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Actualité. Réflexions. Reportages
Updated: 3 hours 58 min ago

L’opération Agenor, petit nom de EMASOH, pleinement opérationnelle

Tue, 25/02/2020 - 15:30

(B2) L’opération Agénor, le volet militaire de l’initiative européenne de surveillance maritime du détroit d’Ormuz (EMASOH), portée par la France, les Pays-Bas et le Danemark, a atteint sa pleine capacité opérationnelle. Une cérémonie officielle vient de marquer ce cap

Le vice-amiral Didier Maleterre déclarant le volet militaire de EMASOH (Agénor) opérationnelle (crédit : Etat-Major des Armées / Alindien)

Deux frégates disponibles…

Les frégates française Forbin et néerlandaise De Ruyter sont désormais placées sous le contrôle opérationnel et le commandement tactique de l’opération. Une cérémonie vient d’avoir lieu sur la place d’armes de la base navale française aux Émirats Arabes Unis, en présence de l’amiral Rob Kramer, chef d’état-major de la marine néerlandaise, du général Stéphane Mille, chef du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) à l’état-major des armées, et de Jeanette Seppen (la haute représentante civile de EMASOH) (1) et des Émiriens.

… sous un commandement français depuis Abu Dhabi

L’opération est commandée par un officier français, le vice-amiral Didier Maleterre, l’amiral commandant des forces françaises aux Émirats Arabes Unis (FFEAU) et la zone maritime océan Indien (ALINDIEN). L’état-major tactique (Force Head Quarter ou FHQ), est situé au sein de la base navale d’Abu Dhabi, rassemblant les représentants des États contributeurs et des officiers de liaison (notamment Belge et Danois).

Une étape décisive

« C’est une étape décisive dans l’engagement des partenaires européens au profit de la sécurité maritime et de la liberté de la navigation dans la région », affirme le ministère (français) des Armées. « Cette étape concrétise le projet politique, porté par huit pays européens, de mettre en œuvre une mission de surveillance et de sécurité maritime dans le détroit d’Ormuz. » La capacité initiale opérationnelle avait été atteinte fin janvier (lire : Emasoh déclarée opérationnelle. Le Courbet sur zone. Le Zs Ms De Ruyter arrive).

Une opération pour la liberté de navigation et la stabilité régionale

Pourquoi ce petit nom d’Agénor ? La réponse c’est Florence Parly, la ministre française des Armées qui l’a donnée : « Fils de Poséidon et père d’Europe pour laquelle il s’est toujours battu, Agénor était roi de Tyr. Désormais, c’est aussi le nom du volet militaire de la mission européenne de surveillance maritime dans le détroit d’Ormuz : ‘pour la liberté de navigation et la stabilité régionale’. »

Commentaire : une opération rondement menée

Remarquons au passage que les délais ont été respectés et que l’opération a été montée, sinon dans un temps record, du moins rapidement, pour une mission multinationale. Elle avait été initiée au départ par les Britanniques, puis les Allemands en juillet dernier (lire : Vers une opération maritime combinée franco-germano-britannique dans le détroit d’Ormuz. Les discussions continuent). Mais Londres comme Berlin avaient jeté l’éponge. Finalement c’est Paris qui a repris le gant, donnant officiellement le ‘la’ en novembre (lire : L’opération dans le détroit d’Ormuz refait surface. Les Français à la manœuvre), soutenu par plusieurs pays nordiques… Comme quoi rien n’est impossible

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Lire : Jeannette Seppen nommée haut représentant civil de l’EMASOH

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Sept véhicules remis aux forces mauritaniennes

Tue, 25/02/2020 - 13:05

(B2) La commissaire européenne Jutta Urpilainen, chargée des ‘Partenariats internationaux’, va remettre officiellement à Nouakchott (Mauritanie), ce mardi (25 février), les clés de sept véhicules blindés au bataillon mauritanien de la Force conjointe du G5 Sahel.

Cela fait partie du lot de 46 véhicules fournis par l’Union européenne. D’autres avaient déjà été fournis au Mali en janvier (lire : 13 véhicules blindés pour les deux bataillons maliens du G5 Sahel). La remise a été faite symboliquement alors que les chefs d’État du G5 Sahel sont réunis en sommet dans la capitale mauritanienne et qu’un exercice multinational bat son plein.

Un exercice multinational en cours

Cet exercice, entamé le 17 février 2020, réunit les forces de la région. Il réunit environ 1600 militaires issus de 34 pays africains et occidentaux et devrait prendre fin le 28 février 2020. Au menu, diverses manœuvres axées sur les reconnaissances de points suspects, ou contrôle d’axes routiers. Y prend part notamment le bataillon autonome des forces spéciales selon les FAMA.

(NGV)

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Quand Tintin Michel se balade, le Conseil européen trinque

Mon, 24/02/2020 - 20:01

(B2) L’échec du sommet européen de jeudi et vendredi sur le cadre budgétaire 2021-2027 est surtout le fait des divisions des ’27’. C’est certain. Personne n’avait vraiment envie d’un compromis. Ni les radins ni les dépensiers. Mais Charles Michel a une part, non négligeable, dans ce plantage. Sa méthode de travail, sa dispersion, son manque de style ont pesé

(crédit : Conseil de l’UE)

Tintin voyage

Alors que sa nomination est actée depuis fin juin et qu’il est en poste officiellement depuis début décembre, on ne peut pas dire que le nouveau président du Conseil européen ait pris sa tâche à cœur tout de suite. Sitôt nommé, Tintin Michel part se balader. Istanbul, Le Caire, Jérusalem et Tel Aviv, Addis Abeba, Tirana et Skopje. En quelques semaines, en janvier et début février, le nombre de déplacements officiels, hors de l’UE, n’est pas négligeable.

… blablate

À chaque fois, cela s’accompagne d’une déclaration, qui enchaîne des phrases types, plutôt banales. Même les communiqués du SEAE (le service diplomatique européen), pourtant taillés au cordeau, où chaque mot est soupesé à l’aune des diplomaties nationales, en disent davantage. Et si l’écrit collectif est trop succinct, le Haut représentant de l’UE, Josep Borrell, au langage plutôt franc, permet d’avoir un langage autrement plus clair et direct, tout en restant diplomatiquement correct.

… et perturbe

Charles Michel ne s’arrête pas là. Il use de son téléphone. Il appelle le président iranien Rohani à qui il parle accord sur le nucléaire iranien (JCPOA), position dans le Moyen-Orient, etc. Quelques jours plus tard, juste avant la conférence de Berlin, il téléphone au dirigeant russe V. Poutine pour parler, là encore, d’un peu tout (Libye, Moyen-Orient, Ukraine). Et, là encore, il le fait savoir. Car la diplomatie de ‘Tintin Michel’ semble davantage axée sur la volonté de se faire valoir, que sur celle d’apporter une ‘vraie’ valeur ajoutée (1).

Le diplomate débutant

Cela fait grincer un peu des dents, dans les couloirs européens. Du côté des diplomates expérimentés, on juge ces prises de position plutôt inutiles au mieux, et intempestives. « C’est l’enthousiasme des débuts » nous glisse-t-on. Du côté russe, on rigole, sachant comment faire vibrer la fibre ‘vanité’ de l’ancien Premier ministre belge. Ce qui n’était pas trop possible avec son prédécesseur, Donald Tusk…

Est-ce le rôle du président du Conseil européen ?

Si on interroge un diplomate européen, il vous répondra : oui, sans ambage.

Un rôle fixé par le Traité

De par le Traité, le président du Conseil européen a un rôle de représentation extérieure (2). Mais, il faut aussi le préciser, le traité considère cette fonction comme secondaire par rapport au rôle de présider, d’animer, de préparer les réunions du Conseil européen, et surtout d’assurer « la cohésion » du Conseil (3). Sur le dossier ‘Moyen-Orient’, malgré tous les efforts, deux voix dissonantes se font entendre (cf. encadré). Fait regrettable…

En étroite liaison avec le chef de la diplomatie européenne

Cette fonction de relations extérieures doit être assurée en étroite liaison avec le Haut représentant qui est, lui, le véritable chef de la diplomatie européenne. À lui, au jour le jour, la présence sur tous les dossiers chauds du moment, en particulier dans les zones de crise. De même que l’autorité sur les délégations de l’UE, la rédaction des télégrammes diplomatiques, comme la présidence des réunions des ministres des Affaires étrangères. La liaison avec le Haut représentant ne semble pas avoir été complètement effective.

Une parole précieuse à ne pas gaspiller

Cela ne veut pas dire que le président du Conseil européen n’a pas droit à la parole et que sa parole extérieure n’est pas importante. Mais elle ne doit pas être gaspillée. Elle est très précieuse notamment pour négocier avec les partenaires stratégiques, pour assurer la présence dans les grandes enceintes internationales, type G7 et, surtout, pour maintenir l’unité sur les grands sujets de politique étrangère. Malheureusement ce rôle là aussi est raté (cf. encadré).

Un oubli des priorités

En inversant les priorités, le président du Conseil européen a sans doute commis une erreur de débutant et surestimé ses forces.

Une certaine impréparation

Charles Michel avait une tâche importante : trouver un accord sur le cadre budgétaire futur de l’Union européenne. Une tâche délicate, ardue, qui requerrait une présence de tous les instants. Les positions très éloignées, durcies par le temps, méritaient un travail acharné. Le sommet raté de jeudi et vendredi l’a prouvé. Cet échec est aussi celui d’une certaine impréparation. Trouver un compromis ne se fait pas avec quelques vidéos conférences ou visites aux chefs de gouvernement ou d’État.

Adopter la méthode Barnier

Cela nécessite non seulement de voir chacun des protagonistes, mais aussi de visiter chacun des parlements, de rencontrer les groupes socio-économiques, de comprendre les tenants et aboutissants de chaque État, pour arriver à les faire fléchir, et amender la position. Un travail de bénédictin, qu’a mené par exemple Michel Barnier sur le Brexit (avec succès). C’est autrement moins glorieux que d’aller se balader dans quelques capitales du Moyen-Orient, des Balkans, ou d’Afrique. C’est vrai. Mais c’est le ‘job’.

Une erreur de jeunesse

En pensant se dispenser d’un tel travail, Charles Michel a surestimé sa force de conviction. Croire que quelques coups de fils, de longues discussions en bilatérale et qu’une négociation au ‘finish’, à la Belge, pouvait marcher était un pari. Sans une préparation sérieuse en amont, le pari était très risqué. Tel le jeune cadre dynamique à qui on offre tout d’un coup un ‘pass unlimited’, Charles Michel s’est cru autorisé à se projeter sous les ‘sunlights‘ pour pouvoir prétendre régler les problèmes du monde. C’est un peu présomptueux.

