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B2 Le Blog de l'Europe géopolitique. Actualités. Réflexions. Reportages
Updated: 6 hours 43 min ago

Pas de patrouille commune en mer Egée entre Turcs et Grecs

Fri, 16/10/2015 - 11:38

Alexis Tsipras en conversation avec Martin Schulz (PE) et JC Juncker (CE) au dernier Conseil européen (crédit: CUE)

(B2) Alexis Tsipras l’a fait clairement savoir lors du sommet européen. A l’idée défendue par Berlin – et Bruxelles – de patrouilles communes gréco-turques en mer Egée, c’est non ! Collaborer avec la Turquie sur la base du droit international, c’est possible. Mais « le contrôle et la gestion des frontières relèvent de la responsabilité exclusive des pays-membres qui ont le premier et le dernier mot. Chaque pays est responsable de la surveillance de ses frontières » a déclaré le Premier ministre grec.

Même son de cloche pour le ministre grec des Affaires étrangères, Níkos Kotzias, qualifiant d’« inadmissible » l’idée de patrouilles communes gréco-turques en mer Egée qui « ouvrent la voie à l’entrée des navires turques dans les eaux territoriales grecques avec toutes les conséquences de long terme qui en découlent ». La Grèce préfère renforcer les forces de l’agence Frontex.

(NGV)

3 militaires de Barkhane blessés au Mali. Les opérations continuent

Thu, 15/10/2015 - 18:12

(B2) Trois militaires français des forces spéciales ont été blessés au nord du Mali, mardi (13 octobre) en fin d’après-midi. Ils étaient engagés dans l’opération française anti-terroristes au Sahel « Barkhane ». Leur « véhicule a sauté sur une mine » indique le service de presse des armées. Les trois militaires qui étaient à bord « ont été grièvement blessés. Ils ont été évacués en France dans la nuit de mercredi à jeudi ».

Une opération de contrôle des points de passage

On apprend également que 40 militaires français, avec 210 militaires des FAMA (les Forces armées maliennes) et 90 soldats des FAN (Forces armées nigériennes), ont mené durant les premiers jours d’octobre une opération dénommée Djiguifa, à la frontière malienne et nigérienne. Objectif : « contrôler les zones de passage susceptibles d’être employées par des groupes armés terroristes ». Cette opération « planifiée par les armées nigériennes et maliennes » précise-t-on côté français s’est déroulée sur une assez vaste zone d’action = « 11 700 m2 ». Elle a été conduite « à partir du poste de commandement tri-partite déployé dans le camp des FAMa à Gao ».

Brexit. Le Britannique est-il nécessaire à l’Europe de la défense ?

Thu, 15/10/2015 - 09:49

David Cameron au Conseil de l’UE en mars 2014 (crédit : Conseil de l’UE – archives B2)

(B2) David Cameron sera aujourd’hui à Bruxelles, au Sommet pour évoquer le futur référendum sur l’adhésion du Royaume à l’Union européenne. L’hypothèse d’un Brexit — le départ du Royaume-Uni de l’UE — n’est plus de pure théorie. Elle pose toute une série de questions, notamment pour la politique de sécurité et de défense de l’Union européenne (PSDC). Le départ britannique serait-il une perte pour l’Europe de la Défense ? La question est sensible. La réponse est claire. Contrairement à ce que certains disent, le départ britannique serait pour la PSDC indolore.

Comme au rugby…

Malgré l’existence de certaines capacités au plan national, l’apport britannique à la PSDC en termes capacitaires est, aujourd’hui, nul ou proche du nul. Et l’Union européenne survivra très facilement à un départ. Les apports de nations comme la Lettonie, l’Irlande, l’Autriche ou le Luxembourg — qu’on ne peut pas qualifier de grande nation de défense —, sont plus importants et utiles pour les opérations militaires européennes que l’apport britannique ! C’est dur à dire, à assumer pour nos amis britanniques. Mais c’est la triste réalité. Sans vouloir raviver de douloureux souvenirs à nos amis anglais, c’est un peu comme au rugby….

L’apport britannique en unités … proche de 0

Durant l’opération EUNAVFOR Atalanta contre la piraterie, Londres n’a mis à disposition qu’un navire depuis 2008. Et ce pendant quelques mois à peine seulement. Soit à peine plus que les … Ukrainiens ! Pendant ce temps, les Luxembourgeois mettaient à disposition deux avions de patrouille maritime durant plusieurs années ! Ce n’est pas une question de moyens. C’est une volonté politique. Le Royaume-Uni préférait mettre ses navires à disposition de l’OTAN ou des Américains. Dans nombre des autres opérations militaires des dernières années, d’ailleurs, la présence britannique a souvent été réduite à 2 ou 3 officiers. C’était le cas pour EUFOR Tchad, EUFOR RCA… Même pour l’opération de stabilisation en Bosnie-Herzégovine (EUFOR Althea) à laquelle tient, comme à la prunelle de ses yeux, le gouvernement britannique, l’apport n’est pas plus important. Idem pour la mission de formation de l’armée somalienne (EUTM Somalie), pourtant décrit comme une « priorité » par le ministre britannique chargé des questions européennes David Lidington comme une « top foreign policy priority » ! Il est ainsi loin le temps de l’opération Artémis au Congo (2003), où la contribution outre-Manche était significative. La seule exception récente est la participation à l’opération Sophia (ex EUNAVFOR Med), où Londres contribue avec un navire.

La contribution britannique facilement remplaçable

En matière financière également, un départ britannique serait aisément supportable. Tout simplement car les coûts supportés en commun sont très faibles. Selon le mécanisme Athena, qui répartit à hauteur du PiB les charges entre tous les Etats membres, la contribution britannique se monte à 15,6%. Les montants totaux étant assez faibles, la contribution l’est également. Dans une opération maritime de type EUNAVFOR Med ou de formation de type EUTM Somalia, la part britannique du budget commun se monte environ à 2 millions d’euros. Dans le budget de l’Agence européenne de défense, la contribution britannique est d’environ 5 millions d’euros. Autant dire que cette contribution est facilement répartissable sur les autres membres.

Un pouvoir politique bloquant

L’apport politique britannique à la PSDC consiste généralement à bloquer les évolutions : veto au QG militaire de l’Union européenne ou à toute augmentation du budget de l’agence européenne de défense (qui tourne actuellement autour de 30 millions d’euros), veto à l’extension des coûts communs (précisons que le Royaume-Uni n’est pas le seul réticent, les Allemands ne sont pas très très chauds non plus), blocage et retardement de l’opération contre la piraterie qu’elle commandera ensuite (EUNAVFOR Atalanta), rabotage continuel des ambitions posées en matière de PSDC, d’industrie de la défense, etc.

Le « poil à gratter de l’UE »

Le seul apport positif à l’Europe de la Défense qu’on peut trouver à la position britannique est son côté « poil à gratter », son pragmatisme, sa manière de mettre sur la table des questions qui dérangent et que n’osent pas poser les autres nations. Le côté « ronchon » du Royaume-Uni en matière de PSDC permet souvent à d’autres Etats membres de ne pas afficher leur opposition. C’est pratique. De plus, une participation, même symbolique de militaires britanniques, a un côté rassurant pour nombre d’Etats membres. Tout simplement car ils considèrent l’armée britannique comme leur matrice commune et … aussi comme un contrepoids utile aux autres grands pays comme la France ou l’Allemagne. Le départ britannique mettrait ainsi chacun au pied du mur, sans pouvoir s’abriter derrière Londres : veulent-ils construire ensemble une Europe de la Défense ou non ?

Welcome aux contributions extérieures

Un départ du Royaume-Uni n’empêcherait pas qu’il puisse continuer à contribuer de manière extérieure, aux opérations militaires européennes, comme le font aujourd’hui nombre de pays tiers, de la Géorgie à la Colombie, en passant par la Suisse, la Norvège, la Serbie ou les Etats-Unis… Il n’empêchera sa participation aux différents programmes de l’Agence euroépenne de défense – pour peu qu’il signe un accord (comme l’ont déjà fait la Norvège ou la Suisse). Il n’empêchera pas les coopérations bi ou multilatérales de prospérer (ou de lambiner…). La participation britannique au programme A400M Atlas ou à d’autres programmes industriels, ne se déroulant pas dans le cadre formel de l’Union européenne, pourra perdurer. L’armée britannique pourrait même — si elle le souhaite — être associée aux différents exercices politico-militaires de l’UE comme le sont d’autres pays de l’OTAN. Et, surtout, le Royaume restera une puissance militaire (moyenne), membre de l’OTAN. Car, autant dans l’Union européenne, Londres joue un rôle de ralentisseur, autant il joue dans l’Alliance atlantique, un rôle actif et utile, voir progressiste.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi sur B2 Pro, notre analyse (sur la discussion au Sommet sur le référendum britannique) : Messieurs les Anglais, tirez les premiers !

