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Les USA accélèrent le mouvement d’évacuation de Kaboul. La date butoir du 31 août sera respectée

Bruxelles2 Blog - Wed, 25/08/2021 - 19:05

(B2) Le général Stephen R. Lyons, chef du commandement de transport aérien américain (TRANSCOM) a fait récemment un briefing sur l’opération d’évacuation de Kaboul, intéressant sur plusieurs aspects. Extraits…

Le général Lyons face à la presse par vidéoconférence (US Transcom)

Cet échange avec la presse (dont le script est parvenu à B2) a eu lieu le 23 août. Avec un rythme d’évacuation plus que soutenu.

Un rythme soutenu d’évacuation

« Plus de 10.000 dans les dernières 24 heures », indiquait le général Lyons. Un rythme tenu (37.000 personnes évacuées au 23.08, 48.000 le lendemain, 58.000 le 24.08). Avec parfois d’heureux événements à célébrer : trois bébés sont nés à bord (ou juste à l’arrivée).

400 à 450 passagers en moyenne par avion

« Nous ne voulons jamais quitter l’aéroport de Kaboul avec un avion vide ou même partiellement plein si nous pouvons l’éviter. Nous ne le faisons donc pas. » En fait, chaque avion est rempli avec « environ 400 à 450 passagers ». Le record est pour le moment détenu par l’équipage du vol C-17 avec l’indicatif 871 qui est reparti avec « 823 passagers ».

Toute la force aérienne mobilisée

« Toutes les ressources de mobilité sont concentrées sur cet effort. La composante aérienne compte plus de 200 aéronefs engagés en opérations. Même les KC-10 sont engagés dans l’opération d’une manière ou d’une autre. […] Le ministre a décidé d’activer la première étape de la Silver Reserve Air Fleet (le niveau 1 de la réserve civile aérienne (cf. encadré).

Un dialogue quotidien de déconfliction avec les Taliban

« Nous sommes en communication quotidienne avec les dirigeants Taliban à l’extérieur de l’aéroport. Parfois plusieurs fois par jour pour dénouer le conflit du mieux que nous pouvons, et aider à assurer un accès sain à l’aérodrome pour les citoyens américains en particulier. »

Une menace de l’État islamique potentielle

« Nous sommes conscients de la menace que représente l’État islamique. Sans parler au nom des Taliban, je pense que c’est une hypothèse sûre de supposer qu’eux aussi sont conscients de cette menace. » NB : le général n’a pas voulu épiloguer sur l’A400M français tirant des leurres au moment du décollage.

La problématique du carburant

« Nous ne prenons volontairement pas de carburant au sol. Nous nous assurons donc d’avoir suffisamment de carburant pour entrer et sortir sans prendre de carburant afin de ne pas stresser la posture logistique là-bas. »

Rotation rapide d’une heure au sol

La rotation d’une heure au sol est rendue possible par deux éléments : « Nous avons un certain nombre d’avions engagés. Mais nous avons deux fois plus d’équipages. […] Nos équipages sont absolument incroyables, je ne vais pas vous mentir. Ils sont fatigués. Ils sont probablement épuisés. » Et l’ambition est de « réduire le temps sur le terrain à moins d’une heure ».

Mission terminée le 31 août

« C’était la direction donnée par le Président. Et nous nous engageons à le faire. Nous n’allons pas lâcher prise. […] Tant qu’il y a une mission à accomplir. Nous serons là-bas. »

Et après le 31 août

« Il est certainement possible que l’aéroport maintienne ses activités à l’avenir. Ce sera aux autorités locales de le définir. » S’il y a un départ de l’armée US, « cela ne veut pas dire que tout le monde va partir et ne pas continuer à faire voler des avions à partir de là. » NB : les Turcs pourraient rester.

(Propos sélectionnés et traduits par Nicolas Gros-Verheyde)

L'activation de la réserve civile aérienne. Décidée le 22 août par le Pentagone, l'activation du niveau 1 de la CRAF (Civil Reserve Air Fleet) a pour objectif d'accélérer l'opération d'évacuation d'Afghanistan. Elle permet au ministère de la Défense d'accéder aux capacités aériennes commerciales. De façon concrète, le niveau 1 va concerner 18 appareils : quatre de United Airlines, trois chacun pour les compagnies American Airlines, Atlas Air, Delta Air Lines et Omni Air, deux de Hawaiian Airlines. Les avions activés par la CRAF ne voleront pas à l'aéroport international Hamid Karzai de Kaboul. Ils seront utilisés pour le mouvement ultérieur des passagers depuis les refuges temporaires et les bases de transit provisoires. Il permet aux avions militaires de se concentrer sur les opérations à destination et en provenance de Kaboul. C'est la troisième activation du CRAF dans l'histoire du programme. La première s'est produite à l'appui des opérations Desert Shield/Storm (août 1990 à mai 1991), et la seconde était pour l'opération Iraqi Freedom (février 2002 à juin 2003). Cf. communiqué en anglais.

#ICYMI, #watch an @usairforce C-17 Globemaster III, arrive at Hamid #Karzai IAP, Afghanistan, in support of #Afghanevac. The @DeptofDefense is committed to supporting the @StateDept in the departure of U.S. and allied civilian personnel from Afghanistan safely.#TogetherWeDeliver pic.twitter.com/oDBSaquwio

— USTRANSCOM (@US_TRANSCOM) August 23, 2021

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Situation tendue à l’aéroport de Kaboul (Bundeswehr)

Bruxelles2 Blog - Mon, 23/08/2021 - 22:22

(B2) Des échanges de tirs se sont produits entre les forces de sécurité afghane, les forces américaines et allemandes face à des « assaillants inconnus » ce lundi matin (23 août) . Témoin de la tension aux portes de l’aéroport

Une fusillade

Ce Lundi (23.08) au petit matin, à 6h43 heure de Kaboul (4h13 CEST) , une fusillade a éclaté entre « les forces de sécurité afghanes et des assaillants inconnus à la porte nord de l’aéroport de Kaboul » annonce le commandement des opérations des forces conjointes allemandes sur Twitter. Bilan : un garde de sécurité afghan tué et trois autres blessés. « Les forces américaines et allemandes ont également été impliquées dans la suite de la bataille. Tous les soldats de la Bundeswehr sont indemnes », a complété la Bundeswehr dans un communiqué.

Au moins huit morts

Le flux de personnes cherchant à fuir l’Afghanistan ne s’est pas tari pendant le week-end. « Une semaine exactement après la prise du pouvoir par les Taliban à Kaboul, la situation à l’aéroport reste très explosive », reprend la Bundeswehr qui recense « au moins huit personnes [ayant] trouvé la mort » jusqu’à présent (en comptant le mort de ce matin).

Un chaos désespéré à l’extérieur

C’est un « chaos désespéré à l’extérieur de l’aéroport », raconte le général de brigade Jens Arlt, chef du détachement allemand d’évacuation, comme le rapporte notre confrère Thomas Wiegold de Augengeradeaus. L’accès à la zone protégée a été fermé temporairement hier (dimanche). Ce qui a entraîné « une grande agitation et, surtout, une cohue supplémentaire » concentrée à Abbey Gate, les autres portes « étant temporairement fermées ».

Pour se repérer, la carte des entrées sur l’aéroport de Kaboul (Source : Augengeradeaus)

(Agnès Faure, st.)

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Première opération d’évacuation d’envergure pour les A400M de toutes nationalités

Bruxelles2 Blog - Sun, 22/08/2021 - 10:05

(B2) Pour l’avion de transport européen, l’opération d’évacuation des ressortissants et des Afghans de Kaboul en cours depuis la mi-août est un peu le grand baptême en opération

Toutes les nationalités du programme sur place

Ce n’est pas la première fois que ces appareils sont employés en opération, pour amener ou évacuer hommes ou matériels. Loin de là. Mais c’est la première fois que ces appareils sont déployés en aussi grand nombre, de façon intensive, sur un court laps de temps, dans des conditions pas évidentes, par différentes nationalités. Il doit y avoir sur place pas moins d’une vingtaine d’appareils (6 allemands, 1 français, 1 belgo-luxembourgeois, 1 espagnol, des Britanniques et Turcs). Tous les pays participant au programme sont ainsi répondu.

Un appareil essentiel pour ce type d’opération

Pour ce premier test grandeur nature, l’A400M a bien répondu. C’est un appareil « extrêmement fiable » a assuré le col. Yannick Desbois, commandant de la base aérienne 104 aux Émirats qui assure toute la logistique de l’opération française ‘Apagan’. Il a « assuré toutes les missions » qu’on lui demandait. « On fait plus que doubler la capacité d’emport » par rapport aux C-130. « La capacité de la soute, son allonge [km parcouru], sa vitesse, sont des atouts essentiels » dans ce type d’opération. La dextérité des équipages, leur « niveau de maîtrise, de jour comme de nuit, dans des conditions particulières » est aussi remarquable selon lui.

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Comment se déroule l’évacuation de Kaboul ? Une des opérations les plus complexes de l’histoire récente

Bruxelles2 Blog - Sat, 21/08/2021 - 20:05

(B2) Entre Kaboul et les différents hubs mis en place, quels avions utilise-t-on ? Qui sélectionne les évacués ? Comment se passe la coordination des vols ? Quelles sont les difficultés à l’aéroport de Kaboul ? Comment se déroule l’accueil des évacués dans le hub français aux Émirats… ? Toutes les réponses

Embarquement à Kaboul (État-major des armées) NB : Ces éléments ont été rassemblés en bonne partie lors d'un long entretien (vendredi) de plusieurs médias (dont B2) avec le colonel (français) Yannick Desbois, commandant de la base aérienne 104 (Émirats arabes unis) qui assure le hub pour l'armée française. Ils ont été complétés par des informations recueillies par B2 en 'off' auprès de diplomates ou responsables militaires de diverses nationalités

Anticiper, coordonner

Comment tout cela est planifié ?

Les armées avaient planifié l’évacuation de Kaboul, à froid. A chaud c’est une autre affaire. « On essaie d’avoir une prévision 24 heures avant. Mais très honnêtement dans cette opération — indique le colonel Yannick Desbois, commandant de la base 104 — les plans survivent quelques heures à peine. On se réadapte en permanence. » La gestion d’un « tel dispositif d’évacuation est particulièrement complexe. Ce n’est pas toujours facile à faire » ajoute un diplomate, qui a travaillé au sein la cellule de crise du Quai, interrogé

Comment se fait la coordination aérienne ?

La coordination se fait au quartier général américain situé au Qatar, le CAOC (Combined Air Operations Centre) d’Al-Udeid, qui coordonne toutes les opérations aériennes US et des Alliés pour la région. C’est lui qui est responsable notamment du volet aérien de l’opération Inherent Resolve contre Daech (Iraq, Syrie). Les Américains tiennent le manche, mais chaque nation est déjà représentée dans le CAOC. Ce ne sont pas les Américains qui décident seuls, assure le colonel Desbois, commandant de la base 104, tout se fait en « coordination ».

Quand l’opération sera terminée ?

