(B2) Contrairement à certains avis (sans doute peu éclairés) d’experts qui voyaient des rivalités entre Belges et Français, les polices des deux pays (comme les services de renseignement) ont très vite renforcé leur coopération après les attentats de vendredi 13. « Dès la nuit et le jour qui ont suivi les attentats de Paris, le parquet fédéral a reçu ainsi 4 demandes d’entraide judiciaire urgentes émanant du parquet de Paris » précise aujourd’hui un communiqué du Parquet fédéral (belge). « Une Equipe Commune d’Enquête (JIT – Joint Investigation Team) a été créée afin de permettre une collaboration policière et judiciaire aisée et intensive, de part et d’autre des frontières belges et françaises. » Dans le même temps, le parquet fédéral a ouvert sa propre enquête et un juge d’instruction spécialisé en matière de terrorisme a été saisi. Au total, aujourd’hui « 5 personnes ont été placées en détention préventive cette semaine dans le cadre de l’enquête menée en Belgique depuis les attentats de Paris ».
Le communiqué publié tout à l’heure par le Parquet fédéral est intéressant car il précise quelques éléments sur l’enquête encours.
1° Deux jours avant les attentats de Paris, le 11 novembre vers 19h, Salah Abdeslam a été filmé dans la station-service de Ressons (sur l’A1 en direction de Paris), en compagnie d’une personne identifiée comme étant Mohamed Abrini, né le 27 décembre 1984. Ce dernier était au volant de la Renault Clio qui servira à commettre des attentats deux jours plus tard. Le juge d’instruction a émis un mandat d’arrêt international et européen. Un mandat d’arrêt européen et international a été émis. Un appel à témoins a été diffusé par la police (voir ici).
2° Trois véhicules utilisés lors de l’attentat. Lors des attentats de Paris, les auteurs ont utilisé 3 véhicules munis de plaques d’immatriculation belges — VW Polo, Seat Leon et Renault Clio — qui avaient été loués le 9 novembre par Brahim Abdeslam (mort dans les attentats), et par son frère Salah Abdeslam, deux ressortissants français résidant à Molenbeek.
3° La fuite de Paris – première voiture. Salah Abdeslam a été contrôlé à Cambrai, quelques heures après les faits, aux alentours de 9h10, sur l’autoroute en direction de Bruxelles. Il était à bord d’un véhicule de marque VW Golf en compagnie de deux autres personnes. L’enquête menée en Belgique sur ce véhicule a permis l’arrestation dimanche 15 novembre de Mohammed AMRI, propriétaire de la VW Golf et de Hamza ATTOU, le passager. Arrêtés, ils sont tous deux inculpés de participation aux activités d’un groupe terroriste et d’assassinats terroristes. Et leur maintien en détention a été confirmé par la chambre du conseil de Bruxelles le 20 novembre.
4° La fuite de Salah Abdeslam – 2e voiture. S. Abdeslam semble ensuite avoir été emmené à bord d’un autre véhicule conduit par une autre personne. Les suites d’enquête ont permis de remonter jusqu’à Ali O., un ressortissant français de 31 ans résidant à Molenbeek. Il est interpellé dimanche 22 novembre en soirée, placé sous mandat d’arrêt le 23 novembre et inculpé de participation aux activités d’un groupe terroriste et d’assassinats terroristes. Il comparaîtra vendredi 27 novembre devant la chambre du conseil de Bruxelles en vue de la confirmation éventuelle de son maintien en détention.
5° Des armes de poing. L’instruction a également permis l’interpellation du nommé Lazez A., un ressortissant marocain de 39 ans résidant à Jette. Deux armes de poing ont été découvertes dans son véhicule ainsi que des traces de sang. Placé sous mandat d’arrêt le 20 novembre par le magistrat instructeur et inculpé de participation aux activités d’un groupe terroriste et d’assassinats terroristes, il comparaîtra demain matin devant la chambre du conseil de Bruxelles en vue de la confirmation éventuelle de son maintien en détention.
(NGV)
(crédit : CNN Turk)
(B2) Le Conseil atlantique nord (NAC) se réunit en urgence ce mardi (24 novembre) à 17h. Il a été saisi par la Turquie afin d’informer les alliés sur l’incident survenu ce matin. Ce matin, deux F-16 turcs ont abattu un avion Sukhoi Su-24 (*) du groupe aérien russe de Syrie qui avait violé l’espace territorial turc en bordure la Syrie. Les deux pilotes ont pu s’éjecter. Mais leur sort est encore incertain (un des parachutes pourrait s’être enflammé).
Un moment mal choisi
Cette affaire survient à un moment clé au moment où Paris comme Washington cherchent à renforcer avec Moscou la coopération en Syrie pour combattre l’organisation de l’état islamique (Daech). Et il n’est pas exclu des provocations de part et d’autre.
D’un côté, les violations de l’espace aérien turc ne sont pas rares par l’aviation russe. Celle-ci « teste » ainsi régulièrement la défense turque. Le test a-t-il été « positif » cette fois. En tout cas, côté turc, on affirme que des sommations ont été faites par les avions turcs et sont restées sans réponse. Tandis que du côté de la défense russe, on affirme que l’avion se trouvait « exclusivement au-dessus du territoire de la Syrie (…) à 6.000 mètres d’altitude » et que l’avion a été abattu visiblement par des tirs « venant du sol ». A noter que l’avion abattu a heurté le sol côté syrien.
De l’autre, il est certain que l’intervention russe bouleverse les plans d’Ankara dans la région. La Turquie entend également protéger les rebelles turkmènes qui combattent de l’autre côté de la frontière en Syrie. Abattre un avion est normalement une phase ultime de la surveillance aérienne. Mesure extrême, elle n’est normalement prise qu’en cas de risque avéré et pas pour une simple violation territoriale, qui donne lieu d’ordinaire à des mesures plus classiques : signaux visuels, radios, suivi à distance, tirs d’encadrement.
Pas d’article 4 ?
On peut noter que, pour l’instant, la Turquie s’est bien gardée d’invoquer l’article 4 (ouverture de consultations formelles) du côté de l’OTAN, comme lors d’incidents précédents de nature identique (1). Elle a, en parallèle, convoqué l’ambassadeur russe dans la capitale turque. Procédure ordinaire en cas d’incident entre deux pays. Ce qui pourrait témoigner — nous a confié un diplomate de l’Alliance — la volonté de ne pas exacerber les tensions. La réunion même pourrait ainsi ne pas déboucher sur une déclaration de l’Alliance en tant que telle (des 28 Etats membres). Mais juste d’une déclaration du secrétaire général de l’organisation, Jens Stoltenberg. Ce qui aurait pour effet de ne pas engager, en tant que tel, l’OTAN.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Lire : La Turquie veut informer ses alliés de l’action contre l’Etat islamique
(*) Des appareils également présents dans l’armée syrienne