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Actualité. Réflexions. Reportages
Updated: 2 hours 7 min ago

Une compagnie belge dans l’opération Barkhane. Un accord politique encore nécessaire

Thu, 26/11/2020 - 12:30

(B2) Les Belges devraient s’engager au Mali en 2021 de façon plus robuste qu’aujourd’hui

(crédit: mil.be)

Une compagnie ou sous GTIA dans Barkhane

Un « sous GTIA » selon l’appellation française, une compagnie selon l’appellation belge devrait être intégrée à l’opération Barkhane, selon nos éléments, et non pas dans la task-force Takuba. Environ 200 hommes, venant surtout de la composante terre de l’armée belge, qui milite en particulier pour cet engagement permettant de tester également ‘grandeur nature’ ses nouveaux blindés Griffon et Jaguar, en interopérabilité totale avec les Français (1).

La prudence officielle

Ceci se retrouve explicité dans la note de politique générale du ministère de la défense soumise à la Chambre des députés, début novembre : « un déploiement d’un sous-groupe tactique d’armes combinées (CATSG ou Combined Arms Tactical Subgroup), éventuellement dans le cadre de l’opération française Barkhane, sera étudié plus avant et, le cas échéant, fera l’objet d’un débat parlementaire. » Un propos très prudent, qui tranche avec les autres engagements relatés de façon plus décisive dans cette note (EUTM, Minusma). Du côté du cabinet de la ministre belge de la Défense, la jeune Ludivine Dedonder, contacté par B2, on ne veut pas en dire vraiment plus.

Une ‘décision’ très politique

L’explication est très politique, comme me l’a confié un collègue bon connaisseur de la défense belge. La décision appartient normalement à l’exécutif en Belgique. Mais il n’y a pas d’unanimité, au sein de ce qu’on appelle la coalition ‘Vivaldi’ (2). Si les libéraux et socialistes francophones sont assez allants, Verts francophones, Ecolos et Socialistes flamands notamment ne ressentent pas une envie forcenée envers ce qui peut apparaitre comme une ‘aventure’ militaire. D’où la décision du gouvernement de recourir à une discussion parlementaire, une sorte d’approbation lui permettant d’éviter une crise sur un sujet accessoire en pleine crise du Covid-19.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Sur le sujet, lire aussi FOB qui a été un des premiers à couvrir cette information

  1.  Un exercice commun avait rassemblé, il y a un an, les deux partenaires. Lire : Le premier exercice ‘CaMo’ en Belgique a commencé et Insurrection celtique en province de Luxembourg.
  2. Par référence aux quatre saisons du compositeur italien et de son illustration colorée — vert, rouge, orange, bleu — qui symbolise les couleurs des principaux partis qui en sont membres (Ecolos, Socialistes, Chrétiens-démocrates flamands, Libéraux).

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Sécurité en Méditerranée. Deux jours pour réfléchir, comprendre et partager des idées (Fabio Agostini)

Wed, 25/11/2020 - 18:00
(crédit : EUNAVFOR Med Irini)

(B2) A la veille de la conférence ‘Shade Med’, l’amiral Fabio Agostini, commandant de l’opération européenne Irini explique le pourquoi et le comment de cette arène virtuelle qui va réunir des acteurs civils et militaires des trois continents autour de la Mare nostrum

Un moment clé

En ce moment historique, d’une grande complexité et d’une effervescence remarquable, célébrer la mer Méditerranée dans un forum est une étape nécessaire. Cette conférence SHADE MED (Shared awareness and De-confliction in the Mediterranean) qui a lieu jeudi et vendredi (26-27 novembre) est importante. Elle va permettre à tous les professionnels et au public qui se connecteront par vidéoconférence de discuter des défis de la région et des perspectives d’avenir possibles.

Un lieu d’échanges essentiel, un pont entre l’Atlantique et l’Indo-Pacifique

Le bassin méditerranéen est désormais un ‘pont d’eau’ qui assure une continuité, avec les connexions commerciales, de l’Atlantique à l’Indo-Pacifique. Il s’agit d’une zone avec un taux très élevé d’échanges économiques et culturels, avec des acteurs historiques et nouveaux ainsi que des puissances régionales intéressées à avoir un certain poids influent en la matière.

Coopérer en Méditerranée un défi

Le thème de SHADE MED de cette année — « Les défis de la coopération en Méditerranée après la pandémie mondiale »— permettra d’éclairer les différents scénarios possibles et, grâce à des intervenants de haut niveau, ouvrira la voie à de nouvelles initiatives communes au profit de tous les acteurs qui ont des intérêts et partagent des objectifs liés à cette mer stratégique.

Une arène virtuelle pour trois continents

Je tiens beaucoup à ce séminaire international qui, précisément à cause de la pandémie du Covid-19, se déroulera en ligne. Pendant deux jours intenses, cela va être une arène virtuelle avec des participants des trois continents surplombant la mer Méditerranée mais aussi le quartier général de l’opération de l’UE IRINI que j’ai l’honneur de commander.

Réfléchir, comprendre et partager des idées

Nous estimons qu’il est nécessaire de réfléchir, de comprendre et de partager des idées sur la manière de faire face à la période actuelle et sur ce qui suivra la pandémie au niveau économique, humain et structurel dans la zone méditerranéenne. Je suis convaincu que si nous nous posons les bonnes questions et si nous faisons face à la réalité avec une approche holistique mais néanmoins pragmatique, nous pouvons réellement obtenir des résultats durables.

Il reste beaucoup à faire

Dans le cadre de l’opération IRINI, par exemple, nous avons essayé de traiter cette question en adoptant plusieurs mesures, en gardant toujours une attitude positive et proactive. Cependant, nous sommes conscients qu’il reste encore beaucoup à faire, à différents niveaux (pas seulement opérationnel), pour gérer raisonnablement tous les défis que le Covid-19 et la région méditerranéenne apportent avec eux.

Notre mission : garantir stabilité et sécurité en Méditerranée centrale

Notre ambition, avec cette conférence, d’apporter une contribution proactive. En restant à équidistance des parties, nous travaillons jour après jour pour garantir la stabilité et la sécurité en Méditerranée centrale. Notre avenir est écrit dans cette mer, berceau de la civilisation, une route bleue pour l’avenir, un scénario de défis et de grandes opportunités que la pandémie du Covid-19 nous force à saisir. Il nous appartient d’être proactifs et vigilants pour le bien-être commun.

Contre-amiral Fabio Agostini, commandant de l’opération IRINI

Titres et intertitres sont de la rédaction

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Sahel. La Grèce s’engage dans Takuba aux côtés des Français

Wed, 25/11/2020 - 06:10

(B2) La Grèce devrait envoyer une unité militaire dans la task-force Takuba au Mali. Un gage de son engagement européen

Eléments de l’escadron parachutiste des forces spéciales (crédit : Alpha TV)

Athènes pourrait envoyer une petite unité militaire, dans le cadre de l’opération anti-terroriste initiée par la France, plus particulièrement dans le triangle des trois frontières, aux confins du Mali et du Niger.

Une unité de petite taille

La mission grecque sera de « petite taille » et impliquera du personnel des forces spéciales, selon notre collègue Savvas Vlassis du média grec Doureios. Ils devraient provenir de l’escadron parachutiste des forces spéciales (ou ETA comme Eidiko Tmima Alexiptotiston), une unité d’élite de l’armée grecque.

Pour la force protection

Au préalable, deux officiers des forces spéciales devraient être envoyés au Mali, en repérage, afin de s’informer sur le cadre opérationnel, se faire une image de la lutte en cours et de la mission de Takuba. Le contingent suivra ensuite. L’unité grecque devrait assurer, au début, la ‘force protection’ du camp.

La Grèce est le cinquième pays européen à s’engager dans cette opération au sahel (après l’Estonie, la Tchéquie, la Suède et l’Italie).

Commentaire : un engagement africain peu courant

Cet engagement des Grecs sur le terrain terrestre est suffisamment rare pour ne pas être signalé. Athènes n’avait pas montré un engagement notoire sur le terrain africain jusqu’ici. Les Héllènes ne sont actuellement que deux dans la mission de formation de l’UE de l’armée malienne (EUTM Mali). On peut donc y voir une contrepartie, solidaire, à l’engagement français indéfectible aux côtés des Grecs dans leurs différents répétés avec la Turquie. La France a d’ailleurs encore récemment envoyé plusieurs navires en Méditerranée orientale (lire : MEDOR. Trois navires et deux avions français pour surveiller du coin de l’œil la Turquie).

Un tournant grec dans la défense européenne

Mais il ne s’agit pas d’un simple retour d’ascenseur. La Grèce effectue un retour notable dans le dispositif européen de la défense, sous la direction du premier ministre (Nouvelle Démocratie), K. Mitsotakis. Après une période de prudence, elle s’est impliquée de façon notable dans la coopération structurée permanente (PESCO), coordonnant 5 des 26 projets les plus prioritaires. Elle est entrée récemment dans l’initiative européenne d’intervention (IEI) lancée par Paris. Elle commande aujourd’hui la force maritime en mer Méditerranée (EUNAVFOR Med Irini) y contribuant directement avec un navire et un avion de patrouille maritime. Enfin, lors de la réunion des ministres de la Défense de l’UE, vendredi dernier (20.11), le Grec Nikolaos Panagiotopoulos avait appuyé sur « l’intérêt commun » des États membres à « parvenir à la stabilité au Sahel et à renforcer la sécurité dans l’ensemble de la région », en particulier au Mali.

Une demande française de longue date

Cela répond à une demande française exprimée à plusieurs reprises. Le président français Emmanuel Macron l’avait évoqué de façon sybilline en recevant le premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis fin janvier, parlant « d’opération conjointes maritime comme terrestre ». La ministre des Armées Florence Parly l’avait exprimé plus directement lors d’une rencontre avec son homologue grec, à Athènes en février. « J’ai demandé à mon homologue de considérer l’engagement, à un niveau significatif, des forces armées grecques à nos côtés, au sol, en Afrique, pour lutter contre la menace terroriste et neutraliser au plus loin les trafics. » « Cet engagement exigeant est porteur d’une forte expérience opérationnelle et d’une plus grande interopérabilité de nos forces. » avait-elle ajouté. (Télécharger ici). Et le sujet aurait été à nouveau abordé lors du sommet Med7 en Corse début septembre (lire : Sommet Med7. Les Méditerranéens menacent la Turquie de sanctions).