Les Américains avaient indiqué la date butoir du « 31 août », le porte parole du Pentagone précisant bien « pour l’instant ». Du côté militaire français, aucune date butoir n’a été fixée. « On est capable de tenir dans la durée. » assure le colonel Desbois. L’opération durera « tant qu’il y aura des personnes à évacuer, que les Taliban nous laisseront faire et que les Américains l’auront décidé » résume à B2 un militaire. Les Allemands ont fixé au « 30 septembre » leur date butoir pour leur opération. Certains pays (Tchéquie) par exemple ont déjà mis fin à leur opération.

Briefing équipage opération Apagan (État-major des armées)

Sur l’aéroport de Kaboul

Qui assure la sécurité sur l’aéroport ?

Confiée au départ aux militaires turcs, la « sécurisation de l’aéroport de Kaboul repose essentiellement sur les militaires américains déployés » reconnait un diplomate tricolore. Ils ont été renforcés par des Britanniques et des Français. Il s’agit d’assurer la sécurité aux portes, mais aussi de maintenir le niveau de sécurité adéquat pour mettre en œuvre les différents moyens (surveillance des pistes, éclairage des pistes, etc.). Précision importante : les forces euro-atlantiques ne tiennent que la partie militaire de l’aéroport, pas la partie civile.

Où sont les Talibans ?

Les Taliban sont « présents en ville, à proximité de l’aéroport, ainsi que dans la partie civile de l’aéroport ». « Ils n’ont pas démontré pour l’instant d’hostilité avérée » à l’égard des forces militaires occidentales assure le col. Desbois. Mais, selon les différentes évaluations, les renseignements, ils « possèdent des armes [lance roquettes, etc.] qui pourraient être utilisées contre les avions et être une menace ».

Comment est la situation sur place ?

L’aéroport Hamid Karzai est un « aéroport très particulier, très encaissé, avec beaucoup de chaleur ». Sur place, les conditions sont « rudimentaires », « précaires », « loin des standards habituels », avec « énormément de vols ». Pour les pilotes, la manœuvre est donc « extrêmement complexe ». Il faut toute l’habilité et la maitrise des équipages pour s’y poser. L’éclairage des pistes est limité. A cela, il faut ajouter l’impossibilité de s’approvisionner en carburant sur place et, surtout, « un certain niveau de menace ». La situation est très « évolutive ». « Cela évolue heure par heure » indique le col. Desbois. La situation est « très volatile » confirme-t-on de toute part. Samedi (21.08) « la situation à Kaboul est très difficile [qu’au début] », indiquait-on ainsi, côté allemand, en indiquant vouloir évacuer le « maximum de personnes », le plus vite possible.

Combien de temps les appareils restent sur place ?

La partie militaire de l’aéroport a une « capacité d’accueil limitée ». Il n’y a pas beaucoup de place de parking. Les appareils doivent stationner de la façon la plus limitée possible sur le tarmac. « Quand les avions se posent à Kaboul ils embarquent les passagers et doivent repartir rapidement. » Délai constaté (selon les informations communiquées par les différentes armées) : en moyenne, entre une demi-heure à une heure maximum entre le poser des roues et le décollage. « On essaie de faire la coordination au maximum pour s’assurer qu’il n’y a ait pas deux avions qui arrivent en même temps, et de ne pas avoir trop d’avions parqués en même temps » (col Desbois). Du côté français, on l’affirme, « on n’envoie pas d’avions si on n’est pas sûr d’embarquer des personnes. ».

Quels appareils sont utilisés pour aller à Kaboul ?

Les Français, comme la plupart des autres nations (Allemands, Belges, Néerlandais…) utilisent exclusivement des avions dits ‘tactiques’ A400M ou C130 (voire C-17 coté US). « La situation de la sécurité implique en effet d’avoir des niveaux de protection élevés ». Ces appareils ont des « systèmes d’autoprotection, de leurres », permettant de déjouer les missiles. Pour l’instant, il n’y a « pas eu de tirs avérés contre les avions français. Mais la qualité du militaire est de prévoir et de s’adapter aux conditions techniques. »

Qui sélectionne les personnes qui montent à bord ?

Du côté français, c’est une équipe consulaire du ministère des Affaires étrangères, basée en partie à Abu Dhabi, et sur place à l’aéroport de Kaboul, (en coordination avec l’ambassadeur sur place, David Martinon), qui dresse les listes des personnes qui peuvent embarquer à bord. Les militaires se contentant de prendre les listes qu’on leur a donné. NB : chaque pays a plus ou moins le même type d’organisation. Des équipes consulaires belges, néerlandaises, ont été envoyées sur place etc.

Les appareils sont parfois remplis au maximum ? Qui décide au dernier moment ?

Un A400M qui peut accueillir normalement 120 personnes assises. Mais en termes de tonnage, il peut accueillir beaucoup plus. « On essaie de faire au mieux pour accueillir le maximum de passagers à bord. » précise le colonel Desbois. Un A400M français a ainsi accueilli près de 210 personnes. « Dans toutes les conditions de sécurité » assure- l’aviateur. « L’équipage a placé tous les passagers [ainsi que les bagages] afin de bien répartir le poids dans l’appareil, veillant à ce qu’on n’excède pas le poids maximal limite ». En dernier lieu, c’est le commandant de bord qui arbitre et décide combien de passagers il peut embarquer, sur des critères « très froids, très techniques ». NB : Les appareils allemands repartent régulièrement avec plus de 200 personnes à bord (230 pour le plus important).

Comment arrivent les personnes à l’aéroport de Kaboul ?

C’est un vrai problème. La difficulté est pour les personnes devant prendre l’avion d’accéder à l’aéroport. Les Allemands viennent d’acheminer sur Kaboul, deux hélicoptères H145M (la version militaire de l’hélicoptère d’Airbus EC145). Objectif : pouvoir aller chercher des personnes hors de l’aéroport. Les Finlandais (qui ne sont pas membres de l’OTAN) envoient une équipe de forces spéciales. Etc.

A la base 104 (Émirats Arabes unis)

Les personnes évacuées transitent sur la base française quelques heures (entre 8 h à 24h) avant de reprendre l’avion vers Paris. Des avions ‘blancs’ (type A310 ou A330), plus confortables, permettent de faire la seconde partie du trajet « dans des conditions meilleures » pour une longue distance. Le temps de faire les contrôles de sécurité et de se retaper un peu.

Comment se passe la vie sur la base française ?

La base 104 est une petite base, avec 180 personnels (environ 160 permanents et une vingtaine de plus court séjour. Les Français se reposent en bonne partie sur le soutien des Émiratis (la base française est en fait une enclave dans la base Al Dhafra des Émiratis). « Nous avons une très bonne coopération » tient à souligner le col. Desbois. Normalement, il n’y a « pas de capacité d’hébergement normalement. On a poussé les murs, mis en place des camps provisoires » pour héberger à la fois les renforts venus de Paris (service de santé des armées, équipe consulaire, etc.) et les civils évacués. Jusqu’à 250 personnes sont ainsi logées sur la base. Une nécessité vu l’urgence, le contexte Covid-19, etc.

Comment s’organise l’accueil des évacués de Kaboul ?

Différents contrôles de sécurité sont effectué (comme dans tout aéroport classique) pour s’assurer qu’il n’y a pas de matières dangereuses ou illicites transportées. Une fouille des personnes et bagages a lieu. Les évacués reçoivent aussi un soutien sanitaire. Des tests antigéniques Covid-19 sont pratiqués. Il s’agit aussi « de traiter les différentes pathologies qu’ils peuvent avoir ». Une équipe du service de santé des armées est présente sur le site. Enfin, c’est l’occasion de lancer le processus consulaire (effectué par une équipe des Affaires étrangères) : contrôle d’identité et de certaines informations nécessaires pour les visas), mais aussi prise de coordonnées du reste de la familles sur Kaboul.

Dans quel état sont les personnes qui arrivent ?

Les évacués de Kaboul sont en grand « état de détresse psychologique ou physiologique. C’est normal vu la situation à Kaboul » et les difficultés à atteindre l’aéroport. On essaie « de les détendre ». Tout le personnel de la base — officiers, sous-officiers compris —  a ainsi été réquisitionné. « J’ai vu des pilotes de Rafale servir une tisane à une Afghane de 82 ans et passer un peu de temps avec elle ; des équipages s’allonger par terre, pour jouer avec des enfants — nous avons reçu jusqu’à 15 nourrissons —, gonfler des ballons de baudruches, sortir un ballon de foot pour jouer avec les jeunes… » Histoire d’oublier les moments difficiles vécus.

Sur la base 104 française des Émirats arabes unis (État-major des armées)

La base peut-elle continuer à mener ses autres missions ?

« Nous avons préservé une nécessaire étanchéité avec les autres activités de la base », couverts par le secret défense. Si le contexte « le nécessitait, on est à même de d’assurer une autre opération et d’accomplir l’ensemble des missions nécessaires pour les Rafale », assure le col. Desbois. Normalement la base est prévue pour assurer deux avions de transport par jour. Là on a accueilli 40 rotations en cinq jours.

(Nicolas Gros-Verheyde)

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Tentative d’attaque pirates d’un navire au large de Mogadiscio

Bruxelles2 Blog - Fri, 20/08/2021 - 05:55

(B2) Un cargo battant pavillon turc, le MV Anatolia, a été attaqué par un skiff avec 4 ou 5 personnes armées à bord, près des côtes somaliennes au Nord de Mogadiscio (025848 Nord et 046440 Sud Est)

Les pirates « ont tenté de s’approcher du navire et ont ouvert le feu avec des armes légères et des grenades propulsées par fusée (RPG) » selon le QG de Rota de l’opération européenne anti-piraterie (EUNAVFOR Atalanta) qui a reçu l’alerte vendredi (13 août).

Un des tirs au RPG a causé des dommages à proximité du pont. Les échanges de tirs ont duré près de deux heures entre les assaillants et le personnel de sécurité privé du bord. Avant que les assaillants n’abandonnent et retournent à terre.

Il n’y a « eu aucun blessé à bord du navire marchand » indique l’opération Atalanta. Le navire (un cargo de type roulier RoRo) a pu poursuivre sa route et arriver au port de Mogadiscio le lendemain, samedi (14 août). Il n’y a pas eu besoin d’intervention directe d’un moyen naval.

(NGV)

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Les Talibans à Kaboul. Des Alliés pris par surprise. Un bug du renseignement euro-atlantique ?

Bruxelles2 Blog - Wed, 18/08/2021 - 08:13

(B2) L’avancée rapide des Taliban vers la capitale afghane n’avait pas été prévue. Du moins aussi rapidement par les différents services. Certains responsables européens le reconnaissent sans ambage.

« Vendredi [13 août], selon toutes les informations disponibles, notamment les données du renseignement, nous avons travaillé avec le fait que nous avons le temps d’évacuer d’ici la fin septembre. On parlait samedi [14] de la fin août, date à laquelle les talibans pourraient atteindre Kaboul. Le fait qu’il y ait finalement fait irruption lundi [16] est une preuve claire de la dynamique de l’évolution de la situation. Personne n’était prêt pour un tel développement », a reconnu le ministre tchèque des Affaires étrangères Jakub Kulhánek.