Un trio directorial qui a dû mal à trouver son style

Or l’actuel président du Conseil européen n’a ni l’expérience de son compatriote Herman Van Rompuy (qui la jouait discrète) ni la force et l’aura (il faut le reconnaître) du Polonais Donald Tusk. Deux personnalités qui l’ont précédé à ce poste, chacune avec son style. Charles Michel doit encore prendre ses marques. Il n’est pas le seul. Les premiers pas de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sont aussi décevants. Le seul à tirer son épingle du jeu aujourd’hui est le ‘vieux’, Josep Borrell. Avoir deux maillons faibles sur trois, qui se ‘tirent la bourre’, au lieu de marcher, main dans la main, c’est dommage. Au moment où, plus que jamais, l’Europe a besoin de leadership, c’est une erreur.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Un rôle limité dans l’unité européenne

N’en déplaise ce qu’aime à dire l’entourage du président du Conseil européen, Charles Michel (n’)a (pas) forcé l’unité européenne face au au plan américain pour la paix entre Israël et la Palestine. Ce n’est pas lui qui a été le principal artisan du rassemblement.

Le premier communiqué publié très vite dès la publication du plan US, ‘au nom des 28’ (le Royaume-Uni était encore membre), était un communiqué d’attente et de rappel de la position européenne. Le minimum syndical européen (lire : Le plan de paix US pour le Moyen-Orient accueilli avec prudence par les Européens).

Mais l’unité apparente s’est très vite fractionnée. Et il n’a pas été possible de répéter l’exercice quelques jours plus tard. Ce qui a obligé le Haut représentant de l’UE à faire un communiqué en son nom propre (soutenu par une majorité de l’UE) et non au nom de l’Union comme espéré. La République tchèque et surtout, la Hongrie, avec un déplacement à Washington et une déclaration tonitruante de son ministre des Affaires étrangères, a fait savoir publiquement son désaccord avec la position commune (lire : Le plan de paix américain pour le Moyen-Orient en infraction du droit international dénonce l’Union européenne).

  1. On sent comme une volonté chez Charles d’égaler le père. Un complexe d’Oedipe mal digéré peut-être. Louis Michel, ancien ministre des Affaires étrangères de Guy Verhofstadt, ancien commissaire européen chargé du Développement, en connaissait un rayon au niveau international.
  2. « Le président du Conseil européen assure, à son niveau et en sa qualité, la représentation extérieure de l’Union pour les matières relevant de la politique étrangère et de sécurité commune, sans préjudice des attributions du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. » (article 15.6 TUE, 1er alinéa)
  3. « Le président du Conseil européen : a) préside et anime les travaux du Conseil européen; b) assure la préparation et la continuité des travaux du Conseil européen en coopération avec le président de la Commission, et sur la base des travaux du Conseil des affaires générales; c) œuvre pour faciliter la cohésion et le consensus au sein du Conseil européen; d) présente au Parlement européen un rapport à la suite de chacune des réunions du Conseil européen. » (article 15.6 TUE, 2e alinéa)

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Combien de morts par IED au Mali ces dernières années

Sat, 22/02/2020 - 14:23

(B2) La question a été posée à la Chambre des députés (belge) et la réponse fournie par le ministre des Affaires étrangères et de la défense, Philippe Goffin, le 22 janvier dernier.

Fouille anti-IED par les militaires de l’opération Barkhane (crédit : EMA / DICOD avril 2019 – Archives B2)

593 personnes on été victimes des suites d’engins explosifs artisanaux (IED) au Mali en 2018 et 459 –dont 137 morts – en 2019.

La MINUSMA a eu 93 victimes – dont 8 morts – en 2018 et 49 – dont 5 morts – en 2019.  Les forces de sécurité maliennes ont eu 187 victimes en 2018 et 148 en 2019.

Les autres forces présentes ont eu au total 68 victimes en 2018 et 42 en 2019. Les troupes françaises de l’opération Barkhane ont perdu 27 militaires entre 2013 et fin 2018. Les IED ont causé la mort de sept militaires français.

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Sur mer, la coopération européenne fonctionne. Je le constate tous les jours (Amiral Lozier)

Fri, 21/02/2020 - 14:20

(B2 à Brest) Du Golfe de Guinée, avec la piraterie, à l’Arctique, avec l’ouverture de la route de la soie polaire, en passant par la lutte anti-pollution dans le Golfe de Gascogne ou la protection des sous-marins nucléaires de regards trop curieux, le vice-amiral d’escadre Jean-Louis Lozier ne manque pas de champs d’action

L’homme a trois casquettes, une civile et deux militaires (cf. encadré). Comment ne pas aborder tous les rôles.

La coopération européenne fonctionne bien aujourd’hui ?

Oui. Quand le CONRO [cargo porte-conteneurs-roulier] Grande America a coulé dans le Golfe de Gascogne, et que j’ai déclenché les opérations de gestion de crise, j’ai pu bénéficier rapidement des moyens anti-pollution espagnols. Facilement. Un peu comme si j’appelais mon collègue de la préfecture maritime de Méditerranée ! Nous avons une collaboration ancienne, qui a fait ses preuves, avec le ‘Biscaye plan‘ (1). La demande de soutien s’est faite directement entre nos organisations respectives, sans nécessiter d’accord politique préalable. Nous avons ensuite coordonné nos survols pour optimiser la détection des nappes de polluants. Leur radar était par exemple plus performant à certains moments du jour que les nôtres. On les a privilégiés à ce moment-là. Nous avons une coopération semblable avec l’agence européenne de sécurité maritime (l’EMSA basée à Lisbonne), qui fonctionne aussi très bien. Nous avons pu avoir deux moyens anti-pollution supplémentaires. Affrétés et financés par l’Union européenne, l’un basé à Vigo et l’autre à Brest, ils ont été déployés en moins de 24 heures. Une véritable opération européenne en fait !

Pendant ce temps, d’autres navires en profitent pour dégazer ?

Les temps ont changé. Nous avons désormais les moyens de surveiller plusieurs « feux » à la fois, grâce justement à cette coopération européenne. Nous bénéficions de produits satellitaires appelés Cleanseanet, fournis par la société CLS, et financés par l’EMSA. Des moyens très utiles pour repérer les pollutions. Ces clichés satellitaires nous permettent d’avoir une première alerte. Ils nous permettent de ne déployer qu’à bon escient nos moyens. On envoie un avion pour affiner la détection et agir ensuite.

Et si la même chose se passe en Espagne ?

On répondra bien évidemment présent ! Les Français seront là, demain comme par le passé, aux côtés de nos amis espagnols.

C’est le naufrage du Prestige qui a entraîné cette réorganisation ?

L’organisation espagnole a été revue après le Prestige. En effet. C’est un peu leur Amoco Cadiz (2). Une catastrophe qui nous avait obligé, côté français, à renforcer notre organisation. À chaque crise maritime, nous nous complétons notre dispositif et rendons compte que la coopération est vitale.

On est à Brest, à quelques encâblures de l’Île Longue, où est basée la force nucléaire sous-marine. C’est de votre ressort ?

Non. Le centre de commandement de la force océanique stratégique, qui est situé plusieurs dizaines de mètres sous nos pieds, dans le ‘granit’, dépend d’ALFOST [l’Amiral commandant la Force océanique stratégique]. Mon rôle, c’est d’assurer la protection des SNLE [sous-marin nucléaire lanceur d’engins] lors de leurs manœuvres d’entrée et de sortie de la base de l’île Longue, jusqu’à leur plongée et leur dilution dans les profondeurs. C’est ma responsabilité première. Pour cela, je dispose de chasseurs de mines qui garantissent la sûreté des chenaux d’accès, de frégates anti sous-marines ou de moyens aériens dédiés à la lutte anti sous-marine.

Les Russes sont là ?

On a assisté effectivement depuis plusieurs années à une recrudescence de l’activité sous-marine russe en Atlantique. Il ne faut pas exagérer le phénomène. Mais, avec nos alliés, nous devons rester vigilants. Nous les surveillons de près.

Votre commandement s’étend jusqu’à l’Arctique. Avec la fonte des glaces, la donne change, cela devient un passage ?

En effet, le Rhône [bâtiment de soutien et d’assistance métropolitain] a d’ailleurs franchi en septembre 2018 le passage du Nord-Est allant de la mer de Norvège au détroit de Bering. C’est une zone stratégique et qui va le devenir de plus en plus. Ce n’est pas ma zone de responsabilité en termes de sauvetage en mer, mais s’il arrivait un problème à un navire français, on pourrait difficilement ne rien faire. Il faut donc tout envisager.

Il y a des différences par rapport à l’Atlantique ?

C’est un environnement très particulier. Par exemple, dans un fjord, les transmissions ne fonctionnent pas bien entre les avions et les bateaux. Pour bien appréhender le jour où un incident arrivera, il faut s’y déployer et s’y entraîner régulièrement, apprendre en quelque sorte. Depuis deux ans, nous participons ainsi activement à un exercice de sauvetage en mer au large du Groenland avec la marine danoise.

L’Arctique attire les Chinois également ?

Clairement, le grand Nord est une zone d’intérêt pour tous, France et Européens y compris. Les Chinois s’y implantent. Le transporteur maritime chinois COSCO a annoncé qu’il emprunterait cette voie maritime. Ses investissements en Islande, Norvège, ou au Groenland ne sont pas un hasard. La « route de la soie » polaire s’ouvre.

Autre zone d’intérêt, le Golfe de Guinée. Malgré tous les efforts, les actes de piraterie ou de brigandage se multiplient ?

C’est vrai. Mais cela progresse. Les pays africains s’équipent, se coordonnent. Il y a des opérations où des pirates sont mis en échec. Ce qui s’est passé avec le G-Dona 1 récemment (3), n’aurait pas pu se réaliser il y a cinq ans. Le MDAT-GoG (Maritime Domain Awareness for Trade – Gulf of Guinea), qui fait partie du centre d’expertise de sécurité maritime, le MICA Center, a été contacté rapidement. Le COM [Centre des opérations maritimes] du Togo a envoyé un patrouilleur. Les pirates ont été stoppés, arrêtés et ramenés à Lomé. Depuis le lancement du processus de Yaoundé [2013], on sent chez nos partenaires africains une réelle volonté de prendre en main leur sécurité maritime, de mieux partager l’information, de se coordonner et d’intervenir rapidement si nécessaire. C’est un changement de paradigme !