(Nicolas Gros-Verheyde)

Correction apportée sur la dénomination de l’entité. Il ne s’agit plus de la gendarmerie

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Hailing, Approche amicale, Arraisonnement, Abordage… les opérations d’interception maritime

Tue, 24/11/2020 - 23:55

(B2) Héler, intercepter, arraisonner des navires relève du commun de l’action maritime en mer. Et de l’opération Irini en particulier. Mais encore faut-il bien distinguer les différentes modalités

L’hélicoptère est souvent utilisé pour se rendre rapidement sur le navire. C’est une bonne alternative au bateau à coque rigide (alias Zodiac), surtout en mer agitée, ou pour arriver sur un navire haut sur l’eau. L’engin survole le navire visé, et les militaires glissent le long d’une corde pour prendre pied. – Ici L’hélicoptère de bord du Hamburg en manœuvre (crédit : Bundeswehr 11 novembre – Archives B2)

Des opérations d’interception maritime

Selon la situation et le degré de suspicion vis-à-vis de la rupture de l’embargo sur les armes ou le pétrole vers/de la Libye (1), il existe plusieurs options de visite : du simple interrogatoire (ou hailing) et de l’approche amicale (friendly approach) à l’arraisonnement plus ou moins ‘rude’. On distingue ainsi trois types d’arraisonnement, selon la volonté de coopération du navire: l’arraisonnement sans opposition (ou coopératif), l’arraisonnement non coopératif et l’arraisonnement avec opposition. Ces options diffèrent en termes de degré de force utilisée (non létale et létale).

Deux objectifs : information et vérification

Pour l’opération européenne de contrôle de l’embargo au large de la Libye (EUNAVFOR Med Irini), l’objectif général de ces interrogations ou interceptions est tout d’abord de recueillir des informations, de montrer la présence également, voire d’effectuer une fouille plus précise en cas de suspicion avérées.

Par voie de mer ou d’air

L’équipe de visite arrive à bord soit par voie de mer (bateau à coque rigide type RHIB ou Zodiac), soit par la voie des airs (hélicoptère). Cette dernière modalité souvent préférée pour des raisons de rapidité et d’adaptabilité à tous les temps (notamment en cas de mer un peu houleuse ou agitée) et aux navires hauts sur l’eau.

Codifiées dans les règles d’engagement

Toutes ces interventions se retrouvent normalement codifiées dans les « règles d’engagement » de l’opération Irini. Les ‘ROE’ (selon l’appellation courante des militaires) constituent là, un « cadre juridiquement contraignant » pour l’emploi de la force. Si elles paraissent insuffisantes au regard de la situation, et pour permettre l’arraisonnement, le chef d’équipe doit obtenir l’autorisation du commandant de la force pour mettre en œuvre d’autres mesures.

Les cinq formes d’approche d’un navire

Premier contact : le hailing

Le « hailing » (hélage ou interrogation) est le premier contact avec un navire . Il s’effectue en général via la radio maritime VHF. L’interrogatoire implique la collecte de données sur un navire marchand : données générales et techniques, équipage, cargaison, destination et historique du voyage (départ, escales, horaires, etc).

Les informations obtenues sont alors transmises au commandement de l’opération de l’UE, qui les évalue. Et, si nécessaire, ordonne des mesures supplémentaires. C’est là que tout commence. C’est la base d’un processus. Si rien de suspect n’est constaté, l’appel est discret. Le navire interrogé est relâché et peut poursuivre son voyage en tant que navire dit autorisé. S’il y a un élément à vérifier, on passe à la suite avec des mesures militaires supplémentaires nécessaires (cf. ci-dessous).

Second mode : l’approche amicale (Friendly approach)

Par définition, l’approche amicale n’est pas l’arraisonnement, mais plutôt l’approche d’un navire non suspect. Cela nécessite « toujours » le consentement de son capitaine. Le consentement de l’État de pavillon n’est pas nécessaire. L’utilisation de mesures coercitives, l’attribution de lieux, la collecte de données personnelles et les recherches sont interdites.

Le but est, ici, de recueillir des informations, au besoin de clarifier les conversations radios, comme d’informer l’équipage sur l’objectif de l’opération. Il permet ainsi de faire comprendre la présence des navires de guerre dans la zone maritime et d’établir une confiance mutuelle. C’est un outil de présence, de dissuasion comme d’information. Une ‘aimable conservation’ de police en quelque sorte.

L’arraisonnement sans opposition (Unopposed Boarding)

L’arraisonnement sans opposition représente le niveau le plus bas des ‘abordages’. S’il y a un soupçon de violation de l’embargo sur les armes, c’est souvent sur ce format que le navire de guerre se dirige.

En principe, le consentement du capitaine civil et celui de l’État du pavillon doivent être requis. L’équipage est dit coopératif. La résistance n’est ni attendue ni avérée. En gage de coopération, en général, une échelle de pilote est lancée à l’équipe de visite, venant par le hors-bord. Le chef d’équipe est normalement un des premiers récupérés par le premier officier du navire.

L’équipage est consigné dans un espace commun. L’équipe de visite, en coopération avec lui, fouille soigneusement le navire sous sa propre sécurité. Les membres d’équipage sont photographiés et identifiés. Tous les documents et pièces du navires sont consultés et évalués. 

L’arraisonnement non coopératif (non-cooperative Boarding)

Dans ce cas, ni le consentement de l’État du pavillon ni celui du capitaine ne sont acquis. L’équipage prend parfois des mesures de résistance passive pour rendre difficile l’embarquement de l’équipe, le retarder ou l’empêcher. Des exemples typiques sont le fait de ne pas répondre aux appels vocaux marins ou de refuser qu’ils montent à bord, y compris de ne pas déployer une échelle de pilote.

Pour l’équipe de visite, cela signifie recourir à des règles d’engagement un peu plus larges. Elle pourra ainsi monté à bord du navire marchand contre la volonté de l’équipage et le fouiller de façon plus élaborée. Lors de la fouille, une partie des militaires assureront la protection des autres.

Arraisonnement de force (Opposed Boarding)

C’est le niveau d’arraisonnement le plus robuste. Le navire suspect refuse activement de laisser monter l’équipe d’arraisonnement. En règle générale, l’équipe doit alors forcer l’accès. Du côté de l’équipage, il s’agit clairement de contrer la visite. L’équipe de visite, en coopération avec un membre de l’équipage fouille soigneusement. Le reste de l’équipage est consigné dans un espace commun

Le risque d’un incident est élevé et le recours à la violence armée est concevable des deux côtés. À bord du navire, l’équipe de visite doit adopter une approche tactique qui met l’accent sur la sécurité de l’équipe et permet en même temps de sécuriser les preuves, les données et les informations. En général, cet arraisonnement nécessite l’utilisation de forces spéciales.

Et après la visite ?

S’il n’y a pas de problème, après enquête complémentaire au besoin, le navire marchand est libéré pour continuer le voyage. Il est « important d’éviter autant que possible les retards dans l’intérêt des compagnies maritimes » précise un officier maritime. Si le soupçon de violation est avéré, « des mesures supplémentaires » peuvent être requises.

Déroutement vers un port de diversion

Le navire va par exemple être dérouté vers un port de l’Union européenne, sous escorte (2). Il y en a pour l’instant un déjà désigné : Marseille (lire : Le port de Marseille, port de déroutement pour Irini). Mais un ou deux autres devraient être désignés rapidement (en Grèce et/ou en Italie), afin de mener une enquête plus approfondie sur le navire et sa cargaison. Des échantillons peuvent ainsi être prélevés s’il s’agit d’une cargaison liquide (violation de l’embargo sur le pétrole) et analysés à terre.

Garde à vue et mise sous séquestre

Si le soupçon est avéré, la saisie du navire (ou sa mise sous séquestre à titre conservatoire), la mise en garde à vue du capitaine ou de certains officiers de l’équipage, le consignement de celui-ci à terre ou sur leur navire peuvent être ordonnés. Les poursuites pourront être engagées ensuite soit par l’Etat du port de diversion, soit (au besoin après transfert) par l’Etat du pavillon du navire ayant procédé à l’arrestation. La base de ces poursuites reste la résolution de l’ONU sur le contrôle de l’embargo sur les armes.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Ces règles s’appliquent +/- pour l’action anti-pirates. Avec une différence fondamentale : le délai de piraterie, codifié dans le droit de la mer, autorise (surtout en absence d’État du pavillon) un contrôle plus robuste.
  2. On parle de déroutement ou diversion (selon la terminologie anglaise).

Cet article est extrait de conversations avec les militaires, de la communication officielle et des données de l’opération Irini. La réalité est un peu complexe. Mais nous avons essayé d’être aussi didactique que possible. Toutes les précisions ou ajouts sont bienvenus (case commentaires)

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La Turquie proteste officiellement contre l’interception d’un de ses navires marchands par l’opération Irini (v2)

Tue, 24/11/2020 - 01:48

(B2) Le ton monte à Ankara. L’affaire du Roseline A prend une tournure très politique

Le MV Roseline A arraisonné par les militaires allemands du Hamburg (crédit : EUNAVFOR Med Irini)

Protestation officielle

Le ministère turc des Affaires étrangères a ainsi convoqué lundi (23.11) les ambassadeurs européen, italien et allemand pour leur remettre une note de protestation officielle après l’arraisonnement par la frégate allemande Hamburg dans le cadre de l’opération Irini de ce navire marchand (lire : Grabuge turco-germanique en Méditerranée orientale. Ankara s’oppose au contrôle d’un de ses navires (v2)). « Un acte non autorisé et forcé » selon lui.

Un navire qui transportait de la peinture et des biens humanitaires !

Selon les autorités turques, en effet, le MV Roseline A, ne transportait que « de la peinture, du matériel lié à la peinture et des biens d’aide humanitaire ». Le capitaine du navire « a coopéré et a partagé des informations détaillées sur la cargaison du navire et son itinéraire ». « Néanmoins, à 17h45, des éléments armés de l’opération Irini sont montés à bord du navire et ont effectué une longue ‘inspection’ durant des heures ».

Des méthodes robustes

Tous les membres de l’équipage, y compris le capitaine, « ont été fouillés de force, rassemblés et confinés dans un seul endroit, les conteneurs ont été fouillés par la force, tandis que le capitaine a été placé sous la garde d’un militaire armé. » Une intervention « menée sans le consentement ni de la Turquie, en tant qu’État du pavillon ni du capitaine du navire ». L’intervention aurait « duré jusqu’après minuit » selon le communiqué de la diplomatie turque, et « n’a pris fin que sur les objections persistantes de la Turquie ». Le personnel armé est resté à bord et a quitté le navire marchand à 9h38 du matin.

Le consentement de l’État du pavillon

Et la Turquie d’annoncer qu’elle se réserve le droit de demander une « indemnisation des personnes physiques et morales concernées pour les dommages et pertes pouvant résulter de cet acte ». Le consentement de l’État du pavillon « avant d’interférer avec les navires marchands dans les eaux internationales » est nécessaire, poursuit le communiqué. « Les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur l’embargo d’armes vers la Libye n’éliminent pas cette obligation ».

Une opération lancée sans l’aval de la Turquie et de l’OTAN

Au passage, les Turcs contestent — c’est courant — la « neutralité de l’opération Irini », avec un argument nouveau cette fois. L’UE l’aurait « lancée sans consulter ni le gouvernement légitime de la Libye, ni la Turquie ni l’OTAN ».

