« Être ou ne pas être ensemble, telle est la question ». Donald Tusk, le président du Conseil européen, qui connait ses classiques, espère que les réponses qu’il a présentées hier aux demandes du gouvernement de David Cameron convaincront les Britanniques de rester dans l’Union lors du référendum qui devrait être organisé d’ici l’été. On peut d’ores et déjà parier que cela ne sera pas le cas : la Grande-Bretagne a un problème existentiel dans sa relation à l’Union qu’aucun arrangement technique ou aucun amendement aux traités européens ne réglera jamais.
Ainsi, Londres, au fil des ans, s’est taillé un statut sur mesure, ne participant qu’aux politiques qui l’intéressent: elle n’est ni dans l’euro, ni dans l’union bancaire, ni dans la politique d’immigration et d’asile, ni dans Schengen, ni dans la politique de défense et à peine dans le budget communautaire. C’est ce que leur rappelle longuement Donald Tusk dans ses propositions : leur singularité est reconnue dans les traités eux-mêmes et jamais une décision n’a été prise en Europe qui ait nui à leurs intérêts. Bien au contraire, l’Union d’aujourd’hui est largement « made in Britain ».
Pourtant, cela ne suffit pas à une classe politique et à une opinion publique hystérisisées par une presse europhobe qui fait feu de tout bois contre ce monstre continental, toujours trop bureaucratique et pas assez libéral. On peut même parier qu’une sortie pure et simple ne réglerait absolument pas le problème. Londres continuerait à voir dans chaque décision européenne, dans chaque pas dans l’intégration, une menace pour Albion, voire une agression ! Un exemple? Un Brexit permettrait à la zone euro d’enfin rapatrier sur le continent la majeure partie des opérations en euros qui se traitent pour l’instant à la City. On peut imaginer sans peine sa réaction le jour où cela se produira. Il n’y a, au fond, que deux moyens de rassurer durablement la Grande-Bretagne. Soit en lui reconnaissant sa légitimité à diriger l’Europe : « rule Britannia », en quelque sorte. Soit en atomisant façon puzzle le projet européen afin qu’elle puisse de nouveau jouer des alliances au mieux de ses intérêts. Plus personne ne se fait d’illusion, parmi les partenaires de Londres, sur le fameux pragmatisme britannique: chantre de la mondialisation heureuse, elle persiste à rêver de l’Europe telle qu’elle était au XIXe siècle…
Cette énième crise de nerfs britannique vient utilement rappeler une nouvelle fois aux dirigeants européens que le mythe d’une Union avançant d’un même pas vers un lumineux avenir commun est définitivement mort. Le coeur du projet communautaire, aujourd’hui, c’est la zone euro qui est, avec dix-neuf pays, probablement à son extension maximale. C’est elle qu’il faut intégrer et démocratiser d’urgence, sa survie en dépend, sans plus se préoccuper des autres États membres. C’est une révolution copernicienne qui serait nécessaire: un nouveau traité à dix-neuf créant une zone euro fédérale, une Europe puissance, qui laisserait subsister la vieille Europe, celle des 28, l’Europe espace. Ainsi, on empêcherait durablement la Grande-Bretagne et ses apprentis de nuire. Si l’Allemagne y est prête, la France, elle, est ailleurs. Et c’est cette absence qui est dangereuse, bien plus qu’un Brexit.
N.B.: version longue de mon édito paru dans Libération du 3 février
Le Secrétaire Général Thorbjørn Jagland répond aux informations selon lesquelles la police française a évacué des centaines de Roms à Paris. « Il est essentiel que les autorités françaises fournissent à toutes les personnes qui ont été contraintes de quitter le campement – dont des enfants et des personnes âgées – un autre logement adéquat, d’autant plus qu’ils ont décidé de prendre cette mesure pendant l’hiver.
Dans les estimations, 11 000 Roms ont été expulsés de chez eux en France l’an dernier.
Rien ne permet de penser qu’une politique d’expulsion de masse remédiera durablement à l’exclusion et aux préjugés auxquels doivent faire face de nombreux Roms.
Au contraire, les expulsions peuvent s’avérer contre-productives car elles perturbent souvent la scolarité des enfants roms et entravent l’action de ceux qui fournissent aux communautés roms des soins de santé de base, menant, par exemple, des campagnes de vaccination ».
La Cour européenne des droits de l’homme a déjà eu l’occasion de se prononcer sur ce type d’Affaire. (Arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière : Winterstein et autres c. France ) Cette affaire portée devant la Cour européenne des droits de l’homme du Conseil de l’Europe concerne une procédure d’expulsion engagée contre plusieurs familles de Gens du voyage qui vivaient sur un même emplacement depuis de nombreuses années. Les tribunaux nationaux ont rendu des ordonnances d’expulsion des familles, sous astreinte. Bien que les ordonnances n’aient pas été appliquées, de nombreuses familles ont déménagé. Seules quatre familles ont été relogées dans des HLM ; des dix sites où les autres familles devaient être relogées n’ont pas été créés. Les quatorze requérants se sont plaints notamment que l’ordonnance les contraignant à évacuer le terrain qu’ils occupaient depuis de nombreuses années était une violation de leurs droits au respect de leur vie privée et familiale et de leur domicile.
La Cour a estimé qu’il y avait eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile) de la Convention. Elle a fait notamment remarquer que tout en reconnaissant le défaut d’urgence et l’absence de troubles manifestement illicites, les tribunaux n’ont pas pris en compte l’ancienneté de l’installation des requérants, la tolérance des autorités municipales, le droit au logement, les dispositions des articles 3 et 8 de la Convention et la jurisprudence de la Cour. La Cour a souligné à cet égard que les nombreux instruments internationaux et ceux du Conseil de l’Europe soulignaient la nécessité, en cas d’expulsion de Roms ou de Gens du voyage, de fournir aux personnes concernées un autre logement. Les autorités nationales devaient prendre en compte le fait que ces requérants appartenaient à une minorité vulnérable, ce qui suppose d’accorder une attention particulière à leurs besoins et à leur mode de vie différent lorsqu’il s’agit de trouver des solutions à l’occupation illicite de terrains ou de prendre une décision sur l’attribution éventuelle d’un autre logement.
Pour en savoir plus :
Les États membres seront bientôt obligés de fournir leurs voisins en électricité en cas de pénurie, au sein de 9 grandes régions européennes.
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Quelles seraient les vraies conséquences d'une sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne? Comment l'anticiper ? Un article de notre partenaire, La Tribune.