Un constat qui n’est pas le même pour la politique étrangère

Ce constat ne vaut qu’en matière de PSDC. Si on dresse le même constat pour la politique étrangère de l’UE (la PESC), le constat serait totalement différent. Le départ britannique serait sans aucun doute une réelle perte. Le rôle historique, sa place dans le Commonwealth, en Afrique ou en Asie, son lien qui reste privilégié avec les Etats-Unis (même s’il s’est un peu effacé), le poids de sa diplomatie, son positionnement fort vis-à-vis de la Russie, etc. sont un apport incontestable. Sans oublier un fait important : l’Union perd un siège au Conseil de sécurité de l’ONU où Londres exerce sinon une influence prépondérante, du moins un rôle notable (au moins aussi important que le siège français). On l’a vu lors de la négociation d’une résolution contre les trafiquants en haute mer au large de la Libye, où le Royaume-Uni a tenu « la plume » du texte adopté…

Pourquoi lève-t-on les sanctions sur les Biélorusses ?

Wed, 14/10/2015 - 15:07

(B2) Cela ne fait plus l’ombre d’un doute aujourd’hui. Et le secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, Harlem Désir, a confirmé à Luxembourg, ce que tout le monde n’osait dire. « Il y a un accord pour suspendre les sanctions » frappant les Biélorusses, pour une durée de 4 mois. Cette levée survient pour plusieurs raisons, bonnes ou mauvaises.

La conjoncture…

Tout d’abord, les élections certes n’ont pas été super démocratiques. Quand un président est élu à 83% des voix et où le second fait de la figuration à 4% des voix, on a comme un soupçon d’échec démocratique. Mais elles n’ont pas été suivies d’une politique de répression, comme fin 2010. Elles surviennent « dans un climat apaisé » justifie Harlem Désir. Ensuite, la raison qui motivait ces sanctions a disparu. Les prisonniers politiques ont été libérés par le gouvernement Loukachenko, les derniers au mois d’août. Ce n’est pas un détail. Car le dispositif des sanctions ne peut en l’état perdurer. Un dispositif de sanctions déjà mis à mal. Depuis plusieurs mois, les tribunaux européens ont, très régulièrement, invalidé les sanctions frappant des Biélorusses, les estimant non prouvées. Et une vingtaine de personnes ont déjà été, discrètement, retirées de la liste noire de l’UE durant l’été, pour des raisons similaires (lire : La liste noire « Belarus » allégée de 24 noms).

… et la politique

A ces raisons, plus ou moins fondées juridiquement, s’ajoutent des considérations beaucoup plus politiques. La Biélorussie a joué un rôle, qu’on considère positif, à Bruxelles comme à Paris et à Berlin, dans la crise ukrainienne. En montrant une certaine équidistance entre Russes et Ukrainiens, avec qui Loukachenko entretient de bons rapports, en offrant sa capitale comme lieu de négociation qui a préludé aux deux accords de Minsk, la Biélorussie a tiré assez habilement son épingle du jeu. Minsk essaie également de ne pas dépendre totalement de Moscou et de se rapprocher de l’Union européenne, tout en gardant son lien privilégié avec la Russie. A cet égard, cela constitue un test de la nouvelle politique de voisinage oriental de l’UE, moins « agressive » à l’égard de Moscou, et plus réaliste. Terminée, la politique « idéaliste » mise en place fin 2013, où par la signature d’accords étroits, l’Europe entendait apporter la démocratie et l’économie de marchés aux pays les plus proches de la Russie. Du coup, le pouvoir largement autocratique de Loukachenko et la réduction à quasi-zéro de son opposition.

La découverte de la Realpolitik, un tournant par rapport à 2013

L’Europe, qu’on a souvent taxée de bisounours de la politique internationale, pratique ainsi une certaine RealPolitik, assez froide, un peu éloignée sans doute de la proclamation des valeurs démocratiques, mais sans doute plus concrète vis-à-vis de ses propres moyens. La Biélorussie représente ainsi à l’Est ce que l’Egypte représente au Sud : un subtil compromis entre la défense nécessaire des valeurs et la tout aussi nécessaire recherche de pôles de stabilité dans le voisinage. Le pari fait à Bruxelles est que, pas à pas, la politique de la main tendue, pourrait produire au final, plus d’effet que la grande politique d’accords d’association avec le voisinage oriental conclue en novembre 2013 qui a débouché davantage sur le chaos que sur la stabilité (cf. Ukraine ou Moldavie), tant au plan politique qu’au plan économique.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Plus de détails lire sur B2 Pro :

Acheter Français pour remplacer le Famas : est-ce possible ?

Tue, 13/10/2015 - 12:01

Personnels des OMLT (Operational Mentoring and Liaison Teams) du 515e RT pendant une seance de tir FAMAS sur un pas de tir de Kaboul (crédit: DICOD/Ministère français de la Défense)

(B2) Pour remplacer le FAMAS, achetons un fusil français ! C’est le sens de la campagne que mènent deux députés français, l’un des Républicains du Rhône, Philippe Meunier et, l’autre du PCF du Nord, Jean-Jacques Candelier. Ils ont écrit, début octobre, une Lettre, criant au loup sur l’ouverture à tout vent des marchés publics d’armement à des « étrangers ». Une lettre qui flatte le nationalisme à deux sous, où tout ce qui n’est pas français est « étranger » — Européens compris — et qui surfe sur l’émotion, légitime, de la fin du FAMAS, le fusil d’assaut de la Manufacture d’armements de Saint-Etienne (aujourd’hui fermée). Tout un symbole. Mais les arguments utilisés sont plus proches de la publicité mensongère…

Le premier argument utilisé est l’exclusion d’une solution nationale

« Tout a été mis en œuvre dans la procédure d’appel d’offres pour exclure, de fait, toute solution nationale. Cela n’est pas acceptable. » indiquent-ils

Le ministère de la Défense a, effectivement, lancé en 2014 un appel d’offres pour renouveler le parc des FAMAS, fusils de l’armée française. Un « beau » marché puisqu’il concerne 90.000 armes, les munitions, les accessoires et le dispositif de soutien et s’étale sur 14 ans. Un appel d’offres restreint, comme l’y autorise la réglementation communautaire — la directive de 2009 sur les marchés publics de défense — mais lancé au plan européen. Tout simplement parce qu’il n’y a pas (plus) de production nationale de fusils d’assaut. La « préférence communautaire » s’applique bien (*). Ceux qui sont exclus ne sont pas les producteurs nationaux mais les opérateurs hors de l’Union européenne, comme l’indique l’appel d’offres.

« Cette procédure n’est pas ouverte aux opérateurs économiques des pays tiers à l’union européenne ou à l’espace économique européen »

L’appel d’offres du ministère de la défense est même allé assez loin puisqu’il a précisé que la réalité de la production devait aussi se situer dans l’Union européenne. Le contractant devant justifier :

1° « que les moyens de production, indispensables à la fabrication des canons et des têtes de culasse des fusils d’assaut, sont actuellement situés et mis en oeuvre sur le territoire de l’UE ou de l’EEE (espace économique européen) ». L’industriel doit fournir « la liste de ces moyens, l’adresse de leur lieu d’implantation et la liste des productions réalisées au cours des trois dernières années »
2° idem « pour les sources d’approvisionnement, indispensables à la fabrication des canons et des têtes de culasse des fusils d’assaut »
3° idem « pour la chaîne d’assemblage et les moyens de la (réception) finale des fusils d’assaut ».

De plus, il doit justifier de certaines capacités, par exemple « sa capacité à exécuter, sur une longue durée et pour des quantités d’armes importantes, des contrats de fourniture de fusils d’assaut incluant des prestations documentaires, notamment au travers des axes suivants : quantités d’armes livrées, durée des contrats, organisation, effectifs, principes de management, gestion des risque ».

C’est là le hic justement. Car le fameux poulain des deux députés, le « français » Verney-Carron, établi à Saint-Etienne (**), ne remplit pas ces conditions. Tout simplement car il n’a pas ce produit à son catalogue et que s’il en fabriquait un, ce serait en vertu d’un accord de transfert de technologie, conclu avec l’industriel israélien, Israel Weapon Industry (IWI), fabricant du légendaire Uzi et des plus récents Galil ou Tavor. En fait de « made in France » et de fabricant national de fusil, on se se trouve plutôt face à ce qu’on appelle un faux-nez européen. C’est-à-dire un fabricant « étranger » qui trouve un débouché sur le sol national. On comprend mieux pourquoi le ministère de la Défense préfère inclure dans son appel d’offres des fabricants, patentés de fusil d’assaut, qui ont déjà fait leurs preuves sur le marché européen, voire national. Cinq industriels restent actuellement en compétition : l’Allemand Heckler & Koch (avec le HK 416), le Belge FN Herstal (avec son SCAR), l’Italien Beretta (avec son ARX 160), le Suisse Swiss Arms (qui produit notamment le SIG 550) et le Croate HS Produkt (avec le VHS2). Les évaluations sont en cours. Le résultat du marché devrait être notifié en décembre 2016 pour un achat courant 2017 et l’équipement complet des forces en 2018. Certaines retombées de ce marché ne sont d’ailleurs pas exclues pour certaines entreprises françaises, comme Nexter Mechanics basé à Tulle (Corrèze) ou Manurhin basé à Mulhouse.

