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Diplomacy & Defense Think Tank News

Aktionswoche gegen Antisemitismus: Was ist Antisemitismus?

Konrad Adenauer Stiftung - lun, 28/05/2018 - 00:00
Was bedeutet der Begriff? Und welche Ausprägungen des Antisemitismus gibt es? Antworten gibt das Extremismus-Portal der Konrad-Adenauer-Stiftung.

kurzum: Das Recht sollte nicht auf „weiblich“ und „männlich“ verzichten

Konrad Adenauer Stiftung - lun, 28/05/2018 - 00:00
Das Bundesverfassungsgericht hat dem Gesetzgeber aufgegeben, bis Ende des Jahres die Vorschrift zur Eintragung des Geschlechts im Personenstandsregister (§ 22 Abs. 3 PStG) neu zu regeln.

Diplomatie française : « Quand on parle à tout le monde, le pire est de ne rien oser dire »

IRIS - dim, 27/05/2018 - 18:37

 » Emmanuel Macron se différencie de ses prédécesseurs avec une ligne néoréaliste qui consiste à ne pas ignorer les personnages qui comptent. Nicolas Sarkozy, et dans une moindre mesure François Hollande – plus pragmatique mais plus sensible à la pression populaire – pouvaient pratiquer une forme de sélection dans leurs relations. Il y avait chez eux une nostalgie de la puissance et l’illusion de pouvoir être l’arbitre des élégances entre les États pour dire lequel est dans le vrai selon les valeurs occidentales.

Le père spirituel de l’Ostpolitik, Egon Bahr, proche de Willy Brandt, disait à juste raison : « Pour modifier le statu quo, il faut d’abord le reconnaître ». Cela demande de dépasser les positions de principe trop rigides. La rupture diplomatique ne change rien aux situations concrètes. L’important n’est pas de parler ou de ne pas parler avec tout le monde, mais de savoir quoi dire et de s’y tenir. Face à Donald Trump, sur le climat ou l’accord nucléaire iranien, on ne peut pas dire qu’Emmanuel Macron a rallié le point de vue américain. On ne peut pas dire non plus qu’il reste le muet du sérail face à Poutine.

En revanche, la France pourrait être plus « vocale » sur certains sujets comme la situation des droits de l’homme en Égypte. Même chose pour le président rwandais Paul Kagame reçu il y a peu à l’Élysée, et dont la ministre des affaires étrangères est pressentie pour prendre la tête de la francophonie malgré les atteintes aux droits fondamentaux. Quand on parle à tout le monde, le pire est de ne rien oser dire. Il y a sans doute une autre limite : l’excès de confiance, ou plutôt l’excès de communication. Emmanuel Macron est comme nombre d’autres chefs d’État conscient de son charme, assez sûr de son équation personnelle pour avoir le sentiment de convaincre ses interlocuteurs. Mais on a bien vu que la « calino-thérapie » avec Trump était loin de suffire. Après avoir dit « je suis assez certain que mon ami Trump va changer d’avis » sur le climat, le président américain a finalement confirmé le retrait de l’accord de Paris. Cette posture est en même temps habile : il s’agit aussi de ne pas attaquer le premier pour ne pas se mettre à dos l’opinion américaine, et renforcer les soutiens à Donald Trump. S’il y a une rupture entre la France et les États-Unis, on pourra dire que Paris aura tout fait pour l’éviter.

La France a une stature et une indépendance suffisante pour assumer un refus net, ou ne pas céder à la pression, même si ce genre de coup d’éclat est une arme à user avec parcimonie. C’est ce que Jacques Chirac avait pu faire en 2003 en rejetant l’intervention en Irak, ou le non-alignement de Mitterrand avant lui, face au projet de défense américain « guerre des étoiles ». À mon sens il y a un grand geste gaullo-mittérandien à faire si les sanctions américaines sur les entreprises européennes en Iran ne sont pas levées. Il s’agit d’une attaque frontale contre notre souveraineté. Ce serait une catastrophe si les Européens cédaient à ce diktat.  »

Propos recueillis par Jean-Baptiste François pour La Croix.

Zukunftsvision und Innovation: Digitale Weltmeister

Konrad Adenauer Stiftung - dim, 27/05/2018 - 00:00
Wer wissen will, wie die digitale Zukunft aussehen kann, für den lohnt ein Blick nach Singapur.

Coalition populiste en Italie : vers un fragile statu quo européen

IRIS - ven, 25/05/2018 - 15:44

Un nouveau gouvernement vient de se constituer en Italie, issu de la coalition entre la Ligue et le Mouvement 5 Étoiles (M5S), arrivés en tête lors des dernières élections. Le programme économique promis par cette nouvelle coalition inquiète l’Union européenne. La stabilité économique de l’Union européenne peut-elle en être menacée ? Dans un contexte où le populisme semble progressivement devenir une alternative au projet européen, l’Europe possède-t-elle les outils institutionnels et politiques nécessaires pour y faire face ? Le point de vue de Rémi Bourgeot, économiste et chercheur associé à l’IRIS.

Troisième économie de la zone euro, mais deuxième pays le plus endetté, les principales mesures prônées par la coalition italienne pourraient coûter 125 milliards d’euros sur quatre ans. La nouvelle coalition à la tête de l’Italie est-elle concrètement en mesure d’appliquer son programme ?

Le programme présenté par la coalition populiste italienne résulte à la fois de l’objectif de la Ligue et du M5S de trouver un terrain d’entente idéologique et de passer le cap de la confirmation par le président de la République Sergio Mattarella. Après avoir atteint ces objectifs de court terme, la coalition n’est pas véritablement tenue par ces propositions qui relèvent plutôt d’orientations générales. Il en ressort plus généralement la volonté d’envoyer aux électeurs populaires le signal d’une inversion de la logique budgétaire européenne. Sur la question de la sortie de l’euro qui avait été évoquée, la coalition populiste s’est faite extrêmement discrète, à la fois pour ne pas effrayer une partie de son électorat, pour passer l’étape de l’accord présidentiel, et pouvoir prendre le pouvoir sans avoir à faire face à une crise financière. Les taux d’intérêt sur la dette italienne ont crû de façon significative ces derniers temps, mais restent très en-deçà des niveaux typiquement liés à une quelconque panique et sont vus, par certains, comme une opportunité d’investissement dans le contexte des taux très bas en Europe.

La situation de l’économie italienne reste mauvaise. Le PIB par habitant du pays n’est pas plus élevé qu’à la création de l’euro en 1999, et la reprise européenne des dernières années montre déjà des signes d’essoufflement importants. L’économie italienne a, de plus, été très fragilisée par la crise de l’euro, notamment en ce qui concerne la santé du secteur bancaire. La coalition populiste ne rebat pas véritablement les cartes économiques, mais évoque plutôt une forme de relance par la dépense publique et des baisses d’impôts qui restent plutôt conventionnelles. Ce programme entre en conflit avec les règles budgétaires européennes, mais on est loin d’une remise en cause fondamentale du statu quo. De nombreux commentateurs de marché ont même accueilli l’idée d’une relance de ce type avec un relatif enthousiasme, au moment où la reprise économique faiblit et où le support de la Banque centrale européenne sous la forme d’achat de titres de dette est en voie de suppression progressive. La dette italienne est très élevée, à environ 130% du PIB. Cette dette reste cependant à ce jour très liquide et bien notée par les agences, et n’est en rien comparable à la dette grecque et aux différentes étapes de la crise multiple qu’a connue le pays. Surtout, le poids politique de l’Italie en Europe, quelle que soit la crédibilité du gouvernement en place, est bien plus important.

