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L'Afrique réelle (Blog de Bernard Lugan)

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Site officiel de l'historien africaniste Bernard Lugan, professeur à l'Université Lyon III et expert au tribunal international d'Arusha
Updated: 6 days 18 hours ago

Sans prise en compte de l’histoire, la guerre du Sahel ne pourra pas être gagnée

Wed, 21/08/2019 - 16:10
Cette analyse peut être reprise à la condition d’en citer la source

Lundi 19 août 2019, une nouvelle et importante attaque des GAT (Groupes armés terroristes) menée dans le nord du Burkina Faso, a fait des dizaines de morts, de blessés et de disparus dans les rangs de l’armée burkinabé. Pourquoi, six ans après la chevauchée de Serval, un conflit au départ localisé au seul nord-est du Mali, limité à une fraction touareg et dont la solution passait par la satisfaction de revendications politiques légitimes, s’est-il transformé en un embrasement régional paraissant échapper à tout contrôle ?
La réponse tient en deux points :
1) En 2013, pour obtenir une victoire totale, il eut fallu conditionner la progression de Serval et la reconquête des villes du nord du Mali à des concessions politiques du pouvoir de Bamako. Les décideurs français ne l’ont pas voulu.
2) Ceux qui ont défini la stratégie française dans la BSS (Bande sahélo saharienne) ont choisi les nuées contre le réel, à savoir l’illusion de la démocratie et le mirage du développement.Or, en Afrique, comme démocratie = ethno-mathématique, les ethnies les plus nombreuses remportent automatiquement les élections. Conséquence, au lieu d’éteindre les foyers primaires des incendies, les scrutins les ravivent ou les maintiennent en activité.Quant au développement, tout a déjà été tenté en la matière depuis les indépendances. En vain. D’ailleurs, comment les politiques, les médias et les « experts », peuvent-ils encore oser parler de développement, alors qu’ils savent que la suicidaire démographie africaine en vitrifie par avance toute éventualité ?
Dans l’état actuel de la situation sécuritaire dans la BSS, le retour au réel est plus que jamais une urgence afin d’identifier les causes profondes de la conflictualité à laquelle nos Forces sont confrontées. Elles ont en effet un besoin vital de cette lisibilité que seule la connaissance du passé permet d’obtenir. L’histoire régionale nous apprend ainsi que les actuels conflits ne sont pas une nouveauté. Résurgences de ceux d’hier, ils s’inscrivent dans une longue chaîne d’évènements expliquant les antagonismes ou les solidarités d’aujourd’hui. Quelques exemples :
1) A l’ouest du lac Tchad, à partir du Xe siècle et durant plus d’un demi-millénaire, se succédèrentroyaumes et empires (Ghana, Mali et Songhay). Tous contrôlaient les voies méridionales d’un commerce transsaharien articulé et même ancré sur des villes-marchés mettant en contact le monde soudanien et le monde méditerranéen. Quand ils étaient forts, ils se faisaient respecter par les éleveurs nomades, leur interdisant de razzier les agriculteurs sédentaires.
2) Après la destruction de l’empire Songhay par le Maroc en 1591, à l’exception des Bambara au nord et des Mossi au sud, les peuples sédentaires de la région ne constituèrent plus de véritables États. Tant chez les Songhay que chez les Djerma, la vie en société ne fut plus dès-lors organisée qu’autour de villages ou de regroupements de villages incapables de se défendre contre la razzia nomade.
3) A la fin du XVIIIe siècle et durant le XIXe, les populations sédentaires de l’ouest du Sahel subirent l’expansion des nomades Peul, mouvement dévastateur qui se fit avec l’alibi de la religion. Trois jihad peul ou apparentés bouleversèrent alors la marqueterie ethno-politique régionale. Celui d’Ousmane (Othman) dan Fodio se fit en pays Haoussa, celui de Seku Ahmadou au Macina et celui d’El-Hadj Omar en pays bambara. Du haut Sénégal à la région tchado-nigeriane, ce ne fut alors que désolation, pillage, massacre et mise en esclavage.
4) Aujourd’hui, dans tout l’ouest africain, ces terribles épisodes sont encore très présents dans les esprits. Leur souvenir constitue le non-dit, et souvent même le véritable soubassement des actuels affrontements ethniques baptisés « communautaires » par idéologie, « pruderie » ou « prudence »… Or, en ne nommant pas les choses, l’on en perd le sens. En effet, pour les Peul et pour ceux qui se réclament de la « peulitude », Ousmane (Othman) dan Fodio, Seku Ahmadou et El Hadj Omar sont des héros. Les Bambara, Dogon, Mossi, Djerma, Songhay et autres, les voient tout au contraire comme des conquérants esclavagistes cruels et sanguinaires dont l’impérialisme pillard était camouflé derrière un pseudo-justificatif religieux. Voilà défini l’arrière-plan des actuels conflits du Macina et du Liptako amplifiés par la surpopulation et la péjoration climatique. Refuser de le voir ou considérer cela comme « anecdotique » va, tôt ou tard, conduire à de nouvelles « désillusions » et, hélas, à de nouvelles pertes cruelles.
5) Avant la colonisation, accrochés à la terre qu’ils cultivaient, les sédentaires du fleuve et de ses régions exondées étaient pris dans la tenaille prédatrice des Touareg au nord et des Peul au sud. Pour survivre, ils constituèrent alors de complexes réseaux d’alliances ou de solidarités. Ayant traversé le temps, ils permettent d’expliquer pourquoi certaines « communautés » se rangent aujourd’hui du côté des GAT, quand d’autres les combattent. Ainsi, comme les raids des Touareg s’exerçaient depuis le désert au nord du fleuve Niger et ceux des Peul à partir des trois émirats du Dallol, du Liptako et du Gwando, afin d’être épargnés, les sédentaires devinrent les tributaires des premiers ou des seconds :

- À l’ouest, les Songhay choisirent d’être ceux des Touareg, lesquels, en échange, protégeaient leurs villages des attaques des Peul. Entre Gao et Ménaka, au fil du temps, certains des tributaires songhay s’assimilèrent quasiment à leurs protecteurs Touareg. Les Imghad le firent ainsi aux Touareg Ifora et les Daoussak aux Touareg Ouelleminden Kel Ataram. Comme la rive nord leur était tributaire, c’était donc sur la rive sud du Niger que les Touareg menaient leurs razzia, avec pour alliés les piroguiers-pêcheurs Kourtey (Kourteis) vivant entre Ayorou et Say.

- Plus à l’est, toujours sur la rive nord du fleuve Niger, les Djerma étaient dans la même situation que leurs voisins songhay mais, en fonction de la localisation géographique des prédateurs nomades, ils choisirent deux systèmes différents de protection. C’est ainsi que les Djerma du sud devinrent tributaires des Peul pour être protégés des Touareg, alors que ceux du nord demandèrent à ces derniers de les défendre contre les Peul.
6) A la fin du XIXe siècle, l’armée française bloqua l’expansion des entités prédatrices nomades dont l’écroulement se fit dans l’allégresse des sédentaires qu’elles exploitaient, dont elles massacraient les hommes et vendaient les femmes et les enfants aux esclavagistes du monde arabo-musulman.
7) La colonisation fut donc en quelque sorte la revanche offerte par la France aux vaincus de la longue histoire africaine. Cependant, dans tout le Sahel occidental, elle eut deux conséquences contradictoires :

- Elle libéra les sédentaires de la prédation nomade, mais, en même temps, elle rassembla razzieurs et razziés dans les limites administratives de l’AOF (Afrique occidentale française).

- Or, avec les indépendances, les délimitations administratives internes à ce vaste ensemble devinrent des frontières d’États à l’intérieur desquelles, comme ils étaient les plus nombreux, les sédentaires l’emportèrent politiquement sur les nomades, selon les lois immuables de l’ethno-mathématique électorale.
Voilà identifié le terreau des conflits allumés depuis une ou deux décennies par des trafiquants de toutes sortes et des islamo-jihadistes immiscés avec opportunisme dans le jeu ethno-politique local et régional. L’ignorer ou le minorer conduit à la superficialité des analyses, à l’inadaptation des décisions et en définitive, à l’impasse actuelle.Avec des moyens dérisoires à l’échelle du théâtre d’opérations, Barkhane, qui n’est que de passage, n’est évidemment pas en mesure de refermer des plaies ethno-raciales ouvertes depuis la nuit des temps. Une bonne connaissance du milieu et des hommes pourrait cependant lui permettre d’éviter leur surinfection.
Ces points sont développés et illustrés de nombreuses cartes dans mon livre Les Guerres duSahel des origines à nos jours et dans mon cours vidéo intitulé Comprendre le conflit au Sahel

