L’Organisation des Nations unies (ONU), est la somme des États membres qui la composent. À l’ONU, rien ne peut se faire sans l’aval du conseil de sécurité composé de cinq membres (Chine, États-Unis, Fédération de Russie, France et Royaume Unie), car ils disposent du pouvoir de veto qui est l’expression politique d’un État.
C’est le cas pour le conflit israélo-palestinien où un nombre considérable de résolutions onusiennes a été l’objet d’un veto américain parce que Washington ne souhaitait pas imposer quoi que ce soit à Israël.
Un jeu de dupes
Sur le dossier syrien, il ne peut pas y avoir de règlement sans un accord entre les États-Unis, chef de file qui soutient un certain nombre de groupes d’opposition et compte dans ses rangs la Turquie et l’Arabie saoudite, et de l’autre la Russie qui soutient le régime de Bachar, soutenu aussi par l’Iran. Le conflit syrien est un jeu de dupes entre des puissances qui annoncent vouloir établir un règlement alors qu’en coulisse, elles continuent à alimenter des groupes d’opposition.
Le 9 septembre, un accord pour un cessez-le-feu en Syrie a été conclu entre Washington et Moscou. Il a volé en éclat au bout d’une semaine, parce que Washington n’a pas réussi à imposer aux groupes qu’il soutient sur le terrain de le respecter.
En Syrie, il n’y a pas une guerre, il y en a des dizaines. À Alep, le groupe dominant sur le terrain, c’est al Nosra, qui s’est rebaptisé Fatah al Cham (pour faire oublier son affiliation à Al-Qaida). Al Nosra était exclu de l’accord de cessez-le-feu.
D’autres groupes comme les salafistes d’Ahrar al-Cham et l’armée syrienne libre, soutenue les États-Unis, et qui se battent aux côtés d’al Nosra à Alep, n’ont pas respecté le cessez-le-feu parce qu’ils sont dépendants du bon vouloir d’al Nosra. Pour que le cessez-le-feu perdure, il faudrait qu’ils se désolidarisent d’al Nosra.
La Russie marque des points
La Russie aussi, qui marque des points dans cette guerre, n’est pas disposée à abandonner ses acquis sur le terrain et laisser les djihadistes se renforcer et s’organiser. À la moindre violation du cessez-le-feu, Moscou et l’armée syrienne ont répondu par des attaques massives sur les positions de l’opposition à Alep.
Le mécanisme d’une négociation se passe toujours en plusieurs temps. Les acteurs négocient entre eux, comme les Russes et les Américains le font en Syrie. Ensuite, une fois que celui-ci est respecté, l’ONU peut intervenir pour mener les négociations, pour la mise en place d’un gouvernement de transition et ensuite le processus des élections, dans le cas syrien.
Mais la première phase se passe toujours entre les grandes puissances. C’est ce qui s’est passé entre Washington et Téhéran pour les négociations qui ont abouti à la signature de l’accord sur le nucléaire iranien. Il faut distinguer entre le pouvoir réel sur le terrain et le pouvoir juridique de l’ONU. L’ONU vient en appui quand les grandes puissances en ont besoin. Mais sans leur volonté, l’ONU ne peut rien faire tant qu’existe un droit de veto.
Recueilli par Agnès Rotivel
Comment la guérilla des FARC est-elle née et comment expliquez-vous sa longévité ?
Il faut remonter à 1948 et à l’épisode dramatique de la « Violencia », guerre civile qui a fait deux cent mille à trois cent mille morts, opposant libéraux et conservateurs, après l’assassinat du leader libéral Jorge Eliécer Gaitan. A l’issue de cette guerre civile, les FARC lancent leur première conférence, en 1964. Ils commencent leur bataille dans les campagnes et militent pour une réforme agraire.
La rébellion des FARC a duré parce qu’elle a réussi à vivre d’elle-même. Elle avait les moyens d’acheter des armes grâce au trafic de stupéfiants, aux enlèvements crapuleux qui visaient les notables installés dans les campagnes et à la taxation des activités économiques. Cette manne financière lui a permis de passer d’un système de guérilla rudimentaire, dans les années 1980, à une organisation capable de déstabiliser l’armée au milieu des années 1990.
Pendant toutes ces années, les FARC ont surtout été actives dans le sud du pays et dans les régions situées aux frontières du Panama et du Venezuela. Les négociations de l’accord de paix ont duré quatre ans, mais à aucun moment il n’y a eu de cessez-le-feu, car les deux parties savaient qu’il était facile de bloquer des négociations en le violant. Pendant les discussions, les FARC ont donc continué à attaquer les colonnes de l’armée. Les violences ont diminué au fur et à mesure.
Entre 1984 et 1999, il y a eu trois processus de paix, qui ont tous échoué. Pourquoi celui-ci aboutirait-il, selon vous ?
Les combattants sont fatigués, usés et ils ont bien conscience qu’ils n’arriveront jamais à prendre le pouvoir par les armes. Ils subissent aussi la pression des partis de gauche qui voient leur développement entravé parce qu’ils sont accusés de soutenir la guérilla. La Colombie est aussi le pays d’Amérique latine qui réserve la part la plus importante de son budget au secteur militaire. Le gouvernement prend conscience que le pays pourrait augmenter significativement sa croissance économique s’il investissait moins dans les dépenses militaires. Les deux parties ont donc intérêt à ce que le processus aboutisse.