La principale menace sur la stabilité financière italienne proviendrait aujourd’hui d’une récession qui accroîtrait bien plus le poids de la dette qu’un plan de relance même mal conçu. La coalition populiste est loin de proposer quoi que ce soit à même de relancer l’économie italienne sur le long terme, mais les indications préliminaires quant à la politique qu’elle va mener ne sont pas, pour l’heure, de nature à entraîner une déflagration en tant que telle. Reste à voir ce qui va véritablement être fait et la réaction aussi bien des marchés sur le plus long terme que des partenaires européens.

Le programme promis par la nouvelle coalition en Italie semble incompatible avec les règles du pacte européen de stabilité et de croissance, Pierre Moscovici ayant appelé à une “réponse crédible” sur la dette publique. La stabilité économique de l’Union européenne peut-elle être menacée ? Faut-il redouter des conséquences sur la zone euro ?

Les mises en garde vont de soi. Il convient cependant de noter l’évolution du climat intellectuel en Europe depuis le point bas de la crise de l’euro, lorsque la focalisation sur des programmes d’austérité procycliques sidérait les observateurs mondiaux. Les réactions en Allemagne en particulier indiquent une prudence dans le traitement des développements politiques italiens. Le gouvernement allemand s’est fait discret sur le sujet, et la plupart des commentateurs précisaient que le cas italien ne pouvait en rien être traité de la même façon que le cas grec, en raison de la taille de l’Italie. Par ailleurs, la crise politique européenne est un phénomène généralisé, qui touche notamment Berlin très directement. Il n’existe pas à ce jour de voix forte en Europe pour défendre un projet européen qui reposerait sur le respect fort des contraintes budgétaires.

Bien que le gouvernement allemand prolonge la doctrine de Wolfgang Schäuble sur les sujets financiers européens, son successeur social-démocrate au ministère des Finances ne dispose pas du même poids politique ni d’une vision personnelle méticuleuse du fonctionnement de l’Europe en termes de suivi budgétaire. Le fond de l’approche allemande, renforcée par l’envolée de l’extrême droite dans le pays, consiste aujourd’hui surtout à refuser tout bond en avant en termes de construction fédérale et de solidarité financière vis-à-vis du sud de la zone euro. En ce sens, l’arrivée au pouvoir de la coalition populiste à Rome offre un prétexte supplémentaire à Angela Merkel pour enterrer l’idée d’une réforme conséquente de la zone euro. Avant même ce développement en Italie, les autorités allemandes précisaient que toute avancée sur le plan de l’union bancaire devrait attendre une lointaine normalisation du secteur bancaire italien, fragilisé par une montagne de dettes douteuses.

Les partenaires européens de l’Italie n’ont pas véritablement d’autre choix que d’accepter une forme de statu quo avec la coalition romaine. Le déclenchement d’une panique de marché serait dévastateur et remettrait en cause l’existence de la zone euro. On devrait a priori rester loin du jeu qui avait eu lieu sur la crise grecque. En 2015, le gouvernement allemand était prêt à expulser la Grèce de la zone euro. Ce à quoi les autorités françaises avaient opposé leur veto informel. L’idée d’une sortie de l’Italie de la zone euro remettrait directement en cause la fragile stabilité financière de toute l’union monétaire. Derrière les mises en garde parfois frontales, l’heure est plutôt à la prudence et à la recherche d’un statu quo pour quelques années. Les choses deviendraient néanmoins bien plus compliquées en cas de nouvelle crise économique et financière. Les tabous sur la solidarité entre pays européens seraient cette fois quasi-indépassables du fait de l’évolution populiste croisée en Italie et en Allemagne.

Avec l’émergence de mouvements eurosceptiques, que ce soit en Hongrie, en Pologne ou en Italie, l’UE est-elle en capacité de faire face au délitement de son projet ? Possède-t-elle les outils institutionnels et politiques nécessaires pour y faire face ?

La montée de l’euroscepticisme est un mouvement généralisé, notamment au cœur du système en Allemagne. Il y a encore quelques mois, l’hypothèse d’un bond en avant en Europe sous l’impulsion du président Macron était privilégiée par de nombreux observateurs. La désillusion est sévère aujourd’hui et il faut certainement un certain temps pour qu’une nouvelle synthèse n’émerge. Emmanuel Macron a, à diverses occasions, donné quelques indications quant à un changement d’approche.

Plus généralement, la prise de conscience de ces développements est encore relativement récente, et l’heure ne semble pas encore être au développement d’un nouveau mode de coopération qui permette une stabilisation européenne. Cette dernière nécessite un travail ambitieux consistant à mettre en avant un nouveau modèle de développement économique et social en Europe. La réponse à la crise, sous la forme d’une compression tous azimuts façon « low cost » a, à la fois, nourri la montée généralisée du populisme et mis en danger la modernisation de l’économie européenne, dans un contexte de révolution industrielle et technologique dans le monde.

“Un immense big bang politique”. Trois questions à Marc Lazar sur le nouveau gouvernement italien

Institut Montaigne - ven, 25/05/2018 - 15:29
“Un immense big bang politique”. Trois questions à Marc Lazar sur le nouveau gouvernement italien Institut Montaigne ven 25/05/2018 - 15:29 Le Mouvement 5 étoiles et la Ligue sont finalement parvenus à s’accorder sur le nom du prochain président du Conseil, ce sera

Gouvernement italien, que doit-on attendre du duo des extrêmes ?

IRIS - ven, 25/05/2018 - 12:18

Après plus de deux mois de discussion et une pression accentuée de la part du président de la République, Sergio Mattarella, le Mouvement 5 étoiles et la Lega ont trouvé un accord pour un projet commun, malgré des divergences évidentes. Une personne neutre devient président du Conseil : Giuseppe Conte.

Pourquoi la naissance de ce gouvernement a-t-elle pris autant de temps ?

Une coalition entre les deux hommes semblait tout simplement impossible il y a encore quelques semaines lorsque les deux vainqueurs (la Lega et le Mouvement 5 étoiles) déclaraient ouvertement leur incompatibilité. Beppe Grillo, mentor du Movimento 5 Stelle, tweetait qu’un accord avec ceux qui “ont détruit le pays pendant 20 ans” était impossible, alors que Matteo Salvini, secrétaire fédéral de la Lega, répétait un “non” catégorique à toute alliance avec le parti de Luigi di Maio. Dans ce contexte, une alliance entre ces deux partis semblait donc exclue, elle n’était d’ailleurs pas le premier choix ni de l’un ni de l’autre. En effet le Mouvement 5 étoiles s’était adressé au Parti démocrate dans l’espoir de trouver une solution, mais les tractations se sont arrêtées à cause d’un désaccord sur le nom de Maria Elena Boschi, ex-ministre et proche de Matteo Renzi, considérée comme infréquentable par les 5 Stelle.

Ce premier projet de gouvernement mort dans l’œuf, un rapprochement entre les deux extrêmes semblait inéluctable pour satisfaire les Italiens, bien que fortement complexe. Là aussi une personnalité bloquait toute négociation aux premiers abords : Silvio Berlusconi, allié de la Lega et “mal absolu” selon Alessandro di Battista (le numéro 2 non officiel du Mouvement 5 étoiles). Les négociations étaient donc au point mort, jusqu’à ce que Monsieur Berlusconi décide de faire un pas en arrière pour laisser place aux deux jeunes leaders.

Pas de programme commun ni de coalition, mais un contrat

La solution trouvée pour la formation d’un gouvernement est inédite pour l’Italie, il s’agit d’un contrat entre les deux partis. Les politiques engagées devraient être orientées sur deux axes principaux : la réforme des retraites et l’Europe.