Commentaire : on peut avoir quelques doutes sur les leçons de droit international d’un pays qui n’a pas signé la convention de Montego Bay et a violé à plusieurs reprises les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU (notamment sur Chypre). Sa version des faits est à considérer. Mais elle ne parait pas correspondre tout à fait à celle donnée tant par les autorités européenne qu’allemande (lire notre papier mis à jour, Grabuge turco-germanique en Méditerranée orientale. Ankara s’oppose au contrôle d’un de ses navires). Quant au dernier argument, sur l’opération Irini, on est là dans un joyeux délire. Se déroulant en haute mer, sur la base (et l’injonction) d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, l’Union européenne n’a ni à demander le consentement de la Libye et encore moins de la Turquie ou de l’OTAN. Ankara semble se comporter en l’espèce comme chargé d’un protectorat sur la Libye. Un leurre d’une autre époque.

(NGV)

En savoir plus : voir quelques images de l’interception (via Reuters)

Mis à jour – Ajout du commentaire afin d’éviter de prendre pour argent comptant toute la position turque

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Grabuge turco-germanique en Méditerranée orientale. Ankara s’oppose au contrôle d’un de ses navires (v3)

Mon, 23/11/2020 - 13:45

(B2) L’arraisonnement d’un porte-conteneurs turc suspect par une frégate allemande participant à l’opération Irini a tourné court dimanche au large de Benghazi

L’équipe d’arraisonnement du Hamburg à bord du porte-conteneurs Roseline A (crédit : EUNAVFOR Med Irini)

Un navire de la compagnie Arkas repéré entre Crête et Libye

Tout a commencé quand un navire marchand turc ‘Roseline A‘ a été intercepté dimanche (22.11) après-midi par la frégate allemande ‘Hamburg’, à environ 160 nautiques (env. 280 km) au nord de Benghazi, dans l’est de la Libye. Une interception faite dans le cadre d’un mandat international de contrôle de l’embargo sur les armes et de l’opération européenne maritime EUNAVFOR Med Irini.

… avec suspicion de transport d’armes

Il était 15h30 selon les sources officielles. Le porte-conteneurs, battant pavillon turc, et appartenant à la compagnie Arkas (qui travaille notamment pour la Deutsche Bahn), avait quitté Ambarli en Turquie, direction : Misrata (port sous contrôle du gouvernement de Tripoli). Il était suspecté de contenir des armes à destination de la Libye.

Les soldats allemands priés de retourner dans leur navire

Une mission qui n’est pas « de routine », contrairement à ce que disent certains médias (1). Quand un navire turc est fouillé, on s’attend à une réaction. Celle-ci n’a pas tardé. « Quelques heures seulement après que les soldats allemands aient embarqué sur le navire en fin d’après-midi », la Turquie a officiellement protesté selon le média Der Spiegel.

D’une attitude coopérative à un refus net d’Ankara

Point confirmé à la Bundeswehr. « Au départ, la situation à bord était coopérative », précise l’état-major allemand des opérations dans un tweet (2). Mais « par la suite » le vent a tourné : l’État du pavillon — la Turquie — n’a pas accepté l’arraisonnement ». Contactée par B2, l’opération Irini, confirme avec quelques précisions supplémentaires.

Des efforts de bonne foi pour obtenir l’accord de l’Etat du pavillon

D’une part, l’opération européenne a fait des « efforts de bonne foi » pour obtenir le consentement de l’État du pavillon (la Turquie). Mais celui-ci n’a « pas répondu ». D’où cette inspection avec la coopération du « capitaine du navire comme de l’équipage ».  Ce n’est qu’ensuite que l’État du pavillon a « clairement indiqué qu’il refusait l’autorisation d’inspecter le navire ». Ordre (3) a alors été donné de suspendre l’activité d’inspection. NB : selon nos informations les contacts avec l’Etat du pavillon ont duré environ quatre heures. Une longueur prouvant la volonté des Européens d’obtenir une réponse

À bord jusqu’au lever du soleil par sécurité

L’équipe d’arraisonnement est cependant « restée à bord jusqu’au lever du soleil », après avoir « consulté » et obtenu l’accord du capitaine du navire marchand. Ce « afin de pouvoir rentrer sur le Hambourg en toute sécurité », précise-t-on du côté allemand. Le ‘Roseline A’ a alors pu poursuivre sa route vers la Libye et a atteint Misrara dans la journée lundi. Officiellement, selon les Turcs, le navire transportait de l’aide humanitaire. « Aucun matériel illicite n’a été trouvé à bord durant l’inspection » affirme-t-on à Irini. NB : un point qui doit être relativisé. Les militaires n’ayant matériellement pas eu le temps de tout fouiller à bord.

Un rapport sera fait à l’ONU

Interrogé par la presse au point de midi (4) ce lundi (24.11), Peter Stano, le porte-parole du Haut représentant de l’UE, a tenu à préciser trois points.

Premièrement, l’opération Irini agit « toujours en fonction d’un certain nombre d’informations dont elle dispose », dans le cas « d’inspections, d’appels ou de communications avec des navires suspects ». Il ne s’agit pas de contrôles tout à fait au hasard…

Deuxièmement, l’État du pavillon sous lequel navigue le navire « a le droit de refuser l’inspection ». Quand l’opération Irini fait la demande, si l’Etat responsable n’est pas d’accord, l’inspection ne peut pas avoir lieu. Bien sûr, il y a eu « des contacts entre nous et les partenaires turcs, car les Turcs ne donnent pas l’autorisation d’effectuer l’inspection des entités dont ils sont responsables ».

Troisièmement, « dans le cas de non-inspection — et dans de nombreux cas d’inspection, d’appel ou de soupçons —, Irini en fait rapport à l’ONU ».

Et d’ajouter, en guise de préambule : il est « important qu’Irini s’acquitte de son mandat ». Il s’agit « de faire respecter l’embargo » établi au niveau international (et approuvé unanimement au Conseil de sécurité des Nations unies). NB : L’opération Irini a, jusqu’ici, effectué cinq arraisonnements de ce type.

Commentaire : une volonté turque réelle de contourner l’embargo

Cet évènement n’est pas sans rappeler l’affaire du cargo turc Cirkin, en juin dernier, qui avait refusé à plusieurs reprises le contrôle tant par les navires de l’opération Irini (lire : Un cargo sous escorte turque soupçonné de violer l’embargo sur les armes), que par les navires de l’OTAN. Contrôle qui avait débouché, au final, après un nouveau contrôle, en un incident rarissime entre alliés, impliquant la frégate française Courbet (lire : Le Cirkin n’en était pas à son coup d’essai. Un navire français illuminé au radar).

De possible suspect, le navire devient véritablement suspect

On assiste à la même volonté d’échapper au contrôle sur ordre des autorités d’Ankara, avec le même prétexte de l’aide humanitaire. L’un étant contradictoire avec l’autre. Vu la catégorie de navires, porte-conteneurs, il parait évident que le navire ne contenait pas que des armes. Mais il n’est pas exclu du tout qu’un ou plusieurs containers recelaient de tels équipements… Au vu de l’attitude turque, on peut avoir un (très) gros doute. Si on est vraiment face à de l’aide humanitaire, il n’y a aucun motif de s’opposer au contrôle.

Le bras de fer entre Européens et Ankara se poursuit

Alors qu’un missi dominici turc (le conseiller à la sécurité nationale du président turc) était en visite à Bruxelles vendredi (20.11) pour convaincre des hauts fonctionnaires européens de la bonne volonté turque, cet incident montre que rien n’a changé à Ankara. En provoquant l’Allemagne, qui est un farouche partisan du dialogue ‘positif’ avec la Turquie, il n’est pas sûr que Recep Tayyip Erdogan améliore ses relations avec les Européens. Or, les chefs d’État et de gouvernement doivent se prononcer les 10 et 11 décembre sur la mise en place de mesures de rétorsion, à commencer par la réduction des relations avec l’ancien empire ottoman.

(Nicolas Gros-Verheyde, avec Hannah Guérin st.)

  1. L’inspection d’un porte-conteneurs venant d’Égypte mercredi s’est passée sans problème (lire : Méditerranée. Un porte conteneurs inspecté par la frégate grecque Adrias).
  2. Ce cas de figure permet de procéder à l’inspection à bord, avec l’accord du capitaine du navire, sans nécessiter d’accord supplémentaire. Lire article à suivre
  3. Le commandant de la force est aujourd’hui un grec, le commodore Theodoros Mikropoulos, et le commandant d’opération, un Italien, l’amiral Fabio Agostini. (lire : Irini. Un Grec prend le commandement de la force navale au large de la Libye).
  4. Voici le script complet de la réponse, dressé par B2 : Operation Irini is a very important to contribution by the EU to find solution, peaceful solution to the Libyan crisis. Over the last days, or in the recent weeks, we have seen steps which are a cause for a relatively cautious optimism that we are heading or at least advancing slowly towards the possible solution on the ground. And it is important that Irini delivers on its mandate. The mandate is to enforce UN arms embargo. Operation Irini acts always when it comes to inspections, hailing or communications with suspected vessels, acts on a certain amount of information that it has at its disposable. The countries on the flag of region, the vessels are navigating have the right to refuse the inspection. The operation Irini makes the request, if the country which is responsible for the ship says they don’t agree with the inspection, the inspection cannot proceed. So in this case and in many cases of inspection, or hailing or suspicions the Irini reports back to the UN. There were contacts between us and the Turkish partners of course because the turks they are not giving the permission for the inspection, which they are entitles to. What follows is again the process which is enshrined in the mandate of operation Irini.

Mis à jour avec les éléments fournis par Irini, une photo de l’arraisonnement et une info sur la longueur des contacts entre Européens et Turcs.

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Méditerranée. Un porte conteneurs inspecté par la frégate grecque Adrias

Mon, 23/11/2020 - 08:54

(B2) L’équipe de la frégate grecque Adrias a arraisonné et inspecté, mercredi après-midi (19.11), un navire marchand MV Serrano. Sans problème

Le porte-conteneur battant pavillon panaméen avait quitté Alexandrie (Égypte) le 17 novembre et se dirigeait vers Tobrouk, à l’Est de la Libye (sous contrôle des forces Haftar). L’interception s’est produite à environ 42 nautiques au nord-est du port de Tobrouk dans les eaux internationales.

L’équipe d’arraisonnement a « examiné les documents disponibles à bord et a inspecté la cargaison. Rien de suspect n’a été trouvé et le navire a été déclaré libre de poursuivre sa route » précise le QG de l’opération à Rome. La procédure « s’est déroulée sans problème et l’arraisonnement s’est déroulé dans une atmosphère de collaboration entre le capitaine et l’équipage ».