Soit les informations n’ont pas bien circulé entre les alliés, soit il y a eu un gros bug quelque part (les Américains notamment), soit il y a eu un surcroit d’optimisme et d’auto-intoxication collective. Soit les trois à la fois…

(NGV)

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Sauve qui peut. Un pont aérien s’organise pour évacuer de Kaboul ressortissants européens et employés afghans

Bruxelles2 Blog - Mon, 16/08/2021 - 08:45

(B2) Dans la foulée des Américains, les alliés européens ont décider de déployer plusieurs moyens militaires aériens pour évacuer, en priorité, leurs ressortissants d’Afghanistan, ainsi que certaines personnels locaux. Un mouvement planifié il y a quelques jours, mais accéléré et exécuté un peu en catastrophe

Un A400M britannique sur la base de Chypre (Royal Air Force 70SqnA400 / Archives B2)

Royaume-Uni : 600 militaires déployés (opération Pitting)

Le gouvernement britannique, sous le feu de la critique, a déclenché dès le vendredi (13 août) son opération ‘Pitting‘. 600 militaires de la 16 Air Assault Brigade sont partis sur place ce week-end. Ils sont accompagnés d’une petite équipe de fonctionnaires du ministère de l’intérieur, chargé d’assister les diplomates britanniques et « de rationaliser le traitement des nouveaux visas et autres documents nécessaires aux ressortissants britanniques, aux anciens employés britanniques et aux autres personnes éligibles » et d’aider le personnel diplomatique en poste à Kaboul. Cette politique afghane de réinstallation et d’assistance dite ARAP), a permis de rapatrier « plus de 2000 employés locaux » selon le ministère de la Défense.

Tchéquie : un premier avion a quitté Kaboul

Prague a déclenché l’alerte assez vite. Un Airbus A319 de l’armée tchèque a réussi à quitter Kaboul dimanche (15 août). À son bord, « 46 Tchèques et nos collègues afghans, y compris femmes et enfants » selon Jakub Kulhanec, le ministre des Affaires étrangères. L’avion a atterri à Prague lundi martin. Il n’a pas voulu donné plus de détails « pour le moment » avant la fin de l’opération de sauvetage. « Compte tenu de la situation sur KAIA [l’aéroport de Kaboul], c’est un miracle » a ajouté, via tweeter, Jan Hamacek, le ministre de l’Intérieur. Une deuxième rotation est en cours.

La France à partir des Émirats arabes unis

Paris a choisi de s’appuyer sur sa base dans les Émirats arabes unis, pour son opération d’évacuation, dénommée ‘Apagan’. Deux avions de transport — un C130 et un A400M — , ont décollé dans la nuit de dimanche à lundi (15/16 août) et lundi matin, a annoncé le ministère français de la Défense dimanche (15 aout). Direction : la base aérienne 104 (BA104) d’Al Dhafra (EAU). Renforcé par des militaires des forces françaises stationnées aux Émirats arabes unis, ils vont effectuer des norias entre la base et l’aéroport de Kaboul. Première rotation prévue dès ce lundi 16 août. Les personnes évacuées seront accueillies et hébergées au sein de la base. Et les ressortissants français transportés ensuite vers la métropole par des avions longue distance de type Airbus A330 Phénix.

Allemagne : des navettes programmées à partir de l’Ouzbékistan

Berlin a annoncé dimanche (15 aout) l’envoi d’un premier avion de transport A400M pour rapatrier les citoyens allemands, le « personnel local et les autres personnes devant être mises en sécurité » selon les mots d’Annegret Kramp-Karrenbauer, la ministre allemande de la Défense. Des personnels de la DSK, la Division Schnelle Kräfte ou division de réaction rapide) sont à bord afin d’assurer la protection. Le premier avion a décollé de Wunstorf ce lundi matin selon notre confrère Thomas Wiegold de Augengeradeaus, suivis immédiatement de deux autres. Les A400M feront la navette entre Kaboul et l’Ouzbékistan. Des avions civils prendront alors le relais. Un Airbus A310 a décollé aussi de l’aéroport de Bonn-Cologne pour acheminer matériel et personnel de soutien vers Bakou (Ouzbékistan).

Espagne : à partir de Dubai, en soutien au personnel européen également

Madrid a annoncé dimanche (15 août) accélérer ses plans d’évacuation d’Afghanistan. Deux avions de transport A400M partent pour Dubaï afin de rapatrier « le personnel de l’ambassade espagnole, les Afghans et leurs familles qui ont collaboré avec notre pays » annonce le ministère des Affaires étrangères. Les Espagnols devraient aussi assurer l’évacuation du personnel européen et local de la délégation de l’UE à Kaboul.

NB : plusieurs autres pays ont réussi à mener l’évacuation de leur personnel (Finlande, Pologne, …), sans envoyer de moyens aériens propres, en recourant aux moyens américains déployés sur place.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Un mouvement américain

Sur décision de Joe Biden, les Américains ont décidé le 12 août le redéploiement de plus de 6000 hommes. Aux 650 militaires encore sur place, deux bataillons de Marines et un bataillon de l’armée de terre, soit environ 3000 personnels, les ont rejoint sur la zone sécurisée de l’aéroport de Kaboul ‘Hamid Karzai’. Ils ont pour objectif d’assurer le rapatriement dans l’ordre du personnel diplomatique US et « d’accélérer l’évacuation des demandeurs de visa d’immigrant spécial afghan » (SIV). Ils auront aussi la capacité de faciliter l’extraction du personnel si nécessaire. Une « selon le porte-parole du Pentagone, John F. Kirby.

À cela s’ajoute l’envoi d’un élément de soutien conjoint de l’armée de l’air américaine d’environ 1000 personnes au Qatar (dans un premier temps) pour faciliter le traitement des candidats SIV. Le déploiement d’équipes de combat de la brigade d’infanterie de Fort Bragg au Koweït (soit entre 3000 à 3500 militaires), est aussi prévu. Ils sont prêts à intervenir et assurer une sécurité supplémentaire à l’aéroport « si nécessaire » selon le porte-parole du Pentagone, John F. Kirby (qui s’exprimait face à la presse jeudi).

Cette opération « temporaire, ciblée » devrait durer « jusqu’au 31 août ». Elle n’est cependant « pas considérée comme une mission NEO opération d’évacuation de non-combattants » affirme Kirby. Elle ne remet pas en cause la décision de retrait, insiste-t-il. Une fois cette mission terminée, le Pentagone prévoit d’avoir moins de 1000 soldats américains sur le terrain « pour soutenir la présence diplomatique à Kaboul ».

Ces militaires sont placés sous l’autorité du rear-admiral (contre-amiral) Peter Vasely, ancien chef de la composante des forces spéciales de l’OTAN en Afghanistan et du Special Operations Joint Task Force–Afghanistan.

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Afghanistan. Une sévère défaite de l’OTAN. Une introspection nécessaire

Bruxelles2 Blog - Sat, 14/08/2021 - 19:37

(B2) L’effondrement du gouvernement et des forces de sécurité afghanes, soutenus à bout de bras depuis près de vingt ans par les USA et les Alliés occidentaux, interpelle. Faire reposer l’échec sur la seule tête de Joe Biden est un leurre. Une vraie remise en question s’impose

Joe Biden dans la salle de crise (White House 15 août)

Mettre le tort aujourd’hui sur les Américains pour un départ précipité, comme le font actuellement certains responsables politiques (notamment en Europe) ou observateurs, est un raccourci rapide. S’il y a défaite, c’est d’abord celle du gouvernement afghan de Ashraf Ghani, et de son armée, soutenue par l’ensemble des occidentaux. Le gouvernement Najibullah — soutenu par les Russes — avait tenu trois ans après le retrait russe (en 1989). Le gouvernement Ghani aura tenu à peine quelques semaines en 2021. L’armée afghane, soutenue et formée par les Américains et l’OTAN, s’est écroulée. C’est donc une défaite occidentale dans son ensemble. La plus longue et la plus importante des opérations de l’Alliance atlantique s’achève dans une déroute. L’erreur n’est pas seulement tactique, elle est stratégique.

Un retrait US annoncé et progressif

Déclenché sous Obama

Contrairement à ce qui est indiqué — le retrait militaire américain n’a pas été soudain. Il a été progressif et annoncé. C’était une promesse du Démocrate Barack Obama : en finir avec les guerres déclenchées sous l’ère Bush (Irak et Afghanistan) et ramener tous les boys à la maison. Le 22 juin 2011, le président démocrate annonce le retrait d’un tiers des 100.000 Américains présents sur place (dans le cadre de la coalition ou en solo). Objectif : un retrait total d’ici fin 2014. Une annonce qui cadre avec la campagne électorale pour son nouveau mandat (élections en novembre 2012). Dans la foulée, plusieurs pays, dont la France annoncent leur retrait. En octobre 2015, volte-face, Washington annonce le maintien d’un effectif à un niveau d’environ 10.000 hommes.

Repris par Donald Trump

Durant sa campagne électorale, le Républicain Donald Trump reprend un leitmotiv similaire à celui de son concurrent démocrate : en finir avec les présences militaires inutiles à l’étranger (lire : L’Amérique « en premier », de Trump. Pour l’Europe, un certain langage de la vérité). Là aussi, le terrain a raison de la promesse politique. Le 21 août 2017, le président annonce une « nouvelle politique » pour l’Afghanistan. réaffirme l’engagement et le déploiement de quelques milliers d’hommes supplémentaires. En 2017, l’effectif US atteint toujours 14.000 personnels environ (dont 8500 dans Resolute Support, le reste dans la mission de lutte anti-terroriste). Les retraits futurs seront désormais liés aux « conditions sur le terrain ». Dans la foulée des négociations de paix entamées à Doha avec les Taliban, il reprend son antienne du début et annonce, le 17 octobre 2020, le retour des boy’s à la maison « d’ici Noël » (We should have the small remaining number of our BRAVE Men and Women serving in Afghanistan home by Christmas). De façon plus concrète, le terme est donné à fin avril (avant le 1er mai). Avant son départ, il ordonne le départ de plusieurs centaines de soldats US ne laissant que 2500 soldats sur place, essentiellement à Kaboul.

Et bouclé sous Joe Biden

L’alternance avec Joe Biden (élu début novembre 2020) ne change pas fondamentalement la donne. Celui qui, sous Obama, en tant que vice-président a été l’un des plus ardents défenseurs de la décrue militaire en Afghanistan, repousse la date du 1er mai, « difficile » à respecter. Il se donne simplement quelques mois à son entrée en fonction (en janvier 2021) pour valider le retrait prévu par son prédécesseur. Il annonce sa décision le 13 avril 2021, avec un calendrier légèrement étalé. Départ « sans conditions » d’ici au 11 septembre, jour anniversaire de l’attentat du 11 septembre 2001. L’essentiel des troupes étant retiré avant début juillet (avant la fête nationale US du 4 juillet). Parler de retrait surprise est donc étonnant…

La fin de l’opération de stabilisation

Ce relais aux forces afghanes a d’ailleurs été entériné par la fin de l’opération de stabilisation de l’OTAN (ISAF) en 2015 et son remplacement par une mission ‘non exécutive’ (Resolute Support ou RSM). Objectif : entraîner, conseiller et assister les forces de défense et de sécurité nationale afghanes (ANDSF). Prévue jusqu’à 2016, cette mission est prolongée ensuite jusqu’à fin 2020 (au sommet de Varsovie), avec un accent mis sur le volet plus tactique. La mission prend fin en mai 2021, avec le retrait des forces occidentales. Tous les alliés approuvent ce retrait ou, du moins, n’expriment aucune critique publique ni d’alternative. (Lire aussi : Le retrait de l’OTAN d’Afghanistan décidé. La mission Resolute Support se termine et L’OTAN promet de ne pas abandonner l’Afghanistan. La formation et le soutien continuent).