En ce qui concerne le système des prestations sociales, le Mouvement 5 étoiles souhaiterait une modification ou une réorientation de la loi sur les retraites actuelles (la legge Fornero) alors que la Lega voudrait sa suppression immédiate et unilatérale. Mais l’abolition de cette réforme a un coût : 80 milliards d’euros selon les économistes, beaucoup moins (15 ou 20 milliards) selon les deux partis au gouvernement. Dans tous les cas, on imagine difficilement une élimination pure et simple de cette loi, surtout pour un pays endetté comme l’Italie.

Pour les deux extrêmes, l’Europe n’a rien apporté de positif à l’État italien, qui doit récupérer sa souveraineté monétaire et budgétaire, au risque d’un conflit avec Bruxelles. Jusqu’à présent, les mots ont été très virulents envers l’Europe, surtout de la part de Matteo Salvini. Pour le leader de la Ligue, l’Europe est la responsable de tous les maux italiens et de toutes les difficultés que le pays rencontre. Les prochains mois nous diront si ce nouveau gouvernement passe de la parole aux actes.

Les deux partis doivent également appliquer deux promesses électorales qui semblent, dans les conditions économiques actuelles, relever de l’utopie. Le Mouvement 5 étoiles avait comme point fort de son programme le “revenu de citoyenneté” (une sorte de RSA élargi) et une grande réforme pour l’emploi, un investissement considérable. La Lega basait son programme sur une « flat tax » progressive de 15% à 25%, soit une baisse des entrées notable pour l’État. Deux projets aussi incompatibles qu’irréalisables financièrement, mais sur lesquels les électeurs comptent beaucoup. Ce mariage de raison entre les deux partis est perçu par les deux électorats comme une trahison de leur ligne directrice, à savoir “pas d’alliance” pour le Mouvement 5 étoiles et “coalition de droite” pour la Lega. Si le prix à payer est de travailler avec l’ennemi, il doit permettre d’appliquer les réformes les plus importantes. Les électorats contestataires qui ont voté pour les extrêmes seront intransigeants sur ce point.

Une nouvelle philosophie internationale

Le gouvernement précédent avait changé un peu la donne avec une politique internationale moins centrée sur l’Italie et plus orientée vers l’étranger. L’ancien président du Conseil, Paolo Gentiloni, était également l’ex-ministre des Affaires étrangères (2014-2016) où il avait œuvré pour faire participer l’Italie aux affaires internationales, comme à Cuba ou en Iran[1]. À l’inverse, le nouveau gouvernement s’est clairement recentré sur une politique défensive anti-immigration et protectionniste. Matteo Salvini prône une politique d’expulsion des migrants et une protection des frontières. Il faudra donc s’attendre à une fermeture (voire un hermétisme) diplomatique plutôt qu’à une collaboration avec l’Europe et les pays du Sud.

Le Mouvement 5 étoiles et la Ligue ont un point commun : un intérêt et une sympathie pour la Russie de Vladimir Poutine. Matteo Salvini admire le président russe et cite Moscou comme ville de référence : “une ville propre sans SDF ni migrants et où les femmes peuvent rentrer le soir sans risquer leur vie”. Le Mouvement 5 étoiles quant à lui a changé son programme il y a quelques semaines afin de modérer ses positions sur le conflit syrien et militer pour une levée des sanctions contre la Russie. Un potentiel rapprochement des deux pays est envisageable. L’Italie pourrait donc regarder à l’Est, ce qui serait une nouveauté de taille et un désaveu des États-Unis, pays avec lequel la population italienne noue des liens forts depuis plus d’un siècle (vagues d’immigrations de la péninsule vers l’Amérique et la Seconde Guerre mondiale).

Une sortie de l’Europe improbable

Emmanuel Macron a rapproché ouvertement ce gouvernement au Brexit. Cette corrélation est assez logique au vu des programmes et des tons utilisés par les deux partis au pouvoir. Mais il n’y a peut-être pas de quoi être aussi alarmiste. N’oublions pas que la Lega est née comme “Lega Nord”, partisan d’une scission de l’Italie qu’elle n’a jamais fait, même lorsqu’elle était au gouvernement avec Silvio Berlusconi. Il en sera de même avec l’Europe. Situation identique pour le mouvement 5 étoiles : son fondateur, Beppe Grillo, parlait il y a 10 ans d’une sortie de l’Union européenne. Aujourd’hui, cette option n’est plus d’actualité.

La réelle véhémence de ce nouveau gouvernement contre l’Europe est basée sur la monnaie unique et les restrictions financières. L’Italie est un pays qui avait pour habitude de déprécier la lire pour pouvoir rester compétitive et l’euro a stoppé net cette possibilité. La souveraineté monétaire nationale est donc un argument central dans les discours populistes italiens, qui promettent une amélioration immédiate une fois libérée du diktat de Bruxelles. Là aussi, dans les discours de Matteo Salvini et de Luigi di Maio, les mots sont forts, mais dans les actes il n’est pas certain que l’Italie ait les armes pour imposer ses revendications.

Giuseppe Conte, Président du Conseil ou simple pantin ?

Deux partis pour un seul poste de président du Conseil. Le choix s’est donc porté sur une personne neutre satisfaisant les deux camps.

Giuseppe Conte apparenté au Mouvement 5 étoiles même s’il n’est pas une figure active et présente médiatiquement. Professeur de Droit (symbole de l’impartialité) à Florence et originaire du sud, il représente idéalement le territoire italien, sauf le nord, chasse gardée de Matteo Salvini.

Giuseppe Conte est peu connu du grand public et n’a jamais été présent sur la scène politique avant sa nomination. Il est donc difficile d’anticiper ses réactions et les traits de caractère qui pourraient définir son style. L’unique certitude est qu’il est moins expérimenté que les deux artisans du gouvernement. On pourrait donc s’attendre à ce qu’il applique sagement les ordres qui lui sont donnés.

Nouveauté de ce président du Conseil : Monsieur Conte a un curriculum vitae plus international que la grande majorité de ses prédécesseurs. Le nouveau président du Conseil pourrait donc être le parfait médiateur entre l’Europe et les politiques proclamées à Rome, évitant ainsi des incidents diplomatiques qui mettrait l’Italie dans une position difficile. Il a d’ailleurs déjà déclaré être favorable à une Italie toujours présente au sein de l’Union européenne.

L’opposition attend le faux pas

Paradoxalement, Silvio Berlusconi peut être satisfait de cet accord. Les sondages sont formels, en cas de nouveau vote le parti de Monsieur Berlusconi, Forza Italia, serait sérieusement en difficulté. Il a donc tout intérêt à conserver les sièges qu’il a actuellement et éviter une crise politique anticipant de nouvelles élections. De plus, Silvio Berlusconi n’est plus inéligible depuis le 12 mai, ce qui pourrait lui permettre de revenir au centre de la scène politique. Il faut donc s’attendre à une action ou manœuvre de sa part, car, même âgé de 81 ans, Monsieur Berlusconi peut et veut encore compter. Comme disait son médecin personnel (Umberto Scapagnini, décédé en 2013) : “Silvio Berlusconi est techniquement immortel”.

Matteo Renzi est peu optimiste quant à la réussite de cette alliance M5S-Lega, un “Frankenstein politique” comme l’a défini le journaliste Massimo Giannini. L’ex-secrétaire du Parti démocrate rêve donc d’une crise politique qui pourrait ouvrir une brèche à une centralisation et unification des partis modérés. Il regarde donc ce spectacle, espérant une fin tragique qui pourrait légitimer son retour comme homme providentiel. Reste à savoir si le Parti démocrate l’accepterait de nouveau comme leader, ce qui n’est pas dit. Malgré des efforts pour rassembler la gauche, une guerre interne fait rage. Lors de ces derniers jours, la convention du Parti démocrate s’est déroulée dans une ambiance électrique, ce qui ne présage rien de bon.

Un gouvernement, mais pour combien de temps ?

