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B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages
Updated: 8 hours 11 min ago

Dernières nouvelles des missions de maintien de la paix l’UE (PSDC) – septembre 2015

Tue, 06/10/2015 - 09:26

(BRUXELLES2)

Koulikoro (Mali). Le bataillon Debo revient se former après 1 an sur le terrain

Pour leur retour à Koulikoro, les instructeurs européens ont préparé un petit exercice de réaction à l’embuscade. (Crédits: EUTM Mali)

Environ 600 hommes du GTIA 5 (Groupement tactique interarmes) sont arrivés à Koulikoro pour leur recyclage programmé dès leur entraînement initial en mai 2014. Cela marque le début du cycle de réentrainement des Forces  armées maliennes (FAMA) par la mission européenne de formation (EUTM MALI).

Depuis tout ce temps, ils se sont battus dans le nord du Mali et ont également été impliqués dans l’opération pendant la période de la prise d’otages de Sévaré. Sévaré est également la ville de garnison du GTIA 5 « DEBO ». Les exercices ont pour but de voir comment les soldats maliens en patrouille réagissent face à une attaque ennemie inopinée et comment ils se sortent d’affaire sur le plan tactique. Malgré des températures avoisinant 36°, les ordres sont rapidement exécutés. Et ils reprennent rapidement l’entrainement, en progressant avec précaution tout en observant attentivement le terrain. « La première formation EUTM que les soldats maliens ont reçue et le fait qu’ils ont été déployés en opérations dans le nord ces derniers mois, sont encore très visibles. Il faut seulement rafraîchir les connaissances qu’ils possèdent déjà. C’est un bon signe! Cela montre que le travail d’EUTM Mali a eu un effet positif et le niveau de compétence des soldats maliens continue à s’améliorer » souligne le caporal instructeur Ale, du premier régiment des Gurkhas (1st Royal Gurhka Regiment) qui assure la formation côté européen.

Niamey et Agadez (Niger). Les formations d’EUCAP Sahel Niger battent le plein 

EUCAP Sahel Nigel apporte une formation d’intervention pour treize formateurs de l’Ecole nationale de gendarmerie de Niamey. (Crédits: EUCAP SAHEL Niger)

Une formation a été dispensée par les experts d’EUCAP Sahel Niger, début septembre, à 13 formateurs permanents de l’Ecole Nationale de gendarmerie de Niamey sur les « Techniques d’Intervention Professionnelle ». Formation qui permet d’acquérir les savoir faire techniques tout en respectant le cadre légal et l’usage de la force strictement nécessaire. À Agadez, c’est une formation en « Gestion du parc de véhicules » qui a été dispensée par les Européens, les 15 et 16 septembre.  Il s’agissait de la troisième session de formation du module en question, à laquelle ont participé 10 mécaniciens de la Gendarmerie et 7 mécaniciens de la garde Nationale venus de toutes les régions. Cette formation est complémentaire des activités précédentes de la mission en faveur des ateliers automobiles des différentes forces qui ont permis de renforcer leurs capacités en matière de maintenance à travers la fourniture d’outillage performant.

Dar al-Salaam (Tanzanie). Formation de marins tanzaniens au système de détresse

(Crédit : EUNAVFOR Atalanta)

L’opération EUNAVFOR Atalanta continue ses actions de formations. Mardi 15 septembre, ce sont les Espagnols du patrouilleur Meteoro, de passage au port de Dar El-Salaam, qui ont formé des cadets-officiers de la marine tanzanienne. Objectif de l’instruction : le système mondial de détresse et sécurité maritime et les mesures d’autocorrection mis en oeuvre par les navires marchands pour se protéger des attaques de pirates. Le commandant ESPS Meteoro, José Almira, « il est important de continuer (…) à former nos partenaires régionaux pour bâtir la confiance et la compréhension mutuelle et améliorer la sécurité maritime dans la région. » 

Tiraspol (Transnistrie) EUBAM Moldavie-Ukraine prépare les actions pour 2016-17

Le chef de la mission européenne d’assistance aux frontières (EUBAM Moldova) pour la Moldavie et l’Ukraine, l’ambassadeur Andrew Tesoriere, a visité Tiraspol le 24 septembre pour rencontrer Vitali Ignatiev, ministre des affaires étrangères par intérim de Transnistrie. L’objectif était de présenter le plan d’action de la mission pour 2016 et 2017.

Ergneti (Georgie). Réunion pour améliorer le mécanisme de prévention et réponses aux incidents  

La réunion d’Ergneti, co-animée par Kęstutis Jankauskas, le chef de la Mission d’observation de l’UE en Géorgie (EUMM Georgia), et l’ambassadeur Angelo Gnaedinger, le Représentant spécial du Directeur du bureau de l’OSCE pour le Caucase du Sud (Crédit : EUMM Georgia)

Les participants à la 58e réunion pour le Mécanisme de prévention et réponses aux incidents (IPRM) à Ergneti, ont constaté que la situation de sécurité reste « stable ».

Les incidents spécifiques le long de la frontière administrative ont été passés en revue. Toutes les parties se sont engagées à augmenter la vigilance et à intensifier l’échange d’informations pertinentes par rapport aux feux de forêt.

Afin de répondre aux préoccupations de la population locale, des informations complémentaires seront fournis sur les exercices militaires.

Méditerranée. Sauvetages en mer : 1.000 migrants supplémentaires sauvés

(Crédits: EUNAVFOR Med)

Tôt dans la matinée du 19 septembre, deux navires de l’opération EUNAVFOR Med (la frégate allemande Schleswig-Holstein et son homologue britannique HMS Enterprise), avec l’aide d’un hélicoptère britannique Merlin, ont mené une opération de sauvetage coordonnée sur 3 navires différents, venant ainsi au secours de 767 personnes. Les navires en détresse étaient en bois ou en caoutchouc. Tous venaient du port de Zuwarah, à seulement 20 minutes  Dans la nuit du 26 et 27 septembre, ce sont 251 migrants qui ont été sauvés d’un probable naufrage. Les deux actions ont été menées sous la coordination du centre maritime international de coordination de sauvetage (IMRCC) à Rome. Les migrants ont été transférés aux ports de Palerme, Augusta et Lampedusa tandis que les bateaux en bois vides de ses occupants ont été pris en charge par des unités navales de l’opération italienne « Mare Sicuro » (Lire aussi: Ne dites plus EUNAVFOR Med, dites Sophia ! (maj)

Ukraine. Recommandation des Européens pour la réforme de la législation pénitentiaire

(Crédits: UEAM Ukraine)

La mission européenne de conseil des forces sécurité (EUAM) en Ukraine a présenté, le 23 septembre 2015, ses recommandations sur l’amélioration du projet de loi sur les droits des prisonniers » lors de la réunion régulière du groupe d’experts du Parlement ukrainien. Un accord a été établi pour mettre en œuvre les suggestions de l’UEAM au cours de la seconde lecture du projet de loi.