Un pouvoir et une armée afghane médiocres

Au bout de vingt ans de soutien euro-atlantique à bout de bras, les forces afghanes restent peu efficaces. Le mot est ‘faible’. Même si les informations sont laconiques dans les rapports officiels publics, la réalité suinte.

Un leadership médiocre

L’armée nationale afghane (ANA) a un « leadership médiocre ». Les soldats sont « déçus par les dirigeants qui ne s’occupent pas d’eux avec des congés, des promotions et des salaires ». Il y a des « dirigeants actuels corrompus et/ou incompétents » (rapport Congrès US, 2017).

Une armée en renouvellement permanent

Le taux d’attrition (pertes au combat, désertion et autres départs) est classé « secret défense » par les autorités afghanes (1) (SIGAR US, juin 2021). Mais il reste « à un haut niveau » (PA-OTAN, 2018). On parle d’un taux de 2,8% mensuellement (SIGAR US, juin 2019). C’est-à-dire que l’armée perd chaque année un tiers de son effectif. Le « taux de rotation élevé (de 25 à 30 % par an) « empêche les ANDSF [forces de défense et de sécurité nationale afghanes] de disposer de forces plus expérimentées » (ibid).

… et malmenée par le pouvoir

La cause de ce manque d’entrain des recrues est multiple : « la récurrence des déploiements de longue durée, la perspective de devoir participer à des opérations de combat de façon quasi permanente et les conditions de vie difficiles », ainsi que l’obligation pour les soldats de servir hors de leur région d’origine (ibid). Sans compter « la fraude et la gaspillage » récurrents en Afghanistan, qui touchent également les forces de sécurité (GAO US, 2021).

Des insuffisances capacitaires

Résultat, les forces armées souffrent de certaines lacunes et dépendent de leurs alliés pour les moyens d’action essentiels : renseignement, surveillance et reconnaissance (ISR), systèmes d’artillerie, appui feu aérien, soutien logistique, notamment de moyens aériens d’évacuation médicale (Défense US, 2017). Ce, malgré un apport financier notable. Pa moins de « 84 milliards $ » ont été investis dans la sécurité par le seul gouvernement américain, en 17 ans de 2002 à 2018 (GAO US, 2021) !

Une surévaluation des capacités

Les forces alliés avançaient cependant le brouillard sur l’efficacité de leur soutien Les USA et les conseillers de la coalition avaient « peu de contacts directs » avec les unités conventionnelles « sur les lignes de front ». Conséquence, le ministère de la défense s’appuyait, pour évaluer les capacités tactiques des unités formées, sur des « auto-évaluations, qui, selon les responsables du DOD, pourraient ne pas être fiables » (GAO US, 2018).

Le déni occidental et l’effet boomerang de la propagande

Certes la ‘lingua‘ officielle des militaires a longtemps tenté de donner le change. De retour de Kaboul, en février 2018, le général US Curtis Scaparrotti, commandant suprême des forces alliées en Europe (SHAPE) se dit ainsi convaincu que « les Taliban ne pourraient l’emporter sur le champ de bataille » ! Cette ‘propagande’, à destination de l’extérieur, a abouti à une forme d’auto-conviction qui explique sans doute aujourd’hui l’effet de ‘surprise’ devant la rapidité de l’avancée talibane.

Des erreurs en cascade

La défaite face du pouvoir afghan n’est donc pas tellement un problème de soudaineté du retrait, mais plutôt de sa tardiveté et d’erreurs stratégiques. Une présence de plusieurs années aurait-elle changé la donne ? Pas sûr du tout.

Un objectif de guerre fluctuant

L’opération entamée en 2001, au lendemain des attentats du 11 septembre à New-York (World trade center) et Washington, conçue au départ comme une opération anti-terroriste anti-Ben Laden s’est muée en une opération de transformation civilo-militaire d’un pays, sensé être un État tampon entre un Iran ‘maléfique’ et des républiques d’Asie centrale jugées trop proches de Moscou.

Une absence de stratégie de sortie

La stratégie de sortie a été très floue, avec des calendriers sans cesse remis en cause, ou réétalés dans le temps, donnant l’impression aux autorités afghanes que l’engagement occidental était ad vitam aeternam. Elles ne se sont pas vraiment préparées au départ.

Une formation déficiente

L’effort entrepris depuis 2002 pour former et encadrer une armée nationale afghane était-il utile, efficace, solide? Le concept choisi d’une armée ‘nationale’ nombreuse était-il valable ? N’a-t-on pas préféré le nombre à la qualité ? Vouloir solidifier un État très éclaté, en mettant en place une armée nationale, sans se reposer sur l’organisation traditionnelle par province était-il possible ? Etc. Une introspection solide doit être menée au niveau euro-atlantique, pour éviter de répéter les erreurs sur d’autres terrains

Une capacité d’autonomie européenne limitée

Enfin, cet épisode est l’illustration cuisante que, malgré tous les discours, en cas de forte tension, les Européens sont toujours incapables aujourd’hui d’avoir une autonomie stratégique, aux plans politique comme militaire. Ils n’ont pas pu influencer durablement la stratégie américaine sur place, ni réussir à trouver une autonomie d’action. Durant les différentes réunions de l’OTAN, en 2020 et 2021, ils n’ont pas vraiment critiqué la décision US de retrait. Le principe de ‘tous ensemble’ de l’OTAN s’est transformé dans une règle réaliste ‘les USA impulsent, les Européens suivent‘.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. « USFOR-A continued to classify detailed ANDSF attrition information this quarter because the Afghan government classifies it»
  2. SIGAR = Special Inspector General for Afghanistan Reconstruction

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Dans la gueule du loup, avec Anne Nivat

Bruxelles2 Blog - Sat, 14/08/2021 - 09:55

(B2) Direction Grozny, Nice et Falloujah, avec l’intrépide Nina. Trois pays, trois villes, trois histoires, avec un point commun : un sentiment de révolte puissant.

Nina, jeune reporter de guerre, est partie voir la guerre, comme elle le dit elle-même, en Tchétchénie. Fin 1999, la guerre bat encore son plein dans cette république russe, aux frontières de la Géorgie. Aux côtés de Mahmoud, elle vit les bombardements, et nous emmène au fil de ses rencontres avec la rébellion tchétchène, et les forces de sécurité russes.

Autre lieu, autre époque : Nice, en 2021. Elle rencontre Abdel, dans un café. Il lui raconte son histoire, comment il est parti à Falloujah, en Irak, et pourquoi. C’est une autre sorte de rébellion : « J’me suis dit, et moi, ma vie, mes vingt ans, j’en fais quoi ? C’était aussi une façon de m’opposer à mes parents, des musulmans non pratiquants. Je voulais leur démontrer que pour moi, ils s’étaient soumis. Moi j’avais vingt ans, et j’voulais pas subir. Tout ça s’est mélangé dans ma tête. Partir, ok, mais fallait une bonne raison… Ou alors une mauvaise… Partir défendre mes frèrres musulmans qui étaient dans la merde pourrait me donner un but, comme une sensation d’exister… » Alors, Abdel commence à regarder des vidéos de massacres d’enfants et de femmes sunnites en Irak. Son désir de vengeance le pousse à partir. Partir faire la guerre à vingt ans, il trouvait ça « classe ! ». Peu après il comprend : la guerre, c’est dégueulasse. C’est la désillusion pour le jeune homme. 

L’histoire d’Abdel fait replonger Nina dans ses souvenirs de Falloujah, à la même période. Là bas, nous assistons avec elle aux affrontements entre Américains et Iraquiens.

Les trois personnages confrontent leurs idées sur la guerre, sur la rébellion, les sentiments qu’elles provoquent avant, pendant et après, partagent leurs souvernis sur l’horreur de ce qu’ils ont vu et vécu. Ils nous prennent par la main, nous présentent à leurs rencontres, leurs peurs. Et dévoilent un bout de leur histoire, une fiction certes, mais certainement peu éloignée de la réalité de milliers de personnes dans le monde.

« Dans la gueule du loup », BD de Anne Nivat, Jean-Marc Thévenet et Horne. Editions Marabout, 119 pp, 19,95 euros.

(Aurélie Pugnet)

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Géopolitique de l’Europe, les bases pour réviser cet été

Bruxelles2 Blog - Sun, 08/08/2021 - 21:32

(B2) L’heure est venue pour la bulle européenne de quitter Bruxelles, les bureaux gris de la Commission européenne, délaisser l’affreuse moquette grisâtre du Parlement, arrêter de trainer dans les cafés italiens, permettre à Schuman dee redevenir un homme et plus un rond-point. Planifier son mail ‘out of office’ et partir ! Mais pour ceux qui restent à Bruxelles, qu’ils soient dans les institutions, journalistes, lobbyistes, chercheurs, il va bien falloir s’occuper. C’est l’occasion idéale pour faire un peu de révision…

« Géopolitique de l’Europe » propose 40 fiches thématiques répondant à des questions pour comprendre les enjeux européens. Des questions des plus pratico-pratiques (À quoi sert l’Union européenne d’un point de vue commercial ?), aux plus philosophiques (L’Europe, c’est la paix ? Le piège de Tocqueville ?). On y trouve des fiches explicatives aussi, sur la différence entre les compétences partagées/exclusives/d’appui, le rôle des institutions (ne confondez plus Conseil de l’UE et le Conseil européen), et une chronologie des traités. Elles présentent encore les différentes coopérations de défense en Europe, les investissements de la Chine sur le vieux continent, les perceptions de menaces selon les pays…

Les explications sont basiques, didactiques, courtes, et avec des schémas. C’est l’introduction idéale avant de se pencher plus en détail sur un sujet en particulier.

Un livre recommandé aussi pour les étudiants, ou pour s’instruire à la plage, à l’abri des regards indiscrets de vos collègues et concurrents.

« Géopolitique de l’Europe, 40 fiches illustrées pour comprendre le monde », par Olivier de France, préface de Pascal Boniface, Editions Eyrolles, pp. 184, 17,90 euros.

Et pour tout connaître des dernières évolutions de la politique de défense européenne, l’indispensable à se procurer : la nouvelle ‘boîte à outils’ de la défense européenne, qui vient de paraître, ainsi que notre ouvrage de référence sur la PSDC. Et pour aller plus loin, sur la défense, la sécurité et la diplomatie européennes c’est sur B2 Pro que ça se passe.