Le président du Conseil trouvé, il lui faut encore former son équipe de ministres et établir le format qu’aura ce gouvernement. Le rôle de Luigi di Maio et de Matteo Salvini est encore à définir et le poste de ministre de l’Économie semble être la convoitise principale. Il faudra ensuite que le gouvernement change la loi électorale, car le système proportionnel ne fonctionne pas. De nombreux grands chantiers sont à réaliser, avec une majorité de seulement quelques sièges à l’assemblée. Pour de nombreux spécialistes, voir ce gouvernement se maintenir au pouvoir jusqu’en mars prochain serait déjà une prouesse. Un retour aux urnes avant la fin de la législature n’est donc pas exclu.

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[1] Paolo Gentiloni est le premier président à aller à Cuba après l’accord avec les États-Unis. Il était également allé en Iran juste avant l’accord sur le nucléaire.

Entretien avec Dominique Reynié : « Les votes populistes ne sont pas des coups de force mais des colères froides »

Fondapol / Général - ven, 25/05/2018 - 10:50

Dominique Reynié, le directeur de la Fondapol, s’étonne que certains commentateurs nient encore les angoisses qui génèrent le vote « antisystème ». Les gouvernements européens n’ont qu’une alternative: prendre au sérieux la question des frontières ou être balayés par des coalitions populistes. LE FIGARO.- Pour la première fois, un gouvernement «antisystème» a pris la tête d’un pays […]

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Corée du Nord : 2 doses de malentendus réciproques, 1 dose d’habileté made in Trump

IRIS - ven, 25/05/2018 - 10:33

Au travers d’une lettre adressée à Kim Jong-un ce 24 mai, Donald Trump a annulé la rencontre prévue avec le dirigeant nord-coréen initialement prévue pour le 12 juin prochain. Comment comprendre cette décision ? Les arguments développés par Donald Trump sont-ils suffisants pour expliquer une telle décision ?

Cette annonce n’est, malheureusement, pas une grande surprise, tant les développements de ces derniers jours, les nouveaux exercices militaires entre Américains et Sud-coréens et les déclarations à Washington comme à Pyongyang laissaient présager un report, voire une annulation de cette rencontre. En claire, les deux parties ne se faisaient pas confiance. Dans sa lettre, Donald Trump se montre ambigu, souhaitant sans doute associer la carotte et le bâton, mais il est au final assez peu convaincant.

Ainsi, comment dans le même document menacer la Corée du Nord de frappes nucléaires et regretter que cette rencontre ne puisse avoir lieu? Certains estimeront que le changement de ton est consécutif à la seconde visite de Kim Jong-un à Pékin, mais force est de reconnaître que ce n’est pas Pyongyang qui a pris la décision d’annuler cette rencontre, mais bien Washington. C’est ce que l’histoire retiendra.

Quelles sont les différences stratégiques entre les objectifs des deux parties ? Ces différences peuvent-elles être réconciliées ? Le ton du rapport de force, qui traverse la lettre, est-il approprié en ce sens ?

Dès l’annonce faite par Trump, sous forme de tweet, de sa volonté de rencontrer Kim Jong-un, les deux parties n’étaient pas sur la même ligne. Côté nord-coréen, cette rencontre, souhaitée depuis des années, avait – et a toujours – pour but de marchander la menace nucléaire en obtenant des garanties sécuritaires, une levée des sanctions, et une forme de normalisation de la relation avec les Etats-Unis. L’arme nucléaire est perçue à Pyongyang comme la meilleure garantie permettant d’atteindre ces objectifs.

Certains qualifient cette stratégie de fil du rasoir, d’autres de stratégie du pire, mais le résultat été le même. Côté américain, cette rencontre devait sceller la dénucléarisation de la péninsule, et dans un second temps ouvrir une nouvelle ère dans la relation entre les deux pays. En rehaussant le ton de la menace, Donald Trump perd le crédit qu’il avait emmagasiné en se montrant ouvert au dialogue, il perd surtout une occasion de replacer son pays au centre du dialogue sur l’avenir de la péninsule coréenne. Ce ton n’est donc pas approprié et ne fait qu’une victime: la diplomatie américaine. De son côté, la Corée du Nord n’a rien à perdre, n’oublions jamais cette règle élémentaire de toute stratégie de négociation.

Comment peut-on anticiper la réaction nord-coréenne et la suite des relations entre les deux pays ? Une prochaine réunion, sur les termes définis par Donald Trump, est-elle envisageable ?

Cette annulation est d’abord un échec pour la diplomatie américaine et pour le locataire de la Maison-Blanche, qui s’enorgueillit depuis des semaines être à l’origine du dénouement d’une crise qui dure depuis sept décennies. L’administration Trump a fait preuve d’une naïveté désarmante, et la politique étrangère américaine est dans la tourmente. À moins que certains dans l’entourage du président américain n’aient souhaité saboter cette rencontre. Cette possibilité ne doit pas être exclue. On pense à John Bolton, dont il est difficile de penser que son évocation du modèle libyen était une gaffe, mais aussi à Mike Pence, qui ne partageait visiblement pas l’enthousiasme de Trump.

Côté nord-coréen, les derniers jours ont fourni un avant-goût de la réaction, et le faut que l’annulation survienne le jour même du démantèlement du site d’essais nucléaires de Punggye-ri, gage de la bonne volonté du régime (en plus de la libération des trois otages américains) ne va pas aider à recréer les conditions d’un dialogue serein. Les deux pays sont parvenus à créer un point de contact, c’est bien, il va falloir maintenant laisser passer l’orage et repartir sur des bases solides, sans précipitation. En attendant, il faut souhaiter que ce nouveau développement n’ait pas un impact négatif sur la relation Seoul-Pyongyang, qui reste l’élément essentiel de toute pacification de la péninsule, avec ou sans le bon vouloir de Washington.

Un desafío para Donald Trump: la seguridad hemisférica en crisis y el futuro de la guerra al narcotráfico

Real Instituto Elcano - ven, 25/05/2018 - 04:10
ARI 69/2018 - 25/5/2018
Raúl Benítez Manaut

La política de Donald Trump en relación a la cooperación de EEUU con América Latina para combatir el narcotráfico está demostrando ser errática.

Chechnya’s Status within the Russian Federation

SWP - ven, 25/05/2018 - 00:00

In the run-up to the Russian presidential elections on 18 March 2018, the Kremlin further tightened the federal “vertical of power” that Vladimir Putin has developed since 2000. In the North Caucasus, this above all concerns the republic of Dagestan. Moscow intervened with a powerful purge, replacing the entire political leadership. The situation in Chechnya, which has been ruled by Ramzan Kadyrov since 2007, is conspicuously different. From the early 2000s onwards, President Putin conducted a policy of “Chechenisation” there, delegating the fight against the armed revolt to local security forces. Under Putin’s protection, the republic gained a leadership which is now publicly referred to by Russians as the “Chechen Khanate”, among other similar expressions. Kadyrov’s breadth of power encompasses an independent foreign policy, which is primarily orientated towards the Middle East.

Kadyrov emphatically professes that his republic is part of Russia and presents himself as “Putin’s foot soldier”. Yet he has also transformed the federal subject of Chechnya into a private state. The ambiguous relationship between this republic and the central power fundamentally rests on the loyalty pact between Putin and Kadyrov. However, criticism of this arrangement can now occasionally be heard even in the Russian president’s inner circles. With regard to Putin’s fourth term, the question arises just how long the pact will last. The price that Moscow was willing to accept for Chechnya’s “pacification” by Kadyrov and his supporters includes serious human-rights violations. Since 2017 these have increasingly moved back into the focus of international politics and reporting.