Quant à la deuxième affirmation des deux députés :

« Aussi loin que remonte l’histoire de nos armées, le fantassin français a toujours été équipé d’une arme fabriquée sur notre sol. »

Elle se heurte à certaines réalités qui ont sans doute échappé à nos représentants de la nation. Cela fait belle lurette que de nombreuses unités sont équipées de fusils fabriqués hors de France. Le HK 416 a ainsi remplacé le FAMAS dans l’armée de l’air, en commençant par les commandos parachutistes, l’escadrille spéciale d’hélicoptères de Cazaux avant de se généraliser dans toute l’arme. Et comme l’atteste mon collègue du mamouth, fin connaisseur des équipements, ce n’est pas le seul exemple. « L’armée de terre a acquis des fusils d’assaut SCAR (de la FN). Et les forces déployées à l’étranger avaient aussi bénéficié de fusil d’assaut SiG (suisse) dans les années 70, faute de mieux dans le patrimoine national. » Idem pour le COS, le commandement des opérations spéciales, qui a doté ses personnels « faute de produits nationaux équivalents de pistolets Glock et HK, HK416 et 417, miniguns M134D de Dillon » etc.

L’ambition à travers la mise en place d’appels d’offres européens n’est pas d’ouvrir à tous les vents – comme le prétendent les auteurs de la lettre – mais bien de créer un marché européen de la défense (celui-ci est encore balbutiant) et de consolider les industries nationales. La réaction du repli sur soi peut se comprendre. Mais, à terme, elle se révèle suicidaire. Car les marchés nationaux sont aujourd’hui trop petits pour faire vivre un industriel. L’exemple du FAMAS le montre, à la perfection… Une arme peu vendue à l’export, qui n’est pas suffisamment bon marché ni exceptionnelle, pour susciter un engouement extérieur.

(NGV)

(*) La préférence communautaire n’a pas été inscrite de façon obligatoire dans la réglementation européenne, malgré les demandes françaises. Mais elle n’est pas interdite. C’est au choix des Etats membres de l’appliquer ou non.

(**) Un autre projet, mené par Etienne Faverjon, le fusil Ariès, avait commencé à faire parler de lui avant de sombrer. L’entrepreneur, établi également à Saint-Etienne a été arrêté pour trafic d’armes (lire sur le Parisien ou le Progrès) et son entreprise, France-Armes, a ensuite été mise en liquidation. On comprend pourquoi les services de commande de l’Etat ont quelques doutes sur les vocations de dernière minute…

Crash d’un hélicoptère britannique en Afghanistan

Mon, 12/10/2015 - 15:15

(B2) Un hélicoptère Puma MK2 de la Royal Forces s’est écrasé au quartier général de l’opération de l’OTAN, Resolute Support, à Kaboul, en Afghanistan. Cinq personnes dont deux membres de la RAF sont mortes dans ce crash. « Un accident et non pas le résultat de l’activité des insurgés » précise-t-on du côté du ministère britannique de la Défense.

La résolution de l’ONU sur la lutte contre les trafiquants. Obligatoire ?

Fri, 09/10/2015 - 19:05

Intervention de la marine allemande au secours de migrants au large de la Libye (crédit : Bundeswehr, juin 2015 / archives B2)

(BRUXELLES2) Le Conseil de sécurité de l’ONU vient d’approuver dans une résolution les mesures prises par les Européens au large de Libye afin de traquer les trafiquants d’êtres humains (l’opération EUNAVFOR Med alias Sophia). Une approbation utile mais pas révolutionnaire, contrairement à ce qui a été souvent indiqué. Explication rapide…

En Haute mer s’applique le droit international – la convention de Montego Bay et le protocole de Palerme – qui permet, déjà, à toute autorité publique en mer (navire militaire, de gardes-frontières, etc.) de prendre toutes les mesures nécessaires contre ces trafiquants. Ce sans avoir de résolution des Nations-Unies. Certains Etats membres ont déduit que ces « mesures nécessaires » impliquaient le pouvoir de saisir les navires, d’arrêter et traduire en justice les trafiquants. C’est le cas de la France ou de l’Italie. D’autres estiment que cette terminologie n’est pas assez précise et ne permet pas d’entraver les libertés publiques. C’est le cas notamment au Royaume-Uni. Cette résolution ne tranche pas totalement le dilemme. Si elle est très précise sur les saisies de navires, elle renvoie pour les arrestations de façon générale au droit interne et international.

La résolution de l’ONU est, en revanche, plus précise sur les mesures possibles contre les navires suspects d’un Etat portant pavillon (un point encore plus sensible que le précédent) et la destruction, sous certaines conditions, des navires suspects. Mais, là encore, cependant, il s’agit davantage d’une clarification du droit applicable que d’une novation du droit international.

Cette résolution est surtout utile au plan politique. Elle marque le consensus de la communauté internationale sur l’intervention contre les trafiquants. Elle oblige tous les autres Etats à engager des poursuites contre ceux-ci. Et tout le monde à coopérer dans ces matières. Elle donne ainsi les bases à un engagement international plus décisif en la matière.

(NGV)

Pour aller plus loin :

Les moyens de l’opération Sophia (EUNAVFOR Med) dans sa phase 2

Wed, 07/10/2015 - 16:39

(B2) Dans sa seconde phase, qui démarre aujourd’hui, l’opération Sophia (ex EUNAVFOR Med) comptera 6 navires et 7 moyens aériens (avions et hélicoptères), soit un peu plus que lors de la première phase, limité au renseignement et au recueil d’information (lire : L’opération EUNAVFOR Med est lancée. Les moyens mobilisés (exclusif)). 3 autres navires devraient venir dans les semaines qui viennent renforcer ceux déjà présents (ainsi que nous l’avions annoncé sur B2 Pro il y a quelques semaines déjà, lire : Petit succès pour la génération de forces d’Eunavfor Med, phase 2. Qui participera ?). Il ne faudra cependant pas additionner les moyens, certains ne restant que quelques semaines.

6 navires actuellement sur zone

le porte-hélicoptères italien Cavour qui demeure le navire-amiral où se trouve le commandement de la force (FHQ).

la frégate allemande Schleswig-Holstein (F-216) et le navire de soutien Werra (A-514), un navire de la classe Elbe de type 404devraient être relevés prochainement. Lire aussi : Deux navires allemands engagés en Méditerranée dans l’opération EUNAVFOR Med

la frégate britannique HMS Enterprise (H-88), spécialisée dans les écoutes de l’environnement maritime, équipée en sonar, radar et autres mesureurs d’échos.

la frégate française Courbet (F-712), a rejoint la force EUNAVFOR vendredi (2 octobre). Cette frégate de type FREMM dispose d’un hélicoptère Panther de la flotille d’aviation maritime 36F, basée à Hyères (près de Toulon). Elle est présente pour une durée limitée (environ 6 semaines).

la frégate espagnole Canarias (F-86) qui a rejoint la force lundi (5 octobre). La frégate est arrivée tôt au matin, rejoignant le Cavour dans le port militaire de Augusta en Sicile. Les marins espagnols ont passé un jour entier à bord, le temps de compléter les procédures et le déploiement opérationnel. Un moment clé notamment pour installer les dispositifs de communication (notamment un ‘chat sécurisé’ de type Mercury qui permet aux navires de communiquer entre eux. La frégate Canarias est une frégate de classe ‘Santa María’, avec un équipage de 202 personnes. Elle dispose d’un hélicoptère de bord, un SH-60B Seahawk, prénommé ‘Tweety », « équipé pour les vols de nuits et les patrouilles de renseignement » précise-t-on au QG d’Eunavfor.

A ces moyens s’ajouteront trois autres navires qui vont arriver sur zone dans les prochains jours ou semaines

La frégate Leopold Ier rejoindra prochainement la Méditerranée. Elle a appareillé, lundi (5 octobre) de sa base de Zeebruge. Dotée d’un équipage de 175 militaires, elle devrait rester six semaines dans la région, selon l’agence Belga dans une opération baptisée du côté belge « Cooperative Venture ». La frégate rejoindra ensuite le porte-avions français Charles de Gaulle, pour une mission dans le Golfe Persique. Mission non encore confirmée côté français.

La corvette slovène Triglav 11, devrait être engagée dans l’opération durant 4 mois. Elle appareillera le 16 octobre prochain. L’engagement slovène a pris un peu de retard, comme le confirme le porte-parole de l’armée, Simon Korez. « A l’origine, le navire devait partir pour le 10 octobre, mais en raison de la préparation et la préparation de l’armement, il a pris un peu de retard ». Les Slovènes ont cependant posé une réserve à leur engagement (caveat) au processus de l’arraisonnement et l’inspection des navires s’ils étaient confrontés à une résistance active. En plus de l’équipage du navire (un ancien patrouilleur russe de la classe Svetlyak), 12 officiers et marins participent également à l’état-major de la force et au Rôle 2 (hôpital de campagne). 

La frégate britannique, HMS Richmond (F-239), une frégate de type 23, viendra relayer son homologue.