(Aurélie Pugnet)

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[Maroun Labaki] Mon cœur saigne pour Beyrouth

Bruxelles2 Blog - Sat, 07/08/2021 - 17:58

(B2) Un très beau texte d’un confrère belge, d’origine libanaise, un an après l’explosion dans le port de la capitale libanaise, qui a mis à genoux des milliers de familles… et l’État libanais

Ce 4 août, mon cœur saigne pour Beyrouth. Je suis né au Liban, et c’est dans ses montagnes que plongent mes racines. C’est dans ses pinèdes que logent mes doux souvenirs d’enfant. C’est sur sa ligne de fracture entre l’Orient et l’Occident que j’ai appris que nous sommes tous différents et tous les mêmes. J’ai été nourri à sa diversité.

Longtemps, les Libanais m’ont irrité, à toujours lier leurs malheurs à de supposées interférences étrangères, à toujours rejeter la faute sur leurs voisins. Trop facile. On ne bâtit pas un État sur des combines. Un jour, on finit par payer.

Mais les Libanais ont trop payé pour leurs erreurs. Depuis près de deux ans, mais surtout depuis l’explosion au port de Beyrouth du 4 août 2020, les Libanais ont plongé dans la misère. La livre libanaise ne vaut plus rien, plus personne n’a accès à son épargne, il n’y a plus de médicaments, il n’y a plus d’essence, il n’y a plus d’électricité. Imaginez juste ma maman – qui n’est pas la plus mal lotie.

Le pays est parti en vrille, mais depuis un an la classe politique ne parvient pas à former un gouvernement ! Chacun tient l’autre par la barbichette, et tous ses sombres cleptomanes craignent par-dessus tout le grand déballage de leurs ignominies. Ils soufflent donc sur les braises confessionnelles dans l’espoir d’enfumer encore longtemps le peuple…

Le peuple a cependant grandi dans l’épreuve. Que s’est-il passé il y a exactement un an ? Qui connaissait l’existence de cette bombe à retardement au milieu du port de Beyrouth ? Les Américains affirment que seules 500 tonnes de nitrate d’ammonium ont explosé. Où sont alors passées les 2.250 autres tonnes de la cargaison débarquée on ne sait trop comment en 2013 ? Le Hezbollah a-t-il fait main basse sur ce trésor, en tout ou en partie, afin de renforcer son arsenal ? L’a-t-il aimablement cédé à son allié Bachar el-Assad ? Ce n’est pas faire injure aux chiites de poser ces questions ! Les Libanais, chiites compris, ont le droit de savoir. La classe politique libanaise, quasiment dans son ensemble, s’est pourtant appliquée à torpiller l’enquête… Un scandale dans le scandale !

Les magouilles, la corruption, le clientélisme, l’incurie, la spéculation, l’économie-casino : les Libanais veulent aussi savoir qui a volé leur argent, qui a piloté ce désastre annoncé. Peut-on dans ce contexte faire l’économie d’une rupture institutionnelle ? J’en doute plus que jamais. Ne pourrait-on, ici ou là, invoquer le droit d’ingérence ? On n’est pas loin en tout cas de la non-assistance à peuple en danger. SOS Beyrouth. SOS Liban.

Maroun Labaki

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En pause estivale

Bruxelles2 Blog - Sun, 01/08/2021 - 08:52

L’été venu, l’équipe de B2 part en pause estivale. Le rythme a été intensif ces derniers mois. Et tout le monde a besoin de souffler. Nous vous offrirons néanmoins quelques articles exclusifs, pour vous distraire ou vous informer. Nous reprendrons la plume si l’actualité européenne devient brûlante. Sinon ce sera l’occasion de relire un des 15.000 articles que vous n’avez pas eu le temps de lire ou, tout simplement, de faire pause. C’est bien aussi…

© NGV

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Dernières nouvelles des missions et opérations de maintien de la paix de l’UE – PSDC (juillet 2021)

Bruxelles2 Blog - Sat, 31/07/2021 - 19:25

(B2) Le tour des missions et des opérations ne ressemble finalement jamais à un autre. Ce mois ci, nous embarquons à côté des Européens sur le pont d’un navire, à terre. Ou pour escalader les pentes d’une montagne pour y cueillir des mines anti-personnel. Ils applaudissent à la créativité de forces de l’ordre, pour lutter contre la corruption. En Irak, la mission étend sa présence au Kurdistan…

Niamey (Niger). Nouvelle compagnie mobile à la frontière

La création d’une troisième Compagnie Mobile de Contrôle des Frontières (CMCF) est sur les rails. Un accord vient d’être signé en ce sens entre la mission européenne de soutien aux forces de sécurité intérieures et de la stabilisation du Niger (EUCAP Sahel Niger) et la Police nationale. Détails ici

(crédit : EUCAP Sahel Niger)

Erbil (Irak). Présence renforcée en Kurdistan irakien

Dans la perspective de l’ouverture d’une présence à Erbil, le chef de la mission de l’Union européenne de conseil à la sécurité intérieure (EUAM Iraq), Christoph Buik, s’est déplacé pour une série de rencontres avec les autorités régionales. L’enjeu est de renforcer la coopération dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité. Une visite largement relayée par la presse locale. Détails ici

Le chef de mission C. Buik, et Dr Hemin Hawrami, vice-président du Parlement du gouvernement régional du Kurdistan (crédit : EUAM Iraq)

Mogadiscio (Somalie). Bateau à terre

Le « ship in a box » (SIAB), le centre de formation des forces de l’ordre, a servi de terrain d’exercice à une formation d’intégration conjointe entre les unités de police maritime du port de Bosaso (BP-MPU) et des forces de police somaliennes (SPF-MPU). Le SIAB est la reproduction, à terre, d’un pont de navire marchand. Il été remis à la police maritime des forces de police somaliennes (SPF-MPU) par la mission de l’UE de soutien aux capacités maritimes (EUCAP Somalia), il y a deux ans. Détails ici

À bord du SIAB, les forces de l’ordre s’entraînent, notamment, aux procédures d’embarquement pour des inspections à bord des navires marchand (crédit : EUCAP Somalia)

Treskavica (Bosnie-Herzégovine). Déminage en haute montagne

Lorsque les membres de l’équipage de l’hélicoptère des opérations aériennes de l’EUFOR Althea (opération de stabilisation de l’UE) partent avec l’Agence de protection civile (CPA) de Bosnie-Herzégovine, sur les pentes du Mont Treskavica (2088 mètres au sommet), ce n’est pas pour un exercice ou un simple circuit de randonnée. Mais pour une opération de déminage. Ici, sur des sentiers de randonnée, on retrouve encore des mines anti-personnel et des restes explosifs de guerre déplacés par les avalanches. Détails ici

Golfe d’Aden. La voie maritime de l’aide alimentaire

L’escorte des bateaux du programme alimentaire mondial reste une activité phare de l’opération de lutte contre la piraterie maritime (EUNAVFOR Atalanta) dans le golfe. L’EUNAVFOR Somalie a « un taux de réussite de 100 % dans la protection du PAM dans la Corne de l’Afrique, et nous sommes pleinement engagés à le maintenir » explique le contre-amiral (LH) Luca P. Esposito, commandant de la force CTF 465. Détails ici

(crédit : EUNAVFOR Atalanta)

Ukraine. Campagne contre la corruption

Trois vidéos et trois affiches ont été retenues pour illustrer la nouvelle campagne de sensibilisation sur l’importance de la prévention et de la lutte contre la corruption, menée par la mission de conseil de l’Union Européenne aux forces de sécurité intérieure ukrainiennes (EUAM Ukraine). La remise des prix a eu lieu en juillet. Près de 100 candidats, issus de 14 académies des forces de l’ordre, ont répondu au concours lancé par la mission en partenariat avec la Fondation Hanns Seidel. Détails ici et les affiches à découvrir

L’une des affiches primées (crédit : EUAM Ukraine)

Enguri (Géorgie). Visite du voisin ukrainien

Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, s’est rendu sur le pont d’Enguri, près de la ligne de démarcation administrative abkhaze. L’occasion pour le chef de la mission d’observation de l’UE en Géorgie (EUMM Georgia), l’ambassadeur Marek Szczygieł, de lui faire un topo sur les enjeux et les évolutions contrastées de la situation en termes de sécurité et sur un plan humanitaire. Détails ici

(crédit : EUMM Georgia)

Bamako (Mali) Prise de poste

Le nouveau commandant de force de l’EUTM Mali, le général de brigade allemand Jochen Deuer, a pris son poste le 7 juillet 2021. Il succède au général de brigade Fernando Luis Gracia Herreiz (armée espagnole). Détails ici

(crédit : EUTM Mali)

(informations recueillies par Emmanuelle Stroesser)

NB : Pour tout connaître des dernières évolutions de la politique de défense européenne, l’indispensable à se procurer : la nouvelle ‘boîte à outils’ de la défense européenne, qui vient de paraître, ainsi que notre ouvrage de référence sur la PSDC

Lire aussi sur le B2 Pro (parus en septembre) :

Et sur le blog :

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Les interprètes afghans pour la mission EUPOL Afghanistan dans un trou noir

Bruxelles2 Blog - Thu, 29/07/2021 - 09:25

(B2) La situation des interprètes afghans ayant travaillé pour la mission de l’UE ‘EUPOL Afghanistan’ se heurte à un vide juridique. Qui va les protéger ?

Chaque formateur de l’UE était accompagné d’un interprète afghan (EUPOL Afghanistan)

Qui doit les protéger ?

Parce qu’ils étaient employés par l’Union européenne, la question se pose maintenant de savoir qui doit les protéger. Question cruciale alors qu’objectivement leur vie peut être mise en danger par l’avancée des Taliban. Certains pays, tels les Pays-Bas (1), n’acceptent leur demande d’asile et de rapatriement en Europe que s’ils ont travaillé pour des nationaux, comme l’indique le quotidien Trouw qui cite le cas concret d’un interprète, traducteur et agent de liaison pour EUPOL. Celui-ci attend cependant toujours d’être fixé sur son sort.

Des interprètes en danger

Pour l’ancien avocat général Jan Gras, qui a travaillé trois ans avec EUPOL en Afghanistan, dans l’unité anti-corruption puis à la formation des hauts gradés de la police afghane, chaque Afghan qui a travaillé pour la mission de maintien de la paix est « en danger », et cela inclut également les policiers, comme il le raconte à Trouw. « Quiconque a visiblement travaillé en étroite collaboration avec nous est désormais en danger. Je sais par un policier que sa voiture a explosé, il essaie maintenant de sortir du pays. »

Une centaine de personnes concernées ?

Le nombre de personnes concernées pourrait dépasser la centaine. « C’est difficile à estimer », reconnaît Jan Gras. « Mais au sein d’EUPOL nous avions une centaine de personnes [qui] avaient tous un interprète personnel. […] Lorsque je travaillais pour l’unité anti-corruption, j’avais un interprète personnel qui était toujours avec moi. Je ne pouvais rien faire sans lui. Les Afghans ont également traduit les leçons que j’ai enseignées et les programmes que j’ai créés. »

Un recensement en cours côté néerlandais

L’excuse invoquée par le gouvernement de ne pas savoir qui a travaillé pour eux est « une pure absurdité » selon lui. « Les Afghans qui travaillaient pour EUPOL étaient employés par l’Union européenne et à Bruxelles, ils savent qui était sur la liste de paie. » La police néerlandaise et le ministère de la Justice et de la Sécurité ont décidé cette semaine de faire un inventaire du nombre d’Afghans qui ont travaillé pour la mission de police , sont en difficulté aujourd’hui et souhaitent venir aux Pays-Bas.