"Von Schabbat zu Schabbat": Aktionswoche gegen Antisemitismus

Konrad Adenauer Stiftung - ven, 25/05/2018 - 00:00
Unter dem Motto "Von Schabbat zu Schabbat - Gemeinsam gegen Antisemitismus" beteiligt sich die KAS an der Aktionswoche gegen Antisemitismus.

Vor 25 Jahren: Die Gegenwart erfordert unsere Wachsamkeit und Entschlossenheit

Konrad Adenauer Stiftung - ven, 25/05/2018 - 00:00
Der Brandanschlag in Solingen vom 29. Mai 1993 ist ein deutscher Erinnerungsort in negativer Lesart.

The Primacy of Politics and the Protection of Civilians in UN Peacekeeping Operations

European Peace Institute / News - jeu, 24/05/2018 - 21:30

On May 24th, IPI together with the Permanent Mission of the Kingdom of the Netherlands to the United Nations cohosted a policy forum entitled “The Primacy of Politics and the Protection of Civilians in UN Peacekeeping Operations.” This policy forum explored the perceived and actual tensions between the pursuit of political solutions and the protection of civilians in peacekeeping contexts. The event follows the 2018 Security Council Open Debate on the Protection of Civilians organized by Poland (#United4Civilians).

This event is the first as part of IPI’s recently launched Protection of Civilians Project. While the High-Level Independent Panel on Peace Operations (HIPPO) stressed the “primacy of politics,” UN peacekeeping missions are often mandated to protect civilians in challenging environments where the peace process has stalled and political solutions seem out of reach. In these contexts, protecting local populations from physical violence may appear to be an operational imperative for the mission and a priority over engagement in protracted and uncertain political processes.

This policy forum provides an opportunity to discuss situations where there is a risk of competition between the primacy of politics and the centrality of protection, as well as where they are complementary and mutually reinforcing. While the two objectives are hardly mutually exclusive, in practice pursuing both can raise challenging questions. In South Sudan, Darfur, or the Democratic Republic of the Congo, the UN mission’s political role may seem elusive, and its protection goals may appear to detract from its political effectiveness. The political stance of UN missions intervening in support of host states may also be an important limitation for peacekeepers mandated to protect civilians from all threats of physical violence—including from host-state forces.

In these situations, where civilians are clearly at risk, how should peace operations reconcile political strategies and the protection of civilians? In the absence of viable political processes at the strategic level, what political measures and strategies can be used in parallel with military operations to protect civilians on the ground?

Opening Remarks:
H.E. Mr. Karel J. G. van Oosterom, Permanent Representative of the Kingdom of the Netherlands to the United Nations

Speakers:
Mr. Ralph Mamiya, Consultant; formerly Protection of Civilians Team Leader, UN Department of Peacekeeping Operations
Mr. Sébastien Lapierre, Chief, Policy and Best Practices Service, UN Department of Peacekeeping operations
Ms. Daniela Kroslak, Leader, Darfur Integrated Operational Team, UN Department of Peacekeeping Operations
Ms. Chloé Marnay-Baszanger, Chief, Peace Mission Support Section, Office of the UN High Commissioner for Human Rights
Ms. Alison Giffen, Director, Center for Civilians in Conflict

Moderator:
Dr. Namie Di Razza, Research Fellow, International Peace Institute

Annulation du sommet entre Donald Trump et Kim Jong-un : « Une opération de communication de part et d’autre »

IRIS - jeu, 24/05/2018 - 20:35

Doit-on parler de coup de théâtre ou d’un scénario prévisible ?

 On commençait à s’en douter ces derniers jours, ça sentait le roussi, en particulier parce que le ton était monté entre certains responsables nord-coréens et la Maison Blanche, notamment après que le vice-président américain Mike Pence avait prédit un destin « à la Kadhafi »pour le dirigeant nord-coréen. En retour, Mike Pence a été qualifié d’« ignorant » et de « stupide » par la diplomatie nord-coréenne.

Comment est-on passé, en quelques semaines, d’une quasi-réconciliation, de la promesse d’une rencontre, à cette rhétorique beaucoup plus belliqueuse ?

C’est une opération de communication de part et d’autre. Du côté nord-coréen, il y a le désir d’être enfin reconnu sur la scène internationale. Et du côté de Donald Trump, on est beaucoup dans une communication incantatoire, vouloir montrer que l’on peut dominer les dictateurs, imposer sa vision unilatérale au monde. Peut-être que Donald Trump a fait une erreur au départ en acceptant ce sommet sans négocier un minimum au début. Il pensait qu’il pouvait appliquer sa stratégie de l’art du « deal » à la diplomatie. Ça a marché pour l’Iran, il est un peu galvanisé par la situation au Moyen-Orient, il s’est aussi un peu laissé emporter par le président sud-coréen Moon qui lui avait parlé de prix Nobel. C’est aussi l’échec du président Moon ce soir.

Donald Trump manie quand même encore l’incertitude… Dans son courrier au leader nord-coréen, il laisse une porte ouverte à une éventuelle rencontre plus tard tout en disant : « Attention, notre puissance nucléaire est plus forte ». C’est à la fois l’invitation et la menace ?

Oui, il souffle le chaud et le froid. Il parle de l’hostilité, de la confiance rompue, on revient à des termes que l’on avait connus avant la décision de tenir ce sommet. Ce qu’il se passe aussi dans l’entourage de Trump, c’est la nomination d’un nouveau secrétaire d’État, Mike Pompeo, qui est beaucoup plus dur que le précédent. Rex Tillerson [l’ex secrétaire d’État américain] avait beaucoup œuvré au rapprochement avec la Corée du Nord. Et puis surtout, il y a le conseiller à la sécurité intérieure, John Bolton, qui est un idéologue jusqu’au-boutiste sur la question des relations internationales. On a l’impression d’avoir vraiment perdu plusieurs mois.

« Vu de Russie, les succès de politique étrangère de Macron sont très modestes »

IRIS - jeu, 24/05/2018 - 16:32

Que vient faire Macron en Russie ?

Cette visite est la réponse de Vladimir Poutine à sa venue à Versailles, il y a un an. Emmanuel Macron vient discuter des grands problèmes de politique mondiale : l’Iran, la Syrie, l’Ukraine, le terrorisme… Il vient aussi essayer d’améliorer la relation bilatérale sur le plan politique, mais également économique.

Il y a un an, le président français avait évoqué les sujets qui fâchent sans détour. Peut-il encore se permettre un tel ton ?

Il ne reçoit pas, il est reçu : nuance essentielle en diplomatie. On ne se permet pas les mêmes choses. Emmanuel Macron dira ce qu’il a à dire à Vladimir Poutine, mais d’une façon sans doute moins abrupte qu’à Versailles. Dans ce genre de rencontre, l’essentiel se dit en coulisses, loin des micros. Les Russes y tiennent particulièrement.

Quelles relations entretiennent les deux dirigeants ?

On personnalise à l’excès la diplomatie. Les hommes comptent ; leur sensibilité et leurs tropismes pèsent. Mais à travers Emmanuel Macron, c’est avant tout la France que voit Vladimir Poutine. Une grande puissance mondiale, nucléaire, qui a su développer une politique étrangère indépendante, y compris pendant et après la Guerre froide.

Comment les Russes perçoivent-ils le président français ?

Comme un jeune leader ambitieux, qui essaie de reprendre le leadership du monde occidental, en tout cas de l’Europe. Mais Moscou ne cache pas ses doutes sur sa capacité à le faire, même dans un contexte d’affaiblissement relatif de la chancelière Angela Merkel.

Avec les États-Unis et même avec l’Allemagne, les succès de politique étrangère de Macron sont pour l’instant très modestes. Pour ne pas dire inexistants, vu de Russie.

La France ne brille-t-elle plus à Moscou ?