Pourquoi n’a-t-on pas mis en place une opération du type Atalanta ?

On n’est pas du tout dans la même situation à tous les plans, politique comme opérationnel. En Somalie, il y avait un État failli au lancement de l’opération. Ici, il y a 19 États souverains et une volonté politique de faire cesser cette insécurité maritime. Dans la Corne de l’Afrique, il y a un courant de navires (marchands) qui vont d’Ouest vers l’Est, et vice-versa. Ici, il y a de multiples ports d’arrivées, de départ, des plateformes pétrolières, etc. Enfin, dans le Golfe de Guinée, la plupart des incidents ont lieu dans les eaux territoriales. Le brigandage prend de plus en plus le pas sur la piraterie proprement dite (4). Les moyens d’action ne peuvent être les mêmes…

Vous en êtes sûr ?

Imposer une opération internationale serait contre-productif. Cela entraînerait les États à s’en désintéresser ou à rejeter l’opération, voire les deux en même temps. Et les Européens sont déjà là. Un patrouilleur portugais est en permanence à Sao Tomé. Nous avons l’opération Corymbe. L’Espagne déploie aussi régulièrement un navire dans la zone. Nous intégrons les équipes. À bord du BCR Somme, dernièrement, il y avait une équipe portugaise. C’est comme çà qu’on crée des réflexes de coopération européenne. Et avec les programmes GoGIN et Swaims (5), on est bien en complémentarité entre l’action des États et de l’UE.

Que faut-il faire de plus ?

Persévérer. On n’arrête pas des formes de criminalité, souvent endémiques, de cette ampleur en quelques années. Il faut un investissement tenace sur le temps long. On doit continuer de soutenir le processus de Yaoundé. Les marines africaines doivent continuer de renforcer leurs moyens de surveillance et d’intervention aéromaritimes. Les corpus juridiques doivent s’adapter, pour arriver à poursuivre les contrevenants. Tout comme on le fait en Europe. Surveiller, intervenir et dissuader par de lourdes sanctions sont indissociables pour lutter contre l’insécurité maritime.

Vous employez souvent le mot ‘européen’, l’Europe c’est indispensable ?

Cela fait partie de mon travail quotidien. J’héberge à quelques pas de mon bureau le MICA Center où travaillent des militaires français, espagnols, portugais et belges. Le fait de travailler ensemble, de faire des exercices ensemble crée des habitudes. La coopération devient naturelle. C’est important. L’Europe ne doit pas rester une idée virtuelle. On doit toujours faire du concret. Il faut que les Européens prennent confiance en eux.

(Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde)

Les trois casquettes de l’amiral

L’amiral Lozier a trois casquettes. Première casquette : celle, civile, de préfet maritime. Il coordonne l’action de l’État en mer dans trois secteurs : la mise en œuvre des actions de secours (en cas d’accident ou de catastrophe), la réglementation (prise d’arrêtés), le développement durable en mer. Deuxième casquette : militaire celle-là, il est le commandant en chef pour toutes les opérations maritimes de la Zone Atlantique, qui s’étend du Sud au Nord jusqu’à l’Arctique. Troisième casquette : il commande l’arrondissement maritime Atlantique (ports militaires et soutien des forces maritimes de la région). Enfin, même s’il n’a pas de responsabilité européenne en soi, l’Amiral a une étoile de plus à son actif : l’Europe.

Entretien réalisé en face-à-face dans les locaux de la préfecture maritime de Brest en novembre 2019

  1. Signé en 1999, actualisé en 2009, le Plan Biscaye est un document opérationnel qui prévoit les modalités d’intervention conjointe entre la préfecture maritime de l’Atlantique et la SASEMAR (Sociedad de Salvamento Marítimo y Seguridad Marítima), pour le sauvetage, la lutte contre la pollution ou l’assistance à un navire en difficulté dans le golfe de Gascogne.
  2. Ce pétrolier, affrété par la société Amoco et battant pavillon du Libéria, s’échoue à proximité des côtes bretonnes, en face du village de Portsall, le 16 mars 1978. Puis il se brise en deux quelques jours plus tard. Ses 227.000 tonnes de pétrole brut s’échappent, occasionnant une marée noire restée dans les mémoires. Avec l’Erika ensuite, ce naufrage entraîne une prise de conscience et une série de modifications réglementaires en France comme au niveau européen.
  3. Attaqué par une équipe de huit pirates, dans la nuit de samedi 11 mai au dimanche 12 mai, le G-Dona 1 a bénéficié de l’intervention d’une vedette rapide et d’un patrouilleur de la marine togolaise. Huit pirates ont été interpellés, remis à la gendarmerie maritime togolaise.
  4. Les actes de brigandages ont lieu dans les eaux territoriales des États au contraire de la piraterie qui, elle, sévit en haute mer. En haute mer, tout navire d’État à le droit, et même le devoir, d’intervenir.
  5. Lancé en décembre 2016 par l’Union, le programe ‘Gulf of Guinea Inter-regional Network‘ (GoGIN) vise à améliorer la sécurité et sûreté maritimes. Le programme de ‘renforcement des systèmes de justice pénale en Afrique de l’Ouest et du Centre’ (Swaims) soutient l’élaboration d’un cadre législatif et d’une coopération juridique pour la poursuite et le jugement des crimes maritimes. Porté par l’UNODC, il est financé quasi-totalement par l’UE (5,9 millions sur un budget total de six millions €).

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Mali. Barkhane mène des opérations dans le centre autour de Mopti

Thu, 20/02/2020 - 23:58

(B2) Les militaires de l’opération Barkhane viennent de mener plusieurs actions dans le centre du Mali autour de la ville de Mopti. 50 ‘terroristes’ ont été neutralisés. Cela fragilise le dispositif selon l’armée française

Deux opérations distinctes, autour de Mopti

Ces opérations ont été menées en deux phases. La première s’est déroulée entre le 9 et le 10 février, au nord-ouest de Mopti. Des frappes aériennes de drone et de Mirage 2000, couplées à l’engagement d’hélicoptères de combat ont d’abord « permis de neutraliser une vingtaine de combattants armés. Parmi eux se trouvait un cadre de l’État islamique dans le Grand Sahara » (EIGS) indique l’état-major des armées.

La deuxième action a été menée entre le 16 et le 17 février, au sud de Mopti, dans une région où la Katiba Macina est comme un poisson dans l’eau. Cette fois, « les frappes aériennes et tirs d’hélicoptères de combat ont été accompagnés d’un assaut héliporté. Une trentaine de combattants djihadistes ont été mis hors de combat. »

Une cinquantaine de terroristes tués

En tout, ainsi ces actions — bien préparées en amont par du renseignement, permettant d’identifier avec certitude les groupes terroristes — ont permis de « neutraliser une cinquantaine de membres [de groupes terroristes], de détruire une trentaine de motos et deux pickups, et enfin de saisir de l’armement, des téléphones et du matériel électronique ». Ces deux opérations « au bilan matériel et humain très lourd, fragilisent le potentiel offensif des groupes armés terroristes dans cette région » précise-t-on à l’EMA.

(NGV)

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Les fonds européens de défense changent l’ambiance chez les industriels. On se parle !

Thu, 20/02/2020 - 20:52

(B2) Le Fonds européen de défense n’est pas encore né que certains effets commencent déjà à se faire sentir. L’ambiance change. Lors d’entretiens informels, avec certains industriels, nous avons pu nous en rendre compte

(crédit : Conference on European Space)

Le budget du Fonds européen de défense est un des points clés de la discussion aujourd’hui et demain entre les chefs d’État et de gouvernement sur le futur cadre budgétaire (MFF) pour 2021-2027. (Lire : Le Fonds européen de défense rapiécé. Est-ce grave docteur ?)

On se parle enfin !

Du fait du futur Fonds européen de défense (FEDEF), qui doit entrer en œuvre dans un an — et de son précurseur le Programme industriel de développement de la défense européenne (EDIDP) déjà en place — les industriels ont appris une chose : ils doivent coopérer. Ce n’est pas une question de volonté uniquement. C’est une obligation. Il n’y a pas d’autre moyen s’ils veulent bénéficier des subventions européennes. Et, pour cela, ils doivent dialoguer. Ce qui n’était pas vraiment tout à fait dans le karma des industriels de la défense auparavant. On se parlait, mais la méfiance était souvent là. Grâce au dialogue créé, les industriels reconnaissent l’expertise de leurs concurrents et partenaires. Ils apprennent à se faire confiance.

Le naturel change de camp

Les coopérations nationales, qui étaient encore jusqu’à peu la logique naturelle, perdent la cote. Il est impératif en effet de trouver des partenaires hors de ses frontières. Le Fonds européen défense pose en effet comme condition de réunir des entreprises de différents pays (trois au moins). Mais tout n’est pas gagné pour autant. Les plus petites entreprises doivent jouer des coudes pour s’imposer. La tentation est grande, en effet, chez les plus grosses entreprises de faire jouer leurs filiales, directes ou indirectes, déjà établies dans un autre pays pour remplir les conditions.

Des champions européens

Le risque est ainsi grand de voir les grandes entreprises continuer à gagner du terrain en formant des partenariats entre elles, au détriment des petites et moyennes entreprises (PME). Elles formeraient des champions européens, qui prendrait ‘en otage’ le marché de la défense européenne subventionné par le Fonds… sans laisser de place aux petits. Une crainte chez de nombreux industriels, mais aussi du côté des institutions européennes.

Faire que le FEDEF devienne l’affaire de tous

À la Commission européenne, on ne veut pas utiliser le terme de « champion européen », souvent très utilisé en France, pour se démarquer à l’international. L’implication des PME dans le Fonds est une « question très importante », jauge-t-on au Berlaymont (siège de la Commission). « Il faut faire en sorte que la défense européenne devienne l’affaire de tous ». Les projets candidats « devront intégrer des PME ».

Un défi : le volet acquisition

Une chose manque absolument dans le futur FEDEF : la promesse d’achat et de contrat d’État. Car si l’industrie s’engage dans le développement d’un projet sans contrat final — habituellement passé avec l’État —, ses coûts seront certes compensés par les subventions et il n’y aura pas de perte financière substantielle immédiate. Mais l’effort consacré l’empêchera de se concentrer sur une autre technologie, elle aura donc perdu des ressources et en rentabilité sur le long terme.