 

(Leonor Hubaut)

Un avion russe survole l’espace aérien turc, ambassadeurs de l’OTAN convoqués

Mon, 05/10/2015 - 14:41

(B2) Une réunion des ambassadeurs de l’OTAN (NAC) est convoquée spécialement ce lundi après-midi pour discuter de la violation de l’espace aérien turc par des avions russes. C’est ce qu’a annoncé tout à l’heure le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, après une rencontre avec le ministre des Affaires étrangères tuc, Feridun Sinirlioglu, de passage à Bruxelles.

Ces « violations de l’espace aérien turc par des avions de combat russe (sont) inacceptables » a indiqué Jens Stoltenber. « Les actions de la Russie ne contribuent pas à la sécurité et la stabilité de la région. Je demande à la Russie de respecter pleinement l’espace aérien de l’OTAN et d’éviter l’escalade des tensions avec l’Alliance ». Et d’ajouter : « Je demande instamment à la Russie de prendre les mesures nécessaires pour harmoniser ses efforts avec ceux de la communauté internationale dans la lutte contre ISIL ».

Dimanche, le ministère turc de la Défense avait indiqué dans un communiqué qu’un avion russe (un Sukhoi Su30) avaut été intercepté par deux F-16 des forces armées turques, en patrouille dans la région et reconduit hors de l’espace turc vers la Syrie. « Une erreur de navigation » ont plaidé les Russes aux autorités militaires turques, selon le quotidien turc Hurriyet. L’avion Su-30 qui avait violé l’espace turc de quelques centaines de mètres dans le district sud de Yayladağı, vers midi dimanche, est retourné dans l’espace aérien syrien après un avertissement, précisent ces mêmes sources.

Commentaires : on peut remarquer la promptitude de réaction de l’OTAN. Les violations régulières de l’espace aérien grec par des avions turcs ne suscite pas un tel engouement. Plus récemment, le bombardement sanglant d’un hôpital de MSF en Afghanistan n’a pas vraiment suscité de commentaires aussi fermes. Sur le plan militaire, on peut considérer que ce débordement russe n’est pas une simple « erreur de navigation » mais davantage un avertissement sans frais aux autorités turques pour leur signaler que la frontière syrienne est désormais bien surveillée et … à respecter.

Bavure américaine sur l’hôpital de MSF à Kunduz ?

Sat, 03/10/2015 - 08:23

Le centre de traumatologie de Kunduz (Crédit : MSF)

(B2) L’hôpital de Médecins sans frontière à Kunduz, au nord de l’Afghanistan a été « frappé à plusieurs reprises au cours de bombardements soutenue et a été très gravement endommagé » dénonce l’organisation humanitaire. Selon MSF, Trois membres du personnel sont morts et plus de 30 sont portées disparues. Ce centre de traumatologie MSF – qui est la seule installation du genre dans la région – est notamment assuré par MSF Belgique.

« Lorsque l’attaque aérienne a eu lieu ce matin, nous avions 105 patients et accompagnants à l’hôpital et plus de 80 personnel médical, international et national, de MSF. Nous ne disposons pas encore des chiffres définitifs de victimes. Mais notre équipe médicale fournit les premiers soins et nous recensons les personnes décédées » explique Bart Janssens, directeur des opérations à MSF. « Nous sommes profondément choqués par cette attaque, le meurtre de notre personnel et les patients ». Et d’appeler « toutes les parties à respecter la sécurité des installations et du personnel de santé ».

Ce bombardement serait dû à une erreur des frappes américaines. Les forces américaines ont, en effet, mené une attaque aérienne « dans la ville de Kunduz à 02h15 (locale), contre les individus qui menacent la force. Cette frappe peut avoir entraîné des dommages collatéraux à un établissement médical à proximité » reconnait, selon The Guardian, le colonel Brian Tribus, porte-parole des forces US dans la région. « L’incident est sous enquête »

Depuis que les combats ont éclaté lundi dernier, l’hôpital de MSF a traité 394 blessés.

(NGV)

Alerte santé pour Trident juncture 2015

Thu, 01/10/2015 - 17:58

(B2) Plus de 30.000 militaires de 30 nations prendront part à l’exercice « Trident Juncture 2015 » dont l’objectif est de certifier la Force de Haute disponibilité de l’OTAN (VJTF). La première phase, le Command Post Exercice, se déroulera du 3 au 16 octobre. L’exercice réel (Live Exercise) débutera le prochain 21 octobre, sur le camp d’exercice de Zaragoza (Espagne). L’exercice simulera un conflit entre les pays de la Corne de l’Afrique où s’imbriquent des conflits ethniques, des crises de réfugiés, les conflits sur les ressources en eau et l’émergence d’une alerte de Santé type « Ebola ». Malgré des noms de pays fictifs (Kamon, Lakuta et Tytan), les plans utilisés pour l’exercice seront réels, avec une attention spéciale portée à l’Ethiopie et le Soudan du Sud.

Sanctions contre 4 fauteurs de trouble au Burundi

Thu, 01/10/2015 - 13:56

(B2) L’Union européenne a adopté ce jeudi (1er octobre) des restrictions en matière de déplacements (interdiction de visas) et un gel des avoirs à l’égard de quatre personnes, dont les actions « compromettent la démocratie ou font obstacle à la recherche d’une solution politique à la crise actuelle au Burundi, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, y compris par des actes constituant des atteintes graves aux droits de l’Homme », vient d’annoncer un communiqué du Conseil. Cette mesure entrera en vigueur demain, vendredi, après publication au Journal officiel.

(NGV)

NB : une nouvelle annoncée en avant-première sur B2 Pro avec tous les détails sur les personnalités visées. Lire aussi : Premières sanctions contre des responsables burundais. Qui pourrait être concerné ?

Les Russes tapent en Syrie. Une frappe très politique. Un effet papillon ?

Thu, 01/10/2015 - 09:45

Frappe aérienne effectuée par l’aviation russe en Syrie le 30 septembre – images : Ministère russe de la Défense

(B2) Il a suffi d’un petit décret et de quelques avions. Les Russes ont joint le geste à la parole. Et, désormais, en Syrie, comme sur l’ensemble du Moyen-Orient, il faudra compter avec eux.