(NGV)

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Dernières nouvelles des missions et opérations de l’UE – PSDC (octobre 2020)

Sun, 22/11/2020 - 12:12

(B2) La routine ou presque pour les équipes à terre, en mer ou en vol : exercices conjoints, entraînement de forces étrangères, ou formation pour lutter contre la corruption policière

Djibouti. Amitiés japonaises

Octobre rime avec exercices conjoints entre les forces européennes de l’opération Atalanta et la Force d’autodéfense maritime du Japon (JMSDF). L’occasion aussi d’un défilé naval, dans les eaux territoriales djiboutiennes, avant un débrief, à terre, sur la coopération en matière de lutte contre la piraterie dans l’océan indien. Détails ici

Défilé de frégates japonaise, italienne et espagnoles au large de Djibouti (crédit : EUNAVFOR Atalanta)

Birni N Konni (Niger). Le pied à l’étrier pour une nouvelle compagnie

Depuis quelques semaines, une nouvelle Compagnie Mobile de Contrôle de Frontières (CMCF), la deuxième de la Police Nationale, travaille à la sécurisation de la zone frontière avec le Nigeria. Ses 252 policiers (dont 7 femmes) ont suivi une formation intensive de six mois par la mission de soutien aux forces de sécurité intérieure et de la stabilisation du Niger (EUCAP Sahel Niger). Détails ici

(crédit : EUCAP Sahel Niger)

Koulikoro (Mali). Formation aux premiers secours

Réagir face à une hémorragie massive, des blessures au thorax ou encore une morsure d’animal, c’est ce qu’ont appris huit stagiaires de différents bataillons d’infanterie maliens. Cette éducation médicale spécialisée fait partie du pilier éducation-formation de la mission de formation de l’armée malienne (EUTM Mali). L’objectif est, qu’en cas de besoin, ils puissent stabiliser une victime blessée, et éviter les décès au combat. Détails ici

(crédit : EUTM Mali)

Donetsk (Ukraine). Déjouer le risque de corruption policière

La police de la circulation est très exposée aux risques de corruption. Tandis que la corruption au sein de la police criminelle se révèle très difficile à détecter. C’est pourquoi la mission de conseil aux forces de sécurité intérieure ukrainiennes (EUAM Ukraine) a organisé un séminaire pour réfléchir avec les autorités sur les tactiques à mettre en place pour y remédier. Exemples à l’appui, comme celui de la Roumanie et de sa direction générale anti-corruption (ACGP). Détails ici

Ramallah (Territoires palestiniens). Une expertise sollicitée

EUPOL COPPS intervient comme conseiller technique au nouveau groupe de travail sur l’intégrité, la transparence et la lutte contre la corruption. Lancé mi-octobre par le premier ministre palestinien, ce groupe de travail est présidé par la Commission palestinienne de lutte contre la corruption (PACC). Détails ici

Berbera (Somalie – Somaliland). Équiper les équipes de terrain

À Berbera, la garde-côtière somalienne va pouvoir mieux réagir à la criminalité en mer, grâce à l’installation d’une nouvelle station-service par la mission de renforcement des capacités des forces de l’ordre civiles maritimes en Somalie (EUCAP Somalia). Les garde-côtes sont également maintenant équipés d’un système de vidéoconférence et du matériel de bureau pour faciliter la communication en ligne, obligatoire par temps de Covid-19.

(crédit : capture d’écran compte Twitter EUCAP Somalia)

Butnir (Bosnie-Herzégovine). Pro pace unum

Pro pace unum en latin signifie Unis pour la paix. C’est le message gravé sur les médailles de déploiement remises aux plus de 250 soldats, aviateurs et marins de 12 nationalités différentes, basés au quartier général de l’opération de stabilisation en Bosnie Herzégovine (EUFOR Althea). Une cérémonie présidée par le général Reinhard Trischak. Détails (et galerie de photos) ici

(crédit : EUFOR Althea)

(informations recueillies par Emmanuelle Stroesser)

NB : Pour tout connaitre ou réviser, n’hésitez pas à vous procurer notre ouvrage sur la PSDC

Lire aussi sur le B2 Pro (parus en octobre) :

Sur le blog (opération Irini) :

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Et tous les articles de notre rubrique missions UE (PSDC)

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Un intrus s’invite à la réunion des ministres de la Défense de l’UE. Rigolade et embarras garantis

Fri, 20/11/2020 - 20:30

(B2) Un journaliste néerlandais a réussi à s’introduire sans vraiment de difficulté à la réunion des ministres de la Défense ce vendredi (20.11). Une bonne partie de rigolade… mais pas pour tout le monde

Le journaliste de RTL, Daniel Verlaan, (en haut à droite) fait coucou aux ministres de la défense de l’UE réunis (crédit : RTLNieuws/Daniel Verlaan)

Une bourde de la ministre néerlandaise

Tout commence avec une bourde monumentale. Sur son compte twitter, la ministre néerlandaise de la Défense Anlk Bijleveld — ou un membre de son équipe selon le gouvernement néerlandais — publie une photo où l’on peut voir 5 des 6 chiffres du code PIN permettant d’entrer dans la réunion Zoom. Un « accident » assure le ministère de la Défense. La photo a d’ailleurs été retirée entre temps. Mais Daniël Verlan, journaliste spécialisé dans le ‘tech’ pour le média néerlandais RTL News, a eu le temps de voir l’info…

… suivie d’une défaillance de sécurité

Le journaliste fait une copie écran et devine rapidement le chiffre manquant. D’autant que le code d’utilisateur n’est pas bien sorcier. Un simple ‘admin’ fonctionne. Et, tout simplement, il débarque en pleine réunion, alors que la discussion entre les ministres bat son plein.

Un petit coucou magistral en réunion

Suit alors, entre le journaliste et le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, qui mène la réunion, un dialogue digne d’un film de Buñuel.

— « Quelqu’un est entré dans le système. Il faut stopper la réunion… nous travaillons sur la scène publique là », alerte Josep Borrell, qui tente de s’adresser directement à l’intrus.

« Comment allez-vous ? »l’interroge-t-il, d’un ton badin, réprimant mal un sourire. On entend quelques éclats de rire dans la réunion.

— « Bonjour. Merci ça va bien », répond, hilare, Daniël Verlan.

— « Qui êtes vous ? Vous savez que vous être entré dans une réunion secrète des ministres de la Défense ? Vous savez, c’est un délit hein ! » (Josep Borrell)

« Oui je sais. Je suis un journaliste des Pays-Bas. Je suis désolé d’avoir dérangé votre réunion. Merci de… Je vais m’en aller ! » (Daniël Verlan)

« Oui, ce serait mieux de partir rapidement, avant que la police arrive hein », conclu Josep Borrell, sur un ton paternel, réprimant mal un sourire envers ce ‘jeunot’ impétueux qui pourrait être son petit fils.

Une intrusion éclair…

Le journaliste assure n’être resté que quelques minutes dans la réunion, et avoir immédiatement allumé sa caméra et son micro pour que l’on puisse détecter sa présence… Mais le résultat est étonnant. « J’ai moi-même été un peu choqué que cela fonctionne. Je ne m’attendais pas à ce qu’il n’y ait pas d’autre forme de sécurité ou de validation », affirme le journaliste sur twitter.

Avec une conséquence majeure

La suite ? Le journaliste ne la raconte pas. Mais B2 l’a appris de bonne source. La réunion a été stoppée. Et la conférence de presse du Haut représentant de l’UE a été avancée d’une petite demi-heure sur l’horaire prévue. « Cela s’est traduit par la coupure immédiate des travaux », a confirmé à B2 un participant à la réunion. Sans vraiment créer de dommage, selon lui. L’essentiel avait été dit. « La réunion se terminait. » Quoi qu’il en soit, notre collègue néerlandais a mis le doigt sur un point sensible.

Un vrai problème posé

Dans les milieux européens, l’heure n’est en effet pas à la franche rigolade. Et l’embarras face à une telle intrusion est net. « Cela montre à quel point il faut être prudent avec ce genre de réunion. Une réunion des ministres de la Défense n’est jamais innocente », a ainsi concédé à RTL Nieuws le premier ministre néerlandais Mark Rutte, avant d’essayer de se rassurer devant la (grosse) boulette de sa ministre. « Le seul effet secondaire (positif), que A. Bijleveld a fait remarquer aux autres ministres, est à quel point il faut être prudent. »

Renforcer la sécurité des communications

« Nous avons besoin d’un renforcement très net de la sécurité des communications », a indiqué à B2 un diplomate. Le travail « est lancé », précise-t-on d’ailleurs. Cette question de la sécurisation des communications internes avait d’ailleurs été abordée au plus haut niveau lors d’un Conseil européen, l’année dernière. Les chefs d’État et de gouvernement des 28 d’alors demandant aux institutions européennes de plancher sur le sujet pour renforcer la sécurité. Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell n’a pas dit mieux lors de la réunion, s’adressant au président du comité militaire, le général Claudio Graziano : « Général, vous avez raison. Il faut investir dans des systèmes de communication ».

En vidéoconférence, prière de ne pas évoquer de sujets top secrets

Par précaution d’ailleurs, lors de cette réunion (comme lors des autres réunions par vidéoconférence), plusieurs ministres ont jugé bon de ne pas aborder des sujets jugés trop confidentiels. « Les lignes n’étaient pas sécurisées », confirme notre interlocuteur. On évite de parler de sujets trop confidentiels. Ainsi « on n’a pas parlé précisément de l’analyse des menaces », un document ‘classifié’ des services de renseignement européens.

L’aubaine du Covid-19 pour les espions en tout genre

Chacun sait en effet que dans le cas des vidéoconférences qui se sont généralisées avec la crise du coronavirus, les possibilités de piratage ou d’écoutes sont multipliées. Les vidéoconférences sont « une aubaine », nous confiait ainsi il y a quelques mois, un spécialiste du domaine, pour tout ce que Bruxelles compte d’espions en tout genre (Chinois, Russes…).

(Leonor Hubaut, avec Nicolas Gros-Verheyde)

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Le port de Marseille, port de déroutement pour Irini. Un nouveau navire prochainement

Thu, 19/11/2020 - 18:49

(B2) C’est confirmé. Le Haut représentant de l’UE vient de l’annoncer. L’opération Irini pourra faire escale à Marseille en cas de saisie de matériel suspect

Un port de déroutement… enfin

La France a « confirmé, aujourd’hui (jeudi 19.11), la disponibilité du port civil de Marseille » pour le débarquement des équipements et matériels qui pourraient être saisis par les militaires européens dans le cadre de la vérification de l’embargo international sur les armes et le pétrole (vers ou en provenance) de la Libye. Josep Borrell, le Haut représentant de l’UE, vient de l’annoncer, tout juste sorti de la réunion des ministres des Affaires étrangères, lors de la conférence de presse finale (par vidéoconférence), à laquelle B2 a assisté.