Rapatriement loin d’être effectif

Pour les interprètes auprès des forces armées néerlandaises, la situation est plus limpide au plan juridique, mais loin d’être réglée, malgré les engagements répétés des autorités. Selon le ministère de la Défense, au moins 70 interprètes et leurs familles (sur 273 recensés) sont toujours en Afghanistan, attendant l’autorisation de venir aux Pays-Bas, indiquent nos confrères néerlandais.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Les Pays-Bas était un des pays les plus engagés dans la mission EUPOL Afghanistan.

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24 heures chez Ariane, fournisseur d’accès à l’espace

Bruxelles2 Blog - Wed, 28/07/2021 - 13:46

(B2 chez Ariane) On part dans l’espace avec un constructeur de fusées européennes, Ariane

Après être allé voir des satellites européens, B2 est parti chez un constructeur européen de lanceurs — autrement dit, des fusées — pour envoyer ces satellites dans l’espace (lire : 24 heures chez Airbus) Et bientôt des humains ? (Lire notre interview : L’Europe doit se réveiller et organiser la présence dans l’Espace (André-Hubert Roussel et Stéphane Israël – Ariane).

Wow !

Les téléphones, abandonnés dans une boîte étrange. Les photos, interdites. Mesures de sécurité, au max. Ce que l’on s’apprête à voir prend des airs top secret. Et c’est bien le cas. Direction les sites d’intégration des fusées Ariane 5 puis Ariane 6. Vite, vite, on se dépêche ! Il faut tout voir. Chez Ariane, on est fier de nous faire faire le tour du propriétaire, nous mettre des étoiles dans les yeux, et nous impressionner. Pas bien difficile, il y a de quoi. Le ‘wow effect‘ est présent. 

Ariane6, la nouvelle génération de lanceurs

Nous entrons dans ces bâtiments ultra-sécurisés. Chaque génération de lanceur a son hangar de production. D’un côté ceux d’Ariane 5, et à quelques mètres de là, Ariane 6, les nouveaux, où une cinquantaine de personnes seulement y travaillent. 

Ariane 62 (le chiffre 2 correspond aux deux boosters)

Sur le site des Mureaux de Arianegroup, en région parisienne, des équipes sont à la tâche pour fabriquer le premier étage (core stage) des lanceurs Ariane — soit de tout en bas, jusqu’où se trouve le dessin du numéro 6. Et c’est déjà immense, la taille d’une tour d’une douzaine d’étages à peu près. Cela donne une idée de la suite. Au final, une Ariane 6 fera 62 mètres (un immeuble de 20 étages) contre 55 mètres pour sa petite sœur Ariane 5.

Une meilleure productivité

Si la différence d’apparence entre une Ariane 5 et Ariane 6 est ce qu’il y a de plus marquant, derrière leur apparence ‘simple’ se cache un travail titanesque d’innovation. Non seulement dans la performance du lanceur lui-même, mais dans l’organisation de la production. Alors que seules cinq à sept fusées  Ariane 5 sortent des usines par an, avec Ariane 6, l’objectif de production est de douze par an, soit une fusée par mois. Cette efficacité répond à plusieurs facteurs.

Pour Ariane5, l’intégration se fait verticalement. Pour Ariane6, elle est horizontale. Ce changement d’organisation peut paraître anodin, mais chez Ariane, il s’agit d’un véritable game changer. Ils gagnent en temps, en efficacité — par exemple tout simplement parce qu’en travaillant verticalement, si l’on oublie un outil à l’étage supérieur, il faudra prendre l’ascenseur pour aller le chercher, souci inexistant sur une intégration horizontale. Ici, on fonctionne comme dans une usine à la chaîne : chacun des équipement suit sa route avant d’être assemblé dans l’étage principal et envoyés au Havre, en bateau, sur la Seine. Là bas, il est rejoint par l’étage supérieur (second stage), arrivé de Brême, en Allemagne. Assemblés en un seul morceau, ils départent pour Kourou, en Guyane française.

Autre gain de temps non négligeable pour Ariane 6, celui d’assemblage sur le launchpad de Kourou. Alors qu’il fallait 30 jours pour une Ariane 5, seuls dix jours seront nécessaires pour la campagne d’assemblage des nouvelles Ariane 6.

En fin de course, l’objectif est aussi de rendre la production d’une Ariane 6, 40% moins chère qu’une Ariane 5.

Détour qui vaut la peine, avant de passer à la suite, pour rendre visite au moteur Vulcain 2.1 qui partira sur Ariane 6, dont la puissance est équivalente à deux trains TGV.

Vulcain 2.1 FM2 – VLine

Déjà obsolète ?

En 2024, débutera la phase de stabilisation de Ariane 6. C’est à dire que plus aucune Ariane 5 ne sera produite. Il en sera fini de cette génération, place à la nouvelle. La première Ariane 6, doit être lancée pour le second semestre 2022, alors qu’elle était au début prévue pour 2020 mais « les grands programmes de développement peuvent prendre plus de temps que prévu », justifie Stéphane Israël, le PDG d’Arianespace. A ceux qui se demandent si Ariane 6 ne sera pas obsolète une fois prête, Stéphane Israël est formel : elle ne le ne sera « pas du tout ». Au contraire, Ariane 6 « sera le lanceur de la décennie ».

Paré à toutes les opportunités

De plus, tient à rappeler son constructeur, Ariane 6 est « parfaitement adaptée à l’évolution, ainsi qu’à la demande institutionnelle et commerciale ». Pour les institutions, il y a un lanceur polyvalent pour les satellites d’observation lourds (type CSO, le satellite d’observation militaire de la France) et pour les missions scientifiques (Mars sample return, Mission de retour d’échantillons martiens). Pour les commerciaux, « la polyvalence sera la clé », souligne Stéphane Israël. Pour répondre à la tendance du moment d’envoyer des grandes constellations de satellites, il faut de grands lanceurs, comme Ariane6. 

Dans le carnet de commandes de la mission Ariane 6, se trouve déjà les satellites de navigation Galileo (le GPS européen), de géosatellites pour les opérations américaines (Viasat), et européennes de Eutelsat (deux entreprises de connexion par satellites).

L’innovation continue

Comme le dit Stéphane Israël, Ariane 6 « n’est pas la fin du voyage », seulement le « début d’un nouveau ». Et « il faudra toujours innover davantage. » Ariane se projette déjà vers les prochaines générations, après Ariane6, sur son site de Vernon, en Normandie. On y croise Thémis et Prometheus (ce dernier est développé en partie aussi à Ottobrunn en Allemagne). Ne vous fiez pas à leurs petits noms, ce sont en fait de grosses machines à la puissance redoutable. L’un est un démonstrateur d’étage de fusée réutilisable (reusable stage demonstrator) et le second un moteur réutilisable… vers l’infini et l’au-delà !

(Aurélie Pugnet)

Toutes les images sont créditées à Arianegroup/Arianespace

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24 heures chez Airbus Defence & Space, au milieu des satellites, vecteurs de la souveraineté européenne

Bruxelles2 Blog - Tue, 27/07/2021 - 14:40

(B2 à Toulouse) Les Européens ont besoin de leur accès à l’espace pour être indépendants face aux autres puissances spatiales. En particulier, avec leurs propres satellites. Immersion chez Airbus Defence & Space, un constructeur de satellites européens

Nous les utilisons tous les jours, et pourtant nous ne les voyons jamais. Les satellites qui oscillent au dessus de nous envoient nos mails, nous permettent de regarder la télévision, nous guident sur les routes, prennent des photos de la Terre… C’est charlotte sur la tête, blouse blanche Airbus sur le dos, que B2 a arpenté le site d’Airbus, à Toulouse, qui fabrique ces fameux objets. B2 a visité pour vous des salles blanches — ces espaces clos limitant la quantité de contaminants à l’intérieur — où sont construits, testés, assemblés des satellites européens et leurs équipements.

Le tout avec le téléphone en mode avion laissé à l’extérieur… Ici, on ne rigole pas avec la sécurité et l’hygiène. Les satellites et leurs équipements sont fortement protégés, pour des questions de sécurité industrielle et de souveraineté. Une fois assemblés et prêts, ils sont envoyés dans l’espace, et impossible, dès lors, de les réparer s’ils venaient à tomber en panne… Interdiction aussi donc, d’écrire au crayon gris, la pointe en graphite entrant en contact avec le papier pourrait créer des poussières… et endommager les équipements.

Airbus Space and Defence a été sélectionné, comme Thales Alenia Space pour travailler sur la deuxième génération de satellites de navigation européen Galileo (Airbus)

Des gros appareils photo 

Premier arrêt, la salle d’intégration des équipements optiques. Un autre nom pour désigner d’immenses appareils photos mis sur les satellites pour observer la Terre depuis l’espace. Ils servent à surveiller autant les catastrophes, que détecter le manque d’eau de cultures, suivre les changements météorologiques, ou cartographier une zone. Dans le civil, la résolution est de 30 cm (avec les derniers Pléiade néo d’Airbus), et encore plus basse pour les militaires… Le futur et l’innovation ne s’arrêtent pas à la taille de la résolution. Chez Airbus on veut notamment travailler sur la vidéo, l’agilité des appareils, le nombre des bandes spectrales (Airbus fait déjà des instruments qui peuvent décrypter 13 bandes spectrales différentes sur le même satellite).

Ici, le principal défi est d’intégrer tous les équipements avec une précision parfaite. Un satellite a un côté à l’ombre, un autre au soleil soit un côté sous +150 et l’autre à -120 degrés celsius. Tel un rail de chemin de fer qui gonfle sous la chaleur cuisante de l’été, il faut s’imaginer l’impact de la chaleur sur un satellite — et le degré de perfection nécessaire pour éviter une catastrophe.

Satellites d’observation (Airbus)

Les yeux et les pieds du satellite d’observation

La perfection n’est pas laissée à l’écart dans la suite de notre parcours. Dans un bâtiment tout proche, se cachent des équipements stratégiques, principalement dédiés à l’Observation (1), comme sur la photo ci-dessus. De leurs petits noms : gyroscopes, actionneur gyroscopique (CMG). En clair, ce sont les yeux et les pieds des satellites. Entre deux panneaux lumineux prêts à alerter : « danger d’asphyxie » et « évacuation immédiate », les équipes d’Airbus fabriquent donc ces petites choses au rôle si important.

L’actionneur gyroscopique (CMG), c’est les pieds. Il oriente le satellite d’observation (donc jusque trois tonnes, rappelons qu’il n’y a pas d’air dans l’espace), pour prendre des photos comme il le souhaite.