A la « française »

« Basé sur l’article 102.1 (d) de la Constitution russe, Vladimir Poutine a soumis une proposition au Conseil de la Fédération pour lui demander d’autoriser l’utilisation du contingent des Forces armées russes de l’extérieur du pays, sur la base des principes et normes du droit international généralement reconnus » indique le communiqué de presse du Kremlin, publié mercredi (30 septembre) au matin. Autorisation accordée dans la foulée. La suite n’a pas traîné. Dans un schéma organisationnel assez semblable à celui existant en France, le chef de l’Etat, qui est le commandant suprême des forces armées, ordonnait de commencer « l’opération aérienne pour viser des cibles des terroristes de l’ISIL sur le territoire syrien ».

Huit cibles détruites

Et dans l’après-midi, le ministère russe de la Défense annonçait avoir réalisé plusieurs frappes sur des cibles des « dépôts d’armes et de munitions, de fuels, des centres de communication, du matériel militaire des terroristes de l’ISIS ».  Une annonce faite sur twitter, sur facebook, sur youtube, etc. en utilisant donc tous les canaux modernes des médias sociaux, dans un exercice plutôt rare pour l’armée russe de ‘transparence’ (ou propagande) militaire, assez proche en fait de celui que pratique l’armée israélienne ou britannique. On apprendra un peu plus tard que ce raid réalisé par le groupe d’aviation russe basé en Syrie a frappé « 8 cibles de l’ISIS, (…) situées dans une zone montagneuse », qui ont été « complètement détruites ».

La cible contestée

Américains comme Français ont immédiatement émis des doutes sur la cible visée, arguant qu’elle concernait davantage des groupes modérés hostiles à Bachar el Assad que l’organisation de l’Etat islamique (ISIL/ISIS). Difficile de cerner le vrai du faux. Quoi qu’il en soit, John Kerry, le secrétaire d’Etat américain a indiqué, très vite, mercredi soir, devant le conseil de sécurité de l’ONU puis devant la presse avoir des « préoccupations (quant) à la nature des objectifs, au type de cibles » visées par les Russes. Il y a « besoin de clarté ». L’organisation de l’Etat islamique (ISIL) devrait « de toute évidence être ciblée ». Mais, de façon « tout aussi évidente, ce n’est pas ce qui se passe ».

Une frappe très politique

Dans un jeu où la propagande est intense de part et d’autre, l’essentiel n’est pas vraiment là. Car cette frappe russe a, avant tout, un objectif politique. Elle permet à la Russie de récupérer ses galons de force avec qui il faut compter et discuter en Syrie, non pas juste parce qu’elle a un siège au Conseil de sécurité des Nations-Unies mais parce qu’elle est sur place militairement et que son intervention ne peut se discuter d’un point de vue juridique.

Un certain fondement juridique

D’un point de vue du droit international, la position russe semble, en tout cas, assez fondée… quelle que soit la cible visée. Car les militaires russes interviennent à la demande du gouvernement légal de la Syrie (de Bachar el Assad). Ce n’est peut-être pas très moral mais c’est imparable !  Ce que ne peuvent pas se revendiquer les occidentaux qui agissent en marge de la légalité internationale. Au passage, la Russie s’impose comme un partenaire obligé pour le régime de Damas, tout autant que l’Iran.

Et une certaine continuité dans le soutien à Bachar

Cette intervention a aussi une certaine logique dans la continuité. Soutenant de façon non équivoque le régime de Bachar, Moscou a bloqué notamment toute tentative de résolution du Conseil de sécurité à l’ONU contre ce régime. Le gouvernement russe a, depuis le début de la crise, prédit que les Occidentaux se trompaient en croyant que l’opposition syrienne démocratique l’emporterait. L’ancien ambassadeur à l’OTAN, Dimitri Rogozine, aujourd’hui vice-Premier ministre, avait averti, lors d’un dernier point de presse à Bruxelles (en janvier 2012 !) que les Européens se trompaient. Vous verrez – avait-il dit alors, arguant de la bonne connaissance russe de la région par la Russie. « Ceux que vous soutenez sont des terroristes qui vont se retourner contre vous » avertissait-il, en substance, dans un discours sans nuances, qui détonnait en 2012 et parait presque raisonnable aujourd’hui… Faisant référence à l’intervention en Libye, toute proche, il avertissait également, sans ambages : plus jamais !

L’effet papillon de la frappe

Désormais, effectivement, il va falloir se coordonner étroitement entre militaires, entre Russes et Américains, et le reste de la coalition, pour éviter tout risque de « collision ». Et de façon imparable, et cynique, cette coordination se fera avec le régime de Bachar, les Russes assurant le « point manquant » de la coordination entre la coalition et le régime de Damas.

Une coordination étroite USA-Russie

John Kerry le secrétaire d’Etat US, l’a reconnu hier à New-York, lors d’une conférence de presse commune tenue à New-York avec Serguei Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, au sortir de la réunion du Conseil de sécurité. « Nous avons convenu de l’impératif dès que possible – peut-être même dès demain — d’avoir une discussion de déconfliction de militaires à militaires, des réunions, des conférences — tout ce qui peut être fait dès que possible. Car nous sommes d’accord sur l’urgence de cette déconfliction » (*).

Une zone de déconfliction indirecte avec le régime de Bachar

Point confirmé par son homologue russe. « La première instruction pour nous est de faire en sorte que les militaires américains, la coalition menée par les Etats-Unis d’une part et les militaires de la Fédération de Russie qui se livre maintenant à certaines opérations en Syrie, à la demande du Gouvernement syrien, entrent en contact et établissent des canaux de communication pour éviter les incidents involontaires » a précisé Lavrov. « Et nous avons convenu que les militaires devraient entrer en contact les uns avec les autres très bientôt. » Le ministre russe lâchant d’ailleurs que cette décision assurait « le suivi de ce que nos présidents ont convenu lors de leur rencontre ici le 28 septembre » (sous entendu : les Américains étaient parfaitement au courant).

Pas vraiment un ami, mais déjà un partenaire

A quelques heures d’une autre réunion fondamentale, sur l’Ukraine, à Paris, en format Normandie, la discussion va changer de tournure. La Russie n’est toujours pas vraiment un « ami » mais elle est un peu plus un « partenaire ». Il y a un renversement des priorités au sein de l’Union européenne aujourd’hui. Entre le risque russe en Ukraine et le risque de l’Etat islamique en Syrie et en Irak, les grands pays européens et les Etats-Unis ont choisi : c’est le front sud sur lequel il importe de se concentrer pour l’instant.

Des conséquences au plan européen

Choisir entre s’affronter et coopérer

Au sein de l’Union européenne, il y a là les signes d’une évolution notable. Alors que tous les esprits étaient tournés depuis fin 2013 vers l’Est – en oubliant le Sud – la réalité géopolitique est venue rappeler qu’entre deux risques, il faut choisir le moindre. La doctrine européenne de dire que le front est et le front sud ont la même valeur et doivent susciter le même engagement politique n’est aujourd’hui plus tenable. Tout simplement car les deux risques ne sont pas de la même intensité.