Déroutement des navires suspects et réception des matériaux

Les navires interceptés par l’opération maritime de l’UE (EUNAVFOR Med Irini) pourront donc être déroutés vers le port du sud de la France. Ce qui n’est pas une nouveauté. Cette solution avait déjà été mise en place dans le cadre de l’opération Sophia. Mais elle n’avait été utilisée qu’à une seule occasion (lire : Des armes à bord d’un navire libyen. Une première saisie pour Sophia). La contrebande d’armes n’était alors pas la priorité de cette opération.

Une difficulté lancinante depuis plusieurs mois

Pour l’opération Irini qui lui a succédé depuis avril, aucune solution de repli n’avait en revanche pu être trouvée. Cette absence avait provoqué un couac en septembre, quand un navire émirati soupçonné de faire du trafic de carburant militaire (pour avions) avait été intercepté par les navires européens. Il avait fallu quelques temps, plusieurs coups de fil entre les capitales, et une discussion entre ambassadeurs pour trouver une solution. Le navire faisait, lui, des ronds dans l’eau en attendant. C’est finalement la Grèce qui avait fini par accepter de recevoir le navire suspect (lire : Un navire soupçonné de violer l’embargo vers la Libye intercepté par l’opération Irini).

Un problème résolu

Le « problème est donc résolu », comme s’en réjouit Josep Borrell. « Nous avons maintenant un port clair pour le faire »… Quoique, peut-être pas tout à fait. La logique voudrait en effet que l’on ait « plusieurs ports, certains proches de la zone, d’autres plus éloignés », indique un expert consulté par B2. Ce « pour conserver l’efficacité opérationnelle » (1).

… mais d’autres ports nécessaires

De fait, Marseille n’est pas vraiment le port le plus proche de la zone opérationnelle (en Méditerranée centrale). La logique opérationnelle voudrait que l’on dispose d’un port en Grèce, côté oriental, d’un autre en Italie, au plus proche de la Libye, avec, en arrière-plan, un troisième port, celui de Marseille. Quoi qu’il en soit, côté français, on estime avoir « fait le job ». La disponibilité de ce port emporte aussi derrière tout un cadre juridique. Concrètement, c’est la France (et le procureur de Marseille) qui pourrait se retrouver en première ligne en cas de mise sous séquestre, voire de poursuite ou d’incarcération.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Le commandement de l’opération a aussi demandé divers moyens techniques ou humains. Il faut en effet apporter une expertise pour le transport, le stockage voire la destruction des cargaisons arraisonnées, souvent très sensibles.

Les moyens français engagés

La conférence de génération de forces a aussi été l’occasion pour la France de préciser son offre.

Une frégate dans la prochaine période

Côté opérationnel, la frégate Latouche Tréville a achevé le 7 novembre dernier sa rotation. Elle n’a « pas été relevée pour l’instant » nous a confirmé un officier. Mais la France a promis de fournir un nouveau navire à l’opération. Sans doute pour l’année prochaine. La conférence de génération de forces de l’opération vient de se tenir aujourd’hui.

Des moyens aériens (Marine, Air) en appui

En attendant, Paris fournit des moyens en appui. C’est-à-dire non intégrés de façon permanente à l’opération, mais pouvant intervenir au besoin. Ainsi un « avion de surveillance maritime Atlantique 2 (ATL2) a été déployé et a effectué deux vols au profit d’Irini » la semaine précédente, selon l’état-major français des armées, interrogé par B2. La frégate Aconit était, jusqu’à il y a quelques jours, en soutien associé à l’opération. De façon ponctuelle un avion de surveillance de la marine nationale Falcon 50 ou un Awacs E3-F de l’armée de l’air viennent prêter main forte à l’opération pour effectuer quelques vols de reconnaissance (Falcon 50) ou un appui plus large (Awacs).

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Entretiens de la défense européenne – 3e édition : entre utopie et défis

Thu, 19/11/2020 - 16:05

(B2) Ces troisièmes ‘Entretiens’ témoignent d’une Europe à la croisée des chemins. Prête à tout, à condition de le vouloir et d’être en capacité de passer de la rhétorique à la pratique… 

Covid-19 oblige, les troisièmes Entretiens de la défense se sont tenus cette année à distance, concentrés sur une demi journée, mercredi (4.11), et assurés de main de maître par les différentes animateurs (Stéphane Rodriguez, Federico Santopinto, Frédéric Mauro), en direct de la salle ‘Walster Hallstein’ du Berlaymont, qui sert aux réunions de la Commission européenne. Une journée découpée en quatre temps forts.

 Les ambitions du commissaire Breton

Thierry Breton, le commissaire européen au Marché intérieur (et ayant en charge l’Espace et la Défense), a ouvert les débats en présentant son plan pour doter l’Europe d’un ‘hard power’. Un plan en douze étapes, bâti autour de la Défense, d’investissements, où l’on parle aussi cyber et espace.

Un contexte favorable, à condition d’oser

Le premier panel d’experts en géopolitique, réunis autour d’une question – « Quelle géopolitique pour l’Union européenne » – est catégorique : l’Europe doit hausser le ton. C’est le seul moyen pour que l’Union européenne et ses États membres se fassent entendre dans le remous mondial.

Des défis immédiats à relever

Les experts ‘défense’ du second panel sont affirmatifs : si l’Union représente l’ultime espoir pour la défense européenne, les avancées sont beaucoup trop timides.

Il manque, notamment, une bonne planification de défense, comme le détaille Jean-Paul Palomeros (ancien chef d’état-major de l’armée de l’air française et chef de l’ACT, le commandement pour la transformation de l’OTAN).

L’Europe de la défense se cherche encore. La conclusion coule de source. Elle est signée de la présidente de la sous-commission défense du Parlement européen, et ancienne ministre des Affaires européennes, Nathalie Loiseau (LREM/Renew).

L’envolée utopique de Jolyon Howorth

Comment ne pas oublier, dans le rôle du grand témoin, le Britannique Jolyon Howorth, de la Harvard Kennedy School, qui a agité la marmite comme on l’espérait. S’il croit en l’autonomie stratégique, cela oblige au préalable les Européens à reconnaitre l’impasse actuelle de la PSDC comme du fonctionnement de l’OTAN. Il ne restera alors plus qu’à refonder une ‘Nouvelle Alliance !

(ES et la rédaction de B2)

(crédits photos : Thierry Breton / Commission européenne ; Jolyon Howorth / Sorbonne / IREDIES ; Jean-Paul Palomeros /  Def12 )

Les textes ont été publiés soit sur le blog soit sur notre édition B2 Pro réservée aux adhérents/abonnés. Mais de façon à les rendre accessibles, ils sont en format ‘ouverts’ à tous.

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Autonomie stratégique. Refondre l’Alliance autour d’un pilier européen (J. Howorth)

Wed, 18/11/2020 - 14:20

(B2) Pour Jolyon Howorth, l’Union européenne atteindra l’autonomie stratégique. C’est inévitable…à terme. Mais les Européens doivent sortir des sentiers battus, reconnaitre l’impasse actuelle de la PSDC comme du fonctionnement de l’OTAN, et refonder une ‘Nouvelle Alliance’

(crédit : US defence.gov)

Le chercheur britannique d’origine, francophile au point d’avoir acquis la nationalité tricolore, a jeté un pavé dans la mare lors des troisièmes entretiens de la défense européenne, le 4 novembre dernier, dont il était le ‘grand témoin’.

Une autonomie stratégique structurelle

« Une autonomie stratégique est à terme inévitable. Ce n’est pas une prédiction de Nostradamus. Ce constat est déterminé par l’histoire et par la géographie. L’histoire nous enseigne qu’entre les États-Unis et l’Europe, depuis bientôt 250 ans, les rapports stratégiques ont évolué constamment. Et la géographie nous dit, suivant Vidal de la Blache, que les intérêts de deux blocs continentaux qui ne partagent nullement le même espace territorial, ne peuvent être communs, encore moins identiques. L’autonomie ? Quoi de plus naturel alors.

Une communauté transatlantique fondée sur une différence d’intérêts

« Le discours atlantiste selon lequel Américains et Européens seraient liés dans ‘une communauté de destin’ est trompeur. Au 19ème siècle, les intérêts ‘étrangers’ américains furent essentiellement asiatiques et latino-américains. Ce ne fut qu’en 1941 que les États-Unis se sont impliqués de façon sérieuse dans les affaires européennes. Sans la menace soviétique, ils s’en seraient retirés en moins d’une décennie. L’Alliance Atlantique fut, à l’origine, conçue essentiellement comme une béquille temporaire, le temps que le Vieux Continent se ressaisisse après la saignée de 1939-45. Nous savons ce qu’il en est advenu.

La PSDC marque le pas

« La PSDC reste toujours bien en-deça des promesses de Saint-Malo (NB : le sommet franco-britannique de décembre 1998 qui lance le projet d’une politique européenne de sécurité et de défense).

Loin de l’autonomie stratégique

« Déjà, vers 2010, celles-ci se caractérisaient bien davantage par des objectifs purement ‘civils’ que par des ambitions un brin musclées. Je n’ai rien contre des missions civiles. Mais ne nous berçons pas d’illusions. Elles n’ont rien à voir avec l’autonomie stratégique. L’UE assure actuellement six missions classées ‘militaires’, dont trois ne sont que des missions d’entraînement de forces africaines. Encore, je n’ai rien contre. C’est très important. Mais ce n’est pas par ce biais que l’UE atteindra l’autonomie stratégique. 

Une faiblesse face aux défis environnants

« Certes, les deux missions militaires significatives (les opérations navales en Méditerranée et dans le Golfe) pourraient être considérées comme ‘stratégiques’. Mais, compte tenu des défis véritablement géostratégiques qui entourent l’Europe, de l’Arctique à la Mer Noire et du Bosphore à l’Atlantique, c’est peu, c’est vraiment très peu. Depuis 2014, seuls cinq nouvelles missions ont été entreprises, dont trois en Afrique. Si la PSDC est ce qu’elle fait, je suis désolé, mais ce n’est guère impressionnant. 

Et le Covid-19 ne va pas arranger les choses

« La plupart des études qui commencent à traiter de l’impact du Covid sur la défense européenne font état des nombreux défis supplémentaires que fait surgir le virus. Défis supplémentaires mais moyens plus limités. La crise du Covid aggrave l’affaiblissement, déjà perceptible, des institutions multilatérales de la gouvernance globale. Elle exacerbe un environnement déstabilisé dans lequel des puissances comme la Chine et la Russie tiennent de meilleures cartes.

Une solution : la fusion entre PSDC et OTAN

« Je persiste à penser que ce sera plutôt par la coopération, voire par la fusion entre la PSDC et l’OTAN — plutôt que par la différentiation entre ces deux entités— que l’Union Européenne atteindra l’autonomie. Je suis convaincu que la PSDC, à elle seule, n’est pas l’instrument adéquat pour forger l’autonomie. Deux avenirs sont possibles pour l’Alliance, dans le contexte d’une victoire du [démocrate] Joe Biden.