Coté aérien, on décompte trois avions de patrouille maritime

Un P3 Orion espagnol, basé à Sigonella (lire : Un P3 Orion espagnol pour EUNAVFOR Med

Un avion Swearingen SW3 Merlin III Luxembourgeois, basé à Malte

Un avion Falcon 50 français, par intermittence

Au moins 4 hélicoptères

Un hélicoptère italien EH 101 basé en Sicile ;

Les 3 hélicoptères de bord des navires engagés (des navires allemand, espagnol et français en disposent)

L’hélicoptère britannique EH 101 ou AW101 Merlin MK2, qui opèrait, avec un équipage de 4 personnes (deux pilotes, 1 observateur, un technicien d’équipage), depuis Malte a terminé son engagement fin septembre. Le Tiger 01 (du 814 Naval Air Squadron) a totalisé à son actif 92 heures de vols dont 86 en opération, 31 missions accomplies, dont 25 opérationnelles. Basé à Malte, il opérait en général depuis le pont du Cavour. Il était présent dans l’opération depuis le le 7 juillet.

Autres moyens

Des drones maritimes italiens

Un sous-marin italien (voire d’autres nationalités… mais qui restent sous commandement national chut !)

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi :

Plus de crise, plus d’Europe de la défense, les ateliers de la Citadelle 2015

Wed, 07/10/2015 - 16:16

(B2) « BRUXELLES2 » / B2 participera, jeudi (8 octobre), aux « Ateliers de la Citadelle » qui portent un titre plus que d’actualité : « Plus de crise, plus d’Europe de la défense ?« .

Organisés par  la mission Lille Eurométropole défense et sécurité (LEDS), la Ville de Lille, en partenariat avec l’Institut Jacques Delors, Toute l’Europe.eu, et France-Culture, dans la citadelle Vauban de Lille, siège du Corps de réaction rapide, cette conférence est un rendez-vous important pour l’Europe de la Défense. Seront présents une pléïade d’experts, d’élus et de militaires. Nicole Gnesotto, présidente du CA de l’IHEDN ; Louis Gautier, secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, ainsi que Michel Barnier, introduiront et animeront les débats. Télécharger le Programme

La première table ronde (à laquelle je participerai) est consacrée au « Parler vrai » avec le général de Rousiers, président du Comité militaire de l’Union européenne, Gilles de Kerchove, coordinateur de l’UE pour la lutte contre le terrorisme, et mon honorable collègue de l’Opinion et du blog Secret Défense, Jean-Do Merchet.

La seconde table ronde est titrée « Agir vite » Veronika Wand-Danielson, aujourd’hui ambassadeur de Suède à Paris mais qui a été longtemps en poste à Bruxelles, Pierre Vimont, ancien secrétaire général du Service diplomatique européen (SEAE), Joachim Bitterlich, ancien conseiller du chancelier H. Kohl, et Nick Withney, chercheur à l’ECFR et ancien de l’agence européenne de Défense.

(NGV)

L’opération Sophia en phase 2. Entretien avec Hervé Blejean

Wed, 07/10/2015 - 07:36

(BRUXELLES2) L’opération Sophia (ex EUNAVFOR Med) entre aujourd’hui (7 octobre) dans une phase plus active, la phase 2a visant à arrêter les trafiquants d’êtres humains et les passeurs en haute mer. B2 a pu s’entretenir, de façon approfondie, avec le contre-amiral Hervé Bléjean, commandant en chef adjoint de l’opération au quartier-général d’opération de Rome (interview intégrale parue sur B2 Pro, lire : EUNAVFOR Med une pièce dans un puzzle plus complet (Bléjean)). Extraits…

La phase 2 (2a) démarre. Quel est votre objectif durant cette phase qui doit être plus opérationnelle ?

Notre objectif est de démanteler les réseaux criminels qui font de l’argent avec le désespoir des gens, et risquent la vie des gens qu’ils font partir en mer dans des conditions dangereuses et scabreuses. Si on appréhende de possibles trafiquants ou passeurs, le but est de les traduire en justice. Et d’avoir ce qu’on appelle le Legal finish. C’est-à-dire d’aboutir, au final, à la condamnation des trafiquants.

Vous pourrez agir malgré les contraintes du droit international ?

Le droit international permet de mener un certain nombre d’actions que ce soit au titre de la convention de Montego Bay ou du protocole de Palerme. On a ainsi parfaitement le droit de monter à bord pour assurer le contrôle des papiers et l’identité des bateaux qui ne battent pas de pavillon. Ce qui est le cas de la grande majorité des bateaux impliqués dans le transport des migrants. Il ne s’agit pas d’un contrôle d’identité des personnes mais des papiers du navire.

Vous parlez de poursuite en justice. Qui va poursuivre ? Va-t-on se retrouver dans la même problématique que pour l’opération Atalanta, avec la difficulté de poursuivre les gens arrêtés ?

L’Italie a accepté de poursuivre tout suspect remis par un navire participant à l’opération, quelle que soit la nationalité du navire. Mais chaque nation participante garde une option. Il appartient à l’Etat de décider s’il souhaite poursuivre ou non la personne arrêtée. Si la réponse est non, l’Italie accepte de poursuivre, pour peu qu’on puisse lui produire une procédure acceptable, par le procureur anti-mafia italien.

Des personnes ont-elles déjà été remises à la justice ?

Oui. Une quinzaine de personnes ont déjà été remises à la justice italienne. Elles étaient liées de près ou de loin, aux réseaux de passeurs.

Démanteler les réseaux ne va pas se faire en quelques mois ?

Non. C’est un travail de fourmi, de longue haleine, qui va prendre du temps. Tout l’objet de l’opération est d’ailleurs d’aller plus loin, de renforcer la coopération avec les organisations de police européenne ou internationale (Eurojust, Interpol…) et de pouvoir agir aussi sur les flux financiers dégagés par ces organisations. Cela nécessite une approche globale complète.

Vous ne pouvez cependant aller dans les eaux territoriales libyennes actuellement ?

Non. Ce sera pour une étape ultérieure. C’est l’objectif ultime de l’opération : aller dans l’espace de souveraineté libyen pour appréhender, au plus près, tous les moyens utiles aux réseaux de trafiquants et passeurs. Mais dans tous les cas il faut une invitation du gouvernement d’unité nationale libyen. Et ce sont des leviers qui ne sont pas entre nos mains. C’est tout l’enjeu du travail mené par Bernadino Leon (NDLR : l’envoyé spécial de l’ONU), dont on appelle le succès.

Donc pas d’intervention en Libye sans l’accord libyen contrairement à ce qui s’était passé en 2011 pour l’opération de l’OTAN ?

Exactement. On ne fera rien dans l’espace de souveraineté libyen sans accord du gouvernement libyen, reconnu par la communauté internationale. Il ne doit y avoir aucun fantasme sur nos intentions. Nous n’avons pas d’agenda caché.

Vous restez très discrets sur le modus operandi des trafiquants, sur ce que vous allez faire dans cette autre phase, pourquoi cette prudence ?

Un de nos objectifs est d’avoir quelques succès opérationnels. L’adversaire est extrêmement connecté, a ses propres capacités d’analyse et de renseignement sur des sources ouvertes. Toute fuite sur la façon dont on veut procéder, qui nous visons, à quel moment on change de dispositif, mettrait à bas notre tactique. Tout le monde mettra la tête sous l’eau, et ce sera dommage. Quand on place une souricière, on ne dit pas quel type d’appât, de piège, ni où et à quel moment on le fait.

(propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde)

La Cour de justice sonne le tocsin pour les libertés publiques. Les 5 leçons de l’arrêt Schrems

Tue, 06/10/2015 - 19:25

(B2) L’arrêt qu’a rendu la Cour de justice européenne ce mardi ( 6 octobre) est un rappel à l’ordre cinglant en matière de libertés publiques pour la Commission européenne comme pour Facebook, et les autres sociétés internationales qui utilisent les données personnelles, sans vergogne. Il enfonce un coin dans la relation UE-USA. Face à un pays pas sûr en matière de protection des données, toute institution nationale est en droit et même en devoir de refuser le transfert des données, quand bien même la Commission européenne en aurait décidé autrement.

Que dit l’arrêt Schrems ?

1° Le système américain de protection de données n’offre pas « un niveau de protection substantiellement équivalent à celui garanti au sein de l’Union ». Le régime américain de la sphère de sécurité rend « possible des ingérences, par les autorités publiques américaines, dans les droits fondamentaux des personnes ». Les autorités des États-Unis peuvent ainsi accéder aux données à caractère personnel transférées à partir des États membres vers ce pays et traiter celles-ci « d’une manière incompatible, notamment, avec les finalités de leur transfert et au-delà de ce qui était strictement nécessaire et proportionné à la protection de la sécurité nationale ».