Bernard Lugan
Categories: Afrique

Pierre Péan et le Rwanda

Thu, 15/08/2019 - 16:53

Pierre Péan qui vient de mourir a considérablement fait avancer la connaissance  sur  le dossier  du génocide du Rwanda, à la fois dans ses livres : Noires fureurs, blancs menteurs : Rwanda 1990-1994 (Paris, 2005) ; Le monde selon K (Paris, 2009) et Carnages  (Paris, 2010), ainsi que dans plusieurs enquêtes parues en grande partie dans Marianne :
Rwanda : Noël en avance pour Paul Kagamé qui gagne la Francophonie... et décroche presque son non-lieu !Non-lieu requis pour l'entourage de Kagamé : ces preuves que le parquet a rejetéesRwanda : le document top secret qui accuse le régime de KagaméRwanda : la vérité sur les massacres de l'Armée patriotique de KagaméRwanda : « J'ai assisté à la préparation de l'attentat qui a déclenché le génocide »Récit d'une manipulationPlusieurs experts démentent le «scoop» de Libération sur les missilesL'étrangleur rwandaisKagamé, le Kim Il-sung africain« L'affaire Wenceslas restera comme un grand déshonneur de la presse française »Comme ceux qui croyaient en Staline...
A travers  ses trois livres et ses nombreuses enquêtes :- Il apporte des preuves sur les auteurs de l’attentat du 6 avril 1994 qui coûta la vie au président Habyarimana et qui fut le déclencheur du génocide.- Il identifie et analyse avec une grande finesse les réseaux qui, en Europe et aux Etats-Unis, ont assuré la propagande du FPR et l’ont aidé à populariser sa version de l’histoire du génocide- Il démontre la manière dont le FPR, grâce à ces mêmes réseaux, avait, dès avant le 1er coup de feu, manipulé l’opinion. A cet égard, il est indispensable de consulter cette vidéo.- Il  montre comment les groupes de pression aux ordres de Kigali ont réussi à saboter l’enquête du juge Bruguière grâce à des complicités se situant au plus haut niveau de l’Etat français.- Il met en évidence la nullité, ou la complaisance, avec laquelle médias et universitaires francophones ont traité le dossier.- Il fait ressortir le rôle des anglo-saxons dans la région des Grands lacs.- Il démontre  que le FPR est coupable de crimes de masse et de crimes contre l’humanité contre les Hutu au Rwanda et en RDC, avant, pendant et après le génocide.
Au moment où, dans son numéro du mardi 13 août, le Financial Times révèle que le Rwanda de Paul Kagamé a trafiqué ses statistiques afin de faire croire à un « miracle » économique, les travaux de Pierre Péan mettent en évidence les dessous et l’ampleur de la manipulation de l’histoire du génocide par  les services rwandais et leurs officines stipendiées agissant en Europe et aux Etats-Unis.
Pour une vision globale et un point sur l’état actuel des connaissances historiques concernant le génocide ainsi que sur les pressions exercées sur le TPIR par les services de Kigali, voir mon livre « Rwanda : un génocide en questions ».
Dans le numéro de septembre de l’Afrique Réelle, un article sera consacré aux tensions entre le Rwanda et l’Ouganda.
Categories: Afrique

L'Afrique Réelle n°116 - Août 2019

Thu, 01/08/2019 - 21:44
Sommaire du n°116 (août 2019)


Actualité :
- Le brouillard libyen
- Les fragilités du Niger
- La malédiction éthiopienne

Dossier : Algérie 
- Le général Gaïd Salah, le drapeau amazigh et la « légitimité » du « Système »
- 1962 : La victoire des arabo-islamistes sur les berbéristes et les maquis, acte fondateur du « Système » algérien
- Le « Système » cherche un dérivatif à la contestation populaire en attaquant la France


Editorial de Bernard Lugan

Algérie : « tout change pour que rien ne change »

En Algérie la rue n'a donc pas eu raison du « Système ». Plus de quatre mois après le départ du président Bouteflika, en dehors de la démission d’un président moribond et d’un report des élections, les millions de manifestants algériens n’ont en effet rien obtenu. Pour le moment ?

De son côté, demeuré maître du temps, le « Système » peut, tout à sa guise, embrouiller la situation, diviser les contestataires, isoler les jusqu’au-boutistes et tenter toutes les provocations. Y compris celles qui pourraient conduire à un bain de sang afin de lui permettre d’apparaître comme le garant de l’ordre public.
Quant à la magistrature, qui, hier, prenait ses ordres à la Présidence, elle le fait maintenant à l’état-major de l’armée qui l’utilise pour emprisonner les « corrompus », nuage de fumée à l’abri duquel le « Système » tente de reprendre le total contrôle du pays.

Comment en est-on arrivé là ?

Mis au pouvoir par l’armée en 1999, le président Bouteflika a voulu se dégager de son encombrante tutelle. Il le fit de deux façons :

1) En privant peu à peu l’armée de son pouvoir économique par la création d’une caste d’oligarques civils bâtissant leurs fortunes en dehors des réseaux militaires.
2) En divisant le corps des officiers par l’exacerbation des haines entre ses clans. Pour mener cette politique, il s’appuya sur un officier général de médiocre stature, le général Ahmed Gaïd Salah, qu’il hissa au sommet de la hiérarchie, en en faisant le chef d'Etat-major et le vice-ministre de la Défense.
Cet homme lige mit en marche le processus de division de l’armée à partir de 2013 en opposant ses deux grandes composantes, à savoir le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) dirigé par le général Mohamed Lamine Médiène dit « Toufik » depuis 1990, et l’état-major (EM) de l’Armée nationale populaire (ANP).

Mais, tirant les leçons de la vague de fond contestataire, et afin de se sauver, et le « Système » avec lui, le 2 avril 2019, et alors que, jusque-là, il lui avait publiquement clamé sa totale loyauté, le général Ahmed Gaïd Salah trahit le   président Bouteflika.

Un problème demeurait cependant car, totalement lié au régime Bouteflika, le général devait, d’une manière ou d’une autre, montrer qu’il n’était pas l’héritier du clan qui avait dilapidé et détourné les ressources de l’Etat.
Le cœur du « Système », à savoir l'Odjak des janissaires, autrement dit les deux ou trois dizaines des plus hauts responsables de l’armée, se refirent alors une « vertu » à bon compte en donnant au peuple les têtes d’affairistes particulièrement détestés, les « oligarques ». Une manœuvre qui, en même temps, masquait la reprise en main de la « vie économique » du pays par la caste militaire.

La rue n'est pas dupe. Mais comment pourrait-elle venir à bout d’un « Système » honni qui, ayant le dos au mur, n’hésitera devant aucun moyen pour se sauver ? Le cataclysme économique qui s'annonce changera-t-il le rapport des forces ?
Les semaines qui viennent nous le diront.
Categories: Afrique

Algérie : ces « faux moudjahidine » qui veulent criminaliser la France

Mon, 29/07/2019 - 09:57
Face au raz-de-marée populaire, le « Système » algérien attaque la France pour tenter de faire diversion. Le 15 juillet 2019, Mohand Ouamar Bennelhadj, secrétaire général par intérim de l’ONM (Organisation nationale des moudjahidines, les anciens combattants), a ainsi appelé les députés algériens à voter une loi criminalisant la colonisation française.En réponse à cette déclaration de guerre, j’ai, le 18 et le 21 juillet, posté deux communiqués sur mon blog. Mohand Ouamar Bennelhadj a réagi dans une vidéo postée le 24 juillet.
Qu’est donc l’ONM, organisation faux-nez du « Système » algérien pour le compte duquel elle met en cause la France avec une violence encore jamais atteinte dans l’histoire des « complexes » relations franco-algériennes?
Une organisation sangsue
Selon l’ancien ministre Abdeslam Ali Rachidi, en Algérie :

« (…) tout le monde sait que 90% des anciens combattants, les moudjahidine, sont des faux » (El Watan, 12 décembre 2015),
Et pourtant, le ministère des moudjahidine, façade institutionnelle de l’ONM, bénéficie du 3° budget de l’Etat. En 2017, avec 245 milliards de dinars (mds/dz) -en fonction du taux de change environ 2 milliards d’euros-, le budget du ministère des Moudjahidine se situait juste derrière ceux de l’Education et de la Défense. A titre de comparaison le budget du Ministère l’Agriculture était de 212 mds/dz, celui du Travail de l’emploi et de la sécurité sociale de 151, celui des Finances de 87, celui de la Justice de 72, celui de la Solidarité nationale de 70, celui de l’Energie de 44, celui de la Formation professionnelle de 48, celui de la Jeunesse et sports de 34, celui de la Communication de 18, celui de la Culture de 16, celui de l’Industrie et des mines de 4 et celui de l’Aménagement du Territoire de 3.
L’importance de ce budget s’explique en partie par les pensions versées à plus de deux millions d’ayants-droit car, paradoxe algérien, au lieu de diminuer selon la loi naturelle voulant que plus on avance dans le temps, moins il y a de gens qui ont connu Napoléon…, en Algérie, tout au contraire, plus les années passent, et plus le nombre des « anciens combattants » augmente…
Résultat :
- Fin 1962-début 1963, l’Algérie comptait 6000 moudjahidineidentifiés, 70.000 en 1972 et 200.000 en 2017…- Selon les propres chiffres de l’ONM, en 1972, 220 000 Algériens recevaient une pension, soit 70.000 titulaires de la carte de moudjahidine et 150.000 veuves de « maquisards ». - A la fin de la décennie 1980, ce chiffre avait doublé puisque, toutes catégories d’ayants-droit confondues, il était passé à 500.000. - En 2010, par un phénomène de génération spontanée, les moudjahidineet leurs ayants-droit étaient 1,5 million. Ceci s’explique car, en Algérie, plus d’un demi-siècle après l’indépendance, l’on demande encore la carte d’ancien moudjahidine… certains qui n’avaient pas 10 ans en 1962 l’ont même obtenue…
Pour être reconnu moudjahidine, nul besoin de lourdes formalités. Il suffit à l’impétrant que deux témoins attestent de ses « hauts faits guerriers » pour qu’il reçoive l’Attestation communale d’ancien combattant. Ce document lui permet ensuite de faire valider cette précieuse qualité par la généreuse commission de reconnaissance. « Généreuse » en effet comme l’a montré l’emblématique « affaire Mellouk », du nom du juge Benyoucef Mellouk qui a dénoncé 312 de ses confrères ayant reconnu contre rétribution la qualité de moudjahidine à un nombre considérable de faux demandeurs. Pourchassé par les associations, exclu de la magistrature, Benyoucef Mellouk fut condamné à la prison car il avait osé toucher au cœur même du « Système » algérien et de sa clientèle.
Une association de prébendiers
Pourquoi cette recherche effrénée du statut d’ancien moudjahidine ? Tout simplement parce que les titulaires de la précieuse carte ainsi que leurs ayants-droit touchent une rente de l’Etat, bénéficient de prérogatives, jouissent de prébendes et disposent de passe-droits. Cette carte qui joue le rôle d’amortisseur social permet également d’obtenir une licence de taxi ou de débit de boisson, des facilités d’importation, notamment de voitures hors taxes, des réductions du prix des billets d’avion, des facilités de crédit, des emplois réservés, des possibilités de départ à la retraite, des avancements plus rapides, des priorités au logement etc.
Achetés par le « Système » qui les tient, d’autant plus quand il s’agit d’imposteurs, les titulaires de la carte constituent son ossature populaire. Leur poids politique qui est considérable s’exerce à travers le maillage du pays par plusieurs associations nationales. Ainsi, l’ONEC (Organisation nationale des enfants de chouhada(martyrs), le CNEC (Coordination nationale des enfants de chouhada) ou encore l’ONEM (Organisation nationale des enfants de moudjahidine. Cette dernière qui compte 1,5 million d’adhérents a des antennes dans toute l’Algérie et même en France. Le nombre de ses membres s’explique car, dans un entretien en date du 27 octobre 2004 donné à Libération, M’barak Khalfa, alors dirigeant de l’ONEM, a pu déclarer sans la moindre pudeur que, comme :

« (…) il y a eu au moins un million (!!!) de moudjahidine, cela fait six ou sept millions d’enfants et donc de membres potentiels. Au rythme actuel, on va finir par dépasser les effectifs de l’UGTA (Union générale des travailleurs algériens) ».