Le débouché des marchés de la Commission européenne 

Au cas où les États ne sauraient garantir des contrats aux industriels développant leurs programmes dans le cadre du Fonds, la Commission européenne devrait s’en charger. Elle pourrait ainsi fournir les besoins de ses différentes agences (maritimes, de pêche, de protection des frontières…). Encore faut-il qu’elle joue le jeu. À voir les marchés et tests passés par l’agence Frontex, par exemple pour un drone israélien ou le Reaper américain, on peut en douter… (1)

Vers une communautarisation de la défense européenne 

Par la création du Fonds, au travers duquel la Commission européenne finance les projets d’armement, on assiste à un transfert de l’expertise industrielle des capitales vers le Rond point Schuman. C’est lent, invisible. Mais cela ouvre certainement une porte à la communautarisation d’une relation jusqu’ici exclusivement intergouvernementale. (2)

(Aurélie Pugnet)

  1. Lire : Frontex : quels drones aériens pour surveiller les frontières maritimes ? et Les curieux achats de drones de Frontex
  2. Lire : La défense, une compétence intergouvernementale qui se communautarise ? (v2)

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Violents combats près de Zolote dans l’Est de l’Ukraine. Le cessez-le-feu bafoué

Wed, 19/02/2020 - 23:40

(B2) D’intenses combats ont eu lieu lundi 17 février aux abords de Zolote en Ukraine. Après plusieurs heures de tirs (près de cinq heures selon les observateurs), on a relevé au moins cinq morts dix blessés.

Une attaque rebelle ou une avancée ukrainienne

Selon Kiev, les forces des rebelles ont lancé une attaque sur trois fronts contre les positions ukrainiennes après un intense barrage d’artillerie qui a commencé vers 5 heures du matin (heure locale). Du côté séparatiste, on dit que « les combats ont commencé après qu’une unité militaire ukrainienne avancée ait tenté de pénétrer sur un territoire non contrôlé par le gouvernement et se soit retrouvée dans un champ de mines », rapporte Radio Free Europe. Les combats ont cessé vers 10 heures du matin « après que les séparatistes soutenus par Moscou aient demandé un cessez-le-feu pour récupérer leurs blessés et leurs morts », a indiqué le général Ruslan Khomchak, chef de l’état-major général des forces ukrainiennes.

Une violation des accords de Minsk

Quoi qu’il en soit, « ces violations du cessez-le-feu et l’usage d’armes lourdes contreviennent aux accords de Minsk et aux conclusions du sommet des chefs d’État et de Gouvernement du 9 décembre dernier » a souligné le quai d’Orsay aujourd’hui (19 février). Et la France d’appeler les parties « à la retenue, afin d’éviter toute nouvelle escalade sur le terrain ». Paris appelle notamment la Russie « à user de son influence considérable sur les formations armées qu’elle soutient pour garantir la pleine application du cessez-le-feu ».

Un incident non isolé

« Ce dernier incident n’est pas isolé », selon le Premier ministre albanais Edi Rama, qui préside actuellement l’OSCE. « Chaque jour, le cessez-le-feu est violé, malgré les engagements pris dans les accords de Minsk. […] Il est essentiel que toutes les parties concernées fassent en sorte que l’engagement en faveur d’un cessez-le-feu complet et durable devienne une réalité ».

(NGV)

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La Numancia relaie la Victoria

Wed, 19/02/2020 - 08:43

(B2) La frégate espagnole ‘Numancia’ a pris le relais ce dimanche (16 février) de sa frégate sœur ‘Victoria’ au sein de la force navale de l’Union européenne déployée au large de la Somalie (EUNAVFOR Atalanta).

(crédit : Armada espagnole)

Un nouveau commandant de la force en mars

La cérémonie a lieu au port de Djibouti. Le Victoria, rentre en Espagne. Le commandement de la force en mer reste assuré, pour l’instant, par le Commodore portugais Jose Vizinha Mirones (au titre de la 33e rotation depuis le début de l’opération en 2008). Il devrait être relayé à la mi-mars par le contre-amiral espagnol Ignacio Villanueva Serrano.

Une triple mission

La mission du ‘Numancia’ reste la même que ses prédécesseurs : lutter contre piraterie maritime et protéger les navires du Programme alimentaire mondial (PAM). Mais une mention particulière est faite par les Espagnols à la surveillance des activités de pêche au large des côtes somaliennes. Une part secondaire de l’activité de l’opération qui pourrait (peut-être) prendre de l’importance à l’avenir. Du moins on y réfléchit… Article à suivre

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Un changement de commandement pour EUNAVFOR Med (ex Sophia) n’est pas à exclure

Tue, 18/02/2020 - 15:45

(B2 – exclusif) L’opération militaire de l’UE en Méditerranée (EUNAVFOR Med) va changer de chef d’ici la fin de semaine. Une décision qui tombe à plat alors que le renouveau est à l’ordre du jour. Question sur toutes les lèvres aujourd’hui à Bruxelles : l’Italie gardera-t-elle au-delà du mois de mars le commandement de l’opération

La salle de commandement du navire espagnol Cantabria crédit : Eunavfor Med 2017)

Les ambassadeurs du comité politique et de sécurité doivent ce mercredi (19 février) valider la nomination d’un nouveau chef de l’opération Sophia (EUNAVFOR Med) de lutte contre les trafics en Méditerranée.

Un relais italien prévu

Le vice-amiral italien Fabio Agostini devrait ainsi succéder officiellement à son compatriote le vice-amiral Enrico Credendino. Ce à compter de vendredi (21 février). L’amiral, qui préside depuis le début aux destinées de l’opération, termine sa carrière militaire et pourrait pressenti pour exercer d’autres responsabilités dans les mois qui viennent (chut…). Une cérémonie officielle de passation du bâton de commandant de l’opération est d’ailleurs prévue à Rome vendredi.

Une volonté de renouveau …

Ce changement était prévu depuis bien avant qu’éclate la polémique et le veto austro-hongrois sur la nouvelle opération (comme nos lecteurs fidèles le savent déjà, lire Carnet 07.02.2020). Du coup aujourd’hui, il tombe quelque peu à plat. Cette nomination en elle-même est un peu bizarre. Car tous les paramètres de l’opération EUNAVFOR Med doivent être revus. Pression politique oblige. Le plan d’opération, les règles d’engagement, la zone d’opération, vont être revus. Le nom de l’opération va être changé. Dans ce maëlstrom de renouveau, la question de changer le quartier général (basé à Rome) ou le commandement de l’opération qui appartient aux Italiens se pose de façon très concrète.

… qui pourrait emporter le nouveau chef

Chacun s’interroge : l’amiral fera-t-il juste un tour, pour quelques semaines ? La question est réellement posée, comme nous l’ont confirmé plusieurs sources diplomatiques et militaires. La porte-parole du SEAE n’a pas dénié ce point. « La nomination prévue est [bien] pour l’opération Sophia » a précisé ainsi Virginie Battu lors du point de presse de midi, interrogée par B2 ce mardi (18 février). « Dans les éléments de l’accord politique – intervenu hier entre les ministres (lire : Ne m’appelez plus Sophia ! Les points clés de la nouvelle opération de l’UE en Méditerranée) —, on ne parle plus de l’opération Sophia. Au-delà du commandement, [plusieurs points doivent être revus à commencer par le mandat ». Et d’ajouter : « L’opération Sophia court jusqu’à fin mars. Je ne préjugerai pas de la suite. On parle bien d’une nouvelle opération. »

Conclusion : un changement (peut-être) nécessaire

Il parait difficile à l’Italie de conserver à la fois le quartier général basé à Rome et le commandement de l’opération.

Une question très politique

Ce serait à l’inverse de l’effet recherché en matière politique qui consiste à faire table rase du passé pour redémarrer à zéro, une « nouvelle opération ». Même si chacun est conscient que le mot ‘nouvelle’ est surtout là pour justifier auprès des opinions publiques autrichienne et hongroise surtout, mais italienne également, le léger revirement de leurs gouvernements, des changements autres que cosmétiques sont nécessaires.

Changer de QG : plus délicat en un temps court

Changer le quartier général nécessite du temps — ne serait-ce que pour mettre en place au niveau technique les dispositifs. Maintenant si on demande aux militaires, ils savent faire avec promptitude, les deux doigts sur le béret du marin. Deux pays nécessitent de cette capacité d’adaptation, selon moi : 1° l’Espagne qui a déjà un quartier général dédié à une opération maritime, à Rota (lire : Au QG de l’opération anti-piraterie Atalanta à Rota (Cadiz)). 2° la France qui peut rapidement monter en puissance. Deux autres quartiers généraux existent dans l’Union européenne : Potsdam en Allemagne et Larrissa en Grèce. Mais le temps imparti pour monter en puissance un QG parait trop court. Pour démarrer fin mars, il aurait fallu déjà prendre les dispositions aujourd’hui.

Changer de commandant d’opération : pourquoi pas

Reste le changement de commandant. C’est ce qui est de plus facile au niveau symbolique. Et c’est dans cette optique que les regards se tournent. En la matière plusieurs pays pourraient prétendre au titre : l’Espagne ou la Grèce par exemple (qui n’a pas de commandement d’opération), voire l’Allemagne ou la France. Et, pourquoi pas une femme commandante pour l’opération. Cela changerait véritablement non ?

 

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Ne m’appelez plus Sophia ! Les points clés de la nouvelle opération de l’UE en Méditerranée

Mon, 17/02/2020 - 18:22

(B2) Les ministres des Affaires étrangères de l’UE ont fini par tomber d’accord*, ce lundi (17 février), sur la relance de l’opération maritime européenne en Méditerranée centrale

L’Autriche participera-t-elle à la nouvelle opération ? Ce serait le minimum. Même si sa marine reste limitée à couvrir le Danube (ici le patrouilleur Niedersachsen, crédit : Armée autrichienne)

Le retour des navires en mer

L’obstruction austro-hongroise a fini par être vaincue au prix d’une série de changements apportés, notamment sur la zone d’opération et les règles d’engagement (lire : La revanche de Piave. L’Autriche-Hongrie bloque. L’opération Sophia dans l’impasse). Ce retour des navires en mer intervient, après un an d’interruption de l’activité navale, et au terme de nombre de discussions et tractations entre ambassadeurs, voire entre ministres par téléphone, ces derniers jours, y compris au plus haut niveau lors de la conférence de sécurité de Munich (article à suivre).

L’embargo sur les armes en focus

L’objectif de l’opération est redéfini. Ou plutôt ses objectifs sont re-hiérarchisés. Elle sera centrée avant tout sur le contrôle de l’embargo sur les armes. Les objectifs de lutte contre le trafic des êtres humains et la formation des garde côtes et de la marine libyenne devenant secondaire.

