grèce. La Hongrie a refusé de bénéficier de ce dispositif. La Suède souhaite en bénéficier. La réinstallation concerne le même type de personnes qui se trouvent, hors de l’Union européenne, dans les camps de réfugiés gérés par le UNHCR ou les autorités locales, en Jordanie, Liban, Turquie. Ce double effort vise essentiellement à prendre en charge les Syriens, victimes du conflit, mais aussi certaines autres nationalités victimes des conflits. Il ne s’agit pas de prendre en charge (normalement) les migrants économiques.

Lire notre dossier N°29. La crise des migrants devenue crise des réfugiés, puis crise tout court

Lire aussi :

Federica Mogherini trop absente des réunions de la Commission ? Heureusement !

Wed, 13/01/2016 - 19:10

Entre Mogherini et Hahn, une certaine complicité (crédit : CUE)

(B2) C’est le constat de nos confrères du média en ligne Politico, qui ont réalisé un travail de bénédictins. A l’aide des listes de présence (officielles), ils ont vérifié la présence de chacun, réunion par réunion. Verdict : la vice-présidente de la Commission, Federica Mogherini, sort en bas de ce classement (68% de présence), juste derrière le commissaire chargé du Voisinage Johannes Hahn (72% de présence). A l’inverse, le président Jean-Claude Juncker n’a que deux absences au compteur, juste derrière… la meilleure élève : la Belge Marianne Thyssen (Affaires sociales), qui ne s’est absentée qu’une seule fois. De quoi démentir quelques mauvaises langues qui soulignent les absences du Luxembourgeois.

Une absence très justifiée

Le résultat sur les deux commissaires aux relations extérieures n’est pas très étonnant. Etre en déplacement à l’étranger, c’est leur obligation ! Federica Mogherini a, de plus, le rôle de Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et de la Politique de sécurité et de présider les réunions du Conseil des Affaires étrangères, comme d’être présente aux réunions du Conseil européen. Un « job impossible ». Les voir absents des réunions de la Commission de temps à autre (1 sur 3) est plutôt un signe rassurant. Une présence studieuse, tout le temps à Bruxelles, serait inquiétante, alors que le voisinage flambe et qu’il y a une série de questions internationales à régler (Iran, Libye, Russie, etc.).

Un engagement réel à la limite de la condition physique

Pour B2, qui suit de près l’activité diplomatique européenne, on ne peut pas dire que l’ancienne ministre italienne des Affaires étrangères lésine sur la tâche. Federica Mogherini a ainsi présidé toutes les réunions des ministres des Affaires étrangères, comme de la Défense, sans aucune exception, selon notre constat. Ce qui est un grand changement par rapport à son prédécesseur, Catherine Ashton. Elle a assuré, sans rechigner, la plupart des réunions internationales à New-York, à Vienne, sur la Syrie, sur la Libye, sur l’Iran, etc. Au plan personnel — c’est un point qui est souvent passé sous silence — c’est une des rares commissaires à avoir déménagé sa famille sur Bruxelles (c’était cet été). On ne peut pas demander vraiment plus. Avant Noël, la fatigue se lisait clairement sur le visage de la Haute représentante.

On ne peut pas exiger de l’Europe d’être présente dans le monde, et d’être présente en même temps à tous les rendez-vous à Bruxelles. Faire le procès des absences de la Haute représentante des réunions de la Commission est donc un mauvais procès.

(Nicolas Gros-Verheyde)

NB : Le seul problème est pour leurs pays respectifs qui comptent sur « leur » commissaire pour défendre leurs intérêts à Bruxelles. Mais connaissant les chefs de cabinet des deux commissaires respectifs, on peut se dire que la maison est bien gardée…

Les Allemands durement frappés dans l’attentat de Istanbul

Wed, 13/01/2016 - 01:49

(B2) L’Allemagne paie un prix lourd dans l’attentat qui a eu lieu ce mardi (12 janvier), matin (10h20), à Istanbul quartier historique de Sultanahmet, entre la mosquée bleue et la basilique Sainte Sophie. Un quartier éminemment touristique particulièrement fréquentés par les étrangers. Huit Allemands ont été tués a confirmé le ministère des Affaires étrangères. Et, neuf autres Allemands figurent parmi les 15 blessés « dont certains grièvement » a-t-il précisé.