Une association vivant sur le mensonge
Les vrais maquisards, ceux de l’intérieur, ceux qui ont effectivement lutté contre l’armée française, sont indignés par ces pratiques. Non contents de s’être fait voler l’indépendance par les planqués de l’ALN, l’armée des frontières durant l’été 1962 (voir à ce sujet le chapitre VII de mon livre « Algérie, l’histoire à l’endroit »), voilà qu’ils doivent supporter d’être assimilés aux imposteurs prébendiers porteurs, tout comme eux, de la carte de moudjahidine.
Voilà pourquoi, en 2003, plusieurs authentiques anciens combattants issus de toute l’Algérie ont adressé un mémorandum à la présidence de la République afin que soit diligentée une enquête concernant le scandale des faux moudjahidine. Selon eux, l’ONM, cette association qui, rappelons-le demande le vote d’une loi criminalisant la France, comptait à l’époque 80% de faux maquisards… dont le ministre des moudjahidine en personne… (Liberté-Algérie 28/10/2003).Selon le colonel Ahmed Bencherif, ancien patron de la gendarmerie nationale et président de l’Association de lutte contre les faux Moudjahidine, 750 millions de dinars, sont versés chaque mois à de faux moudjahidine. Selon le quotidien El Watan en date du 10 février 2007, sur une population de 70.000 personnes, la seule ville d’Aïn Defla (ancienne Duperré) compterait 14.000 faux moudjahidine, dont 1.300 femmes… Quant à Koléa, dans la Mitidja, 2/3 de ses moudjahidine seraient des imposteurs (Libération, 27 octobre 2004).
Toujours selon le colonel Ahmed Bencherif, cette inflation de faux maquisards s’explique parce que, nommés par le « Système », les responsables de l’ONM appliquent sa politique consistant à développer une clientèle d’obligés lui permettant de faire croire qu’il bénéficie d’un soutien populaire. Cela est d’autant plus facile que, comme l’a déclaré Abid Mustapha, ancien colonel de la Wilaya V, au sein des instances dirigeantes de l’ONM :

« Nous (les vrais combattants), sommes devenus une minorité ! Ceux qui occupent les responsabilités au sein du conseil national de l’ONM sont des faux ».
En 2008, Nouredine Aït Hamouda, député du RCD (Rassemblement pour la Culture et la Démocratie), a provoqué un tumulte quand, dans l’hémicycle, il a osé dénoncer le scandale des faux moudjahidine. Et il avait la légitimité pour le faire puisqu’il est le fils du colonel Amirouche Aït Hamouda, chef emblématique du maquis kabyle de la willaya III tué au combat le 29 mars 1959[1]. Plus encore, il a pulvérisé le mythe du 1,5 million morts causés par la guerre d’indépendance, chiffre totalement fantaisiste mais qui permet au « Système » de justifier le nombre surréaliste des ayants-droit, notamment celui des veuves et des orphelins. Or, selon Nouredine Aït Hamouda, sur les 2 millions de porteurs de la carte de moudjahidineet d’ayants-droit, les ¾ sont des faux…
Pour le « Système » algérien, la dénonciation de l’ONM et des faux moudjahidine représente un danger mortel puisque sa « légitimité » repose sur sa propre version de la guerre d’indépendance. Or, l’ONM est le principal vecteur de cette histoire reconstruite. Quant à ses dociles responsables nommés, ils ont pour mission de cautionner, de populariser et d’ancrer le mensonge sur lequel s’engraissent les profiteurs et les corrompus qui dirigent l’Algérie.
Bernard Lugan
[1]Si l’on en croit ce qu’écrit Saïd Sadi (Amirouche, une vie, deux morts, un testament, Paris, 2010), Amirouche aurait été donné aux Français par ses rivaux arabes du MALG (Ministère de l’Armement et des Liaisons Générales, le service de renseignement de l’ALN), or, ceux qui l’auraient « balancé » et leurs héritiers constituent le cœur du « Système » algérien…
Categories: Afrique

Nongqawuse, la Greta Thunberg africaine ?

Tue, 23/07/2019 - 21:37
Les prédictions apocalyptiques, à l’image de celles de la jeune Greta Thunberg ne sont pas l’apanage de l’Europe. Les exemples de prophéties millénaristes faites par des adolescents se retrouvent également en Afrique, notamment en Afrique du Sud et plus particulièrement chez les Xhosa.
Qu’il s’agisse des prophéties européennes ou africaines, elles interviennent toujours dans un contexte de grande crise politique, morale ou sociale. En Europe, les prophéties millénaristes les plus connues se sont produites au tournant de l’an mil (ou mille) quand elles annonçaient la fin du monde et qu’elles se traduisirent par les « grandes peurs ». Aujourd’hui, au moment où les Européens doutent en observant la fin de leur modèle civilisationnel et les menaces que le « grand remplacement » fait peser sur leur identité, c’est l’apocalypse climatique qui est annoncée.
Les Xhosa d’Afrique du Sud ont connu un phénomène semblable quand, influencés par une jeune fille, ils se sont auto-détruits. Le contexte est bien connu. Démoralisés par leurs défaites successives face aux Boers et aux Anglais, notamment celle de 1853, et par les pertes de territoire qui en découlèrent, les Xhosa virent également leur mode social bouleversé par l’impossibilité pour les lignages de partir à la conquête de pâturages nouveaux puisque le front pionnier blanc bloquait le leur. Pour ce peuple qui, génération après génération avançait vers le sud en s’établissant sur des terres nouvelles, le traumatisme fut profond. Il fut amplifié par la terrible sécheresse de l’été 1855-56 (déjà le climat…), et par une épidémie de pleuropneumonie bovine qui éclata en 1854, tuant au moins 100 000 têtes de bétail.
Dans ce sentiment de fin du monde, les prophéties se succédèrent. L’une annonçait la défaite des Anglais en Crimée devant des Russes présentés comme la réincarnation des guerriers xhosa morts au combat lors des précédentes guerres et qui étaient en marche vers le Xhosaland pour le libérer. Une autre annonçait que le chef qui avait conduit la guerre de 1850-1853 était ressuscité.
C’est dans ce contexte qu’en 1856, une jeune fille nommée Nongqawuse et appartenant à la chefferie Mnzabele établie dans la région de la basse rivière Great Kei, eut une vision: la puissance xhosa serait restaurée par les dieux, les troupeaux seraient multipliés et les morts ressusciteraient si tout le bétail, toutes les récoltes et toutes les réserves alimentaires étaient détruites. Durant les 13 mois de la prophétie (avril 1856-mai 1857), les Xhosa tuèrent leur bétail, soit 400 000 têtes, et ils détruisirent leurs récoltes.
Le 16 février 1857, le jour fixé par Nongqawuse, le pays demeura silencieux et, quand la nuit tomba, les Xhosa comprirent qu’ils allaient désormais subir une terrible famine. Les morts se comptèrent par dizaines de milliers et les survivants vinrent implorer des secours à l’intérieur du territoire de la colonie du Cap.Ceux qui avaient tué leur bétail et détruit leurs récoltes accusèrent ceux qui ne l’avaient pas fait d’avoir empêché la réalisation de la prophétie. En effet, quelques chefs xhosa moins naïfs que les autres, l’on dirait aujourd’hui qu’ils étaient des « prophéto-sceptiques », avaient refusé de suivre les hallucinations de Nongqawuse et ils avaient été contraints de s’exiler vers le Basutoland (Lesotho) pour échapper à la furie des croyants.
Le résultat de cette prophétie fut que les Britanniques n’eurent plus besoin de faire la guerre aux Xhosa puisque ces derniers s’étaient suicidés. Ils installèrent alors 6000 colons dans l’arrière-pays du port d’East London et ils englobèrent la région dans la British Kaffraria avant de la rattacher à la colonie du Cap en 1866.
Hier, la prophétie de Nongqawuse a donc servi l’impérialisme britannique… Espérons que celle de Greta Thunberg ne profitera pas à la Chine et à l’Inde qui se rient des hallucinations et du panurgisme des Européens… en attendant que, pour « sauver la planète », ils achèvent de détruire leur industrie…

Bernard Lugan
Categories: Afrique

Quand le « Système » algérien aux abois fait donner ses supplétifs

Sun, 21/07/2019 - 18:28
Le jeudi 21 juillet, le site de propagande Algérie patriotique a réagi (cliquer ici pour lire l'article) à mon communiqué daté du 18 juillet et intitulé « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ». Je vais commenter cette réaction aussi rapide que maladroite.