La zone d’opération revue

Les navires européens seront déployés davantage sur la côte Est de la Libye, non loin de l’Égypte. Pour contrôler l’embargo sur le contrôle des armes, c’est plus justifié. D’une part, cela permet de contrôler les navires venant de l’Est de la Méditerranée : le canal de Suez pour les navires émiratis ou jordaniens qui approvisionnent le clan Haftar ou Turquie qui soutien Tripoli. De plus, avoir une présence non loin de Benghazi (contrôlée, justement, par le général Haftar) n’est pas non plus inutile.

Tous les moyens mobilisés

L’opération sera menée avec tous les moyens possibles : navals, aériens, satellitaires, voire sous-marins, tous les autres outils d’information et de renseignement. Les États se sont tous engagés à contribuer d’une manière ou d’une autre.

Le ‘pull factor’, clé de l’accord

Une clause de rappel a été apposée, permettant de convaincre les Autrichiens. Le processus de trafic des migrants sera observé de près. Si on détecte une augmentation supplémentaire du trafic dans une zone — ce que les spécialistes appellent le ‘pull factor’ (effet d’attraction) —, alors les moyens navals seront retirés de la zone concernée. Ils pourront opérer dans une autre zone au besoin, ou rentreront au port. Ce sera au commandant d’opération de le décider — ou aux autorités politiques (les ambassadeurs de l’Union) — selon le cas.

Le nom de l’opération changé

« Sophia fait désormais partie de l’histoire ancienne », a annoncé fièrement Alexander Schallenberg, le ministre autrichien des Affaires étrangères à la sortie de la réunion. L’opération ne s’appelle plus Sophia. Un nom donné en l’honneur d’un bébé né à bord d’un des navires de l’opération et trop connoté ‘accueil des réfugiés’ pour plusieurs pays. Elle continuera d’être nommée en revanche EUNAVFOR Med accolé avec le nom d’un Dieu grec de la mer qui a eu une nombreuse progéniture. Reste à finaliser tous les détails.

Une nouvelle décision à écrire d’ici le 23 mars

Les spécialistes militaires et ambassadeurs de l’UE sont appelés dès demain à plancher pour tout préciser. Délai donné : la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères, le 23 mars. Juste à temps avant la date-limite inscrite dans l’actuel mandat de Sophia : le 31 mars.

(Nicolas Gros-Verheyde)

*Les ministres des Affaires étrangères sont tombés d’accord sur 9 points, qui sont les suivants :

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Des actes de brigandage courants dans les ports du Nigeria

Mon, 17/02/2020 - 06:15

(B2) L’attaque d’un porte-conteneurs au large des côtes nigérianes n’est pas un acte isolé. Les actes de piraterie ou de brigandage — on ne parle par de piraterie dans les eaux territoriales — sont relativement courants dans cette zone du Golfe de Guinée (Lire : Deux incidents au large du Nigeria).

Les ports nigérians sont particulièrement prisés des pirates. On recense ainsi trois autres incidents, selon les sources maritimes, dans les huit jours précédents.

Trois attaques dans des ports nigérians

Deux voleurs dans un bateau montent à bord, samedi (1er février) d’un pétrolier qui a jeté l’ancre dans l’anse de Lagos au Nigeria. Ils tentent de s’emparer du matelot de service qui effectue une ronde de routine. Mais celui-ci réussit à s’échapper. L’alarme est donnée. Les voleurs s’enfuient sans demander leur reste et sans rien voler. La marine nigériane envoie un patrouilleur sur les lieux.

Le matelot de garde d’un navire de ravitaillement offshore à quai dans le port de Onne (le second port principal du Nigeria, près de Port Harcourt, bordé par l’île de Bonny) remarque dans la nuit, mercredi (29 janvier) une personne non autorisée sur le pont. Alarmé et entendant l’équipage alerté, la personne s’est échappée avec les biens volés du navire. L’incident a été signalé aux autorités portuaires.

L’équipage de service à bord d’un pétrolier ancré dans l’anse de Lagos (au Nigeria), effectuant des opérations de transfert de navire à navire (STS), remarque au petit matin du samedi (25 janvier) une personne non autorisée près du gaillard d’avant. L’alarme est déclenchée. Voyant l’équipage alerté, la personne saute par-dessus bord et s’échappe avec ses complices dans un bateau en bois. Un patrouilleur naval arrive sur les lieux, et commence les repérages autour du pétrolier.

Un autre incident au large du Bénin

A environ 73 nautiques au sud de Cotonou, Bénin, le 19 janvier, durant la nuit, deux pirates armés de fusils AK47 arrivent à monter à bord d’un porte-conteneur Atlantic Discoverer. Ils sont repérés par l’homme de quart. L’alarme est déclenchée, les feux de pont éteints, les logements verrouillés. Les moteurs sont poussés et le navire se dirige à vitesse soutenue vers Tema, au Ghana. La marine ghanéenne est avertie et invitée à monter à bord pour fouiller le navire à son arrivée. Tout l’équipage est sain et sauf. Rien n’a été déclaré volé, selon les sources maritimes.

(NGV)

Lire aussi : Où agissent nos chers pirates des mers ? Selon quelles méthodes ? Quand ? Toutes les réponses … ou presque

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Un porte-conteneurs allemand attaqué au large du Nigeria. La marine portugaise intervient

Sun, 16/02/2020 - 23:55

(B2) Le Maersk Tema, un porte-conteneurs allemand, a été attaqué vendredi (14 février) au large des côtes nigérianes, par un groupe pirate composé de deux petits bateaux rapides à moteur. Deux pirates ont réussi à monter à bord, selon le bulletin maritime.

Un signe clair d’attaque pirates

Selon le suivi AIS, relevé par le site Maritime Executive, le Maersk Tema (qui bat pavillon des iles Marshall) filait vendredi matin à 20 nœuds au large de São Tomé dans le Golfe de Guinée. Mais vers 8h05 GMT, à une position d’environ 100 nautiques au nord-ouest de São Tomé, sa vitesse est tombée à 3,5 nœuds puis quasiment zéro dérivant ensuite à un demi nœud le reste de la journée. Un signe très clair, selon un spécialiste consulté par B2 d’un problème à bord. « Sauf avarie ou panne de machine, on peut alors soupçonner un acte de piraterie ».

L’intervention de la marine portugaise et nigériane

Les 21 membres de l’équipage de ce navire, ont suivi les procédures d’urgence, et se sont mis à l’abri dans la citadelle à l’intérieur du navire. La marine nigériane alertée, renforcée par un navire portugais, sont intervenus faisant fuir samedi (15 février) les pirates. Le porte-conteneurs — qui appartient à Bernhard Schulte Ship et est exploité par Peter Doehle Schiffart —, a repris sa route vers Lagos au Nigeria, escorté par le patrouilleur nigérian. On ne connait pas le sort des pirates, toujours recherchés.

Un temps d’intervention long

Il a fallu près de 15 heures après l’alerte au patrouilleur nigérian SVS Teach pour rejoindre le navire attaqué, rejoint quelques heures plus tard, par un navire de la marine portugaise. Point qui étonne Mikhail Voytenko tenancier du ‘Maritime Bulletin’ « Plusieurs bateaux ou navires de patrouille nigérians étaient beaucoup plus proches du porte-conteneurs en détresse, mais ils se sont tenus à leur mission et n’ont pas répondu ».

NB : même si un dysfonctionnement n’est pas à exclure, ce point peut aisément s’expliquer. L’intervention sur un groupe pirates ne peut se faire par n’importe par n’importe quel navire ni n’importe quelle équipe. Il faut du personnel un peu spécialisé, entraîné et armé dans cet objectif.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Des actes de brigandage courants dans les ports du Nigeria

Les actes de piraterie ou de brigandage — on ne parle par de piraterie dans les eaux territoriales — sont relativement courants dans cette zone du Golfe de Guinée (Lire : Deux incidents au large du Nigeria). Le port de Lagos représente On recense ainsi trois autres incidents, selon les sources maritimes, dans les huit jours précédents.

Deux voleurs dans un bateau montent à bord, samedi (1er février) d’un pétrolier qui a jeté l’ancre dans l’anse de Lagos au Nigeria. Ils tentent de s’emparer du matelot de service qui effectue une ronde de routine. Mais celui-ci réussit à s’échapper. L’alarme est donnée. Les voleurs s’enfuient sans demander leur reste et sans rien voler. La marine nigériane envoie un patrouilleur sur les lieux.

Le matelot de garde d’un navire de ravitaillement offshore à quai dans le port de Onne (le second port principal du Nigeria, près de Port Harcourt, bordé par l’île de Bonny) remarque dans la nuit, mercredi (29 janvier) une personne non autorisée sur le pont. Alarmé et entendant l’équipage alerté, la personne s’est échappée avec les biens volés du navire. L’incident a été signalé aux autorités portuaires.

L’équipage de service à bord d’un pétrolier ancré dans l’anse de Lagos (au Nigeria), effectuant des opérations de transfert de navire à navire (STS), remarque au petit matin du samedi (25 janvier) une personne non autorisée près du gaillard d’avant. L’alarme est déclenchée. Voyant l’équipage alerté, la personne saute par-dessus bord et s’échappe avec ses complices dans un bateau en bois. Un patrouilleur naval arrive sur les lieux, et commence les repérages autour du pétrolier.

Un autre incident au large du Bénin

A environ 73 nautiques au sud de Cotonou, Bénin, le 19 janvier, durant la nuit, deux pirates armés de fusils AK47 arrivent à monter à bord d’un porte-conteneur Atlantic Discoverer. Ils sont repérés par l’homme de quart. L’alarme est déclenchée, les feux de pont éteints, les logements verrouillés. Les moteurs sont poussés et le navire se dirige à vitesse soutenue vers Tema, au Ghana. La marine ghanéenne est avertie et invitée à monter à bord pour fouiller le navire à son arrivée. Tout l’équipage est sain et sauf. Rien n’a été déclaré volé, selon les sources maritimes.