Deux risques à l’Est et au Sud qui ne sont plus de même intensité

A l’Est, il y a une rébellion soutenue par la Russie, et contenue dans une certaine sphère géographique, assez limitée somme toute, qui n’a pas d’intention ni les moyens de déborder de sa zone de combat (sans l’appui de Moscou). Au sud, il y a une rébellion, qui s’étend sur le territoire de deux Etats, dispose d’un trésor de guerre notable et de troupes autrement plus nombreuses et qui a une volonté de contrôler plusieurs territoires voire de frapper le territoire européen. Ce n’est pas tout à fait la même chose.

… et ne peuvent plus être combattus de la même manière

Ensuite, car les Européens n’ont pas les moyens de tenir deux fronts en même temps. Enfin car on ne peut pas désigner d’un côté la Russie comme un horrible ennemi qu’il faut combattre et, de l’autre, lui faire des courbettes pour obtenir sinon sa coopération, au moins sa bienveillante neutralité, sur la Libye, la Syrie, le Sahel, etc.

Un renversement géopolitique au sein de l’UE

Pour la plupart des pays d’Europe de l’Est qui n’ont pas vu que la menace syrienne, comme la symbolique politique de la vague des réfugiés, ce renversement a des conséquences géopolitiques beaucoup plus fondamentales sur leur voisinage qu’ils ne pouvaient l’estimer au premier abord. Ils ne participent à aucune enceinte de discussion et de résorption des principaux conflits en cours. Sur l’Ukraine, c’est en format E2+2 (Allemagne, France, Russie et Ukraine). Sur l’Iran, c’est en format E3+3 (Allemagne, France, Royaume-Uni, Chine, Russie et Etats-Unis). Sur la Syrie, on pourrait adopter un format similaire. Sur le Proche-Orient, c’est le Quartet. etc.

Un hors jeu politique et militaire des pays de l’Est

En bloquant tout partage de la solidarité dans l’accueil des réfugiés, de façon souvent agressive et avec des arguments souvent « borderline », ils se sont mis hors jeu politiquement mais surtout moralement. En ne participant que du bout des doigts aux opérations au Sahel comme en Irak, ils sont hors jeu militairement. Ils auront donc beaucoup de mal — sauf nouvelle (grande) offensive russe à l’Est — à réimposer la priorité « Front Est » à l’agenda. Ce qu’ils avaient réussi à faire depuis plusieurs mois. La frappe russe sur la Syrie, comme ses conséquences, entre Washington et Moscou tout d’abord, au plan international ensuite, a réduit à néant leur importance.

Kaczyński, combien de divisions ?

Il faudra examiner dans les premiers mois si ce fait est simplement conjoncturel ou structurel. Mais il parait certain que leur rente de situation, acquise depuis 2004 et 2007 et les deux élargissements successifs vers l’Est de l’Europe, est en passe de se terminer. Se poser la question : l’Est « combien de divisions ? », c’est déjà quasiment y répondre. Les pays de l’Est reviennent, en fait, à leur étiage normal, ni plus ni moins : celui de petits pays, ne disposant pas vraiment d’une surface diplomatique et militaire, pour peser durablement, sans un soutien (soit de l’Union européenne, soit des Etats-Unis), qui ne pèse qu’à peine 20% du système décisionnel européen (2). Et même si le PiS (Droit & Justice), de Kaczyński, qui entend gouverner la Pologne demain s’il gagne les élections (3) soutient le contraire, et entend restaurer comme il le dit « le phare » de la Pologne, celui-ci risque de ne pas éclairer bien loin…

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Transcript du département d’Etat US traduit par nos soins

(2) Selon le système de double majorité, ce poids devrait diminuer de façon lente mais constante dans les dix prochaines années, vu la stagnation voire la diminution constante de la population de ces pays, alors que la population des autres pays européens (ouest, nord et sud) est en croissance plus dynamique (interne ou/et du fait de l’immigration).

(3) Les élections législatives sont prévues le 25 octobre. Le PiS a déjà gagné avec Andrzej Duda les élections présidentielles

Russes et Américains alliés objectifs en Syrie

Sat, 26/09/2015 - 19:11

(B2) L’apparition de Daech érigée en menace ultime a transformé la donne dans le Moyen-Orient. Malgré les apparences, Russes et Américains semblent aujourd’hui « alliés », chacun avec des fonctions différentes. Aux Russes, le soin de consolider le régime pour éviter sa chute brutale et l’installation d’un No man’s Land propice à tous les radicaux extrêmes, mieux organisés sur le plan militaire. Aux Américains, et leurs alliés, le soin d’effectuer des frappes aériennes sur des objectifs de l’organisation de l’Etat islamique. Aux Iraniens (et aux Kurdes au Kurdistan irakien), le soin de combattre au sol en Syrie et en Irak.

Patiemment Moscou a attendu son heure. Et cette semaine à l’assemblée générale de l’ONU, Vladimir Poutine en personne devrait donner le «la». La Russie tient les fils d’un possible plan permettant de stabiliser la Syrie. Et elle entend en jouer. Ce qui est l’objectif primaire des différents pays, notamment européens. Bachar a, cyniquement, utilisé sa population, en la privant des moyens de vie essentiels (visant boulangeries, marchés, hopitaux…), en les poussant à l’exil. Une politique de la terre brûlée qui paie…

Les soudaines et bruyantes révélations puisées à de « bonnes sources » d’augmentation des livraisons d’armes de la Russie vers la Syrie sont arrivés, à point nommé, pour remettre sur le devant de la scène l’assistance militaire russe. Mais elles n’ont pas empêché les rapprochements initiés par les différentes diplomaties. De fait, ces livraisons « n’ont pas cessé durant tout le conflit » a confié à B2 une autre « bonne » source. « Nous sommes davantage dans le classique d’un contrat d’assistance militaire, visant à renouveler et recompléter un dispositif militaire ».

Le régime syrien, depuis le début de la guerre, a subi d’importantes pertes au niveau matériel (véhicules, hélicoptères…). Sa flotte d’hélicoptères, notamment, sur-utilisés nécessite d’être renforcée. Et, dans l’esprit d’une possible solution politique en Syrie, il n’est pas question que le régime de Damas, s’effrondre trop rapidement pour laisser la place aux mouvements les plus extrêmes.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Ne dites plus EUNAVFOR Med dites l’opération Sophia ou Sofia !