Le « Système » algérien a réagi rapidement parce que j’ai dénoncé sa manœuvre et le cœur de son mensonge en pointant le rôle de l’Association des moudjahidine, ces profiteurs de l’indépendance qui, depuis des décennies, vivent de la rente tirée de la fausse histoire de l’Algérie en captant 6% du budget de l’Etat...
Acculé par la rue le « Système » n’a que deux moyens de détourner la marée de la contestation populaire.
1) S’attaquer au Maroc, comme en 1963 quand la « Guerre des Sables » lui a permis de mettre en parenthèses le soulèvement kabyle, mais, avec le Maroc, qui s’y frotte s’y pique…
2) Rien de tel avec l’ectoplasme français, ce chapon politique dont les élites se complaisent dans leur dhimmitude émasculée, d’où l’attaque en forme de déclaration de guerre faite le 15 juillet 2019 par Mohand Ouamar Bennelhadj (voir mon communiqué en date du 18 juillet).
Puisque Algérie patriotique  relève le gant, et comme les autorités françaises vont, comme elles en ont l’habitude, se blottir tel le lièvre au gîte, je tire donc ma rapière afin de porter quatre coups :
1) L’Algérie qui n’a jamais existé est directement passée de la colonisation turque à la colonisation française. J’attends qu’Algérie patriotique me démontre scientifiquement, et non pas par des glapissements indignés, le contraire.
2) Au moment de l’indépendance, comme il fallait tenter de donner une cohérence aux différents ensembles composant ce pays qui n’avait jamais existé et auquel, tout à fait artificiellement, le général De Gaulle avait rattaché le Sahara et ses hydrocarbures, la nécessité de l’unité se fit à travers un nationalisme arabo-musulman niant la composante berbère du pays. Résultat, les Berbères -non les seuls berbérophones- qui constituent l’immense majorité de la population de l’Algérie (comme le démontre la génétique) furent certes « libérés » de la colonisation française, mais pour retomber dans la colonisation arabe qu’ils subissent depuis plus de dix siècles. J’attends là encore qu’Algérie patriotique me démontre le contraire.
3) Le 15 juillet 2019, Mohand Ouamar Bennelhadj, membre essentiel du « Système » algérien puisqu’il est le secrétaire général par intérim de l’ « Organisation nationale des moudjahidines », les « anciens combattants », a donc appelé le parlement algérien à voter une loi criminalisant la colonisation française. Or, que représente véritablement cette association quand, selon l’ancien ministre algérien Abdeslam Ali Rachidi, « tout le monde sait que 90% des anciens combattants, les moudjahidine, sont des faux » (El Watan, 12 décembre 2015) ?
4) De plus, ces moudjahidine furent moins nombreux que les Algériens combattant dans l’armée française et cela, l’histoire officielle algérienne le sait… et elle le tait. Démonstration :
Nombre d’Algériens servant dans l’armée française
A la différence des registres de l’Association des Moudjahidine,  l’armée française a tenu des fiches d’incorporation, de traitement, de démobilisation etc., ce qui permet de démontrer qu’au mois de janvier 1961, alors que le processus menant à l’indépendance était clairement engagé, environ 250 000 Algériens servaient  dans l’armée française contre 202 842 un an plus tôt, à savoir :- 60 432 appelés- 27 714 engagés- 700 officiers dont 250 appelés- 4600 sous-officiers- 63 000 Harkis (ils étaient 57900 en 1960)- 88700 dans les groupes d’autodéfense dont 19100 Moghaznis et 62000 membres de l’autodéfense villageoise
Nombre  de combattants indépendantistes
Selon les sources françaises :Selon le 2° Bureau français, au mois de mars 1962, à la signature des accords d’Evian, les combattants nationalistes de l’intérieur étaient estimés à 15.200, tant réguliers qu’auxiliaires, et ceux de l’extérieur (l’ALN, ou armée des frontières) étaient 22 000 en Tunisie et 10 000 au Maroc. Les effectifs combattants des indépendantistes étaient donc au total de 50 000 hommes en armes contre près de 250 000 dans l’armée française, soit cinq fois moins. (Toutes les références sont données dans mon livre Algériel’histoire à l’endroit).
Selon les sources algériennes : Les sources algériennes n’indiquent pas de grosses différences par rapport aux sources françaises. Dans son livre publié en 1997, Benyoucef Benkhedda dernier président du GPRA, écrit ainsi qu’à la fin de la guerre, les maquis de l’intérieur comptaient 35 000 combattants (15 200 pour les sources françaises), à savoir 7000 pour la wilaya I, 5000 pour la II, 6000 pour la III, 12000 pour la IV, 4000 pour la V et 1000 pour la VI.
Comme les effectifs de l’ALN, l’armée des frontières sont connus, à savoir  un peu plus de 30 000 hommes, selon les chiffres donnés par les nationalistes algériens, les effectifs combattants nationalistes étaient donc d’un peu moins de 70 000 hommes, soit quasiment un quart des 250 000 Algériens qui servaient alors dans l’armée française. J’attends également qu’Algérie patriotique me démontre le contraire.
Si Algérie Patriotique veut continuer à se faire le porte-voix du « Système » aux abois à travers l’histoire officielle de l’Algérie écrite par son socle régimiste gavé de subventions et acheté par les passe-droits, nous pouvons continuer l’exercice. Dans mon éventuelle prochaine réponse j’expliquerai alors à ses lecteurs comment les Berbères furent colonisés  par les Arabes, et comment les arabistes de l’armée des frontières leur volèrent l’indépendance de 1962…
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Algérie : « Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux »

Thu, 18/07/2019 - 12:12
Cette phrase d’Etienne de la Boétie résume la relation franco-algérienne. A chaque fois qu’il est en difficulté, le « Système » algérien sort en effet le joker-martingale de l’accusation de la France, sachant qu’il sera immédiatement relayé par les héritiers des « porteurs de valises », ethno-masochistes buvant goulûment  au calice de la repentance et de la contrition.
Le 15 juillet dernier, montrant en cela qu’il n’est pas encore mentalement décolonisé, Mohand Ouamar Bennelhadj, membre essentiel du « Système » algérien puisqu’il est le secrétaire général par intérim de l’ « Organisation nationale des moudjahidines », les « anciens combattants », a ainsi appelé le parlement algérien à voter une loi criminalisant la colonisation française. Il a en outre demandé que cette loi ouvre la voie à des « compensations », osant écrire que les Français ont « génocidé » les Algériens et que, après avoir pillé le pays, ils « n’ont laissé ici que des broutilles, des choses sans valeur».
Ces accusations ne relèvent pas de l’anecdote. Ce n’est pas de sa propre initiative que ce pâle apparatchik dont l’association constitue le pivot du « Système » et dévore 6% du budget de l'Etat -plus que ceux des ministères de l'Agriculture (5%) et de la Justice (2%)-, a lancé ces accusations gravissimes. Depuis deux ou trois semaines, acculé par la rue, le général Gaïd Salah a en effet ordonné qu’une offensive anti-française destinée à tenter de faire dévier la contestation populaire soit lancée. Face à cette véritable déclaration de guerre, le président Macron garde un étourdissant silence…
 Alors, puisque, comme ils en ont hélas l’habitude, les « lapins de coursive » qui dirigent la France se tairont, il est donc nécessaire que les « réseaux sociaux » s’emparent de  l’affaire, à la fois pour exiger une réponse officielle des autorités françaises, et pour « remettre les pendules à l’heure ».
En 1962, la France a légué à l’Algérie un héritage exceptionnel et non des « Broutilles » et des  « choses sans valeur », à savoir 54 000 kilomètres de routes et pistes (80 000 avec les pistes sahariennes), 31 routes nationales dont près de 9000 kilomètres étaient goudronnés, 4300 km de voies ferrées, 4 ports équipés aux normes internationales, 23 ports aménagés (dont 10 accessibles aux grands cargos et dont 5 qui pouvaient être desservis par des paquebots),  34 phares maritimes, une douzaine d’aérodromes principaux, des centaines d’ouvrages d’art (ponts, tunnels, viaducs, barrages etc.), des milliers de bâtiments administratifs, de casernes, de bâtiments officiels, 31 centrales hydroélectriques ou thermiques, une centaine d’industries importantes dans les secteurs de la construction, de la métallurgie, de la cimenterie etc., des milliers d’écoles, d’instituts de formations, de lycées, d’universités avec 800 000 enfants scolarisés dans 17 000 classes (soit autant d’instituteurs, dont deux-tiers de Français), un hôpital universitaire de 2000 lits à Alger, trois grands hôpitaux de chefs-lieux à Alger, Oran et Constantine, 14 hôpitaux spécialisés et 112 hôpitaux polyvalents, soit le chiffre exceptionnel d’un lit pour 300 habitants. Sans parler d’une agriculture florissante laissée en jachère après l’indépendance, à telle enseigne qu’aujourd’hui l’Algérie doit importer du concentré de tomates, des pois chiches et de la semoule pour le couscous…
Tout ce que la France légua à l’Algérie avait été construit à partir du néant, dans un pays qui n’avait jamais existé et dont même son nom lui fut donné par la France. Tout avait été payé par les impôts des Français. Daniel Lefeuvre a montré qu’en 1959, toutes dépenses confondues, l’Algérie engloutissait 20% du budget de l’Etat français, soit davantage que les budgets additionnés de l’Education nationale, des Travaux publics, des Transports, de la Reconstruction et du Logement, de l’Industrie et du Commerce ! 
Tous les arguments permettant de réfuter la fausse histoire de l’Algérie écrite par les profiteurs du « Système » se retrouvent dans mon livre Algérie, l’histoire à l’endroit.
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Le réchauffement de l’Afrique n’est pas dû à l’homme