(NGV)

Lire aussi : Où agissent nos chers pirates des mers ? Selon quelles méthodes ? Quand ? Toutes les réponses … ou presque

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[Evros, porte de l’Europe 8] Sharifi G. voulait rejoindre sa soeur en Allemagne, il a été emprisonné en Grèce

Sun, 16/02/2020 - 15:30

(B2) Sharifi G. vient de passer six mois dans le camp de réfugiés d’Athènes. Il a préparé les 85 euros qui doivent lui permettre d’avoir des papiers pour rejoindre sa soeur, en Allemagne

Sharifi G, devant l’entrée du camp de réfugiés d’Elaionas, à Athènes (© B2/Emmanuelle Stroesser)

C’est en Allemagne que Sharif voulait aller lorsqu’il a été arrêté à Alexandroupolis. Il venait de passer la frontière terrestre avec la Turquie, le long du fleuve Evros. Il avait quitté l’Afghanistan plusieurs mois de cela déjà. Car après être parti d’Afghanistan, il a d’abord fait escale en Iran, trois mois. Mais l’avenir n’était pas là non plus pour lui. Il a continué vers la Turquie, puis la Grèce. Il ne livre pas tous les détails de la traversée, cela ne se fait pas à visage découvert. Il accepte d’être pris en photo et de raconter.

« Lot of walk »

Des chaussures abandonnées dans le camp (© B2/Emmanuelle Stroesser)

Passé la frontière entre la Turquie et la Grèce, il a marché jusqu’à Didymoteicho, en redescendant le long du fleuve Evros. « Beaucoup de marche (Lot of walk) » glisse-t-il. Puis il s’est arrêté à Alexandroupolis, avant de quitter la région de la Thrace pour la Macédoine orientale. Il a rejoint alors Thessalonique, deuxième plus grande ville de Grèce. Il vivait en squatt.

La Grèce comme escale

Les barbelés du camps d’Athènes (© B2/Emmanuelle Stroesser)

Il n’avait pas de visa en règle, donc il a été arrêté par les policiers. Il a fait quatre mois de détention. « Et puis j’ai passé un entretien et il était positif », explique-t-il. Sa situation administrative n’est pas très claire. Mais lui, assure qu’il devrait avoir un passeport dans quelques semaines. Alors, il reprendra la route pour Francfort, en Allemagne. Il veut y rejoindre sa grande soeur. Il pense pouvoir trouver du travail, avec son niveau d’ingénieur.

Cinq dans un container

L’entrée du camp (© B2/Emmanuelle Stroesser)

Il est 17 heures, comme lui, beaucoup de réfugiés rentrent. Ils regagnent leurs containers. Les hommes s’y serrent par cinq. Les familles par deux. Sharif ne se plaint pas. Pour manger et le reste, le pécule mensuel de la « UN Card » permet de survivre. C’est quand l’électricité saute, comme durant cinq jours mi-janvier, que la vie au camp devient difficile. Pour le reste, il a vu visiblement bien pire.

Au large du capitole

Des enfants dans le camp d’Athènes (© B2/Emmanuelle Stroesser)

Le camp d’Athènes est à cinq minutes à pied du métro d’Elaionas, un quartier périphérique d’Athènes. La route qui y mène est jonchée de détritus, bordée d’entrepôts de récupération en tous genres (vêtements, ferrailleurs). Le camp s’aperçoit à un jet de pierres d’une décharge à ciel ouvert. L’étranger curieux est vite repéré. Les gardiens à l’entrée veillent à ce qu’aucun n’entre. Pas même pour regarder. Le ton monte. Circulez.

(Emmanuelle Stroesser)

Tous les articles de notre reportage [Evros, porte de l’Europe]

  1. Le fleuve Evros, l’autre porte d’entrée des réfugiés vers l’Europe
  2. La Turquie tire les ficelles aux frontières extérieures de l’UE (G. Koumoutsakos)
  3. En Grèce, le nombre de demandes d’asile en instance explose
  4. L’accueil et le traitement des réfugiés sous la pression de l’accord UE Turquie
  5. EASO va doubler ses effectifs en Grèce
  6. Le HCR, gardien du droit d’asile, en position d’équilibre
  7. Pour MSF, la seule crise est celle d’un manque de volonté politique
  8. Sharifi G. voulait rejoindre sa soeur en Allemagne, il a été emprisonné en Grèce

Cet article [Evros, porte de l’Europe 8] Sharifi G. voulait rejoindre sa soeur en Allemagne, il a été emprisonné en Grèce est apparu en premier sur B2 Le blog de l'Europe politique.

[Evros, porte de l’Europe 7] Pour MSF, la seule crise est celle d’un manque de volonté politique

Sat, 15/02/2020 - 15:30

(B2, à Athènes) Apostolos Veizis dirige en Grèce l’unité de soutien opérationnel médical de Médecins sans frontières. Il assure qu’il « n’y a pas de crise des réfugiés ni de l’accueil des migrants, mais une crise de gestion politique »…

Apostolos Veizis, dans son bureau de MSF à Athènes © Emmanuelle Stroesser 2020

Selon le responsable de l’ONG, tout s’est aggravé depuis la signature de la facilité entre l’Union européenne et la Turquie, en mars 2016. Les conditions de vie dans les camps sont de pire en pire dans les îles de la mer Egée. « Ce n’est pas l’argent qui manque. Mais la volonté politique ». Celle qui devrait éviter que des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants, de mineurs non accompagnés vivent dans des conditions indignes, au cœur de l’Europe.

Changement de réthorique

La réforme de la loi sur l’asile adoptée l’été 2019 par le gouvernement à peine installé est perçue comme un geste avant tout politique. Il fallait marquer le coup. Aller vite. D’ailleurs, « elle a été adoptée en quatre jours » soupèse Apostolos. Il fustige le discours qui s’est durcit. Qui fait que certains hommes politiques « ne parlent que chiffres, du nombre de containers et non plus d’êtres humains ».

L’accès aux soins entravé

La critique contre « l’Union européenne (qui) n’assume pas sa responsabilité » est directe. Médecins sans frontières a d’ailleurs choisi de ne plus recevoir de fonds européens depuis 2016. Un «  choix politique » assumé. Qui lui offre la liberté de dénoncer aujourd’hui les restrictions d’accès aux soins imposées depuis l’été dernier aux réfugiés, dont « des enfants gravement malades ». MSF cible notamment « les autorités grecques (qui) refusent de soigner des enfants gravement malades » sur l’île de Lesbos (2).

(Emmanuelle Stroesser)

  1. Chiffres au 23 janvier 2020.
  2. Cf. communiqué diffusé le 23 janvier.

Tous les articles de notre reportage [Evros, porte de l’Europe]

  1. Le fleuve Evros, l’autre porte d’entrée des réfugiés vers l’Europe
  2. La Turquie tire les ficelles aux frontières extérieures de l’UE (G. Koumoutsakos)
  3. En Grèce, le nombre de demandes d’asile en instance explose
  4. L’accueil et le traitement des réfugiés sous la pression de l’accord UE Turquie
  5. EASO va doubler ses effectifs en Grèce
  6. Le HCR, gardien du droit d’asile, en position d’équilibre
  7. Pour MSF, la seule crise est celle d’un manque de volonté politique
  8. Sharifi G. voulait rejoindre sa soeur en Allemagne, il a été emprisonné en Grèce

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Deux Mirage 2000 font un ‘show of force’ à Birao (Centrafrique). Soutien à la MINUSCA

Sat, 15/02/2020 - 14:33

(B2) Une patrouille de deux Mirage 2000D du détachement chasse ont décollé de N’Djamena, au Tchad, pour conduire jeudi (13 février) une mission d’appui aérien rapproché (Close air support) au-dessus de la ville de Birao en République centrafricaine (RCA). Un « show of force » destiné à appuyer la MINUSCA (mission des Nations Unies pour la stabilisation en Centrafrique), indique l’état-major des armés vendredi. Les casques bleus avaient observé des regroupements de groupes armés à proximité de la ville. L’objectif de ce passage à très basse altitude, souvent impressionnant, était de les dissuader de lancer une offensive.

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[Evros, porte de l’Europe 6] Le HCR, gardien du droit d’asile, en position d’équilibre

Fri, 14/02/2020 - 18:00

(B2, en Grèce) On a plus souvent l’habitude de voir les logos du Haut commissariat aux réfugiés sur les toiles de tente de camps de réfugiés en Afrique. Il a pourtant fallu déployer des moyens en Grèce. En 2016, le HCR a été décisif pour mettre à l’abri des milliers de réfugiés coincés en Grèce du fait de la fermeture des frontières vers les Balkans. Aujourd’hui, le HCR s’apprête à passer le relais de son programme d’hébergement aux autorités grecques. Pas si simple

Une histoire qui date…

Si le HCR a une antenne à Thessalonique, en plus de son bureau à Athènes, ce n’est pas un hasard. Dans cette région nord de la Grèce, Thessalonique a joué un rôle pivot en 2016 au pire moment de ce que l’on appelle encore la « crise des migrants ». Au moins 50 000 réfugiés s’entassaient aux portes de la Macédoine, au dessus de Thessalonique, à la ville frontière d’Eidoméni. Surtout des Syriens et des Irakiens. Aujourd’hui, c’est un autre camp, beaucoup moins important, qui reste sous son regard vigilant. Celui de Diavata, sur la commune périphérique de Delta. D’ailleurs, lorsque B2 l’a rencontré, le chef de l’antenne, Luca Curci, s’apprêtait à aller y voir le maire de la commune, confronté à un sentiment d’insécurité grandissant autour du camps. « On sent que les tensions montent » commente Luca.

Pilote du programme ESTIA

Sur le continent, le HCR s’est surtout attaché à développer depuis 2016 un programme d’hébergement urbain, grâce au soutien financier de l’Union européenne. « Le but est de permettre aux demandeurs d’asile d’avoir un abris, de vivre en sécurité ». En tout, le HCR a réussi à dégoter 25 700 places en appartements. Ces appartements sont disséminés un peu partout, dans des villes, des villages, y compris en Crète. Y ont accès des demandeurs d’asile et des réfugiés « les plus vulnérables » ; une notion sur laquelle le HCR et les autorités grecques ne sont pas toujours raccord nous explique Luca. « Les autorités aimeraient voir moins d’exceptions ».

Et de l’aide mensuelle pour les réfugiés

Le HCR distribue aussi de « l’argent de poche » aux demandeurs d’asile « pour qu’ils puissent se débrouiller au quotidien ». Ceux qui obtiennent le statut de réfugié continuent à le percevoir encore six mois. Rien qu’en décembre 2019, le HCR a fourni une aide en espèces à plus de 90 500 personnes, pour un montant de 8,7 millions d’euros. Depuis avril 2017, date de lancement de ce programme d’aide en espèces, 160 000 personnes en ont bénéficié, comme Sharifi (lire article à suivre).