Il y aura, le 2 octobre, un référendum. D’après les sondages, le oui l’emporte assez largement. Mais le véritable enjeu est le taux de participation. Il faut qu’il y ait un maximum d’électeurs pour assurer la légitimité de cet accord.
Que contiennent les 297 pages de l’accord de paix ?
Cela peut paraître surréaliste dans un pays urbain, mais la réforme agraire est l’un des principaux points abordés, car il constitue l’ADN des FARC. Cette réforme consisterait à restituer les terres aux paysans expropriés. Ceux qui produisent de la coca devront, quant à eux, se reconvertir dans d’autres cultures.
Le deuxième point concerne la reconversion des FARC en mouvement politique. L’accord prévoit qu’ils aient d’office cinq députés et cinq sénateurs pendant deux législatures, c’est-à-dire huit ans. Ce n’est pas grand-chose, mais c’est symbolique. L’idée est de dire : « Maintenant, c’est à vous de faire mieux en vous mobilisant lors des campagnes électorales futures. » En mai 2017, l’organisation compte donc se réunir pour créer un parti politique, dont on ne connaît pas encore le nom.
Les FARC ont exprimé, à l’issue de leur conférence nationale du 23 septembre, leur « soutien unanime » à l’accord de paix. Mais existe-t-il un risque de dissidence ?
Oui, il y a des éléments dissidents. Ce sont les plus radicaux et ceux qui sont le plus impliqués dans les trafics. Les responsables ont indiqué qu’ils étaient assez résiduels, mais ils ne vont pas s’envoler dans la nature. L’ELN (deuxième guérilla de Colombie après les FARC, qui a refusé de participer au processus de paix) peut très bien constituer une plate-forme d’accueil pour ces personnes-là. Elles peuvent aussi, comme ce fut le cas en Amérique centrale, rejoindre des bandes criminelles.
Le défi le plus important à relever semble être la (ré)intégration des guérilleros dans la société civile. Comment y parvenir ?
Cela suppose un débat très difficile, celui de la justice transitionnelle. Comment répondre aux attentes des victimes sans faire peser sur un trop grand nombre de combattants le poids de la justice ? Les FARC ne vont pas signer pour aller en prison. En même temps, ce conflit qui dure depuis cinquante-deux ans, a fait plus de deux cent mille morts. Le gouvernement ne peut donc pas mettre cette question sous le tapis.
L’accord prévoit que ceux qui ont commis un crime contre l’humanité seront poursuivis par des tribunaux colombiens. Des peines de cinq à sept ans sont prévues pour ceux qui reconnaîtront les faits. Dans le cas contraire, s’ils sont reconnus coupables, ils seront condamnés à vingt ans de prison. D’autres peines de réparation sont également prévues, comme participer à la recherche de mines antipersonnel.
Il faut aussi penser au désarmement des guérilleros. De ce côté-là, des choses ont déjà été négociées. Il y aurait une vingtaine de points de concentration, répartis dans tout le pays, où chaque combattant serait suivi et recevrait une indemnité pendant six mois. L’idée est de les orienter vers des activités post-conflit.
Le succès de l’accord de paix dépendra de la réussite de l’intégration des anciens combattants dans la société civile. Pour y parvenir, la Colombie multiplie les appels du pied envers le patronat et la communauté internationale. Quinze chefs d’Etat et de gouvernement seront présents pour la signature, mais il y aura aussi le FMI et la Banque mondiale, ce qui prouve bien la dimension économique de cet accord. Beaucoup de pays ont déjà tissé des liens commerciaux avec la Colombie, mais l’objectif est qu’ils investissent davantage. La signature de l’accord va renforcer l’attractivité économique du pays.
Comment l’opinion publique, notamment les victimes du conflit, accueille-t-elle cet accord ?
Le conflit colombien a touché la périphérie et n’a fait qu’effleurer les grandes villes, comme Medellín et Bogotá, qui subissent davantage la violence des cartels. La population urbaine n’est donc pas vraiment concernée par la guérilla. En revanche, dans les campagnes, les gens attendent la signature de l’accord. Ce ne sont pas dans les régions où les combats ont été les plus intenses que la résistance est la plus forte, mais dans les grandes villes et les milieux conservateurs, qui profitent de cet accord pour s’opposer au président [centriste] Juan Manuel Santos.
Propos recueillis par Feriel Alouti
The book Aftermath of the Ukrainian Crisis edited by Dr Panagiota Manoli, Assitant Professor Panagiota Manoli, Head of the Programme of Slavic, East European and Eurasian Studies of ELIAMEP was published by Routledge. The book has contributions by Hanna Shelest, Theodoros Tsakiris, Nadia Alexandrova-Arbatova, Alexey Gromyko, Sharyl Cross, Steven Blockmans and Ino Afentouli. Contributions in this edited volume attempt to address a number of key aspects of the Ukrainian issue. How does the crisis impact upon Black Sea geopolitics and on regional governance? How can EU – Russia relations evolve under the new multipolar system? How is NATO affected? How important is the energy parameter in Russia-Ukraine-EU triangle? This edited volume aims to discloses the diverse narratives on the roots, evolution and repercussions of the crisis, indicating the extent of its complexity and highlighting important parameters of the Ukrainian issue. This book was originally published as a special issue of Southeast European and Black Sea Studies.