Les Russes la considèrent comme une puissance déclinante, qui joue un peu au-dessus de sa catégorie. Historiquement, la France était considérée comme la puissance politique dominante en Europe ; l’Allemagne étant l’interlocuteur économique privilégié. On voit un glissement majeur ces dernières années : pour Moscou, mais pas seulement, le leader européen, politique et économique, c’est l’Allemagne.

Les excès de Trump profitent-ils à Poutine ?

Sur l’Iran, Israël, le climat… Censé être l’allié principal des Européens, Trump est perçu comme allant trop loin. Paradoxalement, Poutine apparaît comme un dirigeant plus prévisible et raisonnable que le dirigeant américain. Il sait qu’il a une carte à jouer. Cela ne veut pas dire qu’il faille s’attendre à un grand chamboulement des relations internationales… Il reste beaucoup de contentieux à régler.

Sur l’Iran, Moscou et Paris sont d’accord. Ou presque ?

Les deux pays souhaitent que l’Iran reste une puissance non nucléaire. Mais la France estime que la meilleure chance de sauver l’accord, c’est de l’élargir, alors que les Russes ont une vision plus conservatrice. La France est d’ailleurs la seule à penser à un tel scénario…

Le désaccord est plus profond sur la Syrie…

C’est le dossier qui a le plus empoisonné les relations bilatérales franco-russes sous la présidence Hollande. Plus encore que l’Ukraine. Depuis le début du conflit, les positions de Paris et de Moscou sont à l’opposé. Mais la France a mis de l’eau dans son vin ces derniers mois. Elle prend acte du fait qu’elle n’a plus beaucoup de leviers sur le terrain… au-delà de quelques frappes, qui ont d’ailleurs été négociées avec les Russes, début avril.

Les Russes ont donc la main ?

Ils essaient des choses. Depuis la visite de l’Israélien Benjamin Netanyahu, le 9 mai, ils tentent de convaincre les Iraniens et le Hezbollah de quitter les zones frontalières d’Israël. Une autre visite, ou plutôt une convocation, a aussi pesé : celle de Bachar al-Assad à Sotchi, la semaine dernière, pour lui dire de commencer à penser très sérieusement à l’amorce d’un processus politique.

Poutine a su rendre la Russie incontournable…

Oui. Maintenant, son défi, c’est de montrer que la Russie peut également être utile au règlement des grandes crises et pas seulement être incontournable, avec un pouvoir de nuisance.

Mais rien n’est réglé en Ukraine !

Ce dossier ne bougera pas dans les dix-huit mois qui viennent, du fait des élections présidentielle et législatives de l’an prochain. De toute façon, personne ne croit, dans les chancelleries occidentales, que la Crimée puisse un jour revenir à l’Ukraine. Évidemment, ce ne sera jamais admis et l’annexion ne sera jamais reconnue légalement…

Quid des soupçons d’ingérences russes ?

Parmi les contentieux russo-occidentaux, il y a l’ingérence présumée dans les élections américaines ; il y a aussi les activités russes, au sens large, dans le cyberespace. Sans parler de l’affaire de l’ex-espion russe Sergeï Skripal (empoisonné début mars au Royaume-Uni). Les Russes ont été étonnés de voir la France valider les accusations britanniques de façon très ferme… Mais avant même cette affaire, des expulsions croisées d’agents de renseignement avaient déjà eu lieu, sans faire de bruit.

Pas de quoi empêcher de faire des affaires ?

Les intérêts français en Russie sont beaucoup importants que les intérêts français en Iran ! Mais les entreprises préfèrent rester discrètes car la Russie n’a pas très bonne presse…

 La France est le premier pays en termes d’investissements directs en Russie. Et reste le premier employeur étranger, avec près de 180 000 employés. Trente-cinq entreprises du Cac 40 sont implantées dans le pays. Mais toutes souffrent des sanctions et ont le sentiment de ne pas être soutenues par leur gouvernement.

Ce qu’il faut attendre de la visite de Macron en Russie au moment où les relations sont glaciales

IRIS - jeu, 24/05/2018 - 12:45

Alors que le Président français Emmanuel Macron effectue sa première visite en Russie en tant que chef de l’Etat, un constat s’impose: un an après sa rencontre avec Vladimir Poutine à Versailles, la relation bilatérale est très dégradée. Nos deux pays n’ont pas réussi à surmonter la défiance mutuelle et « l’esprit de Trianon » ne tient qu’à un fil, celui des entretiens qu’auront les dirigeants français et russe à Moscou et à Saint-Pétersbourg en marge du Forum économique.

Certes, le dialogue entre Paris et Moscou n’est pas interrompu. De nombreuses réunions ont eu lieu tout au long de l’année 2017 et jusqu’à aujourd’hui. De son côté, le Dialogue de Trianon – plateforme ayant pour mission de favoriser les échanges entre les sociétés civiles de France et de Russie – devrait monter en puissance après son lancement officiel par les présidents Macron et Poutine le 25 mai à Saint-Pétersbourg.

Plusieurs dossiers ont cependant affecté négativement les relations bilatérales ces derniers mois. L’Ukraine tout d’abord: aucun progrès significatif n’a été enregistré dans le Donbass, le processus de Minsk est au point mort, tandis que le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian qualifiait la Russie « d’Etat agresseur » lors d’une visite à Kiev en mars dernier. L’affaire Skripal et ses suites (boycott par le président Macron du stand russe au Salon du Livre et expulsions croisées de diplomates), la Syrie (absence de progrès sur le volet politique, attaque chimique présumée dans la Ghouta et frappes militaires occidentales) ainsi que d’autres contentieux strictement bilatéraux (affaires Barbereau et Kerimov, interpellation d’un agent des services secrets russes à Paris et renvoi de personnel de la DGSE en poste à Moscou) ont fait rechuter les liens entre nos deux pays à un état proche de celui de l’automne 2016, lorsqu’en pleine bataille d’Alep, Vladimir Poutine avait dû reporter sa visite à Paris. Aujourd’hui, les perceptions mutuelles sont très négatives, au niveau des élites et dans les médias tout au moins. En France, la Russie est largement vue comme une puissance révisionniste, qui joue sur les divisions intra-européennes et dont les ambitions sont déstabilisantes pour le continent. En Russie, la France est désormais perçue comme un pays ayant abdiqué sa souveraineté au nom d’une Europe sous tutelle stratégique américaine, en pointe d’un occidentalisme belliqueux et jouant au-dessus de sa catégorie.

La France et la Russie ne voient pas le monde de la même façon et ont des narratifs de plus en plus divergents. Les mêmes mots – souveraineté, terroristes, valeurs – y sont compris de façon différente. Ce décalage se nourrit d’une méconnaissance mutuelle croissante, paradoxalement plus importante aujourd’hui qu’à la fin de l’époque soviétique, et d’une couverture médiatique croisée où le devoir d’informer le cède souvent au souci de flétrir. Côté russe, la « révolution conservatrice » à l’œuvre depuis 2012 et la vague nationaliste consécutive à l’annexion de la Crimée éloignent durablement l’idée d’une convergence avec l’Europe, qui a sous-tendu la diplomatie russe pendant une quinzaine d’années, depuis la Perestroïka jusqu’à la fin du premier mandat de Vladimir Poutine au moins. L’européisation de la diplomatie française, particulièrement visible sur le dossier russe depuis le mandat de François Hollande, et l’horizon mental souvent limité au monde occidental des cercles de pouvoir parisiens, rétrécissent les marges de manœuvre de la France.