Tensions autour du droit d’asile

Luca Curci n’hésite pas à parler de durcissement de la politique d’asile du nouveau gouvernement. Le droit d’asile a été réformé l’automne dernier. Les nouvelles règles sont entrées en application au 1er janvier 2020. Tout n’est pas encore calé ni très clair. En témoigne le fait qu’il n’a toujours pas pu rencontrer la chef du service asile de la région, « car ils ont encore des incertitudes » glisse-t-il. Le HCR a lui des réserves…

Il y a priorité et priorité

Par exemple, « le gouvernement veut pousser l’examen en priorité des demandes d’asile manifestement infondées ». Autrement dit, celles de personnes venant de pays dits « sûrs »(2) « qui ne produisent à priori pas de réfugiés », en retardant d’autant donc l’examen de ceux déjà en attente depuis longtemps. « On aurait préféré que cette procédure accélérée s’adresse aux cas manifestement fondés, autrement dit qui ont manifestement un besoin solide de protection » résume Luca.

Tensions politiques

Le HCR est également critique sur le fait que les nouveaux demandeurs d’asile ne puissent plus avoir de numéro de sécurité sociale. « Sans numéro, ils ne peuvent pas avoir accès à l’assistance médicale. Cela empêche des enfants de se faire vacciner. Or sans vaccination, pas d’inscription à l’école ». Si le HCR multiplie les  « plaidoyers », ils n’ont pas l’heur de faire bouger les choses. Même la visite du Haut commissaire Philippo Grandi en novembre dernier n’y a rien fait. Au contraire même. Le HCR a depuis des problèmes à dérouler des projets comme celui de tuteur pour les mineurs non accompagnés.

(Emmanuelle Stroesser)

  1. Le gouvernement a établi une liste de pays dits « sûrs » dans laquelle on retrouve l’Albanie voisine, l’Algérie, l’Arménie, la Gambie, le Ghana, la Géorgie, l’Inde, le Maroc, le Sénégal, le Togo, la Tunisie, l’Ukraine.

252 millions d’euros de fonds européens

En 2019, le HCR en Grèce avait un budget de 264,4 millions $ US. Montant largement financé par l’Union européenne (252 millions d’euros). Il sert à financer les programmes d’hébergement et d’assistance en espèces de l’ESTIA, ainsi que la gestion de Kara Tepe et de la phase 2 (deux accueils dans l’ile de Lesbos), plus une série d’activités de protection ciblées principalement pour aider à construire accroître la capacité des services gouvernementaux.

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[Evros, porte de l’Europe 5] EASO va doubler ses effectifs en Grèce

Fri, 14/02/2020 - 14:20

(B2, à Athènes) Le bureau européen d’appui en matière d’asile, plus connu sous l’acronyme d’EASO, va doubler de volume en Grèce

EASO a posé ses valises la première fois en Grèce il y a cinq ans. Le bureau européen aidait à la relocalisation de réfugiés bloqués en Grèce dans d’autres États membres. Il ne comptait alors que quelques agents. Ils sont 500 aujourd’hui. Ils devraient atteindre le millier d’ici à la fin 2020 (1). C’est l’objectif sur lequel s’engage l’agence qui vient de signer un ‘hosting agreement’ avec les autorités grecques (cf. encadré).

Dimitrios Pagidas, Chef du secteur Grèce de l’EASO (© B2/ES)

Des interprètes

Une grande partie de ces agents sont des interprètes. C’est ce que nous explique Dimitrios Pagidas, chef du secteur Grèce de l’EASO, dans ses bureaux à Athènes. Ils sont essentiels pour recueillir les récits des demandeurs d’asile. C’est à cette étape qu’intervient le plus souvent EASO. Une fois que les demandeurs d’asile ont été enregistrés par les autorités grecques et Frontex. Les équipes fixes d’EASO sont surtout sur les îles, aucune n’est à Athènes. Quelques unes en région, notamment à Thessalonique, au nord de la Grèce. S’ajoutent deux équipes mobiles, à Athènes et à Thessalonique. Elles vont de camp en camp pour informer les demandeurs d’asile sur leurs droits.

Et des ‘interviewers’

L’étape du recueil du récit de la personne est déterminante. Ce récit doit justifier que la Grèce accorde — ou non — le statut de réfugié. Ce sont les assistants sociaux d’EASO qui font ces entretiens, assistés d’interprètes. « En 2019, nous en avons réalisé 10 000 » dénombre Dimitrios Pagidas. Trois fois moins que le nombre de dossiers que le bureau a aidé à enregistrer. « Parce qu’il est difficile de réaliser plus de deux entretiens par jour [par personne]. On doit se concentrer sur le cas de la personne, sa situation, son parcours ».

Un appui déterminant mais pas décisif

La décision d’accorder ou de refuser le statut de réfugié reste en revanche du ressort des autorités grecques. EASO ne fait qu’émettre un avis. Même si cet avis est suivi « dans la plupart des cas ».

Accélérer les instructions

« Plus il y aura d’agents, plus l’instruction des demandes d’asile pourra s’accélérer » assure D. Pagidas. Ravi d’annoncer que « le service d’asile grec augmente également ses effectifs. Ce qui va permettre d’augmenter de manière significative le nombre d’entretiens pouvant avoir lieu, à la fois sur les îles et le continent. » Si cet effort n’a pas été décidé plus tôt, c’est parce que les budgets étaient limités, explique-t-il.

Agrandir les locaux

Il faut aussi des locaux adéquats. C’est ce qui pousse l’agence à déménager ses équipes en dehors du hotspot de Lesbos. Entassées elles aussi dans des containers, les équipes n’ont pas la place de faire plus de vingt entretiens par jour. « Si nous déménageons dans de vrais bureaux, à l’extérieur du hotspot, nous seront plus productifs » assure D. Pagidas. 

Faible mobilisation des États membres

Les agents qui travaillent pour EASO sont plus souvent des locaux recrutés et formés de façon intensive (en deux trois mois) que des experts mis à disposition par les États membres. Ces derniers se font tirer le pantalon. Ils ne représentent qu’à peine 12% du staff. La directrice exécutive d’EASO, Nina Gregori, l’a rappelé lors de sa venue à Athènes, fin janvier. « Les États membres ont aussi nombre de cas en attente et donc les conseillers expérimentés sont précieux chez eux aussi ! » excuse D. Pagidas. Il explique surtout que le bureau a besoin de personnes « pour un an et pas deux mois ». Ce qui complique encore la tâche de recrutement.

Conseils avisés

Le rôle de l’agence, c’est aussi d’épauler le pays dans la consolidation de son service d’asile. C’est ce qu’EASO a cherché à faire en aiguillant les autorités grecques sur les expériences d’autres pays européens dans la façon de traiter les mineurs non accompagnés. Un grave problème en Grèce mais sur lequel nous n’avons pas eu le temps d’enquêter.

Mais à l’abri de regards extérieurs

Car il n’est pas non plus facile de rencontrer les équipes qui travaillent dans ces camps. « Si à Lesbos, l’EASO dispose d’installations en dehors (du camp) de la Moria où nous réalisons des entretiens dans des locaux sûrs et confortables, nous sommes très prudents avec l’accès à la presse afin de respecter l’état souvent vulnérable et sensible des candidats, comme vous pouvez le comprendre. »

(Emmanuelle Stroesser)

  1. Le « plan d’assistance opérationnelle et technique 2020 », co-défini par l’EASO et les autorités grecques, prévoit un renfort à la fois dans les îles et sur le continent pour assister le service d’asile pour le traitement des demandes de protection internationale en première instance. Dans les îles, 390 agents EASO vont être mobilisés. Dont 14 pour faire de l’information, 36 de l’administratif, 167 seront chargés d’instruire les dossiers, 167 en qualité d’interprètes et 6 sur les procédures dites ‘Dublin’. Sur le continent, les ressources humaines seront deux fois moins nombreuses : 55 agents se chargeront des pré-inscriptions administratives, 88 de l’instruction de dossiers, 88 de l’interprétariat et 4 des dossiers de procédure ‘Dublin’.

La Grèce et EASO officialisent leur relation

Georgios Koumoutsakos, ministre adjoint à la migration et l’asile, et Nina Gregori, directrice exécutive d’EASO, le 28 janvier 2020 (© B2/ES)

Mardi 28 janvier, dans les locaux de la représentation européenne à Athènes, sur un grand bureau verni, deux exemplaires d’un accord attendent leurs paraphes. Il ne manque plus que le drapeau grec ‘de table’ pour que la photo soit parfaite. Le ministre grec adjoint de la migration et de l’asile, Georgios Koumoutsakos, vient d’arriver. Il salue Nina Gregori, la directrice exécutive du Bureau européen pour l’appui en matière d’asile (EASO). Elle s’est déplacée de Malte, siège de l’EASO, pour signer ce ‘Hosting agreement’ avec les autorités grecques. « Nous en avons signé avec Chypre, l’Italie, Malte » énumère-t-elle. Cet accord « sécurise juridiquement » les interventions du Bureau. Cette formalité est nécessaire puisque le Bureau sait qu’il doit encore rester au moins cinq ans en Grèce.

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La défense des Alliés repose largement sur les États-Unis pour l’opinion publique (Pew Research Center)

Fri, 14/02/2020 - 13:15

(B2) Les citoyens de l’Alliance atlantique ont une vision généralement positive de l’organisation, dévoile le sondage réalisé par le Pew Research Insitute*, publié mardi (11 février). Mais il montre également que leur attachement à la défense collective est très bancal. Voire inexistant, si ce n’est envers les États-Unis. Détails

Les résultats du sondage proviennent d’une enquête conduite dans 19 pays, dont 16 États membres de l’OTAN, la Suède, la Russie et l’Ukraine, auprès de 21 029 personnes à l’été 2019.

Une vision largement positive de l’Alliance

Globalement, l’Alliance est vue « favorablement » par l’opinion publique de ses États membres. Un sentiment partagé autant en Europe que de l’autre côté de l’Atlantique.

Parmi les membres, la Turquie fait néanmoins ‘tache’, avec seulement 21% de l’opinion publique favorable à l’Alliance. La Grèce et la Bulgarie se situent également dans le bas du panier (respectivement 37% et 42%). De l’autre côté du spectre, on retrouve la Pologne et la Lituanie, qui comptent largement sur l’OTAN pour leur défense, et où elle est particulièrement soutenue. En Pologne, c’est 82% de l’opinion qui l’accueille favorablement et 77% en Lituanie. L’opinion reste majoritairement positive aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Italie et en Allemagne, alors qu’elle baissent sous 50 % en République tchèque, en Slovaquie, en France, en Espagne, en Hongrie et en Bulgarie.