« Dès lors qu’elle autorise de manière généralisée la conservation de toutes les données à caractère personnel de toutes les personnes dont les données sont transférées depuis l’Union vers les États-Unis sans qu’aucune différenciation, limitation ou exception ne soient opérées en fonction de l’objectif poursuivi et sans que des critères objectifs ne soient prévus en vue de délimiter l’accès des autorités publiques aux données et leur utilisation ultérieure » une réglementation n’est « pas limitée au strict nécessaire ». Elle devient donc illégale. Une réglementation qui permet « aux autorités publiques d’accéder de manière généralisée au contenu de communications électroniques doit être considérée comme portant atteinte au contenu essentiel du droit fondamental au respect de la vie privé ».

Enfin, il n’existe « pas, pour les personnes concernées, de voies de droit administratives ou judiciaires permettant, notamment, d’accéder aux données les concernant et, le cas échéant, d’obtenir leur rectification ou leur suppression ». Là aussi, il y a « atteinte » aux droits fondamentaux. Une telle possibilité « étant inhérente à l’existence d’un État de droit » !

2° La Commission européenne a failli à ses devoirs. La Cour ne contente pas d’annuler la décision de la Commission. Les arguments utilisés sont particulièrement sévères pour l’exécutif européen. D’une part, la Commission était tenue de constater que les États-Unis assurent effectivement, en raison de leur législation interne ou de leurs engagements internationaux, un niveau de protection des droits fondamentaux substantiellement équivalent à celui garanti au sein de l’Union en vertu de la directive lue à la lumière de la Charte. Elle ne l’a pas fait. La Commission « n’a pas opéré un tel constat, mais qu’elle s’est bornée à examiner le régime de la sphère de sécurité ». Cependant, elle savait bien qu’il y avait des problèmes avec la protection des données au niveau américain. La plupart des arguments de la Cour sur le déficit de protection aux Etats-Unies sont en effet, tirées de communications de la Commission européenne. Enfin, elle a interdit aux autorités nationales de contrôle de se prononcer en cas de plainte d’un citoyen.

3° C’est la troisième leçon de cet arrêt. La Cour considère que la Commission n’avait pas la compétence de restreindre ainsi les pouvoirs des autorités nationales de contrôle. Aucune disposition de la directive n’empêche les autorités nationales de contrôler les transferts de données personnelles vers des pays tiers ayant fait l’objet d’une décision de la Commission. Ainsi, même en présence d’une décision positive de la Commission, les autorités nationales de contrôle, saisies d’une demande, doivent pouvoir « examiner en toute indépendance si le transfert des données d’une personne vers un pays tiers respecte les exigences posées par la directive ». En d’autres termes, une décision de la Commission « constatant qu’un pays tiers assure un niveau de protection adéquat aux données à caractère personnel transférées ne saurait annihiler ni même réduire les pouvoirs dont disposent les autorités nationales de contrôle en vertu de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de la directive ».

4° La valeur suprême des droits fondamentaux. Au passage, les juges de la Cour rappellent un principe :« le droit à la protection des données à caractère personnel comme la mission dont sont investies les autorités nationales de contrôle » sont garanties par la Charte des droits fondamentaux.

5° Dernier point, qui est un rappel des prérogatives de la justice européenne. La Cour de justice rappelle qu’elle est « seule compétente pour constater l’invalidité d’un acte de l’Union », tel qu’une décision de la Commission. Par conséquent, lorsqu’une autorité nationale ou bien la personne ayant saisi l’autorité nationale estime qu’une décision de la Commission est invalide, cette autorité ou cette personne « doit pouvoir saisir les juridictions nationales pour que, dans le cas où elles douteraient elles aussi de la validité de la décision de la Commission, elles puissent renvoyer l’affaire devant la Cour de justice ». Et ce sera aux juges européens que reviendra alors « la tâche de décider si une décision de la Commission est valide ou non ».

En l’occurrence, la réponse ne suscite aucune ambiguïté. La Cour déclare « la décision de la Commission du 26 juillet 2000 invalide ». L’autorité irlandaise de contrôle qui avait été saisie d’une plainte (par M. Schrems) doit « avec toute la diligence requise » décider « s’il convient, en vertu de la directive, de suspendre le transfert des données des abonnés européens de Facebook » vers les États-Unis au motif que ce pays n’offre pas un niveau de protection adéquat des données personnelles.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Arrêt C-362/14, Maximillian Schrems / Data Protection Commissioner, du 6 octobre 2015. A télécharger ici

Kunduz, Turquie. Le double standard de Jens Stoltenberg

Tue, 06/10/2015 - 17:01

(B2) Autant le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a été prolixe et incisif, tout à l’heure lors de son point de presse, sur l’incursion russe dans l’espace aérien turc — « une violation grave », un fait « inacceptable », etc. — autant il a été beaucoup plus elliptique sur le bombardement d’un hôpital de MSF. « Je suis terriblement attristé par les évènements. Une enquête complète a été mise sur pied » a-t-il lâché. Et c’est tout.

De la même façon, Jens Stoltenberg, n’est pas avare de quelques précisions sur ce qui s’est passé sur la frontière turque. « Cela ne ressemble pas à un accident » explique le secrétaire général de l’OTAN, donnant moult détails. « Il y a eu deux violations au cours du Week-end (NB : par un Sukhoi 30 et un Sukhoi 24). Et cette violation a duré longtemps par rapport aux violations de l’espace aérien dans d’autres points de l’Europe. Les renseignements que nous avons reçus me font (donc) dire que ce n’est pas un accident. »

Sur l’Afghanistan, il reste beaucoup plus prudent, même très prudent. Ici pas de renseignement de première main, le flou règne. On attend. « Il faut une enquête complète pour établir les faits, une investigation approfondie et complète, ensuite on tirera les conclusions » souligne Stoltenberg.

Une erreur de la chaîne de commandement ?

Cependant les informations publiques à disposition font état d’un bombardement, durant plusieurs minutes, à plusieurs reprises, par des avions américains membres de l’Alliance. On parait assez loin d’un simple dégât collatéral : on est soit face à une énorme bévue « technique » de l’armée de l’air américaine qui imposerait des mesures immédiates de correction ; soit en présence d’un objectif sciemment visé (l’hôpital abritant les talibans). Dans tous les cas, il y a une nécessaire remise en ordre dans la chaîne de commandement Otan et US.

Le double standard !

Le double standard règne. Quand un avion allié de l’OTAN mène une frappe qui, normalement, doit être considéré comme un crime de guerre — le bombardement d’un hôpital, normalement neutre, tue soignants et soignés —, on est seulement (un peu) tristes. Mais c’est tout. Quand la Russie déborde, sciemment, de sa ligne et fait une incursion en territoire de l’Alliance mais sans aucun autre effet, collatéral que ce qu’on pourrait appeler un show of force, c’est le branlebas de combat, l’alerte rouge, le déferlement de qualificatifs… En termes d’honnêteté d’information, ce n’est pas très sage. Et cela ne prête guère à l’optimisme quant à l’honnêteté des différentes forces en présence.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Dernières nouvelles des missions de maintien de la paix l’UE (PSDC) – septembre 2015

Tue, 06/10/2015 - 09:26

(BRUXELLES2)

Koulikoro (Mali). Le bataillon Debo revient se former après 1 an sur le terrain

Pour leur retour à Koulikoro, les instructeurs européens ont préparé un petit exercice de réaction à l’embuscade. (Crédits: EUTM Mali)

Environ 600 hommes du GTIA 5 (Groupement tactique interarmes) sont arrivés à Koulikoro pour leur recyclage programmé dès leur entraînement initial en mai 2014. Cela marque le début du cycle de réentrainement des Forces  armées maliennes (FAMA) par la mission européenne de formation (EUTM MALI).

Depuis tout ce temps, ils se sont battus dans le nord du Mali et ont également été impliqués dans l’opération pendant la période de la prise d’otages de Sévaré. Sévaré est également la ville de garnison du GTIA 5 « DEBO ». Les exercices ont pour but de voir comment les soldats maliens en patrouille réagissent face à une attaque ennemie inopinée et comment ils se sortent d’affaire sur le plan tactique. Malgré des températures avoisinant 36°, les ordres sont rapidement exécutés. Et ils reprennent rapidement l’entrainement, en progressant avec précaution tout en observant attentivement le terrain. « La première formation EUTM que les soldats maliens ont reçue et le fait qu’ils ont été déployés en opérations dans le nord ces derniers mois, sont encore très visibles. Il faut seulement rafraîchir les connaissances qu’ils possèdent déjà. C’est un bon signe! Cela montre que le travail d’EUTM Mali a eu un effet positif et le niveau de compétence des soldats maliens continue à s’améliorer » souligne le caporal instructeur Ale, du premier régiment des Gurkhas (1st Royal Gurhka Regiment) qui assure la formation côté européen.