Thu, 24/09/2015 - 21:00

Fed. Mogherini et l’amiral commandant l’opération, Enrico Credendino

(BRUXELLES2 à Rome) L’opération européenne de lutte contre les trafiquants d’êtres humains en Méditerranée centrale (EUNAVFOR Med) va changer de nom ou plutôt adopter un surnom à l’image de sa grande soeur EUNAVFOR Atalanta.

La Haute représentante de l’UE, Federica Mogherini, l’a annoncé à Rome aujourd’hui lors de son passage au quartier général de l’opération (que j’ai pu visité à l’occasion). EUNAVFOR Med va désormais porter le nom de Sophia (ou Sofia en italien), une petite fille somalienne, née en pleine mer, fin août, sur la frégate allemande Schleswig-Holstein qui l’avait prise en charge après son sauvetage par le navire britannique HMS Enterprise (lire : Sophia née en Méditerranée. Vaste journée de sauvetage pour les navires européens). Un beau relais en mer qui valait bien un surnom…. Ce nom permettra « de faire passer le message au monde que l’opération a pour objectif de sauver et de protéger des vies » a expliqué Federica Mogherini.

Une phase plus active

La phase 2 qui va démarrer le « 7 octobre » sera plus active a promis également la Haute représentante. « On passe d’une phase de renseignement à une pase opérationnelle. » L’objectif va être « cette fois de stopper les trafiquants ». Durant ces dernières semaines, à une vingtaine de reprises (21 exactement selon nos informations), les navires européens ont eu l’opportunité de croiser des trafiquants qu’ils auraient pu arrêter. « 17 en provenance de Libye, 3 d’Egypte » a-t-elle précisé.

Les trafiquants en escorte : traqués

« Le système utilisé par les trafiquants est d’escorter les bateaux ». « Je les avertis : cela va être plus difficile pour eux, et cela rendre plus difficile leur business » a-t-elle ajouté au grand dam des officiers du QG de l’opération qui auraient bien aimé gardé ce détail opérationnel un peu plus discret pour pouvoir frapper un grand coup dès le début de la phase 2. De 4 navires actuellement, l’opération va ainsi passer à 7 navires environ, dont une frégate française de type Lafayette (le Courbet ou le Surcouf). Soit un doublement de sa possibilité d’action.

Contrer le cynisme des contrebandiers d’hommes

Les trafiquants d’êtres humains et les passeurs sont « extrêmement cyniques et flexibles, changeant la route en fonction des opportunités » a conclu la Haute représentante qui a entendu avertir les trafiquants « Nous voulons rendre leur business moins facile, qu’il soit plus difficile pour faire de l’argent, les dissuader réellement »…

Commentaire : deux points importants

D’une part, si une grosse majorité des trafiquants viennent de quelques ports libyens bien repérés, ils bénéficient aussi d’une assise dans les pays voisins, l’Egypte notamment. C’est prouvé maintenant. Et la phase de renseignement de deux mois durant cet été a permis de confirmer ce fait. Ensuite, en matière d’organisation du trafic, on est passé d’un mode artisanal à un mode industriel, extrêmement profitable et lucratif. A suivre sur le Club, une interview exclusive avec le contre-amiral Bléjean, le numéro 2 de l’opération.

(Nicolas Gros-Verheyde)

La bataille d’Angleterre a commencé !

Wed, 23/09/2015 - 20:35

(B2) A l’heure du sommet européen, 4 F-16 de la composante Air ont semé un semblant de panique (raisonnable tout de même) au sommet européen.Survolant à assez basse altitude le bâtiment du Justus Lipsius, 4  F-16 ont annoncé la couleur. Ils volaient cependant suffisamment haut et sans excès de vitesse pour ne pas faire trembler les vitres. Puis ont suivi les avions Marchetti SF.260… L’objectif pour la composante Air de l’armée belge était de commémorer la bataille d’Angleterre qui a eu lieu 75 ans plus tôt le 23 septembre 1940. Dans les coulisses du sommet, c’était une autre bataille qui se déroulait, sans doute un peu moins féroce mais tout aussi difficile, sur l’accueil des réfugiés comme le contrôle des frontières. Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, a dénoncé « l’impérialisme moral » de certains Européens. Tandis que son homologue slovaque, Robert Fico, parlait d’un « diktat ». Ce qui a suscité en réplique des commentaires peu amènes du président français notamment. « Ceux qui ne partagent pas les valeurs de l’Europe doivent se poser la question de leur présence au sein de l’UE » a lâché, un peu excédé, François Hollande !

Un convoi humanitaire d’EULEX Kosovo pour les réfugiés et migrants en Serbie

Wed, 23/09/2015 - 15:22

(B2) La mission européenne « Etat de droit » (EULEX Kosovo) a envoyé de l’aide humanitaire pour les réfugiés et les migrants qui se trouvent actuellement en Serbie. Un convoi de cinq camions est ainsi arrivé à Belgrade lundi (21 septembre) et à Sid, près de la frontière avec la Croatie, mardi (22 septembre). La mission EULEX au Kosovo a fait don d’articles ménagers tels que les équipements de cuisine et appareils électroménagers, des fours à micro-ondes, des machines à eau chaude, des lits, des matelas, des armoires, ainsi que des générateurs, des appareils de chauffage, et un conteneur entièrement équipé avec des cabines de douche, des salles de lavage, et une toilette. Un autre transfert a lieu ce mercredi (23 septembre) vers Kanjiza.

Financer une formation des militaires centrafricains. Ah non quelle horreur…

Fri, 18/09/2015 - 12:25

(BRUXELLES2) Certains principes résonnent régulièrement dans les couloirs européens : « l’approche globale », assurer la sécurité dans les pays d’origine des migrations », « former et équiper les armées africaines » (Train & Equip), « faciliter l’appropriation par les forces locales », etc. Dans la réalité, cependant, cela reste de bons mots. L’application des procédures de la façon la plus étroite possible reste de rigueur. . « Ce n’est pas chez moi ».

Une formation non opérationnelle

Le général Laugel, qui commande l’opération EUMAM Rca (Centrafrique), a pu le constater récemment, d’après les informations que B2 a recueillies auprès d’autres sources. La « partie Conseil » de cette mission en bonne voie. Et ses responsables prévoyaient de monter une petite « formation non opérationnelle » pour certains membres des FACA, les forces armées centrafricaines. C’est-à-dire une formation non liée au combat mais davantage à la structure de l’armée, au droit internationale humanitaire… Car — comme nous l’avions déjà raconté — les FACA manquent de tout équipement de formation, voire d’équipements tout courts. Il n’y a pas de chaises, de tables, de tableau. Et, pour bien faire, il faudrait une petite cantine pour nourrir les futurs stagiaires.