Première option, l’OTAN continue à fonctionner comme elle a toujours fonctionné

« Les Européens seraient moins nerveux quant à la crédibilité de l’article 5 [du traité de l’Alliance atlantique].  L’inertie redeviendrait la règle. Les Américains ne voudront pas céder le leadership, et les Européens n’oseront pas risquer de pousser trop loin leurs ambitions autonomistes. Dans le contexte de Covid, compte tenu d’une crise budgétaire gravissime pour les pays de l’Union, la PSDC repassera à l’arrière-plan (plan qu’elle n’a d’ailleurs jamais vraiment quitté).

Deuxième option, l’européanisation de l’OTAN

« Cela suppose un sursaut considérable de l’imaginaire géostratégique — tant chez les Européens que chez les Américains. [Et trois conditions.] Premièrement, les Américains ne souhaitent plus assumer des responsabilités majeures en Europe puisque la rivalité avec la Chine devient leur priorité absolue. Deuxièmement, les Européens se rendent compte que la PSDC seule ne leur fournira jamais la garantie de leur sécurité régionale (surtout tant que l’OTAN existe) et qu’il ne sert à rien de multiplier les acteurs militaires européens. Troisièmement, il y a une ‘convergence analytique’. Les Américains n’arrêtent pas de demander aux Européens des efforts accrus, de les encourager à assumer le leadership stratégique dans leur voisinage, de prendre leur propre défense au sérieux. Les Européens cessent d’envisager ce rôle par le truchement de la PSDC et acceptent de jouer à fond la refonte de l’OTAN.

Une nouvelle Alliance qui va dans le sens de l’histoire

« L’objectif, à terme, devrait être le retour au scénario initial conçu par Acheson et Eisenhower : une Alliance en rééquilibrage, dans laquelle les Européens prendraient progressivement la part du lion et les Américains joueraient, pendant encore deux décennies, plutôt un rôle de facilitateurs. Il est dans l’intérêt des deux parties de forger une nouvelle Alliance, nullement structurée par la dépendance, encore moins par la servitude, mais par un vrai partenariat équilibré dans lequel les Européens atteindraient, avec l’appui et l’encouragement des Américains, l’autonomie stratégique.

Sortir des sentiers battus

« Le premier scénario respecte le statu quo, ne demande pas de grands efforts et est infiniment plus confortable pour les acteurs actuels. Mais il continuerait à renvoyer aux calendes grecques toute avancée de la part des Européens vers l’autonomie…. [jusqu’à l’arrivée d’un nouveau Donald Trump] qui forcerait à passer au second scénario. Ce second scénario va dans le sens de l’histoire et de la géographie, mais il est extrêmement exigeant et suppose de sortir totalement des sentiers battus. »

(Jolyon Howorth)

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Un entretien avec Euradio

Tue, 17/11/2020 - 12:46

(B2) Comment l’Europe s’approprie le hard power ? Comment travaille un correspondant de presse à Bruxelles ? Pourquoi faut-il continuer à s’exprimer en français ? Et pourquoi le basculement dans le monolinguisme tout anglais des institutions européennes est une faute géopolitique de premier ordre ? Toutes ces questions, je les évoque avec Ulrich Huygevelde de Euradio. La radio européenne qui vient d’établir son studio à Bruxelles, dans le quartier des Marolles en bas du palais de Justice.

euradio · Rencontre Avec Un Correspondant – Nicolas Gros Verheyde

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Nord Mali. Un responsable du GSIM / JNIM neutralisé par les forces françaises

Fri, 13/11/2020 - 10:56

(B2) L’état-major français des armées a confirmé ce vendredi (13.11 matin) avoir ‘neutralisé’ (= tué) un des principaux responsables du GSIM, le colonel Bamoussa Diara

Ce fait d’armes était déjà apparu dans la presse malienne depuis au moins 24 heures. L‘indépendant de Bamako mentionnait notamment un raid opéré par les forces françaises mardi 10 novembre, vers 18 heures, contre un véhicule pick-up de type Hilux, à près de 7 kilomètres, à l’Est de Tadamakat, localité relevant du cercle de Tidarmene, région de Ménaka.

Une opération commando héliportée

Ayant « repéré un pickup suspect », l’action a été menée par « les commandos de l’opération Barkhane » en début de soirée vers 18h au crépuscule, a confirmé un officier de l’état-major des armées ce vendredi à quelques journalistes (dont B2). Quinze hommes des commandos de l’opération Barkhane y ont participé, amenés par hélicoptère. Quatre hélicoptères, en tout, ont été engagés : « deux hélicoptères de manœuvre, appuyés par deux hélicoptères de reconnaissance et d’attaque ». Des drones Reaper ont aussi été engagés, en reconnaissance.

Une action de 15 minutes

Le combat a été assez violent, avec utilisation de différentes armes « du canon de 30 [des hélicoptères] au petit calibre ». L’action a duré quinze minutes environ. Les cinq occupants du pickup « qui sont sortis du véhicule au moment des tirs de sommation et d’arrêt » sont tous morts, dont le colonel Bamoussa Diara, le lieutenant d’Iyad Ag Ghali. Aucun blessé n’est à déplorer du côté français, du moins « aucun n’ayant nécessité de prise en charge médicale » (cela signifie qu’il y a eu des blessés mais légers). Les commandos sont restés « plusieurs heures sur place », ensuite « Le temps d’exploitation sur place ». NB : en général, une prise de photographies, d’empreintes ou d’ADN est effectuée afin de confirmer l’identité des personnes visées.

Une volonté de reprendre la zone des trois frontières

Cette action s’inscrit dans une volonté des Français de Barkhane de reprendre le contrôle de la zone des trois frontières. Plusieurs opérations ont eu lieu — le 30 octobre et le 6 novembre notamment —, conduisant à la ‘neutralisation’ de plusieurs dizaines de ‘terroristes’. Cela s’ajoute à des combats fratricides entre les groupements terroristes de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) et le GSIM, se disputant le contrôle de certaines zones, notamment à Boulikessi. Une lutte confirmée par l’armée française. Nous avons « documenté des affrontements des zones de prédation le 6 novembre par exemple » indique un officier.

Un rebelle historique

Ancien militaire des forces armées maliennes, le colonel Bamoussa Diara (alias Abou Charia), a déserté à deux reprises les FAMA. La seconde fois, en 2012, il rejoint le mouvement Ansar Dine dirigé par Iyad Ag Ghali, devenu ensuite le groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM ou JNIM en arabe). Il est accusé d’avoir mené plusieurs attaques contre les FAMA,  en 2012 à Ménaka, à Aguelhok, à Tessalit  ainsi qu’à Kidal en 2012, ou plus récemment à Djoura en mars 2019 ou à Bouka Weré dans le cercle de Niono en 2020, selon Mahamane Touré de Nouvel Horizon.

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Crash d’un hélicoptère de la mission d’observation au Sinai

Fri, 13/11/2020 - 05:01

(B2) La Force multinationale d’observateurs (MFO) chargée de veiller à la bonne application des accords de paix entre Égypte et Israël dans le Sinai, vient de subir un accident mortel. Un officier français est décédé

Huit militaires à bord

Un hélicoptère US Black Hawk qui effectuait un vol de routine et transportait huit militaires s’est crashé dans la péninsule du Sinai près de l’ile de Tiran en Mer rouge.

Sept militaires sont décédés, dont un Français (le lieutenant-colonel Sébastien Botta venant du CDAOA le commandement de défense aérienne et des opérations aériennes), un Tchèque (le sergent-major Michaela Tichá 27 ans) et cinq Américains.

Un Américain, a pu être récupéré après le crash, selon la MFO. Il est dans un état critique.

Enquête en cours

La cause de l’accident doit encore être déterminée. Une enquête est en cours. Selon l’armée tchèque, il pourrait s’agir d’un « défaut technique ».

Le chef d’état-major français François Lecointre a adressé ses condoléances.

[#CEMA] Toutes mes pensées accompagnent la famille, les proches et les frères d’armes du lieutenant-colonel Sébastien Botta mort en opération au service de la France ce jour, lors de l’accident d’un hélicoptère de la Force Multinationale d’Observateur au Sinaï. pic.twitter.com/V1TLEXGn5P

— État-Major Armées (@EtatMajorFR) November 12, 2020

Tout comme les principales autorités concernées comme le président français Emmanuel Macron ou le président américain élu Joe Biden.

I extend my deep condolences to the loved ones of the peacekeepers, including 6 American service members, who died on Tiran Island, and wish a speedy recovery to the surviving American. I join all Americans in honoring their sacrifice, as I keep their loved ones in my prayers.

— Joe Biden (@JoeBiden) November 12, 2020

Une force multinationale établie en 1982

La Force multinationale sur les observateurs (MFO) a été créée après l’accord de paix de Camp David entre l’Égypte et Israël de 1978, par un protocole d’accord entre les deux pays en août 1981, après la restitution du Sinai à l’Égypte, et est opérationnelle depuis avril 1982. Le blocage au sein du Conseil de sécurité de l’ONU de l’époque (par l’URSS notamment) de valider une mission de casques bleus avait nécessité d’avoir une solution « alternative », avec une force d’observation multinationale.

Veiller aux accords de paix

Elle utilise deux bases dans la région du Sinaï : la base sud de Charm el-Cheikh, où se trouve le quartier général de la mission, et la base avancée nord à El Gorah, non loin de Gaza. Elle a pour objectif à partir de points de contrôle, d’activités de patrouille et d’observation le long des frontières de l’Égypte et d’Israël et sur le territoire du Sinaï, de veiller au maintien de la paix dans les quatre zones de l’accord de paix comme d’assurer la libre navigation à travers le détroit de Tiran.

Un contingent venu de trois pays

Elle est composée (selon le dernier comptage de la MFO) d’un peu plus de 1100 militaires provenant de 13 pays, essentiellement américains : 452 USA, 275 Colombiens, 55 Canadiens, 41 Uruguayens. On trouve également 78 Italiens, 18 Tchèques, 3 Norvégiens, 2 Britanniques et 1 Français, ainsi que 170 militaires de Fidji, 30 Néo-Zélandais, 27 Australiens, 2 Japonais.

(Nicolas Gros-Verheyde)

NB : les noms des militaires tués sont indiqués en fonction de l’information officielle.

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MEDOR. Trois navires et deux avions français pour surveiller du coin de l’œil la Turquie

Thu, 12/11/2020 - 14:15

(B2) La France vient de déployer en Méditerranée orientale (MEDOR) plusieurs moyens maritimes et aériens

les frégates La Fayette, Forbin et Latouche-Tréville dans le cadre de l’opération MEDOR (crédit : état-major des armées / DICOD)

Trois frégates

Le groupe d’action de surface (‘surface action group’ ou SAG) est composé de trois frégates qui ont convergé au retour d’opération : la frégate légère furtive FLF La Fayette (F-710) (qui revient de l’opération Chammal, déployée en Syrie-Iraq contre les groupes terroristes de l’État islamique), la frégate anti sous-marine FASM Latouche-Tréville (D-646), qui vient d’achever son mandat au sein de l’opération maritime de l’UE (EUNAVOR Med Irini), la frégate de défense aérienne FDA Forbin (D-620) qui assure le commandement du groupe.