Tue, 09/07/2019 - 10:08

Mise au point  de Bernard Lugan  En Afrique, le  postulat du « réchauffement climatique global dû à l’homme » est contredit par cinq disciplines scientifiques majeures :
1) Les paléoclimatologues ont, en analysant les « carottes » obtenues lors de forages continentaux et marins, montré que, durant tout le Quaternaire, c’est-à-dire depuis 2,5 millions d’années, l’Afrique a connu des alternances de périodes froides et chaudes, sèches et humides. Les australopithèques et les premiers hominiens en seraient-ils responsables… ?
2) Les paléoenvironnementalistes ont mis en évidence les modifications de la végétation africaine résultant de ces changements climatiques intervenus en dehors de toute intervention humaine.
3) Les climatologues tropicalistes ont démontré que l’actuel  et réel réchauffement est un phénomène à la fois naturel - même si la suicidaire démographie africaine aggrave la désertification -, et de longue durée puisqu’il s’inscrit dans un cycle ayant débuté il y a  5 000 ans. Toujours sans responsabilité humaine.
4) Les archéologues nous apprennent que sur les quinze derniers millénaires, ce furent ces changements climatiques qui, du nord au sud et de l’est à l’ouest, conditionnèrent la mise en place des populations africaines.
5) Les historiens ont mis en évidence le synchronisme existant entre changements climatiques et grandes séquences de l’histoire du continent. (Ce thème du synchronisme constitue le cœur de mon livre « Les guerres du Sahel des origines à nos jours »).
Il a donc été démontré que, depuis des millions d’années, les changements climatiques africains se font selon des cycles naturels connus, décrits, analysés et indépendants des activités humaines. Et pourtant, tels de nouveaux messies, les « ayatollahs verts » imposent leurs prophéties hallucinatoires à des populations frappées de panurgisme, cependant qu’ à travers un matraquage orwellien de plus en plus inquisitorial, ils tentent de réduire au silence les « hérétiques » ne croyant pas à leurs « révélations ».
Cette mise au point est destinée à fournir un argumentaire aux « sceptiques » à travers la mise en évidence des véritables raisons des changements climatiques africains.
Développements :
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L'Afrique Réelle n°115 - Juillet 2019

Tue, 02/07/2019 - 16:24
Sommaire

Actualité :- Algérie et Soudan : le « Système » contre-attaque- Les Iles Eparses sont françaises
Dossier :Mali et Burkina Faso : La descente aux enfers- Le Mali en perdition- Gourma-Liptako : Le retour de la longue histoire- Mali : la colonisation aurait-elle créé les ethnies ?

Editorial de Bernard Lugan
Ce n’est pas de « développement » dont l’Afrique a besoin, mais du contrôle des naissances
Quelques semaines avant les dernières élections, les députés européens ont voté de nouveaux généreux budgets à destination de l’Afrique. En plus d’une rente permanente se chiffrant à des dizaines de milliards d’euros, l’UE va ainsi offrir 32,5 milliards (mds) d’euros d’ici 2020, puis 40 mds entre 2021 et 2027, soit au total 72,5 mds d’euros afin de créer 10 millions d’emplois. Outre que cela fait tout de même « cher » par emploi supposé être créé, nous sommes en réalité en présence d’une entreprise de dilapidation des fonds européens car l’inutilité d’un tel cadeau est en effet actée. Dans son rapport de 2017 publié en 2018, la BAD (Banque africaine de développement) nous apprend ainsi que, compte tenu de sa folle démographie, l’Afrique est condamnée à créer 450 millions d’emplois d’ici 2040. Le rapport don-résultat est donc à la fois ridicule compte tenu de l’océan des besoins africains, et élevé à l’échelle des nécessités européennes. 
L’argument de ceux qui ont ainsi amputé l’UE de sommes qui y sont pourtant indispensables, est que, si nous ne développons pas l’Afrique, nous subirons les migrations. Or, comme je l’ai expliqué dans mon livre Osons dire la vérité à l’Afrique, depuis 1960, tout a déjà été tenté pour développer le continent. En vain, car la croissance économique africaine (entre 1,4% et 1,6%), est inférieure à la croissance démographique (4%). D’autant plus qu’il faudrait au moins 7% de croissance économique durant des années pour simplement rééquilibrer le rapport croissance-démographie. Dans ces conditions, comment prétendre « développer » un continent qui, d’ici à 2030, verra sa population passer de 1,2 milliard à 1,7 milliard, avec plus de 50 millions de naissances par an ? 
La priorité n’est donc pas de continuer de remplir le « Tonneau des Danaïdes » africain, mais de protéger l’Europe de la déferlante annoncée et même programmée par certains. Or, les 72,5 mds d’euros qui vont être dilapidés dans l’illusoire projet de création d’une poignée d’emplois, auraient été nécessaires à une politique ayant pour but la survie de l’identité de l’Europe. 
Cela, d’autant plus que la religion climatique que nous voyons naître sous nos yeux à travers les prophéties hallucinatoires des grands prêtres du « climatiquement correct », répond en partie à un but très clair : préparer les opinions européennes à l’accueil des « réfugiés climatiques » venus d’Afrique. Nous sommes là dans la suite de l’entreprise de désarmement moral et mental des peuples européens qui a débuté au lendemain du second conflit mondial. Avant-hier, nous étions accusés d’avoir pillé l’Afrique en la colonisant. Hier nous l’étions pour l’avoir saignée en lui volant ses ressources naturelles. Aujourd’hui, les mêmes clament que notre niveau de vie provoque le réchauffement climatique qui va rendre la vie intenable en Afrique. Conclusion, comme nous sommes par postulat responsables, nous devrons nous racheter en accueillant les futurs « réfugiés climatiques ». Le masochisme des Européens est décidément sans limite !!!
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Comprendre les conflits au Sahel

Fri, 28/06/2019 - 18:18
Afin de comprendre les conflits au Sahel, Bernard Lugan propose un cours vidéo de 2 heures et illustré de nombreuses cartes.



Pour visionner le cours, s'inscrire sur :
https://lescours-bernardlugan.teachable.com

Le cours est divisé en 6 parties (format HD) consultables pour une durée illimitée.
Les abonnés à l'Afrique Réelle bénéficient de 30% de réduction.
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Peul contre Dogon et Bambara : une plaie ethnique ancienne surinfectée par le jihadisme contemporain

Thu, 20/06/2019 - 10:46

Dans le sud du Mali, dans le nord et dans l’est du Burkina Faso, les massacres se multiplient depuis plusieurs semaines. Vouloir les expliquer par le jihadisme contemporain est une vue de l’esprit car leur arrière-plan est à la fois ethno-historique et inscrit dans la longue durée.Nous sommes en réalité en présence de la résurgence de conflits datant de la fin du XVIIIe et de la première moitié du XIXe siècle. La région fut alors dévastée et conquise par des éleveurs peul dont l’impérialisme s’abritait derrière le paravent religieux. Il y eut alors trois jihad peul. Celui d’Ousmane dan Fodio débuta en 1804 et il dévasta le pays Haoussa ; celui de Seku Ahmadou ravagea le Macina à partir de 1818. Quant à celui d’El-Hadj Omar, il s’étendit à toute la région de la boucle du Niger ainsi qu’au Macina à partir de 1852. Partout les sédentaires furent razziés pour être réduits en esclavage. Au Mali, les principales victimes furent les Bambara et les Dogon. Au Burkina Faso, dans le Gourma, la constitution de l’émirat peul du Liptako se fit par l’ethnocide des Gourmantché et des Kurumba (le numéro de juillet 2019 de l’Afrique Réellecontiendra un dossier consacré à la question du Gourma-Liptako et à la région dite des « Trois frontières » Pour profiter de l'abonnement spécial 10 ans du blog (36 numéros au lieu de 12), cliquer ici.
Les actuels affrontements, notamment ceux opposant Peul et Dogon, tirent directement leur origine de ces épisodes ignorés ou lointains pour les Européens, mais totalement présents dans la mémoire locale.
A partir de 1893, la colonisation établit la paix et les Dogon redescendirent peu à peu des falaises dans lesquelles ils s’étaient réfugiés pour se réinstaller dans la plaine occupée par les Peul. Or, depuis deux ou trois décennies, en raison, de l’essor démographique et de la péjoration climatique, la cohabitation entre les deux peuples est de plus en plus difficile. D’où de très nombreux affrontements avec constitution de milices ethniques d’auto-défense. Avec opportunisme, les jihadistes ont infiltré les milices peul. Résultat, les Dogon pensent revivre le retour du jihad qui, au XIXe siècle les chassa de leur terre.
Dans les immensités sahéliennes, domaine du temps long, l’affirmation d’un islamisme radical est d’abord le paravent d’intérêts économiques ou politiques à base ethnique. Mais, pour le comprendre, encore faut-il connaître l’ethno-histoire régionale. C’est pourquoi j’ai écrit « Les Guerres du Sahel des origines à nos jours », un livre spécialement consacré à cette question. En commande ici.
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Offre spéciale 10 ans du blog : 36 numéros de l'Afrique Réelle au lieu de 12 !

Thu, 06/06/2019 - 11:21
En 2019, le blog de l’Afrique Réelle fête ses dix ans d’existence. A l’occasion de cet anniversaire nous vous proposons un abonnement spécial à l’Afrique Réelle, soit les 12 numéros de l’année 2019, plus, les numéros, au choix, de deux années précédentes, soit au total 36 numéros. Le tout pour 45 euros. Le sommaire de tous les numéros est visible sur cette page
Pour souscrire cet abonnement spécial, deux possibilités :

1) Par carte bleue/Paypal

1e année offerte Année 2010 Année 2011 Année 2012 Année 2013 Année 2014 Année 2015 Année 2016 Année 2017 Année 2018 2e année offerte Année 2010 Année 2011 Année 2012 Année 2013 Année 2014 Année 2015 Année 2016 Année 2017 Année 2018
2) Par chèque

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L'Afrique Réelle n°114 - juin 2019

Sat, 01/06/2019 - 00:16
Sommaire

Actualité :
La question des eaux du Nil

Dossier : Libye 
- Les deux Libye
- L’offensive du général Haftar (2017-2019)
- Sud libyen-nord Tchad : nouveau point chaud

Débat :
Quelle démocratie pour l'Afrique ?


Editorial de Bernard Lugan :

L’ethnie, rempart face au jihadisme ?