Un des attentats les plus graves visant les Allemands

« Depuis de nombreuses années, le terrorisme n’avait pas aussi durement frappé les Allemands comme aujourd’hui à Istanbul » a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, dans un communiqué publié sur son site internet. Le gouvernement fédéral était réuni ce mardi soir. Sujet était l’état d’avancement de l’enquête et de l’assistance aux personnes touchées.

Ne pas céder

« Le cancer du terrorisme ne ménage personne, il nous menace tous aussi, en Turquie, en Europe et ailleurs », a souligné Frank-Walter Steinmeier. « Nous devons et nous ne serons pas intimidés par les assassiner et de la violence. Au contraire. En collaboration avec nos partenaires dans le monde, nous allons continuer à faire face à la terreur à tous les niveaux » a-t-il tenu à ajouter, demandant cependant « une clarification rapide sur les auteurs et les commanditaires » de cet attentat.

L’enjeu : frapper le tourisme

Cet attentat s’inscrit dans une série assez longue en Tunisie (Sousse, Bardo), en Egypte, et en Turquie visant délibérément les lieux touristiques fréquentés essentiellement par les visiteurs étrangers et européens. L’enjeu est double : frapper les pays européens et surtout frapper l’économie des pays concernés en incitant à l’avenir les touristes à ne plus fréquenter ces lieux.

(NGV)

130 migrants sauvés en Méditerranée par la marine espagnole et slovène

Tue, 12/01/2016 - 22:21

(B2) Une nouvelle opération de sauvetage a été menée, mardi (12 janvier), par les navires européens de EUNAVFOR Med permettant de récupérer 130 migrants dérivant en pleine mer. Un avion P3 Orion espagnol a repéré, mardi matin (12 janvier),  deux embarcations de migrants en caoutchouc en détresse, dans les eaux internationales, au nord de la côte libyenne.  Le navire de patrouille slovène Triglav 11 et la frégate espagnole Canarias ont été immédiatement envoyés sur place. 130 personnes ont pu ainsi être secourues puis transférées à bord de la frégate espagnole, tandis qu’un autre groupe de migrants était secouru par un navire de la Garde côtière italienne opérant dans la région. Le SPS Canarias et le navire de la Garde côtière italienne ont fait route ensuite vers l’île de Lampedusa pour débarquer les migrants.

NB : Depuis le lancement de l’opération EUNAVFOR Med, le 22 juin 2015, les navires européens ont permis le sauvetage de près de 8500 personnes, assure-t-on au QG de l’opération.

Force protection belge en route vers Koulikoro

Tue, 12/01/2016 - 21:15

(B2) Un détachement du Bataillon 12e de Ligne Prince Léopold – 13e de Ligne de Spa partira de l’aéroport de Melsbroek (derrière l’aéroport de Bruxelles national) ce vendredi (15 janvier). Destination : le Mali. Les 70 militaires assureront dans le cadre de la mission européenne de formation de l’armée somalienne EUTM, ce qu’on appelle la « force protection » du camp d’instruction de Koulikoro, où se trouvent les « stagiaires » et leurs professeurs, maliens et européens. Cela changera un peu — au moins dans le climat — de la mission qu’ils assument aujourd’hui assurant la garde statique des bâtiments publics sur Bruxelles notamment. Une mission que leurs collègues restés en Belgique vont continuer d’assurer. Près de 200 militaires du 12e/13e de ligne sont toujours ainsi mobilisés en appui à la police fédérale, précise la défense belge.