La pratique de la défausse

Un projet a donc été mis au point. Budget : 250.000 euros (deux cent cinquante mille ! pas 250 millions…). Résultat : rien pour l’instant ! Tous les dispositifs européens consultés se défaussent… sur le voisin. A chaque fois pour d’excellentes raisons procédurales ou de principe. Lors d’une discussion au sein du mécanisme Athena — le dispositif qui finance les missions de la PSDC – la discussion a ainsi tourné court. Plusieurs Etats membres estimant — à juste titre d’ailleurs — que ce n’était pas le rôle de ce dispositif destiné à financer uniquement certaines dépenses communes d’une opération militaire. A l’instrument de stabilité de l’UE (*), qui est normalement le dispositif financier prévu pour ce type d’action, le résultat est identique : pas de financement possible. L’argumentation différente. Les gestionnaires de l’Instrument arguent de l’article 41.2 du Traité qui interdit de financer des actions militaires.

Commentaire : Cette vision peut être discutée, même juridiquement à l’heure du Traité de Lisbonne (voir encadré), et est surtout très contestable au plan politique. Le principe développé par certains responsables européens est de ne pas financer d’action militaire. La peur d’être impliqué dans des actions de type coup d’Etat (comme au Burkina-Faso) ou de dérapages sur le plan des droits de l’Homme est présente. Sous des dehors de générosité, cette politique est d’une rare hypocrisie. Le budget européen pourrait financer des forces de police, de sécurité, de gardes-frontières, des actions anti-terroristes, le renforcement des frontières… mais pas l’armée. C’est oublier que l’armée est (souvent) garante d’une certaine stabilité de l’Etat dans les pays d’Afrique. Et que la police peut tout autant, sinon plus, que l’armée, à l’origine de cas de violences (cf. Burundi). C’est oublier que l’UE paie l’engagement des militaires des armées africaines ou somalienne dans des combats en Somalie au titre de l’Union africaine (et de l’ONU) mais ne peut pas payer du matériel nécessaire à la formation d’une autre armée. C’est plutôt contradictoire.

Il serait temps d’enlever des oeillères absurdes et de mettre au point une politique lisible et claire. Si on veut une certaine stabilité, éviter des Etats faillis, cela passe par une police et une armée démocratiques qui doivent recevoir un soutien, y compris financier. Il serait temps également de mettre fin à la politique de « silos » — dénoncée d’ailleurs par plusieurs hauts responsables européens (de la Commission comme du Parlement européen) — et de mettre les actes en phase avec les grandes orientations politiques définis par les « 28 ».

(Nicolas Gros-Verheyde)

L’interdiction du financement communautaire

L’article 41.2 du traité prévoit que « Les dépenses opérationnelles entraînées par la mise en œuvre du présent chapitre sont également à la charge du budget de l’Union, à l’exception des dépenses afférentes à des opérations ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense et des cas où le Conseil en décide autrement à l’unanimité. » Comme son nom l’indique, cette interdiction de financement communautaire ne concerne d’une part que les « opérations militaires ou de défense » et d’autre part que  le chapitre 2 du titre V du Traité sur l’Union européenne, concernant la « Politique étrangère et de sécurité commune ». Ce n’est plus une exclusion générale du fait de la fusion opérée par le Traité de Lisbonne entre les différents piliers. Elle ne s’applique donc pas, par exemple, aux articles 209 et 212 sur lequel se base l’instrument de stabilité.

(1) Cet outil, dépendant de la Commission européenne est géré par le service des instruments extérieurs (FPI) et mis à disposition du Service européen d’action extérieure. Il est normalement placé sous l’autorité de Federica Mogherini mais dans sa casquette de vice-président de la Commission européenne plutôt que de Haut représentant.

L’UE condamne le coup d’état au Burkina-Faso

Thu, 17/09/2015 - 14:47

(B2) La Haute représentante de l’UE, Federica Mogherini, a condamné sans ambages, dans un communiqué publié ce matin, le coup de force qui se déroule en ce moment au Burkina Faso. « La séquestration du Président de la transition ainsi que d’autres ministres, mettent en péril la Transition et la voie vers les élections du 11 octobre prochain » indique-t-elle. « Toute tentative d’évincer les autorités de la Transition par la force ou action contre la paix et la sécurité du pays ont été condamnées par l´ensemble de la Communauté Internationale ». Et l’UE « appelle à la libération immédiate des personnes retenues et au respect de la Transition et de l’intérêt général ».

Libération et respect du calendrier électoral

Un message développé dans nombre de capitales européennes comme aux Nations-Unies. Sur initiative de la France, le Conseil de sécurité de l’ONU a, dans une déclaration à la presse adoptée à l’unanimité hier, condamné la détention du président de transition, du Premier ministre et de membres du gouvernement et réclamé qu’ils soient « libérés sains et saufs et immédiatement ». Il a demandé que tous les protagonistes « respectent le calendrier de la transition, en particulier la tenue d’élections libres, équitables et crédibles, prévues pour le 11 octobre ».

Pas d’intervention française sauf pour évacuation

L’armée française qui dispose d’un contingent d’environ 200 hommes sur place — surtout des forces spéciales —, dans le cadre de l’opération anti-terroriste Barkhane, ne compte pas intervenir dans ce conflit a indiqué François Hollande ce matin. Sauf si une opération d’évacuation d’urgence des citoyens français, européens ou étrangers, s’avérait nécessaire. En attendant, des mesures de précaution ont été indiquées aux différents ressortissants dans la capitale burkinabaise, Ouagadougou.

Un débat sur la review de défense réduit à un feuillet ?

Wed, 16/09/2015 - 22:20

(B2) La volonté du gouvernement britannique d’avoir le débat le plus limité sur la Strategic Defence Review a fait long feu. Le gouvernement qui vient de lancer une consultation sur la révision de sa politique de défense avait voulu limiter la glose reçue et imposé une limite de 1500 caractères pour chaque réponse. Un peu court ! Un procédé qui a ulcéré les députés britanniques de la commission Défense qui ont écrit une bafouille au gouvernement pour ôter cette limite à leur libre expression. Ils viennent d’obtenir raison. Le gouvernement a donc levé toute limite de longueur aux réponses à sa consultation.

Une université européenne de la Défense, avec quels pays ? Dans quels objectifs ?