Dans la BSS (Bande Saharo-Sahélienne) où le jihadisme prospère sur les fractures ethno-raciales, seul le temps long permet de comprendre la complexité de la situation et d’en saisir les véritables enjeux.
Avant la colonisation, les pasteurs saharo-sahéliens (Maures, Touareg, Peul, Toubou, Zaghawa etc.), razziaient les sédentaires sudistes. Après avoir imposé une parenthèse de paix, les colonisateurs se retirèrent et le temps long africain reprit son cours. Avec une nouveauté cependant puisque les anciens prédateurs et les anciennes victimes étaient désormais rassemblés à l’intérieur de frontières artificielles. Dans ces cadres étatiques plaqués sur les réalités locales, les  anciennes fractures furent aggravées par l’ethno-mathématique électorale qui donna le pouvoir aux sudistes puisqu’ils étaient plus nombreux que les nordistes. Dès les années 1960, refusant cette situation nouvelle, ces derniers se soulevèrent et éclatèrent alors les révoltes des Touareg à l’ouest et celles des Toubou-Zaghawa à l’est[1].
Nous sommes là à l’origine des évènements qui ensanglantent actuellement la BSS et que Barkhane n’est évidemment pas en mesure de résoudre. A supposer que nos forces réussissent à éliminer les jihadistes, la question des rapports entre nordistes et sudistes ne serait en effet pas réglée pour autant puisque le jihadisme n’est ici que la surinfection d’une plaie  ethno-raciale millénaire.  Or, cette réalité explique à la fois le succès des jihadistes et l’échec de leur tentative de création d’un califat transnational et transethnique. Pour survivre ou se développer, ils ont en effet été contraints de prendre appui sur certaines ethnies ou tribus. Ce faisant, ils se sont isolés des autres car ils ont réveillé chez les anciennes victimes les souvenirs des exactions d’avant la colonisation « libératrice ». Quand ils prennent pied dans une région, les jihadistes créent certes un nouveau foyer, mais ils réactivent en même temps les anciennes chaines défensives, les antiques solidarités ethniques. Voilà qui explique les évènements du Macina, du Liptako ou encore du Gourma.
Le cas des Dogon est emblématique. Ce n’est pas par choix qu’à partir de la fin du XVIIIe siècle, se repliant devant la poussée des cavaliers peul musulmans, leurs ancêtres abandonnèrent les plaines fertiles pour se retrancher dans les falaises ingrates de Bandiagara où ils furent harcelés et assiégés par les chasseurs d’esclaves (voir à ce sujet le numéro du mois d’avril 2019 de l’Afrique Réelle). Aujourd’hui, face à la dilution de l’Etat malien et à l’impuissance de son armée[2], les Dogon sont de nouveau contraints d’assurer leur défense contre le jihadisme porté par certains groupes peul…comme aux XVIIIe-XIXe siècles…
La leçon doit être retenue car le jihadisme va pousser vers le golfe du Bénin, la région guinéenne et la Côte d’Ivoire où, au fur et à mesure de son expansion, vont se réveiller les fronts ethniques d’avant la colonisation. Comme actuellement dans la région de Jos au centre du Nigeria. Comme ce sera alors sur les ethnies que s’organisera la résistance, nos Armées doivent donc dès à présent reprendre à leur compte la célèbre phrase de Kipling : « Le loup afghan se chasse avec le lévrier d’Afghanistan ». Mais encore faudrait-il que de véritables enseignements africanistes soient dispensés à l’ESM de Coëtquidan et à l’Ecole de Guerre.
[1] Cette problématique constitue la colonne vertébrale de mon livre : « Les Guerres du Sahel des origines à nos jours ».[2] Pour mémoire, durant le seul mois de mai 2019, l’armée nigérienne a perdu 30 morts dans la région de Tillabéry et l’armée malienne plus d’une dizaine dans la région de Mopti.
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Algérie : le « Système » dans l’impasse

Sat, 25/05/2019 - 10:41
Cette analyse peut être reprise à condition d’en citer la source

La lecture des évènements  algériens doit se faire à deux niveaux, le visible et l’invisible.
Les apparences
Après plusieurs semaines de manifestations, le Ramadan n’ayant pas démobilisé la rue, le mouvement de contestation ne s’essouffle pas,Face à cette réalité, la stratégie du « Système »[1] actuellement incarné par le général Ahmed Gaïd Salah a échoué. Elle avait pour but de gagner du temps et de diviser les contestataires à travers la manipulation d’une justice spectacle illustrée par une vague d’arrestations de «corrompus ». Mais les Algériens ne furent pas dupes car  ils savent bien que c’est tout le « Système » qui est corrompu. A commencer par le général Gaïd Salah dont l’affairisme familial à Annaba fut dénoncé par l’opposante Louisa Hanoune… qui a donc été jetée en prison…Entre la rue et le « Système », les positions sont inconciliables :-Les manifestants exigent une période de «transition »  menée par des personnalités indépendantes, -Le général Gaïd Salah veut, à travers l’élection présidentielle prévue le 4 juillet 2019, faire élire un candidat désigné par lui. Or, ce scrutin paraissant impossible à organiser, à l’issue des 90 jours de présidence intérimaire prévus par la Constitution,  le général va se trouver face à un vide institutionnel.
… et derrière les apparences
La lecture d’El Djeich, la revue de l’armée permet d’aller au-delà des apparences. Depuis plusieurs semaines, y est en effet dénoncé l’existence d’un « complot », ce qui confirme que la guerre est bien ouverte à l’intérieur de la caste militaire. Or, depuis 1962, l’armée avait toujours réglé ses comptes  à huis-clos, s’abritant derrière un pouvoir civil de façade délégué au FLN. De plus, jusqu’à aujourd’hui, en dépit de leurs oppositions, les différents clans militaires n’avaient  à aucun moment transgressé l’ultime tabou qui était de  ne jamais aller jusqu’à mettre en danger la pérennité du « Système ». L’incarcération de plusieurs généraux dont Mediene « Toufik » et Tartag, montre que les haines claniques et personnelles ont pris le dessus sur le consensus indispensable à la survie commune.La crise au sein de l’institution militaire est donc profonde et la multiplication des slogans dirigés contre sa personne montre que le  général Gaïd Salah se trouve désormais seul face à la population. De plus en plus nombreux sont donc ceux qui se demandent si l’impopularité de leur chef ne va pas finir par provoquer un divorce entre l’armée et le peuple. Le risque serait alors de voir la lame de fond contestataire emporter l’institution militaire avec le « Système ».Selon des rumeurs qui commencent à se faire insistantes, plusieurs de ses pairs tiendraient le général Gaïd Salah pour responsable de l’impasse politique actuelle. Le seul obstacle à son éviction serait que les généraux ne se seraient pas encore  accordés sur le nom d’un successeur. Compte tenu du climat actuel, la difficulté est en effet de trouver un général s’étant tenu au-dessus des intrigues du sérail et donc susceptible de rétablit le consensus interne à l’armée, ce qui passe par  la redéfinition de la place de chacun de ses clans. Loin de l’agitation de la rue, mais en ayant le regard constamment tourné vers elle, les janissaires marchandent  donc afin de trouver parmi eux celui qui pourra  sauver le « Système ».  Le proche avenir dira s’ils ont réussi à trouver l’ « oiseau rare ». Mais en ont-ils encore la possibilité ?
Bernard Lugan

[1] Voir le dossier consacré au « Système » algérien dans le numéro du mois de mai 2019 de l’Afrique Réelle.
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Algérie : les dernières cartouches du général Gaïd Salah

Sun, 05/05/2019 - 10:38
Le général Gaïd Salah, désormais cible principale de la contestation, tente de se sauver tout en sauvant ce qui reste du « Système ». Il le fait en livrant à la foule les personnalités honnies de l’ancien régime et ses ennemis personnels.Après les oligarques, les généraux Tartag et Toufik, tous deux anciens patrons des « Services », ainsi que Saïd Bouteflika, dorment donc en prison. Mais, dans sa pathétique course pour la survie, le général ne peut plus rien offrir en pâture à la rue car, avec ces arrestations, il vient de tirer ses dernières cartouches. Or, il est en première ligne comme l’a montré la manifestation de vendredi dernier durant laquelle son nom fut conspué à l’égal de celui de Saïd Bouteflika lors des précédentes protestations. Et il peut être inquiet car le peuple n’est pas dupe de l’ultime manœuvre de celui qui est l’incarnation même à la fois du « Système » et du clanisme de l’ancien régime et qui, de plus en plus isolé, s’est lui-même condamné à la fuite en avant.Mais, dans les casernes, les esprits bouillonnent. Nombreux sont en effet ceux qui n’acceptent pas que, dans le combat pour sa propre survie, le général Gaïd Salah finisse par emporter avec lui la cohésion et le prestige de l’institution militaire. L’impasse constitutionnelle étant totale et le personnel politique étant plus que discrédité, la question qui se pose désormais est de savoir si ceux des jeunes officiers les moins liés au « Système » oseront trancher le nœud gordien avant de franchir le Rubicon. 
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L'Afrique Réelle n°113 - Mai 2019

Tue, 30/04/2019 - 23:04
Sommaire

Actualité :
Comprendre la question du Soudan

Dossier : Autopsie du « Système » algérien
- 1962 : la naissance du « Système »
- L’adaptabilité du « Système »
- Le pouvoir militaire

Rwanda :
Les responsabilités de l'ONU et du général Dallaire dans le génocide


Editorial de Bernard Lugan :