Nos deux pays disposent pourtant de nombreux atouts pour développer leur partenariat au XXIème siècle. Leurs coopérations universitaires, culturelles et scientifiques présentent une richesse et une diversité remarquables, héritage d’une longue tradition intellectuelle et de la visite du général de Gaulle en URSS à l’été 1966. Paris et Moscou peuvent en outre s’appuyer sur une relation économique qui a bien résisté aux multiples chocs de ces dernières années: combien de Français savent que leur pays occupait, en 2014, 2015 et 2016, la première place en Russie en termes d’investissements directs et qu’il y est toujours le principal employeur étranger? Les multiples projets soumis au Dialogue de Trianon témoignent par ailleurs d’une curiosité et d’une attraction mutuelle qui ne se démentent pas.

Dans ce contexte, qu’attendre des entretiens entre les Présidents Macron et Poutine? A minima, qu’ils mettent un terme à la spirale négative, à laquelle ni la France ni la Russie n’ont rien à gagner. Restaurer un peu de confiance exigera de la retenue – dans les déclarations, dans la sphère informationnelle, mais aussi dans des domaines sensibles comme le renseignement et le cyberespace. Peut-être le dossier iranien, sur lequel les positions de la France semblent plus proches de celles de la Russie que des Etats-Unis, permettra-t-il d’impulser une dynamique plus positive que ces derniers mois. À plus long terme, cependant, une amélioration sensible des relations franco-russes passe par une discussion au niveau européen sur l’architecture du continent, c’est-à-dire sur un modus vivendi dans notre « voisinage partagé », sur la politique d’élargissement de l’Union européenne et de l’OTAN, ainsi que sur la politique russe dans l’espace postsoviétique. Seul un aggiornamento stratégique de part et d’autre est de nature à briser le cercle vicieux dans lequel Russes et Occidentaux se trouvent depuis une décennie. La vérité oblige à dire qu’il paraît – hélas ! – aujourd’hui bien improbable. Il est de toute façon inenvisageable sans avancées tangibles en Ukraine.

L’histoire des relations russo-occidentales est, après les retrouvailles de la fin des années 1980, avant tout celle de rendez-vous manqués avec l’Histoire. En 1992 après l’effondrement de l’URSS, en 2001 après les attentats du 11 septembre ou en 2009 avec le reset d’Obama et les propositions de Medvedev sur une nouvelle sécurité européenne, l’inertie a pris le pas sur l’audace et les visions à long terme. Puisse la France jouer un rôle à la hauteur de sa relation historique avec la Russie pour contribuer à la nécessaire réunification de l’Europe.

Article co-écrit avec Pascal Lorot, Président de l’Institut Choiseul et directeur de la rédaction de la revue Géoéconomie.

Russie : visite symbolique du président Macron ?

IRIS - jeu, 24/05/2018 - 12:06

Emmanuel Macron effectue un déplacement en Russie ces 24 et 25 mai afin de rencontrer son homologue Vladimir Poutine. Au programme de cette rencontre, les dossiers syrien, ukrainien et l’accord nucléaire iranien, avant de se rendre au Forum économique de Saint-Pétersbourg. Malgré les divergences sur plusieurs sujets qui opposent ces deux nations, elles semblent faire face à une coopération inévitable, tant sur le domaine économique que géopolitique. Le point de vue de Jean de Gliniasty, directeur de recherche à l’IRIS et ancien ambassadeur de France en Russie.

Dans quel contexte géopolitique et stratégique cette visite se tient-elle ?

La visite d’Emmanuel Macron s’effectue dans un contexte international particulièrement agité, qui est en phase de recomposition. De nombreux événements permettent d’illustrer cette phase inédite au sein de la géopolitique mondiale : l’accord signé entre la Chine et les États-Unis qui prélude à un début de règlement de leur « guerre économique », les sanctions américaines contre les entreprises européennes qui continueraient de commercer avec l’Iran, sanctions contre lesquelles le Conseil européen, en fin de semaine dernière à Sofia, n’a pas pu trouver une solution viable. Dans le même temps, la situation en Syrie est toujours dans l’impasse sur le plan diplomatique, pendant que Bachar al-Assad s’impose progressivement face à l’opposition. Tandis qu’en Ukraine, le climat se tend de nouveau dans la région de la Crimée.

Ces différents éléments illustrent un cadre diplomatique incertain, marqué par une remise en cause de tous les acquis multinationaux et multilatéraux construits depuis 1945. Une redistribution des cartes s’opère dès lors à l’initiative des États-Unis, marquée par une réduction du système multilatéral, phénomène appuyé à la lecture de ces prémisses. Cette période trouble est propice à des initiatives diplomatiques, notamment de la part de la France, seule note positive de ce contexte particulier. C’est dans cette période que le président Macron a décidé de maintenir sa visite au Forum économique de Saint-Pétersbourg malgré les tensions issues de l’affaire Skripal (ancien espion russe empoisonné au Royaume-Uni) et du conflit syrien, afin d’entretenir le dialogue avec Moscou.

Alors que l’Élysée assure que le dialogue avec la Russie « a été maintenu », que doit-on attendre de cette rencontre ?

Le contexte évoqué précédemment n’a pas encore donné lieu à des changements majeurs, malgré la résurgence des initiatives bilatérales, spécialement de la part des États-Unis. Du côté des Européens, le Conseil européen de Sofia n’a pas clairement déterminé le positionnement de l’Union européenne face aux initiatives américaines et russes, hormis la réactivation du processus d’une « loi de blocage » datant de 1996, qui vise à neutraliser les effets extraterritoriaux des sanctions américaines pour les entreprises européennes.

Du côté russe, 80% des membres présents dans l’ancien gouvernement ont été renouvelés après la réélection de Vladimir Poutine ; Dmitri Medvedev a été à nouveau nommé au poste de directeur de « Russie unie ». Ainsi, le président russe semble garder toutes les cartes en main pour son 4e mandat, même s’il se peut que des changements au sein du gouvernement s’opèrent si la situation internationale ou intérieure tendait à se modifier.

Compte tenu des relations entre Paris et Moscou, les deux parties semblent être dans une période d’attente, entre tensions et volonté de dialogue, illustrée par un manque de positionnement affiché pour chacun d’entre eux. Ainsi, la visite d’Emmanuel Macron s’inscrit dans un contexte particulier, qui ne semble pas être propice à des décisions et percées majeures sur le plan diplomatique.

La visite d’Emmanuel Macron s’inscrit dans le cadre du Forum économique de Saint-Pétersbourg. Comment se porte l’économie russe, avec quelles perspectives ? 

La récente remontée du baril du pétrole au seuil de 80 dollars est une aubaine pour la Russie. En effet, le budget russe triennal a été calculé sur un baril à 40 dollars. Ce nouveau prix donne dès lors une marge de manœuvre considérable au pouvoir économique russe.

D’un point de vue intérieur, sur instruction du président, les disponibilités budgétaires et les nouvelles mesures concerneront davantage le domaine social – santé et éducation – que le domaine militaire. Le budget de la Défense de 2017, représentant 5% du PIB russe, a connu une diminution par rapport à 2016 et cet affaiblissement semble devoir durer ces prochaines années. Les disponibilités financières supplémentaires seront donc affectées pour l’essentiel aux affaires sociales et à la modernisation de l’appareil économique de la Russie. Ces objectifs de mandat permettront, dans une certaine mesure, de consolider le pouvoir de Poutine, dont les récents sondages de popularité lui donnent 80% en sa faveur. Cela étant, si les perspectives de croissance se situent ainsi autour de 1,5 – 2% par an, la question de la distribution de la croissance est problématique, le pouvoir d’achat ayant diminué de près de 9% depuis 3-4 ans. L’amélioration de la situation économique est dès lors le défi de Moscou pour ces prochaines années.