Wed, 16/09/2015 - 10:00

L’Ecole royale militaire (belge) pourrait être le coeur de l’université européenne de défense prônée par Jean Marsia, qui vient de défendre une thèse à l’ULB (crédit : ERM)

(BRUXELLES2) Comment approfondir l’Europe politique ? Avec qui faire l’Europe de la Défense ? Comment créer un esprit de corps européen ? C’est en quelque sorte à ces questions fondamentales que s’est attaqué Jean Marsia. Cet ancien colonel de l’armée belge, et ancien conseiller d’Elio di Rupo (quand il était Premier ministre), a trouvé une réponse : la création d’une université européenne de la Défense. Un projet ambitieux qu’il a décrit dans une thèse qui vient d’être soutenue à Bruxelles (1). En voici quelques éléments principaux

Une Europe politique toujours bloquée

Pour l’auteur, l’Europe de la défense est inséparable de l’Europe politique. Or celle-ci est aujourd’hui bloquée. « L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009, n’a pas effacé l’échec, en 2005, du traité constitutionnel. En mars 2012, j’ai eu l’opportunité de faire remarquer à Herman Van Rompuy que le Conseil européen n’avait plus discuté de la défense depuis 2005. » Un nouveau processus s’est mis en place. Il a conduit les 28 chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne à fixer, en décembre 2013, un plan d’action et un nouveau rendez-vous en juin 2015. « Mais en juin dernier, le Conseil européen a reporté l’examen des questions de défense au second semestre 2016. L’Europe politique et l’Europe de la défense à 28 sont toujours bloquées. »

Une sécurité acquise à bon compte

L’Europe, dans sa globalité dispose de moyens importants. « Les 28 États membres de l’Union européenne comptent aujourd’hui un million et demi de militaires ». Mais la réalité est légèrement différente. « Seuls 80.000 soldats, environ 5%, sont utilisables en opérations extérieures. Faute de réelles capacités militaires, ces États membres ne peuvent assurer notre sécurité. Ils font, pour la plupart, appel à l’OTAN, c’est-à-dire aux USA. Cela a permis aux États membres de réduire drastiquement leur effort de défense, mais celui-ci est encore de 200 milliards d’€ par an, qui sont largement gaspillés : en dépensant plus de la moitié du budget de défense des USA, les Européens n’obtiennent qu’un dixième de leurs capacités militaires. »

Reprendre le processus d’intégration vers des Etats-Unis d’Europe

« Charles de Gaulle avait raison en 1953 de s’opposer à la Communauté européenne de défense, et d’exiger une Europe politique, capable de définir une politique européenne de sécurité, comme préalable à une armée européenne » écrit Jean Marsia. « Former des militaires, et spécialement des officiers, n’a de sens que s’ils sont au service d’une entité politique, pour mettre en œuvre sa politique de sécurité et de défense. Le développement de l’EDU doit donc suivre, et non précéder, la création des États-Unis d’Europe. Ceux-ci relanceraient l’Europe politique et l’Europe de la défense, créeraient l’armée européenne et fonderaient l’Université européenne de la Défense (EDU). »

Un noyau pour une Europe politique sans la France et le Royaume-Uni

« il faut reprendre notre processus d’intégration politique et militaire avec un noyau restreint d’États membres, qui constitueraient les États-Unis d’Europe » estime l’auteur. Des pays qui ne placent pas leur souveraineté au-dessus de tout et n’ont pas un statut privilégié « Dès la chute du mur de Berlin, l’Allemagne réclame un approfondissement de l’Europe politique, ce que refusent la France et le Royaume-Uni, eu égard à leur qualité de membres permanents du conseil de sécurité de l’ONU. Ce statut privilégié leur ferme la porte des États-Unis d’Europe. »

Avec quels Etats membres créer ce noyau ?

L’auteur passe ensuite en revue les pays qui pourraient faire partie de ce noyau dur et ceux qui ne le pourraient pas. « Six États, membres de la zone euro ne le sont pas de l’OTAN. Leur neutralité les écarte également. Enfin, une défense commune intéresse d’abord les États aux moyens modestes, en termes de budget de défense et de base industrielle et technologique de défense. Sur base de ces critères, dix États sont potentiellement membres des États-Unis d’Europe. Ce sont : la Belgique, l’Estonie, la Grèce, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie. » Le BENELUX et les États baltes devraient être ainsi « les moteurs de cette initiative ». « Un premier noyau pourrait à terme absorber l’Espagne, puis l’Italie, puis l’Allemagne. Pour rejoindre les États-Unis d’Europe, certains États membres de l’Union européenne pourraient adopter l’euro ou rejoindre l’OTAN. Les États-Unis d’Europe finiraient par reprendre le siège français au Conseil de sécurité. Cela permettrait à la France de les rejoindre. »

Une université européenne de la défense pour former et intégrer les forces armées

Pour constituer « un pilier européen crédible de l’OTAN, les États-Unis d’Europe auront besoin de capacités militaires, mais aussi d’une base industrielle, technologique et scientifique de haut niveau ». Dans ce cadre, la création d’une université européenne de la Défense (EDU), chargée de former (ou compléter la formation) des officiers, serait un élément clé du processus d’intégration. Cette université partirait de l’existant avec des fonctions diversifiées, permettant de pallier un déficit de financement. « Pour dispenser cette formation, les États-Unis d’Europe grouperaient au sein de l’EDU leurs universités de défense, pour remplir de façon coordonnée leurs trois missions : donner une formation universitaire au commandement ; faire de la recherche et effectuer des prestations pour tiers. »

La rationalisation du dispositif existant

Dans ces périodes de difficulté budgétaire, l’auteur préconise aussi une rationalisation des dispositifs existants. « Pour réduire les dépenses qui ne créent pas de capacités opérationnelles, les autres institutions militaires d’enseignement supérieur seraient rationalisées : les États membres de l’Union européenne disposent aujourd’hui d’environ 60 écoles militaires et de 40 collèges de défense. Les institutions qui ne sont pas habilitées au doctorat voire au master seraient supprimées ou associées à l’EDU en tant que collèges. »

…et un véritable campus à l’européenne

L’EDU devant à terme pouvoir orienter, coordonner, gérer de multiples implantations, dispersées aux quatre coins de l’Europe, un modèle a été sélectionné après analyse comparative : The University of California, qui compte 10 campus de haut niveau, dont Berkeley, Los Angeles, San Diego. »

Une fraternité d’armes à créer

« L’EDU susciterait, chez les officiers des forces armées des États-Unis d’Europe, la fraternité d’armes qui leur permettra de s’y intégrer, sans se couper de leurs racines. Le personnel, détaché par les États membres à l’OTAN, à l’Eurocorps ou à l’état-major de l’Union européenne, est loyal à l’institution qu’il sert. Mais c’est son corps d’origine qui décide de ses futures promotions et affectations. Les forces armées des États-Unis d’Europe devraient donc être un corps européen d’officiers, de sous-officiers et de volontaires. Cela exige une formation commune qui développe l’aptitude au commandement, essentielle pour un officier. »