Le coeur du « Système » algérien est formé par une caste d’officiers supérieurs placés à la tête d’une armée qui dévore 25% du budget de l’Etat. Le double de celui de l’éducation. Jusqu’à ces dernières années, les réseaux affairistes militaires contrôlaient intégralement l’économie du pays. Afin de les affaiblir, Abdelaziz Bouteflika injecta dans le « Système » une cohorte de parvenus lui devant leur fortune, les « oligarques ». Au prétexte de lutter contre la corruption, mais d’abord pour tenter de freiner la revendication populaire, l’armée en a fait jeter certains en prison, ce qui lui permet d’éliminer ou de placer sous contrôle des rivaux économiques.
La réaction militaire débuta le 26 mars, quand le général Gaïd Salah, vieil et acariâtre chef d’état-major, décida de sacrifier le président Bouteflika et son clan. Il appela alors à la destitution d’un président dont, jusque-là, il avait été le plus fidèle et le plus inconditionnel soutien, clamant encore haut et fort son appui au « 5e mandat », qualifiant même de traitres à la nation ceux qui s’y opposaient… Quant à son gendre, Abdelghani Zaâlane, ministre des Transports et des travaux publics, il était le directeur de campagne d’Abdelaziz Bouteflika pour ce même 5e mandat…Le sauve-qui-peut des caciques du « Système » prit alors la forme d’une hémorragie. Le RND, parti pourtant servilement associé au FLN, demanda ainsi à son tour la démission du président Bouteflika tout en se précipitant aux pieds du général Gaïd Salah pour l’assurer de sa « loyauté »... Le FLN lui-même fut gagné par ce mouvement. Cette manœuvre n’ayant pas freiné la contestation populaire, c’est désormais du « Système » tout entier dont la rue veut se débarrasser. A commencer par le général Gaïd Salah et son clan familial incarné par Karim et Adel Gaïd Salah, ses deux fils qui règnent sur la ville d’Annaba où ils possèdent organes de presse, hôtels et sociétés d’import-export. Face à la rue, le « Système » résiste en pariant sur la division de la contestation et sur un essoufflement espéré durant le prochain ramadan. Le tout dans l'attente de l'inévitable confrontation.
Au début du mois d’avril dernier, les medias déversant ad nauseam leurs habituels mensonges sur la prétendue responsabilité de la France dans le génocide du Rwanda, le président Macron crut devoir recevoir à l’Elysée des associations porte-voix du régime de Kigali. Par pur fait du prince, il leur annonça, sans le moindre débat contradictoire et sans la moindre consultation de la population, qu’en France, le 7 avril serait désormais jour de « commémoration du génocide des Tutsi du Rwanda ». Reprenant le vocabulaire officiel rwandais, le président Macron a parlé de « génocide des Tutsi » et non pas de « génocide du Rwanda ». 
Les Français vont donc devoir commémorer un génocide dans lequel leur pays ne porte pourtant aucune responsabilité. Sauf celle d’avoir accepté le diktat de Paul Kagamé qui était de retirer son contingent militaire du Rwanda, ce qui fut achevé au mois de décembre 1993, soit cinq mois avant le début du génocide. Les 400 Français furent alors remplacés par plus de 2600 casques bleus de l’ONU. Commandés par l’incompétent et fragile général canadien Roméo Dallaire, ils demeurèrent l’arme au pied, se terrant même parfois dans leurs casernements, laissant ainsi les génocidaires libres d’agir et les hommes de Paul Kagamé libres de conquérir le pays. Mais c’est la France qui est mise en accusation… non l’ONU…
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27 avril 1994 : le début du naufrage de l’Afrique du Sud

Sat, 27/04/2019 - 17:48
En Afrique du Sud, le 27 avril 1994, il y a donc 25 ans, se tinrent  les premières élections multiraciales. Grâce à elles, l’enfer de l’apartheid allait être oublié et le paradis sur terre allait advenir puisque,  des fontaines de la démocratie non raciale allaient couler le lait et le miel. Alléluia !
Vingt-cinq ans plus tard, les illusions ont été dissipées et le pays a sombré :- Taux de chômage officiel, 27,7% (taux officieux 40%).- Chômage des jeunes âgés de 15 à 34 ans, 38,8% selon le  taux officiel.- PIB en chute libre : 3,5% en 2011 ; 2,6% en 2012 ; 1,9% en 2013 ; 0,6% en 2016 ; 1,3% en 2017 et 0,8% en 2018, alors qu’il faudrait 7% durant plusieurs décennies pour simplement stabiliser la pauvreté.- Economie entrée en récession technique depuis  2018.- Revenu de la tranche la plus démunie de la population noire inférieur de près de 50% à celui qu’il était sous le régime blanc d’avant 1994.- Un habitant sur trois survivant  grâce aux aides sociales, le Social Grant.- A l’exception de l’agriculture, branche encore contrôlée par les Blancs, tous les secteurs économiques sud-africains sont en recul ou en faillite, à commencer par les industries de main d’œuvre (textile, vêtement, chaussures), qui n’ont pu résister aux importations chinoises. Quant aux secteurs de la mécanique dans lesquels, avant 1994, l’Afrique du Sud produisait la majeure partie des pièces dont ses industries avaient besoin, ils sont moribonds.- Les mines ont sombré. En raison des pertes de production et des coûts d’exploitation en hausse constants, nombre de puits secondaires ont fermé, entraînant  la  mise à pied de dizaines de milliers de mineurs. Pour maintenir la production, il aurait fallu investir des sommes colossales, mais le climat social, la corruption et l’insécurité ont découragé les investisseurs qui ont préféré faire glisser leurs activités vers des pays moins incertains.- L’industrie minière est pénalisée par les coupures de courant à répétition car la compagnie publique Eskom, littéralement pillée par ses nouveaux dirigeants nommés par l’ANC a vécu sur l’héritage laissé par le régime blanc sans procéder aux investissements indispensables. Résultat : les mines qui représentent aujourd’hui 10% du PIB sud-africain, qui emploient 8% de la population active et qui sont le premier employeur du pays avec 500.000 emplois directs, ont  perdu plus de 300.000 emplois depuis 1994.- La criminalité  fait de l’Afrique du Sud un des pays les plus dangereux au monde.- L’exceptionnel maillage médical a disparu.

Face à ce désastre, regardons en arrière. En 1994, quand, après avoir menti à son peuple, le président De Klerk hissa au pouvoir un Nelson Mandela bien incapable de le conquérir par les armes, il légua à l’ANC la première économie du continent, un pays doté d’infrastructures de communication et de transport à l’égal des pays développés, un secteur financier moderne et prospère, une large indépendance énergétique, une industrie diversifiée, des capacités techniques de haut niveau et la première armée africaine.
Libérée de l’ « oppression raciale », la « nouvelle Afrique du Sud » fut immédiatement la proie du parti prédateur ANC dont les cadres, aussi incapables que corrompus, eurent comme objectif principal leur propre enrichissement. Caricature du corrompu, le président Zuma fut évincé par un coup d’Etat interne à l’ANC qui mit au pouvoir  le vice-président Cyril Ramaphosa. A cette occasion, le monde médiatique entonna son habituel péan: débarrassée du « maffieux » Zuma remplacé par le « vertueux »  Ramaphosa, l’Afrique du Sud allait pouvoir renouer avec l’héritage de  Nelson Mandela. 
Or, comme je l’ai dit à l’époque, en dehors du fait qu’un Venda allait remplacer un Zulu, cette révolution de palais n’allait rien changer au pays. A un Jacob Zuma lié au gang indien Gupta, succédait en effet l’ex syndicaliste Cyril Ramaphosa qui avait trahi ses camarades mineurs en se vendant au patronat blanc. C’est en effet dans les conseils d’administration des sociétés minières au sein desquels il fut adoubé pour contrer les revendications des mineurs dont il avait été le représentant avant 1994, qu’il édifia sa colossale fortune !!!Pris entre les pressions des milieux d’affaires pro-occidentaux dont il était la créature, et celles des tendances radicales-racialistes lourdes qui constituent le fonds de commerce de l’ANC et des partisans de Julius Malema, le nouveau président se trouva vite paralysé. Et, comme d’habitude, il utilisa l’habituel joker des politiciens de l’ANC aux abois, à savoir la dénonciation du bouc-émissaire représenté par les fermiers blancs.

25 ans après les premières élections multiraciales, et comme l’a dit avec justesse Julius Malema: « En Afrique du Sud, la situation est pire que sous l’apartheid  la seule chose qui a changé, c’est qu’un gouvernement blanc a été remplacé par un gouvernement de Noirs ».Avec une différence cependant : avant 1994 les Noirs ne mouraient pas de faim, ils étaient gratuitement soignés et éduqués, l’électricité fonctionnait, les pénuries d’eau étaient inconnues et la police faisait son travail.
Mais, tout cela appartient au passé car, entre 1994 et 2019, l’ANC, le mouvement de Nelson Mandela, a conduit l’Afrique du Sud vers un naufrage. Selon la Banque Mondiale, et bien que réalisant ¼ du PIB de tout le continent, le pays est aujourd’hui devenu un des 5 pays « les moins performants » d’Afrique, juste devant les Comores, Madagascar, le Soudan et le Swaziland…En 25 ans de pouvoir, l’ANC a donc ruiné un pays prospère, le transformant en un Etat du « tiers-monde » dérivant dans un océan de pénuries, de corruption, de misère sociale et de violences.
Afin de comprendre le naufrage de l'Afrique du Sud, Bernard Lugan propose un cours vidéo de 2 heures, illustré de nombreuses cartes animées, retraçant la longue histoire du pays. Le cours est divisé en 5 parties (format HD) consultables pour une durée illimitée. Pour visionner le cours, s'inscrire sur :https://lescours-bernardlugan.teachable.com





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Algérie : derrière l’emprisonnement des oligarques, l’armée reprend le pouvoir économique

Wed, 24/04/2019 - 16:46
Les règlements de comptes qui se multiplient à la tête du « Système » algérien frappent à la fois la haute hiérarchie militaire et le monde des affaires.  L’impression dominante est que l'Odjak des janissaires (l’armée), tente de se refaire une "vertu" à bon compte en donnant au peuple les têtes d’affairistes particulièrement détestés. Or, il s’agit là d’un nuage de fumée destiné à masquer la reprise en main de la « vie économique » du pays par la caste militaire.
Explication.

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Mali : la guerre est-elle perdue ?