(NGV)

Une intervention humanitaire italienne en Libye très politique

Tue, 12/01/2016 - 17:55

(crédit : MOD Italie)

(B2) C’est une intervention à but humanitaire, mais très symbolique, que viennent de réaliser les forces italiennes, lundi (11 janvier), en posant un C-130 à Misrata, avec des médecins et des infirmiers, pour évacuer 15 Libyens, grièvement blessés, lors du récent attentat du 7 janvier contre le Centre de formation de la police de la côte libyenne. 15 blessés graves ont ainsi été pris en charge et rapatriés sur l’hôpital militaire de Celio en Italie. Parmi eux, deux, plus gravement, ont été hospitalisés en soins intensifs ; les autres, polytraumatisés, et déjà traité par le service libyen de santé, ont été hospitalisés dans d’autres départements de l’Hôpital de Celio. « Aucun des blessés n’est dans un état critique » précise le communiqué italien.

Aviosn de surveillance et forces spéciales mobilisées

L’avion avait décollé à l’aube de l’aéroport de Pratica di Mare, il a atterri à Misrata où une équipe médicale militaire interforce a procédé à l’embarquement des blessés à bord de l’avion. L’opération a mobilisé des unités militaires des forces spéciales de sécurité et des avions de surveillance. C’est un « geste concret de solidarité et de l’attention de l’Italie envers le peuple libyen dans une phase particulièrement délicate du processus de stabilisation du pays » souligne-t-on à Rome.

Un geste à haute portée politique

Cette évacuation sanitaire ne ressemble effectivement pas à d’autres régulièrement pratiquées par les forces aériennes. Certes, il ne s’agit que d’une évacuation sanitaire, à titre humanitaire. Mais elle fait figure de vrai test à plusieurs niveaux : politique et opérationnel, international et national. D’une part, c’est la première fois, à ma connaissance, depuis les évènements de 2011, qu’une force ‘occidentale’ se pose sur le sol libyen. D’autre part, et surtout, la demande d’aide a été faite du tout nouveau Conseil présidentiel de la Libye installé après l’accord de Skhirat.

Un premier acte de la toute nouvelle autorité libyenne

Au-delà du traitement des blessés ainsi rapatriés, on est là dans une gestuelle tout autant politique à grande valeur symbolique, pour la toute nouvelle autorité libyenne toujours très soucieuse de sa souveraineté (une manière d’asseoir son autorité), pour l’Italie (une manière d’asseoir son intérêt primordial sur le destin de la Libye) mais aussi pour l’Europe. Les Européens ne parlent pas en l’air quand ils proposent leur assistance à la Libye. Ils sont prêts à le faire, quand et où l’autorité libyenne le demande…

(NGV)

Lire aussi sur notre édition Pro :

 

 

Un nouvel hôpital frappé au Yemen. Plusieurs membres de MSF touchés

Mon, 11/01/2016 - 18:59

(B2) C’est le troisième lieu de santé au Yemen frappé en quelques mois. Cela commence à faire beaucoup ! Et cela interroge sur le sens du respect des lois humanitaires des différents belligérants, en particulier de la coalition militaire dirigée par l’Arabie Saoudite, qui devrait se montrer un peu plus exigeante sur ses règles d’engagements. MSF a d’ailleurs demandé à la coalition que dirige l’Arabie saoudite « d’enquêter sur cet incident » et qu’il soit fin immédiatement à ces attaques contre les structures médicales. L’Union européenne a condamné vivement ce bombardement, une claire infraction au droit international humanitaire —  sans toutefois se hasarder à demander que toute la lumière soit fait sur ces incidents. Ce serait délicat…

Deux membres de MSF gravement touchés

Dimanche (10 janvier), en effet,vers 9h20 (locales), le centre de santé Shiara qui se trouvait à Razeh une zone contrôlée par les rebelles chiites Houthis en guerre contre les forces gouvernementales soutenues par une coalition arabe menée par l’Arabie saoudite, a été atteint par un projectile, dont l’origine n’était pas encore parfaitement cernée. Est-ce une frappe aérienne : certains indices le laissent à penser, notamment le fait que des avions survolaient la région. Cette attaque a fait quatre morts et 10 blessés. Et ce bilan pourrait augmenter avertit l’organisation humanitaire. « Trois des patients blessés sont des membres du personnel de MSF et deux d’entre eux sont dans un état critique »

Un hôpital de la ligne de front

Le district de Razeh se trouve sur une « ligne de front très active » souligne MSF. La population de la zone a été « durement touchée par des bombardements constants et  l’impact cumulé de dix mois de guerre ». L’hôpital Shiara avait déjà été bombardé avant que MSF ne commence à lui apporter un soutien et ses services avaient été limités à la stabilisation des patients, aux urgences, à la maternité et aux activités vitales.