Les yeux prennent la forme du gyroscope. Lui sait comment le satellite est orienté. Nous en avons tous sur nous, ils sont présents dans nos smartphones pour faire pivoter les écrans en format paysage/ portrait — sauf que celui développé à Toulouse est à peu près 100.000 fois plus précis. Plus précis encore, dans un coin de la salle, un gyroscope militaire. Celui-ci est « le plus précis du monde » se vante-t-on chez Airbus (Non, on n’a pas le droit de savoir ce que cela signifie). Pour imaginer la précision de la chose, dans le gyroscope il y a des fils de fibre optique. Dans le gyroscope civil, c’est environ 200 mètre de fibre, dans le gyroscope militaire c’est 4 kilomètres de fibre bobinée — le travail prend un mois entier.

Et quand le satellite se perd, il fait appel à un senseur solaire, ce petit boîtier de la taille de votre main, qui saura remettre le satellite sur le droit chemin.

C’est l’heure de l’évaluation !

Passage obligatoire pour les gyros et CMG : les tests. Des heures entières dans des boîtes qui tournent et retournent dans tous les sens, pour mesurer l’actionneur, le positionnement dans l’espace. La performance est ici mesurée à la précision. Le CMG est si sensible que la climatisation ou un train qui passe non loin fera trembler la table et bouger l’actionneur, et le gyroscope enregistrera un mouvement. Pour éviter ce genre de souci, la table de test est prévue en conséquence : elle est est faite de marbre, pèse plusieurs tonnes, posée sur une plaque anti-sismique et désolidarisée du bâtiment, coulée plus profond dans la Terre. En termes d’innovation des gyros et CMG, une voie en particulier est recherchée : être encore plus performant, soit plus fiable et précis…

15 jours pour cartographier la Corée du Nord

Au sein d’Airbus Defence & Space se cache un département de commercial intelligence, soit un service de fourniture d’analyse d’images satellites. Les images satellites sont belles à voir, mais sans analyse elles peuvent paraître un peu inutiles. 

La mission : se préparer à répondre à différentes menaces. Par exemple, une invasion ou une guerre : les militaires peuvent avoir besoin d’images très rapidement et donc accès aux images civiles — Airbus a des contrats avec la direction générale de l’armement (DGA) et la direction du renseignement militaire (DRM). Face au terrorisme, les armées ont aussi besoin de couvrir les terrains, pour faire un battle management assessement, estimer les dégâts après une frappe, vérifier si une zone est habitée… Pour la marine, ils surveillent les côtes, dont les ports, et observent les échanges. Autre zone d’intérêt : le suivi de travaux dans des endroits peu sécurisés, comme des pipelines ou des mines. Grâce aux images, des équipes mesurent le tas de gravas, ou l’avancement de la construction pour leurs clients, qui n’ont donc pas à envoyer du personnel de sécurité sur place.

Avec ses satellites, Airbus mettrait par exemple 4 à 5 mois pour cartographier le Mali, une quinzaine de jours pour la Corée du nord. Sans surprise, certaines zones font l’objet de restrictions. Airbus ne peut pas vendre des images sous un mètre de résolution dans les zones sensibles françaises (exemple, quand on y voit des zones opérationnelles françaises ou des corps militaires français).

Assemblage & tests

Dernière étape : l’assemblage et les tests. C’est l’heure de vérité pour les satellites. Les panneaux sont déployés, puis ils passent des tests de radio fréquence, de résistance aux températures extrêmes… C’est le moment aussi de se rendre compte de la différence de taille entre un satellite de télécommunications en orbite géostationnaire, qui fait la taille de deux ou trois bus mis bout à bout, et d’un petit satellite d’observation pour constellation, qui fait la taille d’un frigidaire.

Mais ça, ce n’était que pour le civil. Les satellites à usage militaire, type Syracuse, sont cachés derrière des bâtiments particuliers. Il faudra laisser son imagination faire le travail…

A suivre, 24 heures avec les fusées Ariane…

(Aurélie Pugnet)

(1) Les CMG sont surtout utilisés pour les satellites d’observation en orbite basse (low earth orbit, LEO). Les satellites télécoms en orbite géostationnaire (GTO) fonctionnent plutôt avec de la propulsion, car ils n’ont pas besoin de la même agilité.

Lire aussi :

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Retour sur l’opération Artémis. Le modèle d’origine des battlegroups, un mythe ?

Bruxelles2 Blog - Sun, 25/07/2021 - 10:17

(B2) Chercheur patenté, bon connaisseur des missions PSDC, Laurent Borzillo revient sur l’opération Artémis, la première opération militaire autonome de l’UE. Une opération atypique qui n’est pas, contrairement à l’imagerie européenne

Arrivée des forces sur Bunia (Reportage TV – INA) Postdoctorant (programme ambassadeur DGRIS), Laurent Borzilo est rattaché au CNRS (Cepel) et au réseau d'analyse stratégique (UQAM). Ses propos n'engagent que lui. Mais ils nous ont semblé intéressants de les mettre à disposition de nos lecteurs pour exercer leur oeil critique.

Une absence d’emploi des battlegroups notable

« Lorsque l’on aborde le cas des groupements tactiques de l’UE (GTUE ou battlegroup en anglais), on ne peut malheureusement que constater leur absence d’emploi jusqu’ici. Ce, alors que les premiers GTUE d’alerte ont désormais plus de 16 ans. Plusieurs auteurs (chercheurs ou praticiens) ont depuis plusieurs années écrit sur les raisons expliquant selon eux cette absence d’emploi ou sur les réformes nécessaires pour modifier cette situation considérée par plusieurs comme navrante. Pour certains, ceci est d’autant plus regrettable du fait de la réussite de ce qui fut l’opération Artémis lancée en 2003 en Ituri (République Démocratique du Congo), quelques mois avant la décision relative à la création des GTUE.

La première opération autonome de l’UE

Considérée comme la première opération autonome de l’Union européenne, bien qu’ayant été réalisée avant la mise sur pied des GTUE, de par certaines de ses caractéristiques (effectifs projetés, rapidité de déploiement, durée limitée de l’opération, réalisation des objectifs, etc.), Artémis est devenue d’une certaine manière non pas la première mission des GTUE, mais ce que l’on pourrait dénommer la « mission 0 », précédant la création des GTUE, mais ayant les mêmes caractéristiques de ce que serait censée être une opération avec les GTUE. Ce faisant, la preuve serait ainsi faite de la validité du concept des GTUE, l’absence de volonté politique étant quant à elle l’unique responsable de leur non-emploi jusqu’ici.

La mission 0 des battlegroups : un mythe ?

Or l’analyse de décisions prises en 2003 (lancement de l’opération Artémis, discussions sur la création des GTUE) tend à démontrer que cette filiation forte entre Artémis et les GTUE relève du mythe. Certes plusieurs des interlocuteurs interrogés pour notre recherche, ainsi que de nombreuses sources écrites primaires et secondaires font référence à cette opération lorsque le sujet des GTUE est abordé. La source primaire la plus emblématique est justement la déclaration conjointe issue du sommet franco-britannique de Londres de 2003 annonçant la création des battlegroups : « En continuant sur la lancée du succès de l’opération Artémis dans la République Démocratique du Congo, nous proposons une nouvelle initiative pour que l’Union européenne se focalise sur le développement de ses capacités de réaction rapide afin de renforcer son aptitude à répondre aux requêtes de l’ONU dans les situations de gestion des crises à court terme »2. Artémis constitue-t-elle pour autant le modèle à partir duquel les GTUE ont été imaginés et créés ?

Des objectifs proches

La nature de la mission d’Artémis cadre, il est vrai, avec les objectifs assignés aux GTUE. Celle-ci consistait à mettre rapidement fin aux combats et exactions se déroulant dans la province de l’Ituri en République démocratique du Congo. Ce, le temps que l’ONU puisse mettre sur pied une nouvelle force militaire de casques bleus dénommée « brigade Ituri », chargée d’assurer sur le long terme la paix dans cette province. La composition des troupes de l’opération Artémis bat cependant en brèche la thèse du modèle pour les GTUE. En effet, le GTUE se veut avant tout une unité multinationale.

… Mais une composition monocolore

Certes il n’existe pas officiellement de seuils quant au pourcentage que doivent représenter les militaires de la nation cadre au sein du battlegroup. Si l’on se réfère toutefois aux battlegroups d’alerte qui se sont succédé depuis 2005, la moyenne se situe entre un et deux tiers de l’ensemble des forces. Or Artémis était composée de près de 80 % de soldats français. Cela signifie donc que si Artémis avait réellement été utilisée comme modèle, en général 80 % de la composition d’un GTUE devraient être issus de la nation-cadre. La pratique de la composition des groupements d’alerte en est très loin.

Avant tout, une opération française bénéficiant d’un rapide « habillage européen »

Cette mise sur piédestal de l’opération Artémis comme modèle pour les GTUE, sert en fait à masquer une réalité bien moins enchanteresse, à savoir qu’Artémis fut avant tout une opération française bénéficiant d’un rapide « habillage européen » en incorporant des militaires issus de divers États membres, ne servant cependant que dans des postes secondaires d’état-major ou de logistique. À notre question sur l’hypothétique filiation entre l’opération en Ituri et les groupements tactiques un de nos interlocuteurs nous donna justement cette réponse tranchée.

La réalité : loin du mythe

« C’est un mythe complet voulu par les politiques. [Le chef d’état-major de l’armée de Terre] déclencha [à l’époque] l’alerte guépard, [puis] proposa le général Thonier [comme commandant d’opération] au chef d’état major des armées. En huit à dix jours on fit partir le 3° RIMA. Rapidement il fallu faire un habillage européen. Les Belges comme d’habitude fournirent un à deux C-130. Les Suédois acceptèrent et envoyèrent leurs forces spéciales d’un niveau égal voire inférieur à un régiment d’appelés en France. […] Je ne dis pas qu’il ne fallait pas le faire, car c’est bon pour la France de ne pas être seul, mais il ne faut pas se leurrer: c’était une opération française 3».

Une volonté française ardente

Plusieurs autres militaires français occupant des fonctions clés à cette époque nous ont confirmé d’ailleurs cette version, ainsi qu’un militaire allemand en poste alors à la représentation militaire allemande auprès de l’OTAN et du Comité militaire de l’UE : « Sur Artémis, les Français nous avaient prévenus qu’ils le feraient quoiqu’il arrive, mais que cela était mieux avec un affichage européen 4».

Le symbole d’une dynamique positive

Opération française bien que présentée comme européenne tant à l’époque qu’encore aujourd’hui, Artémis ne fut malheureusement pas le modèle à la base de la création des GTUE. On ne peut néanmoins nier que celle-ci a favorisé une dynamique positive en faveur du développement des capacités militaires européennes entre l’automne 2003 et le printemps 2004.

Une proposition franco-britannique à l’origine

Une des raisons possibles de cette absence de lien est peut-être à chercher dans l’origine de la proposition de création des GTUE. En effet le projet relatif à la création de ces unités fut proposé par le gouvernement de Tony Blair aux Français lors du sommet franco-britannique de Londres en 2003, ainsi que l’attestent plusieurs de nos interlocuteurs. Ceci n’empêcha pas cependant les responsables britanniques d’adopter par la suite des politiques peu favorables vis-à-vis des GTUE, une fois ces derniers sur pied.