… et deux avions

Deux moyens aériens viennent en appui de ce groupe : un avion de patrouille maritime Atlantique 2, actuellement déployé à La Sude (Grèce) et un avion de surveillance aérienne E3-F Awacs de l’armée de l’air.

La combinaison des capteurs

Aux navires d’établir tout d’abord « la situation tactique aéromaritime ». Aux moyens aériens « d’étendre la zone couverte » et, avec la diversité des capteurs, de « consolider la caractérisation des activités dans la zone ». Plusieurs vols des hélicoptères de bord — le NH90 du Forbin (qui appartient à la patrouille 31F) et Panther du La Fayette (qui appartient à la patrouille 36F) ont eu lieu.

Objectif : surveiller et dissuader…

L’objectif est triple selon l’état-major des armées : 1. « Améliorer l’appréciation autonome » de situation dans ce « théâtre vaste » qui revêt « une importance stratégique certaine », 2. Manifester « de façon ostensible la présence de la France » dans la zone et son « attachement au respect de la liberté de navigation », 3. Être prêt à intervenir « de manière effective en cas de violation du droit international ».

La Turquie dans le viseur

La cible n’est pas indiquée. Mais elle est très claire : c’est la Turquie et ses forages dans les zones maritimes grecque ou chypriote. Ankara a ainsi émis, fin octobre, un nouveau message de navigation (Navtex), prolongeant l’action de ses trois navires de forage et de recherche sismographique : Oruc Reis, Ataman et Cengizhan. Ce sous protection militaire. La marine et l’aviation turque ont aussi entamé un exercice début novembre dans la zone (avec la marine américaine), dénommé ‘Blue Whale 2020’.

Un effet d’entraînement

Il ne faut nier non plus que cette présence aéronavale a aussi valeur d’entraînement pour les équipages dans des opérations de surveillance aéromaritimes (1). Cela permet de tester la « réactivité » des forces et la bonne coordination entre les moyens aériens et maritimes, mais aussi de vérifier la bonne « agrégation des différents moyens et leur connectivité immédiates ».

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Un vecteur de présence internationale qui est appelé à se développer. La plupart des opérations multinationales aujourd’hui sont de ce type que ce soit au sein d’EUNAVFOR Med Irini ou de EMASOH (lire : Relève dans le détroit d’Ormuz).

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Relève dans le détroit d’Ormuz

Wed, 11/11/2020 - 20:18

(B2) Au large de l’Iran, les frégates danoise et française continuent d’exercer leur vigilance dans le détroit d’Ormuz et le Golfe persique. Relèves de navires à l’appui

la frégate Jean Bart (crédit : MOD France / Premar Méditerranée)

Cette opération de surveillance maritime aéronavale, montée par les Européens, regroupe aujourd’hui des moyens danois (relayant les Pays-Bas, lire : Le Danemark à la tête de la mission dans le détroit d’Ormuz en 2021) et français (qui a initié cette opération). Elle est dénommée ‘Emasoh’ (code européen) ou ‘Agenor’ (code français) ou encore TF474 (code international de la task torce).

La frégate anti-aérienne de type F70 Jean Bart (D-615) a pris le relais dans le golfe d’Oman et le golfe Arabo-persique de la frégate FREMM Languedoc (D-653). Une frégate multimissions, qui aura été intégrée durant presque six mois (170 jours) à la TF474.

Durée rendue possible « grâce à une relève d’équipage inédite en opération », note l’état-major français (1). Le Languedoc a effectué une dernière relâche opérationnelle à Abu Dhabi, début novembre, après dix jours de patrouille et quatre franchissements du détroit d’Ormuz, avant de reprendre le chemin de Toulon.

De son côté, après une relève partielle d’équipage au cours de sa relâche opérationnelle à Dubaï, la frégate danoise HDMS Iver Huitfeldt (F-361) a repris ses patrouilles de sécurité de part et d’autre du détroit d’Ormuz. C’est le Danemark qui devrait assurer le commandement de la mission l’année prochaine (lire : Le Danemark à la tête de la mission dans le détroit d’Ormuz en 2021)

(Nicolas Gros-Verheyde)

Une évacuation

Au passage, la frégate ‘Jean Bart‘ a effectué samedi (7.11) une opération d’évacuation sanitaire d’un marin indien, inconscient du MV Lourdes, un navire de commerce battant pavillon indien. L’hélicoptère de bord de la frégate, avec un médecin et une infirmière, a transporté le patient à l’hôpital de Salalah (Oman). Évacuation effectuée « en coopération » avec une frégate japonaise et « coordination » avec les autorités omanaises, selon l’ambassade de France à Mascate (Oman).

  1. Un processus assez courant dans les marines étrangères, en particulier dans les marines du Nord de l’Europe (Suède, Pays-Bas ou Danemark par exemple). Sur la préparation de cette relève, lire les détails dans colsbleus.

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Adieu Donald. L’Europe de la défense te doit beaucoup. Tes tweets flingueurs vont nous manquer

Mon, 09/11/2020 - 16:35

(B2) Le départ de Donald Trump est sans doute une bonne nouvelle pour les USA. Pas automatiquement pour l’Europe ou du moins sa défense

Donald Trump par lui-même en campagne électorale, poing levé à mi-course (crédit : Maison Blanche)

Le président préféré des médias

Moi je l’aimais bien Donald ! Toute la profession d’ailleurs l’adorait. Tous les journalistes qui diraient le contraire sont en fait de sacrés hypocrites. Avec Trump, le spectacle était garanti chaque soir et chaque matin quand sortait son dernier tweet rageur de la nuit. Un jour c’était l’armée européenne de Macron (lire : Trump tâcle le projet Macron d’armée européenne. A-t-il raison ?). Un autre la politique de l’Union européenne (Lire : Je n’en ai rien à f… d’être populaire en Europe. Les Européens doivent payer et L’Europe ne nous traite pas bien, se lamente Trump). Et jamais très loin, il assénait un bon coup de taloche en direction de l’Allemagne, à ses voitures trop compétitives, ses dirigeants pas assez révérencieux, son budget de la défense faiblard, etc.

Une Alliance atlantique rock’n roll

Les sommets de l’OTAN, d’ordinaire si bien huilés, où l’ennui peut vous gagner rapidement, tant tout se déroule comme sur des roulettes, sont devenus avec Donald, un vrai feuilleton, digne d’un western, avec claquements de portes, embuscades dans les couloirs… et retournement de situation. (Lire : Sommet de l’OTAN : Trump, ses diatribes, ses tweets et Les quatre raisons du coup de sang de Donald Trump à l’OTAN). Sa déclaration sur l’alliance obsolète est restée dans toutes les têtes. Discrètement, il avait même été demandé au service juridique de l’Alliance de vérifier les conditions dans lesquelles pouvaient se retirer un pays membre (NB : les USA). Les humeurs ‘trumpiennes’ perturbaient l’alliance.

Des persiflages en coulisses

En coulisses cela jasait fort. À tous les étages de l’Alliance, des bureaux de la direction aux différentes délégations, cela jasait aussi beaucoup (lire : Les oreilles de Donald Trump ont sifflé à Buckingham Palace). Dans les couloirs de l’Alliance atlantique, chacun s’en donnait ainsi à cœur joie pour se moquer d’un président, pour s’échanger pastiches ou les derniers bons mots du principal actionnaire de l’Alliance. « Je n’en ai jamais vu autant et aussi féroces » me racontait un des diplomates de l’Alliance. Dans les cénacles spécialisés sur la sécurité, comme à Münich, non plus ce n’était pas le fol amour (lire : A Münich le nom de Donald Trump suscite un grand blanc). Pas très étonnant donc que celui qui a bondi de joie, au départ de ce président fantasque est le secrétaire général de l’OTAN. Le Norvégien Jens Stoltenberg voit son cauchemar se terminer.

I congratulate @JoeBiden on his election as the next U.S. President & @KamalaHarris as Vice President. I know Joe Biden as a strong supporter of our Alliance & look forward to working closely with him. A strong #NATO is good for both North America & Europe https://t.co/Ij3rWtNH5c

— Jens Stoltenberg (@jensstoltenberg) November 7, 2020

Une certaine persistance dans la politique étrangère

Pourtant, malgré ses déclarations intempestives et ses allers-retours, et son caractère détestable, il faut reconnaitre certaines qualités au leader des Républicains. Sa politique en matière de politique étrangère a été plutôt claire, limpide et assez prévisible (lire : L’Amérique « en premier », de Trump. Pour l’Europe, un certain langage de la vérité). Sa décision de se retirer de l’accord sur l’Iran, comme sur le climat était annoncée. Sa faible croyance dans les structures multilatérales a pu être vérifiée au fil du temps. Sa promesse de retirer les troupes US, un peu partout dans le monde, a été tenue, même si cela s’est fait de manière brouillonne parfois. Et les pays de l’Est ont bénéficié d’un appui américain, quasi-sans faille, face à la Russie.

Un allié objectif de la défense européenne

Pour la politique extérieure et de sécurité commune européenne (et la stabilité dans le monde), Trump n’a donc finalement pas été un mauvais bougre. Il ne nous a pas entraîné dans une guerre sans fin ou déstabilisatrice (ex. Irak 2003). Malgré (ou à cause de) son agressivité permanente, il a forcé (un peu) les Européens à sortir de leurs retranchements, à commencer (un peu) à penser autonome des USA, comme sur l’Iran notamment (lire : La décision de Donald Trump sur l’Iran, un vrai pari. Un défi aux Européens aussi !). En matière de défense européenne, même s’il n’est pas le seul facteur, cela a incité certains pays, plutôt suivistes de la politique américaine, à se dire qu’après tout, une politique européenne de défense n’était pas tout à fait inutile. Comme une roue de secours, en cas de panne de la ‘voiture’ OTAN.

‘Biden’ un ami exigeant …

Je ne suis pas extrêmement sûr que, sur ce strict point-là (de la défense européenne), nous ayons à gagner avec un Joe Biden. Certes la politique sera plus amicale, plus polie avec l’Europe. Il y aura à la Maison Blanche et au département d’État un préjugé favorable aux alliés sur les adversaires. Cela ne voudra pas dire automatiquement le champ libre pour les Européens. Au contraire. Il faudra mériter (cette amitié) et montrer patte blanche.