Par ailleurs, une priorité a été mise sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Leur développement, ainsi que celui de l’intelligence artificielle, nécessitent un climat de liberté entrepreneuriale qui semble se dégrader en Russie. Or, les mesures qui ont été prises notamment contre le réseau social Telegram, accusé d’encourager le terrorisme et la surveillance des réseaux, semblent s’insérer dans une volonté de contrôle de l’internet russe.

Enfin, les dernières décisions américaines concernant la Russie posent un dilemme important à Moscou : elles donnent en effet au département d’État américain la possibilité de juger si n’importe quelle transaction peut porter préjudice aux États-Unis, quel que soit l’auteur ou la firme concernée par celle-ci. Ainsi, pour la première fois, les sanctions américaines risquent de porter un coup dur à l’économie russe. Moscou va devoir traiter cette question rapidement, car des conséquences se profilent dès maintenant : Oleg Deripaska, le président de la société Rusal, premier producteur d’aluminium au monde, semble se mettre en retrait de son entreprise depuis l’annonce de ces sanctions …

Interview mit Thomas Kranig : Der "Klick-Kontrolleur"

Hanns-Seidel-Stiftung - jeu, 24/05/2018 - 11:28
Auch aufgrund der neuen Datenschutzgrundverordnung der EU ist das Thema Datenschutz hochaktuell. Wir haben bei einer Veranstaltung in Kooperation mit dem bayerischen Hospiz- und Palliativverband in unserem Konferenzzentrum dem Präsidenten des Landesamtes für Datenschutzaufsicht (BayLDA), Thomas Kranig, zwölf Fragen gestellt. Und Antworten bekommen.

Élections au Venezuela : entre pénurie démocratique et ingérences étrangères

IRIS - jeu, 24/05/2018 - 10:53

Nicolas Maduro a été réélu président du Venezuela avec près de 67,7 % des voix, élection sujette à de nombreuses contestations au sein du pays comme à l’international. La crise politique et économique se perpétue au Venezuela dans un contexte géopolitique défavorable à Caracas. Face à une abstention record, une non-reconnaissance de l’issue du scrutin par l’opposition, et la menace de sanctions de la part des États-Unis, le Venezuela s’enlise-t-il dans une crise encore plus profonde ? Pour analyser la situation, le point de vue de Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’IRIS, qui revient d’une mission d’observation des élections au Venezuela.

Nicolas Maduro a été réélu à la tête du Venezuela avec près de 67,7 % des voix. Malgré une forte abstention et une dénonciation d’irrégularités de la part de l’opposition, quelles leçons peut-on tirer de ce scrutin présidentiel ?

La société vénézuélienne est fatiguée politiquement parlant. Ce sentiment s’est ressenti à travers une abstention record atteignant les 54% de non-participation. Cette abstention n’est pas uniquement due à l’appel lancé par un certain nombre de partis d’opposition. De nombreux électeurs, qui en 2013 avaient voté pour le président Maduro, ne l’ont pas fait cette fois-ci, non pas par opposition, mais parce qu’ils sont pris dans les difficultés de la vie quotidienne : il n’y a presque plus d’argent liquide en circulation, conséquence de l’hyperinflation. Une partie des Vénézuéliens est donc dans l’obligation de se livrer à plusieurs activités afin de pouvoir vivre. Cette vie quotidienne empreinte de difficultés repousse les questions politiques au second plan. Elle permet de comprendre l’accroissement de l’abstention dans les quartiers populaires. Pour une autre partie de la société vénézuélienne, représentative des classes aisées et moyennes, favorables aux partis d’opposition, plusieurs centaines de milliers de personnes ayant quitté le Venezuela et ses difficultés figurent dès lors comme abstentionnistes sur les listes électorales.

C’est effectivement une victoire pour Nicolas Maduro, mais une victoire à la Pyrrhus. Pour autant, ce n’est pas une victoire pour l’opposition, qui est largement divisée. Le véritable vainqueur des élections est le parti des abstentionnistes. Ce qui fragilise tout à la fois l’assise de Maduro, mais également l’opposition qui apparaît incapable d’offrir une réelle alternative au pays.

Depuis 2014, le Venezuela connaît une crise politique et économique, marquée par une inflation des prix et une forte violence. Quels sont les défis qui attendent Nicolas Maduro ?

Le défi immédiat est la réaction des pays voisins, des États-Unis et de l’Union européenne. Un certain nombre de pays d’Amérique latine ont décidé de durcir leur position à l’égard du Venezuela. Ils ont rappelé leurs ambassadeurs. Dans leur majorité, ce sont des pays à orientations conservatrices, dirigés par des partis ou mouvements de droite. Le gouvernement nord-américain, dans la foulée des sanctions contre l’Iran, pourrait également annoncer une série de mesures visant à isoler économiquement et financièrement le Venezuela. Ce défi pourrait ajouter des difficultés à un pays qui fait face à une carence de liquidités sur son territoire, génératrice de désordres économiques et d’un mal vivre croissant. La ville de Caracas est quasiment dans le « black-out » faute d’énergie. Ce qui a perturbé la campagne électorale : à partir de 18h, la vie sociale et politique est suspendue faute d’éclairage public suffisant. Dès lors, un contexte d’insécurité domine dans la capitale, considérée déjà comme une des villes les plus dangereuses du continent.

Les défis du président Maduro concernent ainsi l’économie et la sécurité. L’inquiétude des autorités est de savoir si les États-Unis, vont aggraver la situation économique et politique du pays, en prenant de nouvelles sanctions, au risque de créer une situation de chaos. Mais cela n’est-il pas leur objectif inavoué ? Cela ne prépare-t-il pas une éventuelle opération de déstabilisation extérieure, visant à rétablir l’ordre des affaires et celui de la démocratie ? Ces menaces vont probablement amener le gouvernement de Maduro à renforcer ses relations avec la Chine, déjà fortement présente économiquement et diplomatiquement.

Ces élections se sont déroulées en pleine crise politique. Les 14 pays du Groupe de Lima ont annoncé le rappel de leurs ambassadeurs et les États-Unis ont déclaré qu’ils ne reconnaitront pas le résultat de la présidentielle. Comment analysez-vous cette situation ? Quelle posture faut-il attendre du Venezuela sur la scène régionale ?

C’est une situation assez paradoxale. La démocratie au Venezuela ne répond pas aux critères auxquels les Occidentaux sont habitués ; le vote est respecté. Mais l’appareil d’État favorise le candidat officiel. La critique est donc justifiée. Mais pourquoi cibler le seul Venezuela ? Certaines situations, en Amérique latine, en Asie, en Europe, sont tout aussi critiquables : le pluripartisme est interdit en Chine et à Cuba, le gouvernement hongrois n’est pas démocratiquement exemplaire, et la Turquie, encore moins. En Amérique latine, le président brésilien, est issu d’un coup d’État parlementaire, les élections au Honduras ont été inconstitutionnelles, le Pérou a un président qui s’est fait remercier pour corruption, etc. Dans ce panorama de la crise de la démocratie, le Venezuela fait figure de bouc-émissaire collectif et exclusif.

Cette situation répond davantage à des critères liés à la géopolitique, à des logiques diplomatiques que réellement éthiques. Le Venezuela est dans une situation diplomatique de plus en plus complexe, dans la mesure où la plupart de ses voisins, le Brésil, la Colombie, le Pérou, le Chili ou l’Argentine affichent une attitude agressive, calée sur la position des États-Unis.

Ce contexte amène Caracas à s’appuyer davantage sur ses alliés actuels qui vont renforcer leur capacité d’influence, soit la Russie, et plus fortement la Chine. Pékin a récemment signalé dans un communiqué qu’elle attachait la plus grande importance à ce que le résultat des élections au Venezuela soit reconnu au niveau international, preuve de sa forte relation avec Caracas, mais aussi de l’élargissement de sa sphère d’intérêts.

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