Parmi les États non-membres, le bilan est plus mitigé. Alors que la Suède et l’Ukraine soutiennent l’Alliance, respectivement à 63% et 53%, ce n’est pas le cas en Russie. De manière peu surprenante, seuls 16% partagent cette opinion, offrant le pourcentage le plus bas, et 60% de l’opinion s’est dit défavorable à l’organisation.

Les États-Unis pour défendre l’Alliance

Dans le cas d’une attaque potentielle de la Russie sur un Allié, les opinions publiques au sein de l’OTAN s’en remettent largement aux États-Unis pour les défendre.

L’opinion publique croit majoritairement que les États-Unis « viendraient » défendre leurs Alliés par la force militaire. Alors qu’au contraire, ils sont une majorité à penser que leur pays, ne « devrait » pas le faire, faisant ainsi reposer toute la responsabilité de la défense des Alliés sur les États-Unis.

Parmi les opinions qui comptent le moins sur les États-Unis, on trouve la Hongrie (39%), la République tchèque (41%), la Turquie (46%) et la Pologne (47%). Alors que dans les autres pays, l’opinion publique est majoritairement certaine qu’ils interviendraient, notamment en Italie (75%), au Royaume-Uni (73%) et en Espagne (72%).

Une aversion à répondre aux obligations de l’article 5 du Traité

Dans 11 des 16 pays membres de l’OTAN interrogés, l’opinion publique pense qu’ils ne devraient pas utiliser la force pour défendre un Allié face à la Russie. C’est une claque que prend l’article 5 de Traité de l’Atlantique nord, qui promet une défense collective en cas d’attaque sur l’un des Allié.

Très peu sont ceux qui pensent que leur pays « devrait » également intervenir pour défendre ses Alliés. Les plus réticents sont notamment ceux qui pensent largement majoritairement que les États-Unis, eux, interviendraient, comme les Italiens (25%) et les Grecs (25%). Mais également les Bulgares (12%), les Turcs (32%), les Slovaques (32%), les Hongrois (33%), les Allemands (34%), et les Tchèques (36%). Alors que dans certains États la culture d’entraide militaire est plus présente : au Canada (56%), au Royaume-Uni (55%), aux Pays-Bas (64%), en Lituanie (41%) l’opinion publique pensent majoritairement que leur pays devrait intervenir.

L’opinion est néanmoins plus partagée en France, en Espagne et en Pologne.

La volonté d’entraide a baissé, remarque le Pew Research Institute. Par exemple, presque la moitié de l’opinion publique disait être prête à s’engager sur l’article 5 en Italie en 2015, contre 25% en 2019. De même, la volonté a baissé en Pologne (-8 points de pourcentage), en Espagne (-7) et en France (-6). Alors qu’il a augmenté au Royaume-Uni (+6).

L’utilisation de la force nécessaire pour maintenir l’ordre dans le monde

Parmi les membres de l’Alliance, l’utilisation de la force militaire pour maintenir l’ordre dans le monde demeure majoritairement vue comme une option. Seule la Bulgarie se distingue clairement du lot, en n’approuvant la force militaire dans ce cadre qu’à seulement 38%. L’Allemagne (47%) et la Lituanie (48%) se situent également en dessous de la majorité. Les plus favorables sont également les opinions des grandes puissances militaires : les États-Unis (78%), le Canada (71%), le Royaume-Uni (71%), la Turquie (71%), les Pays-Bas (69%) et la France (64%).

(Aurélie Pugnet)

*Le Pew Research Center est un Centre de recherche basé à Washington, indépendant, qui conduit des sondages sur différents sujets.

Télécharger le rapport

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Que signifie la cohérence ? Nouveau mot-clé des Européens en matière de défense

Thu, 13/02/2020 - 07:30

(B2) Les structures européennes se sont trouvées un nouveau mot à ruminer : la cohérence

Les Européens sont-ils prêts à agir de façon aussi cohérente que cette équipe néerlandaise de tir de mortiers intégrée dans un exercice multinational des chasseurs alpins (27e BIM) (© NGV / B2)

C’est un des mots mis en débat à la Commission européenne mardi (11 février). Josep Borrell, le Haut représentant l’a d’ailleurs proclamé haut et fort face à la presse (lire : Politique de défense. La cohérence, à la Commission et ailleurs, c’est moi ! (Josep Borrell)). Les ministres de la Défense de l’UE en avaient également discuté en décembre dernier.

La cohérence nouveau karma européen

La défense européenne adore ces mots clés qu’elle adule pendant quelques mois ou quelques années et répète à satiété. Puis ils disparaissent sans lendemain, comme par inadvertance. Nous avons eu ainsi : la ‘global approach’ (approche globale) puis l’integrated approach’, le ‘pooling and sharing‘ (partage et mutualisation), la ‘global strategy‘ et aujourd’hui… la cohérence, avant le prochain qui va faire son apparition d’ici quelques mois : la ‘boussole stratégique’ (strategic compass). Le principe est, semble-t-il, de trouver un mot le plus abscons possible pour y mettre ce qu’on veut. Mais ce mot a cependant une signification assez précise.

Que signifie la cohérence ?

Sous ce terme, on désire agencer les différentes initiatives prises ces derniers mois : la coopération structurée permanente (PESCO), le fonds européen de la défense (FEDef), la revue annuelle de défense (CARD)… avec les initiatives anciennes (plan de capacité de défense, QG opérationnel). Non pas qu’elles ne soient pas utiles chacune, mais afin de les rendre mieux enclenchées les unes aux autres. Il s’agit de mieux les séquencer dans le temps, tel un engrenage. Un travail qui peut paraitre bureaucratique. Mais où se cachent aussi des enjeux concrets, philosophiques, économiques et géopolitiques.

Derrière un mot de vrais enjeux ?

1. Une politique intergouvernementale ou communautaire ?

Premier enjeu : qui pilote le dispositif de défense au niveau européen : les États membres ou les institutions communautaires ? Une question qui ne se posait pas vraiment il y a vingt ans. La réponse était invariablement : les États membres. Au mieux, les institutions européennes sont là en soutien sur quelques techniques, de financement ou de coordination. Aujourd’hui, avec l’arrivée du Fonds européen de défense et l’intervention du budget communautaire, la question mérite d’être reposée et la réponse n’est plus aussi tranchée que par le passé. Les États membres, bien sûr, sont les pilotes du dispositif. Mais la Commission européenne (et le Parlement européen, la Cour de justice de l’UE, la Cour des comptes…) veulent aussi avoir leur mot à dire… De purement intergouvernementale, la politique européenne de défense devient mixte. Comme le dit Josep Borrell : « L’essentiel de la coopération en matière de défense appartient au domaine intergouvernemental » (je souligne essentiel). On remplace en fait le bon vieux moteur diesel par un moteur hybride, plus subtil. Peut-être plus performant à terme mais plus complexe à gérer aujourd’hui.

2. Le haut représentant ou le commissaire ?

À cette question philosophique se greffe une question institutionnelle ou administrative : qui pilote le dispositif au niveau européen ? Le Haut représentant (Josep Borrell) — qui a en charge les relations extérieures et est le chef de l’Agence européenne de défense — ou le commissaire chargé du portfolio ‘défense’ (Thierry Breton) — qui a à sa disposition la toute nouvelle direction générale de la Défense de la Commission européenne ?  La réponse semble bien tranchée depuis hier. C’est le Haut représentant de l’UE qui est le commandant à bord. Et si vous aviez un doute, l’Espagnol le dit lui-même : « En tant que Haut représentant, j’ai un rôle important pour garantir la cohérence entre les instruments de la Commission européenne et les politiques intergouvernementales ». B2 en a eu confirmation de façon directe auprès d’un diplomate bien introduit : « C’est évident que c’est au haut représentant de coordonner » la politique.

3. Un Fonds défense, réparti à parts égales, ou centrés sur la résorption des lacunes ?

Troisième enjeu : à quels objectifs doit répondre le Fonds européen de défense ? Une question très concrète et qui a des conséquences très précises au niveau industriel et économique. Plus précisément, doit-on répartir la manne financière dont dispose la Commission européenne de façon plus ou moins proportionnée entre les États membres, de façon à préserver, voire encourager une présence industrielle dans tous les pays. C’est un objectif industriel dont sont assez friands nombre de pays, qui n’ont pas ou peu d’industrie de défense. Ou doit-on ne financer que des projets stratégiques, sélectionnés sur le volet, car ils remplissent des lacunes capacitaires ? Dans cette hypothèse, quelles lacunes capacitaires doivent en premier être comblées : celles déterminées par le plan de développement des capacités de l’UE, visant à répondre à ses propres opérations de gestion de crises ; celles déterminées par l’Alliance euro-atlantique qui a un objectif principal : la défense territoriale du continent européen. La question officiellement est tranchée : le Fonds européen de défense répond aux priorités définies dans le plan de développement de capacité fixé par les États membres. Mais le diable se cache dans les détails. Et il existe une pression intense de plusieurs États membres pour ne pas avoir un Fonds centré sur quelques priorités, mais réparties sur un ensemble de priorités.

4. Une Europe au service de l’OTAN ou l’inverse ?

Derrière cette répartition des fonds se glisse un autre enjeu aux contours plus géopolitiques. Qui a la maîtrise du ciel européen : les Européens ou les Euro-Atlantiques ? En clair doit-on revoir (ou compléter) les accords de Berlin Plus — par lequel l’Alliance mettait à disposition des timides Européens ses infrastructures de commandement militaires — en ajoutant un addendum où l’Union européenne met ses compétences financières et législatives à disposition des objectifs de l’Alliance. Le débat ne fait que commencer. Mais d’ores-et-déjà on peut constater que le déblocage d’une ligne budgétaire dans le cadre budgétaire futur (MFF 2021-2027) pour la ‘mobilité militaire’ correspond strictement à un objectif de l’OTAN — la défense territoriale — qui sert effectivement le continent européen mais dans son cadre plus euro-atlantique que de politique européenne. De même, un ou deux financements européens sont venus épauler des projets de l’Alliance (déminage en Bosnie-Herzégovine). Un test très concret du rapprochement UE-OTAN qui est en train de s’opérer.

La cohérence n’est donc pas seulement un ‘petit’ mot. Est-il suffisant ? L’Europe est-elle si cohérente qu’elle veut bien le dire ? À suivre…

(Nicolas Gros-Verheyde)

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