Deux autres incidents

Le 27 octobre, l’hôpital d’Haydan avait été détruit par une frappe aérienne de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite et le 3 décembre, un centre de santé à Taïz avait également été touché par une attaque de la coalition, faisant neuf blessés.

(NGV avec JB)

Ainsi que notre interview du responsable du CICR (juin 2015) : Yémen, un conflit qui dure, un pays au bord du gouffre. L’Europe a un énorme rôle à jouer (C. Schweizer)

Cologne. Un simple dérapage ou une nouvelle méthode d’intimidation ?

Sun, 10/01/2016 - 13:20

(crédit: NRW / baukunst-nrw.de)

(B2) Les évènements survenus à la gare principale (HauptBahnhof) de Cologne dans la soirée du Nouvel an interpellent. S’agit-il juste d’un dérapage collectif de quelques individus, un peu éméchés, ou excités. Ou de quelque chose d’un peu plus organisé, orchestré, par des mouvements qui ont intérêt à la déstabilisation ? Certains indices incident à pencher en ce sens ou du moins à se méfier de toute leçon trop rapidement tirée et de s’interroger…

Une violence sexuelle de masse

Les évènements à Cologne ne semblent pas avoir été totalement spontanés mais plutôt planifiés, ou au moins provoqués. Le nombre de personnes impliquées — de femmes victimes comme d’auteurs présumés — le lieu de rassemblement des auteurs, le mode opératoire en razzia (loin du mode habituel du prédateur sexuel), la présence de mots traduits vers l’allemand (plus ou moins intimidants ‘je veux t’embrasser’, ‘je veux te baiser’ ou ayant rapport à l’anatomie féminine)… sont autant de faits sur lequel il faudra se pencher avec attention. Car il pourrait s’agir d’une sorte de ‘sex-mob’ d’un nouveau genre (voir encadré)

Un usage à des fins d’intimidation

La méthode utilisée comme l’objectif visé correspondent en tout cas, assez exactement, aux méthodes et buts de certaines organisations, comme celle de l’Etat islamique. Ce mouvement ne vise pas, en effet, comme ses prédécesseurs dans l’utilisation de l’action terroriste (des Brigades rouges ou action directe à l’OLP ou GIA, Hamas) à conquérir une liberté, un territoire ou transformer le pouvoir. Il vise davantage à déstabiliser les sociétés ciblées — musulmanes et arabes, dans les pays du Moyen-Orient, et occidentales — en agissant sur des ressorts davantage psychologiques que politiques : la peur, la division, le racisme…

L’usage de la violence sexuelle pour asservir

Cette terreur, Daech, l’exerce également, sur les territoires qu’il contrôle, par l’usage des violences sexuelles, de masse de préférence, à l’égard notamment des minorités mais aussi à l’égard de ses propres populations (1). L’objectif est, à la fois, d’assouvir leur pouvoir mais aussi semer la terreur dans les territoires qu’elles contrôlent. L’exemple des Yezidis, désormais assez bien documenté le montre. Pour assurer la traite des femmes et des jeunes filles Yazidi, l’organisation a créé « une infrastructure systématique, avec un réseau d’entrepôts où les victimes sont retenues, des salles d’observation où elles sont inspectées et mises sur le marché et une flotte dédiée d’autobus pour les transporter » comme le montre l’enquête du New York Times, traduite dans cet article de la RTBF. Daech a, non seulement, « développé une bureaucratie détaillée d’esclavage sexuel » avec « contrats de vente notariés » par les cours de justice, il a aussi développé une doctrine propre.