Niamey et Agadez (Niger). Les formations d’EUCAP Sahel Niger battent le plein 

EUCAP Sahel Nigel apporte une formation d’intervention pour treize formateurs de l’Ecole nationale de gendarmerie de Niamey. (Crédits: EUCAP SAHEL Niger)

Une formation a été dispensée par les experts d’EUCAP Sahel Niger, début septembre, à 13 formateurs permanents de l’Ecole Nationale de gendarmerie de Niamey sur les « Techniques d’Intervention Professionnelle ». Formation qui permet d’acquérir les savoir faire techniques tout en respectant le cadre légal et l’usage de la force strictement nécessaire. À Agadez, c’est une formation en « Gestion du parc de véhicules » qui a été dispensée par les Européens, les 15 et 16 septembre.  Il s’agissait de la troisième session de formation du module en question, à laquelle ont participé 10 mécaniciens de la Gendarmerie et 7 mécaniciens de la garde Nationale venus de toutes les régions. Cette formation est complémentaire des activités précédentes de la mission en faveur des ateliers automobiles des différentes forces qui ont permis de renforcer leurs capacités en matière de maintenance à travers la fourniture d’outillage performant.

Dar al-Salaam (Tanzanie). Formation de marins tanzaniens au système de détresse

(Crédit : EUNAVFOR Atalanta)

L’opération EUNAVFOR Atalanta continue ses actions de formations. Mardi 15 septembre, ce sont les Espagnols du patrouilleur Meteoro, de passage au port de Dar El-Salaam, qui ont formé des cadets-officiers de la marine tanzanienne. Objectif de l’instruction : le système mondial de détresse et sécurité maritime et les mesures d’autocorrection mis en oeuvre par les navires marchands pour se protéger des attaques de pirates. Le commandant ESPS Meteoro, José Almira, « il est important de continuer (…) à former nos partenaires régionaux pour bâtir la confiance et la compréhension mutuelle et améliorer la sécurité maritime dans la région. » 

Tiraspol (Transnistrie) EUBAM Moldavie-Ukraine prépare les actions pour 2016-17

Le chef de la mission européenne d’assistance aux frontières (EUBAM Moldova) pour la Moldavie et l’Ukraine, l’ambassadeur Andrew Tesoriere, a visité Tiraspol le 24 septembre pour rencontrer Vitali Ignatiev, ministre des affaires étrangères par intérim de Transnistrie. L’objectif était de présenter le plan d’action de la mission pour 2016 et 2017.

Ergneti (Georgie). Réunion pour améliorer le mécanisme de prévention et réponses aux incidents  

La réunion d’Ergneti, co-animée par Kęstutis Jankauskas, le chef de la Mission d’observation de l’UE en Géorgie (EUMM Georgia), et l’ambassadeur Angelo Gnaedinger, le Représentant spécial du Directeur du bureau de l’OSCE pour le Caucase du Sud (Crédit : EUMM Georgia)

Les participants à la 58e réunion pour le Mécanisme de prévention et réponses aux incidents (IPRM) à Ergneti, ont constaté que la situation de sécurité reste « stable ».

Les incidents spécifiques le long de la frontière administrative ont été passés en revue. Toutes les parties se sont engagées à augmenter la vigilance et à intensifier l’échange d’informations pertinentes par rapport aux feux de forêt.

Afin de répondre aux préoccupations de la population locale, des informations complémentaires seront fournis sur les exercices militaires.

Méditerranée. Sauvetages en mer : 1.000 migrants supplémentaires sauvés

(Crédits: EUNAVFOR Med)

Tôt dans la matinée du 19 septembre, deux navires de l’opération EUNAVFOR Med (la frégate allemande Schleswig-Holstein et son homologue britannique HMS Enterprise), avec l’aide d’un hélicoptère britannique Merlin, ont mené une opération de sauvetage coordonnée sur 3 navires différents, venant ainsi au secours de 767 personnes. Les navires en détresse étaient en bois ou en caoutchouc. Tous venaient du port de Zuwarah, à seulement 20 minutes  Dans la nuit du 26 et 27 septembre, ce sont 251 migrants qui ont été sauvés d’un probable naufrage. Les deux actions ont été menées sous la coordination du centre maritime international de coordination de sauvetage (IMRCC) à Rome. Les migrants ont été transférés aux ports de Palerme, Augusta et Lampedusa tandis que les bateaux en bois vides de ses occupants ont été pris en charge par des unités navales de l’opération italienne « Mare Sicuro » (Lire aussi: Ne dites plus EUNAVFOR Med, dites Sophia ! (maj)

Ukraine. Recommandation des Européens pour la réforme de la législation pénitentiaire

(Crédits: UEAM Ukraine)

La mission européenne de conseil des forces sécurité (EUAM) en Ukraine a présenté, le 23 septembre 2015, ses recommandations sur l’amélioration du projet de loi sur les droits des prisonniers » lors de la réunion régulière du groupe d’experts du Parlement ukrainien. Un accord a été établi pour mettre en œuvre les suggestions de l’UEAM au cours de la seconde lecture du projet de loi.

 

(Leonor Hubaut)

Un avion russe survole l’espace aérien turc, ambassadeurs de l’OTAN convoqués

Mon, 05/10/2015 - 14:41

(B2) Une réunion des ambassadeurs de l’OTAN (NAC) est convoquée spécialement ce lundi après-midi pour discuter de la violation de l’espace aérien turc par des avions russes. C’est ce qu’a annoncé tout à l’heure le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, après une rencontre avec le ministre des Affaires étrangères tuc, Feridun Sinirlioglu, de passage à Bruxelles.

Ces « violations de l’espace aérien turc par des avions de combat russe (sont) inacceptables » a indiqué Jens Stoltenber. « Les actions de la Russie ne contribuent pas à la sécurité et la stabilité de la région. Je demande à la Russie de respecter pleinement l’espace aérien de l’OTAN et d’éviter l’escalade des tensions avec l’Alliance ». Et d’ajouter : « Je demande instamment à la Russie de prendre les mesures nécessaires pour harmoniser ses efforts avec ceux de la communauté internationale dans la lutte contre ISIL ».

Dimanche, le ministère turc de la Défense avait indiqué dans un communiqué qu’un avion russe (un Sukhoi Su30) avaut été intercepté par deux F-16 des forces armées turques, en patrouille dans la région et reconduit hors de l’espace turc vers la Syrie. « Une erreur de navigation » ont plaidé les Russes aux autorités militaires turques, selon le quotidien turc Hurriyet. L’avion Su-30 qui avait violé l’espace turc de quelques centaines de mètres dans le district sud de Yayladağı, vers midi dimanche, est retourné dans l’espace aérien syrien après un avertissement, précisent ces mêmes sources.

Commentaires : on peut remarquer la promptitude de réaction de l’OTAN. Les violations régulières de l’espace aérien grec par des avions turcs ne suscite pas un tel engouement. Plus récemment, le bombardement sanglant d’un hôpital de MSF en Afghanistan n’a pas vraiment suscité de commentaires aussi fermes. Sur le plan militaire, on peut considérer que ce débordement russe n’est pas une simple « erreur de navigation » mais davantage un avertissement sans frais aux autorités turques pour leur signaler que la frontière syrienne est désormais bien surveillée et … à respecter.

Bavure américaine sur l’hôpital de MSF à Kunduz ?

Sat, 03/10/2015 - 08:23

Le centre de traumatologie de Kunduz (Crédit : MSF)

(B2) L’hôpital de Médecins sans frontière à Kunduz, au nord de l’Afghanistan a été « frappé à plusieurs reprises au cours de bombardements soutenue et a été très gravement endommagé » dénonce l’organisation humanitaire. Selon MSF, Trois membres du personnel sont morts et plus de 30 sont portées disparues. Ce centre de traumatologie MSF – qui est la seule installation du genre dans la région – est notamment assuré par MSF Belgique.

« Lorsque l’attaque aérienne a eu lieu ce matin, nous avions 105 patients et accompagnants à l’hôpital et plus de 80 personnel médical, international et national, de MSF. Nous ne disposons pas encore des chiffres définitifs de victimes. Mais notre équipe médicale fournit les premiers soins et nous recensons les personnes décédées » explique Bart Janssens, directeur des opérations à MSF. « Nous sommes profondément choqués par cette attaque, le meurtre de notre personnel et les patients ». Et d’appeler « toutes les parties à respecter la sécurité des installations et du personnel de santé ».

Ce bombardement serait dû à une erreur des frappes américaines. Les forces américaines ont, en effet, mené une attaque aérienne « dans la ville de Kunduz à 02h15 (locale), contre les individus qui menacent la force. Cette frappe peut avoir entraîné des dommages collatéraux à un établissement médical à proximité » reconnait, selon The Guardian, le colonel Brian Tribus, porte-parole des forces US dans la région. « L’incident est sous enquête »

Depuis que les combats ont éclaté lundi dernier, l’hôpital de MSF a traité 394 blessés.

(NGV)

Alerte santé pour Trident juncture 2015

Thu, 01/10/2015 - 17:58

(B2) Plus de 30.000 militaires de 30 nations prendront part à l’exercice « Trident Juncture 2015 » dont l’objectif est de certifier la Force de Haute disponibilité de l’OTAN (VJTF). La première phase, le Command Post Exercice, se déroulera du 3 au 16 octobre. L’exercice réel (Live Exercise) débutera le prochain 21 octobre, sur le camp d’exercice de Zaragoza (Espagne). L’exercice simulera un conflit entre les pays de la Corne de l’Afrique où s’imbriquent des conflits ethniques, des crises de réfugiés, les conflits sur les ressources en eau et l’émergence d’une alerte de Santé type « Ebola ». Malgré des noms de pays fictifs (Kamon, Lakuta et Tytan), les plans utilisés pour l’exercice seront réels, avec une attention spéciale portée à l’Ethiopie et le Soudan du Sud.