(par Laurent Borzillo)

  • Ce papier est tiré des recherches réalisées dans le cadre d’une thèse1 menée en cotutelle entre l’Université de Montréal et l’Université de Montpellier. Une thèse portant sur les groupements tactiques de l’Union européenne (GTUE) et la brigade franco-allemande en recourant à une comparaison entre la France et l’Allemagne.
  1. Borzillo Laurent, Les forces expéditionnaires bi/multinationales en Europe : analyse comparée des politiques d’alliance de la France et de l’Allemagne (1991-2016), Universités de Montpellier et de Montréal, 2020.
  2. Jacques Chirac et Tony Blair, « Communiqué conjoint, sommet franco-britannique de Londres » Lancaster House, 24 novembre 2003.
  3. Entretien avec un militaire français membre de la direction de l’EMA en 2003, réalisé le 8 juin 2017.
  4. Entretien avec un militaire allemand membre de la représentation militaire allemande auprès de l’OTAN et de l’UE en 2003, réalisé le 9 août 2017.

Lire aussi : Opération Artémis : dix leçons pour l’Histoire

Voir ce reportage

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Takuba. Les Italiens opérationnels à la fin de l’été. Avec une capacité reconnaissance et Medevac

Bruxelles2 Blog - Sat, 24/07/2021 - 15:05

(B2) La participation italienne se confirme. Elle va apporter des capacités précieuses à la task-force Takuba. Pour 2022, les Italiens pourraient passer à l’encadrement des forces maliennes

C’est un détachement Air assez semblable à celui déployé à Herat en Afghanistan avec ses A129 Mangusta (MOD Italie / Archives B2)

Un déploiement commencé en mars, clos d’ici la fin de l’été

Le redéploiement du contingent italien a commencé en mars dans la zone des trois frontières de Liptako Gourma. Les Italiens seront basés plus précisément dans les bases de Gao et Menaka. Et selon le ministre italien Lorenzo Guerini, il est prévu « d’atteindre la capacité opérationnelle initiale après l’été ».

Une capacité reconnaissance et MEDEVAC

L’apport italien se matérialisera surtout par une capacité de reconnaissance et d’évacuation sanitaire (MEDEVAC). Une capacité essentielle pour Takuba, qui lui permettra ainsi d’être autonome des moyens de Barkhane. Les Italiens mettent ainsi à disposition huit hélicoptères (quatre de transport et quatre d’attaque A129 Mangusta). Coût de la mission : 49 millions d’euros (1,2 million € par mois pour le personnel et 1,4 million € pour le fonctionnement + 23 millions pour les coûts d’investissement et déploiement).

Un task-group de mentoring en 2022

Mais Rome prévoit, à partir de 2022, « d’étendre l’activité également à la formation des membres des forces spéciales locales ». Le contingent italien pourrait donc être plus important que prévu. La limite maximale d’engagement a ainsi été augmentée. Elle passe de 200 à 250 hommes pour la période 2021-2022. En moyenne, cela signifie une présence de 150 militaires présents sur le théâtre. Tandis que le nombre de véhicules double — passant de 20 à 44 véhicules.

Des appuis avec les missions conjointes

Des appuis associés seront « possibles vers et depuis les autres missions dans la zone », précise la note gouvernementale, notamment la mission bilatérale (MISIN) de formation des forces spéciales nigériennes. De même, les moyens nationaux, « complétés si nécessaire par des unités de forces spéciales », pourraient « éventuellement être utilisés pour soutenir les activités de ces missions ».

(Nicolas Gros-Verheyde)

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BA709, la base de référence pour les pilotes de drones

Bruxelles2 Blog - Fri, 23/07/2021 - 18:30

(B2, à Cognac) Futur terrain d’accueil de l’Eurodrone, la base aérienne de Cognac-Châteaubernard abrite déjà les Reaper dont une partie sont utilisés en bande sahélo-saharienne (BSS)

Au coeur du vignoble charentais, dans le sud-ouest de la France, la base aérienne 709 s’étend sur un peu plus de 450 hectares. C’est une base en pleine croissance. Une plateforme de formation des pilotes de chasse en pleine modernisation. Près de 1500 effectifs s’y croisent. C’est le plus gros employeur de l’agglomération, après Hennessy, la célèbre distillerie. Sur la base, on y trouve des bâtiments anciens, dont celui abritant le mess, des casernes et des hangars où se garent les Pilatus PC 21 (quasi) flambant neufs de la formation des pilotes de chasse. Outre l’Ecole de l’aviation de chasse, la base est devenue celle de la 33e escadre de surveillance, de reconnaissance et d’attaque (dite 33e ESRA), chargée de la mise en œuvre des drones MALE (moyenne altitude et longue distance) affectés à l’armée de l’air et de l’espace.

Les bureaux de l’escadron spécialisé de pilotes de drones (© ES/B2)

Comme au cinéma, ou presque…

En recul, surprotégés, des containers forment une base dans la base. C’est là qu’opèrent les équipages des drones Reaper. « La force du Reaper, c’est sa persistance, sa capacité en temps réel, sa discrétion », explique le lieutenant-colonel Samuel, de la 33 escadre de surveillance, de reconnaissance et d’attaque. La discrétion est aussi de mise dans ces containers où les équipages se relaient. Mais pas le bruit de la soufflerie, entêtant. L’équipage ne l’entend plus, sous ses casques. Tout est pensé pour leur concentration optimale. Jusqu’au rideau pour protéger de la lumière du jour au moment de la relève. Un équipage de Reaper compte quatre personnes. Deux dans le cockpit de pilotage (à gauche le pilote, à droite le capteur) et deux dans le cockpit de renseignement. Deux cockpits séparés. Mais les quatre membres d’équipage communiquent en permanence. Chacun fait face à une myriade d’écrans, claviers, tableaux et commandes.

Des équipages complets

Dans le cockpit de pilotage, le pilote est chargé du positionnement, de la coordination 3D, du tir. Le capteur se charge du guidage d’armement, de la boule optique. Volant de 5 à 10 km d’altitude, le Reaper quadrille au millimètre. Au renseignement, l’opérateur d’image analyse la vidéo en temps réel, il habille les images (en les retravaillant avec les éléments analysés). Le coordinateur tactique fait la manoeuvre, gère l’interface avec le centre de commandement. C’est « le chef d’orchestre » de la mission. Suivant les missions, « le centre de gravité sera plus ou moins mis sur le renseignement ou le pilotage » explique le lieutenant-colonel Samuel.

Des nouveaux pilotes à part entière

Un pilote de drone, « c’est un pilote et pas un demi pilote » insiste le colonel Nicolas Liautey. Il est le commandant de la base depuis près d’un an, et pilote de chasse expérimenté. La formation initiale sur avion impose « avoir le sens de l’air ». Parce qu’il pilote à distance, il doit s’insérer dans la circulation, communiquer avec les organismes de contrôle aérien, savoir gérer les pannes, etc. La différence, c’est que le pilote de Reaper subit moins de contraintes physiologiques. Son corps ne subit pas les accélérations du vol. « Il n’encaisse pas les 9G d’un pilote de Rafale qui fait demi tour », livre en exemple un pilote.

Le drone reaper, en repos au sol, sur la base aérienne de Cognac-Châteaubernard (© ES/B2)

La particularité sur Reaper, c’est que le spectre des missions est large : renseignement, appui des troupes au sol, etc. Cela justifie que les premiers pilotes aient été recrutés parmi les pilotes de chasse. Le recrutement s’élargit aujourd’hui aux pilotes de transport et d’hélicoptères. Ce qui est certain, c’est qu’il faut encore recruter. Car quand un drone part pour 24 heures, ce sont des équipages qui doivent se relayer. En moyenne, 15 équipages sont nécessaires pour un orbite H24. Un officier l’assure, les jeunes recrues ne sont pas forcément « plus geek » que d’autres. « La richesse de la 33e escadre de Cognac, c’est justement qu’elle compte des profils de différents horizons. »

De Cognac à Barkhane

Le colonel Liautey aime à comparer la 33e escadre à une « start-up », « car on a beaucoup d’expérience mais pas encore de business model sur les drones ». Le « vrai carburant du drone », « ce sont les ressources humaines » résume le commandant. Le « challenge » est de former des équipages tout en apportant un soutien opérationnel en bande sahélo-saharienne (BSS). La base de Cognac-Châteaubernard est la maison mère de deux systèmes BK1 et de deux systèmes BK5 (livrés en 2020). En tout, ce sont douze drones, mais seuls six sont à Cognac. Six autres sont déjà partis en BSS (1). En deux ans, « il a fallu apprendre en marchant en parallèle d’un engagement soutenu » (au Sahel). La première capacité opérationnelle pour le BK5 en BSS date de mai. La pleine capacité est prévue d’ici 2022. D’ici là, les équipes expérimenteront encore les lasers, les munitions guidées au laser, etc.

Sa majesté le MALE

Avec son envergure de 20 mètres, le Reaper est actuellement le plus grand drone. À l’opposé du plus petit en usage dans l’armée, de 20 cm. On l’aperçoit de loin dans son hangar. Comme un grand planeur. Cela lui permet d’être plus léger, et d’avoir une autonomie plus longue (près de 24h). En revanche, il vole moins vite qu’un avion. Ici, il sort quasiment tous les jours. Pour des exercices d’entrainement dans 99% des cas. Une dizaine de pilotes s’y forment par an.

Du plus grand au plus petit, le drone miniature (© ES/B2)

À long terme (2026), les infrastructures de Cognac devront encore s’adapter, pour être prêtes à accueillir l’eurodrone MALE et ses sept mètres de largeur supplémentaire. La base accueillera les premiers à partir de 2028. Le commandant de la base n’en doute pas. À l’horizon 2030, la loi sur la programmation militaire a programmé en tout huit systèmes de drone MALE.

(Emmanuelle Stroesser)

reportage réalisé sur la base de Cognac en juin 2021

  1. Les Reaper sont armés depuis décembre 2019.

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Deux cadres de Daech neutralisés au Mali par Barkhane avec les Américains

Bruxelles2 Blog - Thu, 22/07/2021 - 17:30
(crédit : DICOD / EMA)

(B2) Les militaires français au Mali ont neutralisé « deux cadres » du groupe armé l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), affilié à Daech, annonce le ministère des Armées ce jeudi (22 juillet).

Dans la région de Menaka

Cette neutralisation suit une opération « déclenchée » par la force Barkahne « en coordination avec l’armée américaine » dans la nuit du mercredi au jeudi, « sur très court préavis », contre un camp de l’EIGS, dans la région de Ménaka au Mali. L’identité des deux responsables neutralisés lors de l’opération est « en cours de confirmation », précise le ministère.

L’élimination des cadres dirigeants de Daech : une stratégie

Ce n’est pas la première fois que l’armée française vise des hommes clés dirigeant l’EIGS. C’est même un des axes suivis depuis plusieurs et appelés encore à se renforcer selon la dernière annonce du président français Emmanuel Macron (lire : L’opération Barkhane reconfigurée sur trois piliers. La menace est au Sud, cap sur le Niger dit Emmanuel Macron)

(Aurélie Pugnet)

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