Une doctrine du viol et de la violence sexuelle

« De manière répétée, les dirigeants de l’EI mettent l’accent sur une interprétation restrictive et très sélective du Coran et d’autres règlementations religieuses afin de, non seulement justifier la violence, mais également d’élever et de célébrer chaque crime sexuel comme spirituellement bénéfique, même vertueux. » « A chaque fois qu’il me violait, il priait » raconte une jeune fille de 15 ans. (…) « Il ne cessait de me dire que c’était ibadah », dit-elle, utilisant un terme des écritures islamiques qui signifient le culte. »

L’objectif : provoquer une onde de choc

Une action terroriste (un attentat) à la différence d’un acte de guerre n’a, en effet, pas automatiquement pour but de détruire l’adversaire mais de provoquer une onde de choc qui sera, elle, largement supérieure à l’effet lui-même de l’attentat et, en retour, atteindre l’objectif recherché : miner, détruire de l’intérieur. Or, si les attentats de novembre et décembre (Bamako, Paris, Beyrouth, Egypte…) ont atteint la première cible (des morts), ils n’ont qu’imparfaitement encore provoqué des effets secondaires. On pourrait même dire : au contraire.

L’échec politique des attentats de novembre

L’attentat du 13 novembre a provoqué une union nationale plus certaine que ne l’avaient été les attentats de janvier. En voulant frapper le football (le stade de France) en particulier, les concerts de rock ou les restaurants également (un peu comme le font les Shebab en Somalie), il place tout le monde dans une même cible. C’est un mode de vie qui est atteint et pas seulement des opinions ou des religions. De la même façon, les attentats provoqués au plan international — visant Russie, Liban, Mali, etc. — ont plutôt provoqué une prise de conscience partagée et une certaine unité d’action de la communauté internationale plus importante qu’elle ne l’était il y a quelques mois encore.

Cologne, une terreur discrète ?

Les évènements de Cologne pourraient ainsi être un nouveau type de terreur, exercée de façon beaucoup plus sournoise mais aussi plus ‘efficace’ pour l’objectif visé, donc d’autant plus dangereuse. L’organisation pourrait fort bien utiliser plusieurs cordes à son arc : des attentats séquencés type Paris 13 novembre, ou ciblés, type Charlie Hebdo, de la propagande via internet ou d’autres moyens (prédicateurs autoproclamés) à destination de populations arabes (ou musulmanes) fragilisées (dont la culture religieuse est souvent faible), et des actions de déstabilisation.

Un coup porté au mode de vie européen

Ces faits vont, en effet, porter au-delà de leur gravité même, un choc plus important au sein de la société. La société allemande, mais au-delà une bonne partie de la société européenne pourrait ne pas voir demain les demandeurs d’asile d’un très bon oeil. Elle donne un coup d’aile aux couches les plus racistes, voir les plus extrémistes de la société.

(NGV)

(1) Un procédé utilisé en ex-Yougoslavie, mais aussi au Congo ou au Rwanda, et dans nombre de régions de conflit, par Boko Haram par exemple au Nigeria.

Une action massive, une vraie Sex-Mob

Le papier publié par le quotidien Bild

Selon un dernier bilan, 379 plaintes ont été déposées, certaines pour vols, d’autres (150) pour des violences à connotation sexuelle, légères ou plus lourdes mais sans aucun doute sur l’intention : attouchements, pénétrations, tentative voire viol. Les plaignantes résident en Allemagne, mais aussi en Finlande ou en Belgique, comme le précise un témoignage recueilli par nos confrères de la Libre Belgique. « Les agressions ont eu lieu toute la soirée et toute la nuit. Cela a commencé de manière ‘légère’ dès notre arrivée à la gare et ça s’est aggravé en fin de soirée quand nous nous sommes décidées à rentrer dans l’appartement que nous avions loué, après que nous nous soyons réfugiées plusieurs heures dans un café-snack de la gare centrale pour éviter ces individus qui étaient partout dans la gare et aux alentours. »

Une trentaine d’auteurs auraient été identifiés. Certains résideraient dans des centres pour demandeurs d’asile. Les nationalités sont très variées : d’Afrique du Nord, selon la police, mais aussi d’autres régions, Turquie, Moyen-Orient, etc.

 

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