Sanctions contre 4 fauteurs de trouble au Burundi

Thu, 01/10/2015 - 13:56

(B2) L’Union européenne a adopté ce jeudi (1er octobre) des restrictions en matière de déplacements (interdiction de visas) et un gel des avoirs à l’égard de quatre personnes, dont les actions « compromettent la démocratie ou font obstacle à la recherche d’une solution politique à la crise actuelle au Burundi, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, y compris par des actes constituant des atteintes graves aux droits de l’Homme », vient d’annoncer un communiqué du Conseil. Cette mesure entrera en vigueur demain, vendredi, après publication au Journal officiel.

(NGV)

NB : une nouvelle annoncée en avant-première sur B2 Pro avec tous les détails sur les personnalités visées. Lire aussi : Premières sanctions contre des responsables burundais. Qui pourrait être concerné ?

Les Russes tapent en Syrie. Une frappe très politique. Un effet papillon ?

Thu, 01/10/2015 - 09:45

Frappe aérienne effectuée par l’aviation russe en Syrie le 30 septembre – images : Ministère russe de la Défense

(B2) Il a suffi d’un petit décret et de quelques avions. Les Russes ont joint le geste à la parole. Et, désormais, en Syrie, comme sur l’ensemble du Moyen-Orient, il faudra compter avec eux.

A la « française »

« Basé sur l’article 102.1 (d) de la Constitution russe, Vladimir Poutine a soumis une proposition au Conseil de la Fédération pour lui demander d’autoriser l’utilisation du contingent des Forces armées russes de l’extérieur du pays, sur la base des principes et normes du droit international généralement reconnus » indique le communiqué de presse du Kremlin, publié mercredi (30 septembre) au matin. Autorisation accordée dans la foulée. La suite n’a pas traîné. Dans un schéma organisationnel assez semblable à celui existant en France, le chef de l’Etat, qui est le commandant suprême des forces armées, ordonnait de commencer « l’opération aérienne pour viser des cibles des terroristes de l’ISIL sur le territoire syrien ».

Huit cibles détruites

Et dans l’après-midi, le ministère russe de la Défense annonçait avoir réalisé plusieurs frappes sur des cibles des « dépôts d’armes et de munitions, de fuels, des centres de communication, du matériel militaire des terroristes de l’ISIS ».  Une annonce faite sur twitter, sur facebook, sur youtube, etc. en utilisant donc tous les canaux modernes des médias sociaux, dans un exercice plutôt rare pour l’armée russe de ‘transparence’ (ou propagande) militaire, assez proche en fait de celui que pratique l’armée israélienne ou britannique. On apprendra un peu plus tard que ce raid réalisé par le groupe d’aviation russe basé en Syrie a frappé « 8 cibles de l’ISIS, (…) situées dans une zone montagneuse », qui ont été « complètement détruites ».

La cible contestée

Américains comme Français ont immédiatement émis des doutes sur la cible visée, arguant qu’elle concernait davantage des groupes modérés hostiles à Bachar el Assad que l’organisation de l’Etat islamique (ISIL/ISIS). Difficile de cerner le vrai du faux. Quoi qu’il en soit, John Kerry, le secrétaire d’Etat américain a indiqué, très vite, mercredi soir, devant le conseil de sécurité de l’ONU puis devant la presse avoir des « préoccupations (quant) à la nature des objectifs, au type de cibles » visées par les Russes. Il y a « besoin de clarté ». L’organisation de l’Etat islamique (ISIL) devrait « de toute évidence être ciblée ». Mais, de façon « tout aussi évidente, ce n’est pas ce qui se passe ».

Une frappe très politique

Dans un jeu où la propagande est intense de part et d’autre, l’essentiel n’est pas vraiment là. Car cette frappe russe a, avant tout, un objectif politique. Elle permet à la Russie de récupérer ses galons de force avec qui il faut compter et discuter en Syrie, non pas juste parce qu’elle a un siège au Conseil de sécurité des Nations-Unies mais parce qu’elle est sur place militairement et que son intervention ne peut se discuter d’un point de vue juridique.

Un certain fondement juridique

D’un point de vue du droit international, la position russe semble, en tout cas, assez fondée… quelle que soit la cible visée. Car les militaires russes interviennent à la demande du gouvernement légal de la Syrie (de Bachar el Assad). Ce n’est peut-être pas très moral mais c’est imparable !  Ce que ne peuvent pas se revendiquer les occidentaux qui agissent en marge de la légalité internationale. Au passage, la Russie s’impose comme un partenaire obligé pour le régime de Damas, tout autant que l’Iran.

Et une certaine continuité dans le soutien à Bachar

Cette intervention a aussi une certaine logique dans la continuité. Soutenant de façon non équivoque le régime de Bachar, Moscou a bloqué notamment toute tentative de résolution du Conseil de sécurité à l’ONU contre ce régime. Le gouvernement russe a, depuis le début de la crise, prédit que les Occidentaux se trompaient en croyant que l’opposition syrienne démocratique l’emporterait. L’ancien ambassadeur à l’OTAN, Dimitri Rogozine, aujourd’hui vice-Premier ministre, avait averti, lors d’un dernier point de presse à Bruxelles (en janvier 2012 !) que les Européens se trompaient. Vous verrez – avait-il dit alors, arguant de la bonne connaissance russe de la région par la Russie. « Ceux que vous soutenez sont des terroristes qui vont se retourner contre vous » avertissait-il, en substance, dans un discours sans nuances, qui détonnait en 2012 et parait presque raisonnable aujourd’hui… Faisant référence à l’intervention en Libye, toute proche, il avertissait également, sans ambages : plus jamais !

L’effet papillon de la frappe

Désormais, effectivement, il va falloir se coordonner étroitement entre militaires, entre Russes et Américains, et le reste de la coalition, pour éviter tout risque de « collision ». Et de façon imparable, et cynique, cette coordination se fera avec le régime de Bachar, les Russes assurant le « point manquant » de la coordination entre la coalition et le régime de Damas.

Une coordination étroite USA-Russie

John Kerry le secrétaire d’Etat US, l’a reconnu hier à New-York, lors d’une conférence de presse commune tenue à New-York avec Serguei Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, au sortir de la réunion du Conseil de sécurité. « Nous avons convenu de l’impératif dès que possible – peut-être même dès demain — d’avoir une discussion de déconfliction de militaires à militaires, des réunions, des conférences — tout ce qui peut être fait dès que possible. Car nous sommes d’accord sur l’urgence de cette déconfliction » (*).

Une zone de déconfliction indirecte avec le régime de Bachar

Point confirmé par son homologue russe. « La première instruction pour nous est de faire en sorte que les militaires américains, la coalition menée par les Etats-Unis d’une part et les militaires de la Fédération de Russie qui se livre maintenant à certaines opérations en Syrie, à la demande du Gouvernement syrien, entrent en contact et établissent des canaux de communication pour éviter les incidents involontaires » a précisé Lavrov. « Et nous avons convenu que les militaires devraient entrer en contact les uns avec les autres très bientôt. » Le ministre russe lâchant d’ailleurs que cette décision assurait « le suivi de ce que nos présidents ont convenu lors de leur rencontre ici le 28 septembre » (sous entendu : les Américains étaient parfaitement au courant).

Pas vraiment un ami, mais déjà un partenaire

A quelques heures d’une autre réunion fondamentale, sur l’Ukraine, à Paris, en format Normandie, la discussion va changer de tournure. La Russie n’est toujours pas vraiment un « ami » mais elle est un peu plus un « partenaire ». Il y a un renversement des priorités au sein de l’Union européenne aujourd’hui. Entre le risque russe en Ukraine et le risque de l’Etat islamique en Syrie et en Irak, les grands pays européens et les Etats-Unis ont choisi : c’est le front sud sur lequel il importe de se concentrer pour l’instant.

Des conséquences au plan européen

Choisir entre s’affronter et coopérer

Au sein de l’Union européenne, il y a là les signes d’une évolution notable. Alors que tous les esprits étaient tournés depuis fin 2013 vers l’Est – en oubliant le Sud – la réalité géopolitique est venue rappeler qu’entre deux risques, il faut choisir le moindre. La doctrine européenne de dire que le front est et le front sud ont la même valeur et doivent susciter le même engagement politique n’est aujourd’hui plus tenable. Tout simplement car les deux risques ne sont pas de la même intensité.

Deux risques à l’Est et au Sud qui ne sont plus de même intensité

A l’Est, il y a une rébellion soutenue par la Russie, et contenue dans une certaine sphère géographique, assez limitée somme toute, qui n’a pas d’intention ni les moyens de déborder de sa zone de combat (sans l’appui de Moscou). Au sud, il y a une rébellion, qui s’étend sur le territoire de deux Etats, dispose d’un trésor de guerre notable et de troupes autrement plus nombreuses et qui a une volonté de contrôler plusieurs territoires voire de frapper le territoire européen. Ce n’est pas tout à fait la même chose.