Fri, 19/04/2019 - 16:38
(Cette analyse peut être reprise à la condition d’en citer la source)
Jeudi 18 avril, au Mali, sous la pression des islamistes maîtres de la rue, le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga a choisi de démissionner avant d’être chassé par une motion de censure et une manifestation destinée à faire pression sur les députés. Dans cette crise téléguidée par des notables islamistes ralliés au wahhabisme et qui poursuivent des buts personnels en alliance avec les jihadistes de Iyad ag Ghali, qui sera le prochain Premier ministre ? Quoiqu’il en soit, l’incertitude grandit pour le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK), de plus en plus fragilisé politiquement et confronté à une grève des enseignants, à une forte grogne sociale et à une situation sécuritaire qui se dégrade très fortement.
Au milieu de ces luttes de pouvoir auxquelles elle est totalement étrangère, se trouve la force Barkhane qui doit faire face à un climat de plus en plus hostile. Ainsi, le vendredi 5 avril, à Bamako, à l’appel de Mahmoud Dicko, imam wahhabite dont le mandat de président du Haut conseil islamique du Malis’achève le 21 avril 2019, et  du chérif de Nioro Mohamed Ould Bouyé, des dizaines de milliers de manifestants exigèrent le départ du président IBK. Ils étaient porteurs de banderoles sur lesquelles était inscrit  « Le seul problème du Mali c’est la France » ou « Stop au génocide de la France au Mali ». Les souvenirs de la liesse accueillant les soldats de Serval sont bien oubliés…Pour le moment, le président IBK est soutenu par les dirigeants de la Ligue des imams et érudits pour la solidarité islamique au Mali laquelle n’avait pas appelé à la manifestation, et par le célèbre prédicateur Cherif Ousmane Madani Haidara  partisan de l’islam  traditionnel face au wahhabisme importé par les prédicateurs saoudiens.
Tout procède de la mauvaise gestion politique de la victoire militaire remportée par Serval. Alors qu’il aurait fallu conditionner notre intervention à des concessions constitutionnelles au profit du nord touareg, paralysés par leur universalisme, nos diplomates ont tout au contraire entretenu Bamako dans le mythe du « vivre ensemble » à travers l’illusion électorale qui, en Afrique, débouche presque toujours sur l’ethno-mathématique. Les Maliens ont donc cru que nous avions reconquis le pays pour leur compte et que tout pouvait donc continuer comme avant. Résultat, la  situation a dégénéré.
Au nord le narcotrafic, au sud les guerres ethniques
Le nord du Mali est devenu un espace libre pour l’industrie de la contrebande, le jihadisme y étant le paravent du narcotrafic. Les affrontements entre les groupes, rapidement expliqués à travers des rivalités politiques y résultent le plus souvent de tentatives d’élargissement des zones d’action des réseaux. En réalité, dans la guerre à laquelle se livrent les uns et les autres dans l’océan du désert, les carrefours sont les ports par où passe obligatoirement la cocaïne à destination de l’Europe. C’est donc autour d’eux que se déroulent les combats.
Au centre et au sud du Mali, ce n’est pas le trafic de la drogue, mais la résurgence de conflits antérieurs à la période coloniale qui a fait entrer des querelles paysannes amplifiées par la surpopulation et par la péjoration climatique, dans le champ du jihad régional. En effet, dans le Mali central et dans le nord du Burkina Faso, les actuels massacres de Peul par des Dogon et de Dogon par des Peul découlent d’abord de conflits datant de la fin du XVIII° siècle et de la première moitié du XIX° siècle, quand la région fut conquise par des éleveurs Peul dont l’impérialisme s’abritait derrière le paravent du jihad.
En 2015, sur fond de ces souvenirs toujours présents dans les mémoires, le centre du Mali, l’ancien Macina historique, région administrative de Mopti, s’embrasa. Le Macina est bien différent de l’Azawad saharo-sahélien. En partie composé du delta intérieur du Niger, il est en effet partiellement inondé une partie de l’année, donnant naissance à des zones exondées très fertiles convoitées à la fois par les agriculteurs Dogon (± 45% de la population), Songhay ou Bambara, ainsi que par les éleveurs Peul (± 30%). À partir de l’année 2018, les affrontements meurtriers y devinrent de plus en plus fréquents.
Or, les jihadistes du Macina sont essentiellement des Peul et les attentats de 2015 et 2016 qui ensanglantèrent Bassam en Côte d’Ivoire, Ouagadougou au Burkina Faso, Bamako et Sévaré au Mali, furent également commis par des Peul du Macina. De plus, au mois de janvier 2015, un Peul du Macina, Amadou Koufa, de son vrai nom Amadou Diallo, créa le FLM (Front de libération du Macina), connu localement sous le nom de Katiba Macina. Et Amadou Koufa a clairement ancré sa revendication sur l’ethnie peul. C’est ainsi qu’au début du mois de novembre 2018, il publia une vidéo dans laquelle il paraissait aux côtés d’Iyad Ag Ghali, le chef du mouvement Ansar Dine et de l’Algérien Djamel Okacha membre d’Al-Qaïda, annonçant l’union des groupes jihadistes régionaux dans le GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), et demandant aux Peul de se soulever et cela : « […] où qu’ils se trouvent : au Sénégal, au Mali, au Niger, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Nigeria, au Ghana et au Cameroun ».
L’ethnisation du conflit a pris une forme de plus en plus radicale avec la constitution de groupes ethniques d’autodéfense Bambara, Dogon et Peul. Par capillarité, le mouvement  a touché le nord du Burkina Faso à partir de 2017.
La guerre est-elle perdue ?
Dans ces conditions, la guerre est-elle perdue ? Les islamistes ont-ils  gagné ? Les piètres prestations de l’armée malienne pourraient le laisser penser. Ainsi, le dimanche 17 mars quand la garnison de Dioura, forte de 200 hommes surarmés et équipés à neuf a fui devant une quarantaine d’assaillants, leur abandonnant matériel, armement et véhicules…La situation est cependant différente au nord et au sud du pays.
Au nord, région qui constitue le flanc sud de l’Algérie et où la solution passe par une réelle décentralisation, la clé de la situation est détenue par Alger. Par le passé, l’Algérie a ainsi assuré toutes les précédentes médiations avant de parrainer lAccord d’Alger du 15 mai 2015 pour la Paix et la Réconciliation. Ses services ont des « contacts » avec Iyad Ag Ghali, le « parrain » régional qui, s’il n’est pas abattu, et que cela plaise ou non, sera l’homme par lequel passera le futur règlement. Le problème est que, si, par malheur, l’Algérie sombrait dans une situation à la syrienne, au Mali, nous serions en présence d’une afghanisation.
Au sud où avant d’être celui de l’économie ou du développement, le nœud du problème est celui des rapports inter-ethniques, le conflit n’a pas « coagulé ». Le jihad qui a pour but la fondation d’un califat trans-ethnique bute en effet sur la réalité ethnique car les énormes fossés séparant les protagonistes ont jusqu’à présent empêché l’engerbage. Résultat, le jihadisme se trouve pris au piège des rivalités ethno-centrées qui constituent la vraie réalité sociologique régionale.
Cependant, si la situation échappait à Barkhane et si le Burkina Faso tombait, la Côte d’Ivoire serait à son tour touchée. Mais, heureusement, le « bloc Mossi » semble solide. Autrement, dans cette partie de l’ouest sahélien, l’ultime point de résistance devrait s’ancrer autour de la robuste armée sénégalaise.L’urgence pour nos forces et pour tous ceux qui ont conscience du fait que le Sahel est notre arrière-cour est donc de connaître à la fois l’alchimie ethnique et les résurgences historiques régionales qui expliquent la crise actuelle. C’est dans ce but que je viens de publier « Les guerres du Sahel des origines à nos jours ». 
Pour le commander, cliquer ici.

Bernard Lugan
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Nouveau livre de Bernard Lugan : Les Guerres du Sahel

Sat, 06/04/2019 - 15:56

























Présentation :
Le Sahel est un rift ethno-racial le long duquel vivent des sédentaires sudistes et des nomades nordistes en rivalité territoriale depuis la nuit des temps
La colonisation libéra les premiers de la prédation des seconds, puis elle rassembla les uns et les autres à l’intérieur de limites administratives devenues frontières d’États lors des indépendances. L’ethno-mathématique y donna le pouvoir aux sudistes car ils étaient électoralement plus nombreux que les nordistes.
Ce fut alors la revanche de la houe sur la lance. Mais, au Mali, au Niger et au Tchad, comme ils refusaient de devoir obéir aux fonctionnaires sudistes, les nordistes se soulevèrent.
Ce furent les conflits sahéliens qui s’étendirent de la décennie 1960 jusqu’aux années 2000.
Sur ce terreau fertile prospérèrent ensuite les trafiquants (35% de la cocaïne sud-américaine à destination de l’Europe transiterait par le Sahel), ainsi que les modernes marchands d’esclaves qui déversent leurs cargaisons humaines en Europe.
Enfin, à partir des années 2000, les islamo-jihadistes chassés d’Algérie s’immiscèrent avec opportunisme dans le jeu politique local, y provoquant la surinfection de la plaie ethno-raciale matrice des actuels conflits.
Illustré de plus de 60 cartes en couleur, construit sur la longue durée historique et ancré sur la géographie, ce livre donne les clés de compréhension de cette conflictualité sahélienne dont les conséquences se font sentir jusqu’en Europe. 
Pour nos Armées, il constitue le manuel indispensable avant toute projection sur le terrain.

Table des matières :
Chapitre I : Ces changements climatiques qui expliquent l’histoire
Chapitre II : Les populations du Sahel
Chapitre III : Le « feu de paille » almoravide premier jihad sahélo-saharien (XIe-XIIe)
Chapitre IV : La conquête de l’ouest sahélien par les Arabes et la mise des Berbères « sous l’étrier » (XVe-XVIIe)
Chapitre V : L’âge d’or des empires du Sahel (XIe-XVIe)
Chapitre VI : La conquête marocaine et l’émiettement politique de l’ouest sahélien.
Chapitre VII : La chevauchée guerrière des Peul (XVIIIe-XIXe)
Chapitre VIII : Le jihad de l’est sahélien et la conquête coloniale du Sahel central (XIXe)
Chapitre IX : Les guerres du Mali et du Niger (1962-2009)
Chapitre X : Les guerres du Soudan (1956-2011)
Chapitre XI : Les guerres du Tchad (1966-2019)
Chapitre XII : Les guerres du Nigeria (2002-2019)
Chapitre XIII : La nouvelle guerre du Mali et son extension régionale (2012-2019)
Conclusion : Réflexions sur le jihadisme sahélien

IMPORTANT : CE LIVRE EST UNIQUEMENT DISPONIBLE VIA L'AFRIQUE REELLE

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