…et des tendances lourdes persistantes

L’Europe n’est plus ‘la’ priorité pour Washington. Le fameux pivot vers l’Asie — enclenché sous Obama-Biden, poursuivi sous Trump — va persister. La politique dynamique d’exportation d’armements et de défense de l’industrie US ne va pas céder le pas de sitôt. Washington voudra encore plus que jamais avoir un pied dans les projets européens de défense (coopération structurée permanente et fonds européen de défense, notamment). Et la notion de ‘partage du fardeau’ restera en haut des priorités américaines. Bref faire la ‘danse du ventre’ aujourd’hui devant ‘Joe’ risque de provoquer certaines aigreurs d’estomac demain.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Vous aurez noté que ceci est un éditorial, non une analyse, avec une certaine dose d’ironie, où le second degré rejoint parfois le premier.

Lire aussi notre analyse détaillée de la politique étrangère selon Biden et le commentaire de la position européenne sur l’Iran L’accord sur le nucléaire iranien. Des Européens droits dans leurs bottes

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La nouvelle politique étrangère US, selon Joe (Biden)

Sun, 08/11/2020 - 02:50

(B2) L’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche apparait comme une bonne nouvelle pour les Européens, cloués au pilori par quatre années de président Trump. Qu’est-ce qui va changer… qu’est-ce qui ne va pas changer ?

Joe Biden et Kamala Harris lors de son premier discours de ‘président élu’ dans le Delaware (crédit : flux Franceinfo – sélection B2)

La défense des intérêts nationaux restera une priorité 

Les relations avec l’Union européenne devraient s’améliorer, être plus respectueuses… comme sous la présidence de Barack Obama, dont Joe Biden était le n°2. Avec lui, l’Europe ne sera plus considérée comme un « ennemi » des États-Unis. En témoigne la lecture des quelques vers du poète irlandais Seamus Heaney — tirés de la pièce de Sophocles ‘Philoctetes’  The Cure at Troy —, lors de son intronisation par le parti ‘bleu’ en août dernier. Mais attention aux espoirs ! Après avoir fait le point sur ses différents discours durant la campagne, il est évident que le vieux continent n’est pas au centre de l’attention à Washington. Les mots « Europe » ou « Union européenne » sont rares. À l’instar de sa dernière interview sur CBS News dans ’60 minutes’. Pas un mot sur l’Europe ! La tendance au repli, à la défense des intérêts nationaux, est ancrée chez les Américains, et Biden ne reviendra pas dessus.

Au sein de l’OTAN, des exigences inchangées

Au sein de l’Alliance, le ton devrait sans doute être plus cordial. Mais les exigences resteront. Joe Biden s’est dit « fier des engagements que l’administration Obama-Biden a négociés afin d’assurer que les membres de l’OTAN augmentent leurs dépenses en matière de défense ». En clair, il va continuer à exiger des Européens qu’ils prennent leur part du « fardeau » (lire : Je n’en ai rien à f… d’être populaire en Europe. Les Européens doivent payer (Trump)). Qu’ils augmentent les dépenses pour atteindre l’objectif du 2%, mais aussi qu’ils prennent en charge leur propre sécurité. Pour Alexandra de Hoop Scheffer, chercheuse au German Marshall Fund, « il y a toujours cette idée que l’Europe doit s’occuper davantage des Balkans, de la Méditerranée et de la menace russe sur le flanc Est pour que Washington puisse se concentrer sur la grande menace du 21e siècle, à savoir la Chine ».

La Russie en menace numéro 1, la Chine en numéro 2

Le démocrate est certainement plus critique à l’égard de Moscou que son alter ego républicain. Dans un entretien télévisé (’60 minutes’), il décrit la Russie comme « la plus grande menace pour l’Amérique en ce moment en termes de rupture de notre sécurité et de nos alliances ». « Nous devons imposer à la Russie des coûts réels pour ses violations des normes internationales et nous tenir aux côtés de la société civile russe, qui s’est courageusement opposée à maintes reprises au système autoritaire kleptocratique du président Vladimir Poutine » ajoutait-il sur Foreign Policy en avril. Cette menace impose de rester mobilisés au plan militaire. « Pour contrer l’agression russe, nous devons maintenir les capacités militaires de l’alliance à un niveau élevé tout en élargissant sa capacité à faire face à des menaces non traditionnelles, telles que la corruption armée, la désinformation et le vol informatique. » La Chine vient en second rang décrit comme « le plus grand concurrent », mais aussi potentiellement comme une menace. Ce sera la manière de faire avec Pékin qui « déterminera si nous sommes des concurrents ou si nous finissons par être dans une compétition plus sérieuse en ce qui concerne la force », assure Joe Biden.

Le retour au multilatéralisme

L’autre grande différence avec Donald Trump est un retour au multilatéralisme. « Travailler avec des alliés » a été le mantra de sa campagne. J. Biden a promis de réintégrer immédiatement l’accord de Paris sur le climat. En ce qui concerne la pandémie de coronavirus, il soutient un effort mondial commun et le rétablissement du rôle clé de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

… et à la table de négociation sur le désarmement

J. Biden a promis que la diplomatie serait à nouveau au premier plan des efforts des États-Unis pour prévenir la prolifération des armes nucléaires plutôt que la diplomatie unilatérale et la « pression maximale », poursuivie par l’administration Trump avec la Corée du Nord et l’Iran. Revenir au sein de l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA) (lire : Trump retire les États-Unis de l’accord nucléaire avec l’Iran et rétablit les sanctions extra-territoriales), pour le « renforcer et l’étendre,  tout en repoussant plus efficacement les autres activités déstabilisatrices de l’Iran » est d’ailleurs une idée de campagne… à condition que « Téhéran se remette à respecter l’accord ». Pour ce qui est de la Corée du Nord, Joe Biden veut jouer la carte de l’action conjointe « avec nos alliés et d’autres pays, dont la Chine, pour faire avancer notre objectif commun d’une Corée du Nord dénucléarisée. » Il poursuivra également les efforts pour conclure des accords de contrôle des armements avec le traité New START, qui expire en février prochain, « une ancre de stabilité stratégique entre les États-Unis et la Russie », a-t-il dit en campagne.

Une puissance militaire… qui va mieux choisir ses combats

L’intérêt national prime toujours en ce qui concerne l’engagement militaire. Le mot d’ordre : moins d’éparpillement. « Les États-Unis ont l’armée la plus puissante du monde, et en tant que président, je veillerai à ce qu’elle le reste, en faisant les investissements nécessaires pour équiper nos troupes en vue des défis de ce siècle, et non du dernier.  »

Moyen-Orient : le retour des troupes américaines maintenu

Mettre fin « aux guerres éternelles » en Afghanistan et au Moyen-Orient, « qui nous ont coûté un sang et un trésor indicibles ». C’est l’engagement de Joe Biden. Comme Donald Trump (lire : Stupeur chez les Européens après l’annonce de Donald Trump de retrait américain du Nord-Syrie au profit des Turcs), il s’engage à ramener au bercail une grande majorité des troupes américaines présentes en Afghanistan. Il annonce également vouloir mettre fin au soutien à la guerre menée par les Saoudiens au Yémen.

Une approche plus sélective et une priorité : le terrorisme 

« L’usage de la force doit être le dernier recours, et non le premier. Il ne devrait être utilisé que pour défendre les intérêts vitaux des États-Unis, lorsque l’objectif est clair et réalisable, et avec le consentement éclairé du peuple américain. » La priorité est claire : « définir de manière étroite notre mission comme étant de vaincre Al-Qaïda et l’État islamique ». Et arrêter d’envoyer les troupes inutilement : « Rester retranchés dans des conflits impossibles à gagner épuise notre capacité à diriger d’autres questions qui requièrent notre attention, et nous empêche de reconstruire les autres instruments de la puissance américaine. »

De plus ‘petites’ missions 

Le candidat mise sur de plus petites missions qui « sont durables sur le plan militaire, économique et politique », et « servent l’intérêt national ». Il marque la différence entre « les déploiements à grande échelle, sans limite de durée de dizaines de milliers de troupes de combat américaines, qui doivent prendre fin, et l’utilisation de quelques centaines de soldats des Forces Spéciales et de moyens de renseignement pour soutenir des partenaires locaux contre un ennemi commun ».

(Leonor Hubaut et Hannah Guérin st.)

Télécharger le programme du parti démocrate et l’opinion de Joe Biden dans Foreign Policy (avril 2020)

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Le commandement des forces spéciales des Pays-Bas opérationnel

Sat, 07/11/2020 - 23:33

(B2) Le commandement des opérations spéciales des Pays-Bas (NLD SOCOM) est pleinement opérationnel. Préparation en cours pour la NRF2021

L’exercice Trojan Phoenix du Special operations air task group belgo-danois-néerlandais (crédit : armée DK – Defensie NL)

Annoncé début octobre, cette FOC s’inscrit dans un cadre aussi multinational avec Belges et Danois afin d’être prêt pour la NRF2021, la force de réaction de l’OTAN, de permanence l’année prochaine.

Une demande importante

La disponibilité d’un quartier général de commandement — ‘Command & Control‘ (C2) — des opérations des forces d’opérations spéciales (SOF) est essentielle pour les Néerlandais (1) comme pour l’OTAN. C’est en effet une des lacunes identifiées au sein de l’Alliance. Lacune d’autant plus critique que « la demande de déploiement de forces spéciales a fortement augmenté ces dernières années et devrait continuer d’augmenter » précise un officier néerlandais.

La fin d’un processus de deux ans

De façon concrète, le NLD SOCOM, qui a désormais un effectif complet d’un peu plus de 70 hommes, est prêt à assurer cinq tâches principales :

  • le déploiement et préparation d’unités des forces spéciales (SOF), tant de la marine (Korps mariniers) que les troupes commandos de l’armée de terre (Korps Commandotroepen) ;
  • garantir la qualité des unités SOF ;
  • l’élaboration de politiques et de plans ;
  • l’achat d’équipements ;
  • un rôle de pilotage en matière de connaissances et d’innovation pour les unités des forces spéciales.

Un travail avec Danois et Belges

Ce commandement s’inscrit dans un cadre plus multinational. Les Pays-Bas avec la Belgique et le Danemark travaillent en effet ensemble actuellement dans le cadre d’un commandement des composantes d’opérations spéciales composites (C-SOCC). Un C-SOCC qui sera de garde l’année prochaine pour la NRF, la force de réaction de l’OTAN (NRF2021).

Entraînement à la clé

Les trois pays s’entraînent dans le cadre d’une série d’exercices de certification OTAN. Notamment l’exercice Trojan Phoenix qui vient de se dérouler début novembre, avec un SOATG (special operations air task group), un élément C2 à même de diriger les opérations aériennes des forces spéciales. Le programme d’exercices doit être terminé d’ici la fin de cette année.

(NGV)

  1. Le processus avait démarré en 2017, avec la mise en place d’une task Force chargé d’étudier la mise en place du SOCOM. Et le processus a été entamé en 2018. Pour obtenir le statut de FOC, NLD SOCOM a été évalué par un comité national.

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