… et ne peuvent plus être combattus de la même manière

Ensuite, car les Européens n’ont pas les moyens de tenir deux fronts en même temps. Enfin car on ne peut pas désigner d’un côté la Russie comme un horrible ennemi qu’il faut combattre et, de l’autre, lui faire des courbettes pour obtenir sinon sa coopération, au moins sa bienveillante neutralité, sur la Libye, la Syrie, le Sahel, etc.

Un renversement géopolitique au sein de l’UE

Pour la plupart des pays d’Europe de l’Est qui n’ont pas vu que la menace syrienne, comme la symbolique politique de la vague des réfugiés, ce renversement a des conséquences géopolitiques beaucoup plus fondamentales sur leur voisinage qu’ils ne pouvaient l’estimer au premier abord. Ils ne participent à aucune enceinte de discussion et de résorption des principaux conflits en cours. Sur l’Ukraine, c’est en format E2+2 (Allemagne, France, Russie et Ukraine). Sur l’Iran, c’est en format E3+3 (Allemagne, France, Royaume-Uni, Chine, Russie et Etats-Unis). Sur la Syrie, on pourrait adopter un format similaire. Sur le Proche-Orient, c’est le Quartet. etc.

Un hors jeu politique et militaire des pays de l’Est

En bloquant tout partage de la solidarité dans l’accueil des réfugiés, de façon souvent agressive et avec des arguments souvent « borderline », ils se sont mis hors jeu politiquement mais surtout moralement. En ne participant que du bout des doigts aux opérations au Sahel comme en Irak, ils sont hors jeu militairement. Ils auront donc beaucoup de mal — sauf nouvelle (grande) offensive russe à l’Est — à réimposer la priorité « Front Est » à l’agenda. Ce qu’ils avaient réussi à faire depuis plusieurs mois. La frappe russe sur la Syrie, comme ses conséquences, entre Washington et Moscou tout d’abord, au plan international ensuite, a réduit à néant leur importance.

Kaczyński, combien de divisions ?

Il faudra examiner dans les premiers mois si ce fait est simplement conjoncturel ou structurel. Mais il parait certain que leur rente de situation, acquise depuis 2004 et 2007 et les deux élargissements successifs vers l’Est de l’Europe, est en passe de se terminer. Se poser la question : l’Est « combien de divisions ? », c’est déjà quasiment y répondre. Les pays de l’Est reviennent, en fait, à leur étiage normal, ni plus ni moins : celui de petits pays, ne disposant pas vraiment d’une surface diplomatique et militaire, pour peser durablement, sans un soutien (soit de l’Union européenne, soit des Etats-Unis), qui ne pèse qu’à peine 20% du système décisionnel européen (2). Et même si le PiS (Droit & Justice), de Kaczyński, qui entend gouverner la Pologne demain s’il gagne les élections (3) soutient le contraire, et entend restaurer comme il le dit « le phare » de la Pologne, celui-ci risque de ne pas éclairer bien loin…

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Transcript du département d’Etat US traduit par nos soins

(2) Selon le système de double majorité, ce poids devrait diminuer de façon lente mais constante dans les dix prochaines années, vu la stagnation voire la diminution constante de la population de ces pays, alors que la population des autres pays européens (ouest, nord et sud) est en croissance plus dynamique (interne ou/et du fait de l’immigration).

(3) Les élections législatives sont prévues le 25 octobre. Le PiS a déjà gagné avec Andrzej Duda les élections présidentielles

Russes et Américains alliés objectifs en Syrie

Sat, 26/09/2015 - 19:11

(B2) L’apparition de Daech érigée en menace ultime a transformé la donne dans le Moyen-Orient. Malgré les apparences, Russes et Américains semblent aujourd’hui « alliés », chacun avec des fonctions différentes. Aux Russes, le soin de consolider le régime pour éviter sa chute brutale et l’installation d’un No man’s Land propice à tous les radicaux extrêmes, mieux organisés sur le plan militaire. Aux Américains, et leurs alliés, le soin d’effectuer des frappes aériennes sur des objectifs de l’organisation de l’Etat islamique. Aux Iraniens (et aux Kurdes au Kurdistan irakien), le soin de combattre au sol en Syrie et en Irak.

Patiemment Moscou a attendu son heure. Et cette semaine à l’assemblée générale de l’ONU, Vladimir Poutine en personne devrait donner le «la». La Russie tient les fils d’un possible plan permettant de stabiliser la Syrie. Et elle entend en jouer. Ce qui est l’objectif primaire des différents pays, notamment européens. Bachar a, cyniquement, utilisé sa population, en la privant des moyens de vie essentiels (visant boulangeries, marchés, hopitaux…), en les poussant à l’exil. Une politique de la terre brûlée qui paie…

Les soudaines et bruyantes révélations puisées à de « bonnes sources » d’augmentation des livraisons d’armes de la Russie vers la Syrie sont arrivés, à point nommé, pour remettre sur le devant de la scène l’assistance militaire russe. Mais elles n’ont pas empêché les rapprochements initiés par les différentes diplomaties. De fait, ces livraisons « n’ont pas cessé durant tout le conflit » a confié à B2 une autre « bonne » source. « Nous sommes davantage dans le classique d’un contrat d’assistance militaire, visant à renouveler et recompléter un dispositif militaire ».

Le régime syrien, depuis le début de la guerre, a subi d’importantes pertes au niveau matériel (véhicules, hélicoptères…). Sa flotte d’hélicoptères, notamment, sur-utilisés nécessite d’être renforcée. Et, dans l’esprit d’une possible solution politique en Syrie, il n’est pas question que le régime de Damas, s’effrondre trop rapidement pour laisser la place aux mouvements les plus extrêmes.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Ne dites plus EUNAVFOR Med dites l’opération Sophia ou Sofia !

Thu, 24/09/2015 - 21:00

Fed. Mogherini et l’amiral commandant l’opération, Enrico Credendino

(BRUXELLES2 à Rome) L’opération européenne de lutte contre les trafiquants d’êtres humains en Méditerranée centrale (EUNAVFOR Med) va changer de nom ou plutôt adopter un surnom à l’image de sa grande soeur EUNAVFOR Atalanta.

La Haute représentante de l’UE, Federica Mogherini, l’a annoncé à Rome aujourd’hui lors de son passage au quartier général de l’opération (que j’ai pu visité à l’occasion). EUNAVFOR Med va désormais porter le nom de Sophia (ou Sofia en italien), une petite fille somalienne, née en pleine mer, fin août, sur la frégate allemande Schleswig-Holstein qui l’avait prise en charge après son sauvetage par le navire britannique HMS Enterprise (lire : Sophia née en Méditerranée. Vaste journée de sauvetage pour les navires européens). Un beau relais en mer qui valait bien un surnom…. Ce nom permettra « de faire passer le message au monde que l’opération a pour objectif de sauver et de protéger des vies » a expliqué Federica Mogherini.

Une phase plus active

La phase 2 qui va démarrer le « 7 octobre » sera plus active a promis également la Haute représentante. « On passe d’une phase de renseignement à une pase opérationnelle. » L’objectif va être « cette fois de stopper les trafiquants ». Durant ces dernières semaines, à une vingtaine de reprises (21 exactement selon nos informations), les navires européens ont eu l’opportunité de croiser des trafiquants qu’ils auraient pu arrêter. « 17 en provenance de Libye, 3 d’Egypte » a-t-elle précisé.

Les trafiquants en escorte : traqués

« Le système utilisé par les trafiquants est d’escorter les bateaux ». « Je les avertis : cela va être plus difficile pour eux, et cela rendre plus difficile leur business » a-t-elle ajouté au grand dam des officiers du QG de l’opération qui auraient bien aimé gardé ce détail opérationnel un peu plus discret pour pouvoir frapper un grand coup dès le début de la phase 2. De 4 navires actuellement, l’opération va ainsi passer à 7 navires environ, dont une frégate française de type Lafayette (le Courbet ou le Surcouf). Soit un doublement de sa possibilité d’action.

Contrer le cynisme des contrebandiers d’hommes

Les trafiquants d’êtres humains et les passeurs sont « extrêmement cyniques et flexibles, changeant la route en fonction des opportunités » a conclu la Haute représentante qui a entendu avertir les trafiquants « Nous voulons rendre leur business moins facile, qu’il soit plus difficile pour faire de l’argent, les dissuader réellement »…

Commentaire : deux points importants

D’une part, si une grosse majorité des trafiquants viennent de quelques ports libyens bien repérés, ils bénéficient aussi d’une assise dans les pays voisins, l’Egypte notamment. C’est prouvé maintenant. Et la phase de renseignement de deux mois durant cet été a permis de confirmer ce fait. Ensuite, en matière d’organisation du trafic, on est passé d’un mode artisanal à un mode industriel, extrêmement profitable et lucratif. A suivre sur le Club, une interview exclusive avec le contre-amiral Bléjean, le numéro 2 de l’opération.

(Nicolas Gros-Verheyde)

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