Viser l’excellence…

« Pour dispenser cette formation d’officiers, tout au long de la vie, l’EDU devrait disposer d’un concept de formation qui tende à former l’esprit, le corps et le caractère des élèves et des stagiaires, pour que les officiers européens soient aptes à maintenir ou à rétablir la paix, tout en préservant autant que possible la vie de leurs soldats. Ce concept devrait envisager le long terme : il ne s’agirait pas uniquement de former des sous-lieutenants, mais bien de futurs colonels et généraux. Produire des officiers de qualité implique de viser l’excellence scientifique. Pour l’atteindre, l’EDU serait un espace de liberté, de débat intellectuel, de recherche et d’innovation, capable de promouvoir la tolérance, l’équité et la démocratie. »

… et développer une culture européenne de défense

« L’EDU devrait être impartiale, ouverte sur monde civil et l’étranger, tout en développant une culture, une citoyenneté et un patriotisme européens. (…) L’EDU devrait contribuer au développement de la culture européenne de sécurité et de défense, ainsi que d’une doctrine militaire et d’un style de commandement, adaptés aux valeurs européennes et aux défis du XXIe siècle. Ils seraient donc spécifiques aux États-Unis d’Europe.  »

(1) Thèse intitulée « De l’École royale militaire de Belgique à une université européenne de défense. La clef d’une défense européenne ! » et soutenue, brillamment, à l’ULB (l’Université libre de Bruxelles), le 7 septembre.

Un P3 Orion espagnol pour EUNAVFOR Med

Tue, 15/09/2015 - 22:31

L’équipage espagnol sur la base de Sigonella en Sicile (crédit : MOD espagnol)

(B2) Un avion P3 Orion de l’armée de l’air espagnole s’est posé à Sigonella, en Sicile dimanche (13 septembre). Cet avion de patrouille maritime va participer à l’opération européenne de lutte contre les trafiquants en Méditerranée (EUNAVFOR Med), à compter de la mi-septembre. Objectif : surveiller la zone, recueillir du renseignement.. Le détachement espagnol comprend 45 militaires. A noter que l’état-major espagnol compte également envoyer une frégate qui devrait arriver pour la seconde phase de l’opération. Lire aussi : Les Européens passent la deuxième en Méditerranée

(NGV)

 

 

Une intervention en Syrie avec quelques points d’interrogations

Tue, 15/09/2015 - 16:50

Deux Mirage 2000 sur la base aérienne avancée en Jordanie, dans le cadre de l’opération Chammal (Crédit : EMA / DICOD)

(B2) La décision de François Hollande de commencer une intervention aérienne en Syrie a une logique, politique militaire. Mais elle pose aussi un certain nombre d’interrogations qui ne trouvent pas encore de réponses. Ce qui est inquiétant.

Un engagement nécessaire pour JY Le Drian

« Cette évolution de notre posture tire les leçons d’un an de campagne de la coalition internationale au Levant » a déclaré le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian devant l’université d’été de la Défense lundi (15 septembre) à Strasbourg. « Pour la France, c’est un engagement nécessaire, car la donne a changé et nous ne pouvons plus nous permettre de laisser la Syrie, principal repaire de Daech, demeurer un angle mort de notre action au Levant. » L’objectif est d’apporter une « contribution concrète à la stabilité de la région ». « Notre stabilité est menacée, y compris par des crises qui sont faussement lointaines, car leurs conséquences ne connaissent pas de frontières »

Pourquoi maintenant ?

On parle parfois d’arrière-pensée électorale pour cette décision prise au plus haut niveau de l’Etat. Cet argument, souvent utilisé au plan politique, parait contestable. On ne peut pas soupçonner le gouvernement français d’opérer un revirement dans son attitude de fermeté ou belliciste selon les avis. Paris est intervenu au Mali pour empêcher la victoire des rebelles du nord, dont plusieurs groupes radicaux. En Syrie, après s’être prononcée très clairement sur la chute du régime de Bachar El Assad, Paris a milité pour une intervention militaire en 2013. Intervention refusée alors par les Etats-Unis (et le Royaume-Uni après le « niet » de la Chambre des communes).

Ce qui motive davantage le gouvernement semble être l’inquiétude entre les actions menées sur le territoire national et la situation en Syrie. Le discours du ministre en témoigne. Et des experts le confirment. « De l’attentat contre Charlie Hebdo début janvier à l’attaque dans le Thalys fin août, le chemin des terroristes est passé systématiquement par la Syrie » me confiait un expert du sujet. « Il y a un continuum entre notre action nationale et l’action en Syrie. On ne peut pas désactiver des cellules en France si on ne va pas là où ils sont entrainés » confirmait un spécialiste du renseignement à l’université d’été de la Défense.

Il y a aussi certainement pour le gouvernement la volonté de se trouver aux côtés de Washington alors que les Britanniques ont révélé avoir déjà effectué des frappes en Syrie. Paris ne veut pas se retrouver à la traîne… Une volonté qu’on peut qualifier de suivisme. Mais elle répond aussi à des intérêts très concrets : le partage de renseignements qui est nécessaire pour la lutte contre le terrorisme en France. Les Américains qui commandent les opérations sur l’Irak et la Syrie ne partagent leurs informations au-delà du club traditionnel (1) qu’avec ceux qui participent à l’opération. « Quand on participe, les Américains sont très transparents. Quand on ne participe pas, on n’a pas accès aux informations ».

Quelques questions sans réponse

Dans quel cadre international ?

C’est une question très délicate. Il n’y a pas vraiment de cadre international à l’intervention en Syrie. Aucune résolution de l’ONU n’autorise une intervention avec la force (sous le chapitre VII). La Russie (et la Chine), membres permanents du Conseil de sécurité, s’y sont opposés. Et jusqu’à nouvel ordre, contrairement à l’Irak, le gouvernement « légal » n’a pas demandé l’intervention internationale. Et il n’y a pas de gouvernement légitime reconnu par la communauté internationale qui ait demandé l’intervention contre Daech.

Le régime de Bachar est-il conforté ?

Tant qu’il n’y aura pas de zone d’interdiction aérienne (« No fly zone »), le régime disposera d’un atout maitre dans sa politique de terreur qu’il mène vis-à-vis de sa propre population et des autres mouvements rebelles, à l’aide d’hélicoptères larguant des barils d’explosifs. Une campagne ne ciblant que Daech va entraîner pour le régime de Damas un avantage compétitif sur le terrain, mais surtout un avantage dans la propagande. Il pourra en tirer un soutien implicite à son profit.

Et après ?

C’est la vraie question de cet engagement. A supposer qu’il y ait une efficacité des frappes aériennes, la ‘victoire’ sur l’organisation de l’Etat islamique (ISIL) apparait hypothétique. Et la stabilité de la Syrie ne se résume pas à la victoire sur Daech/Isil. Cela suppose une négociation en impliquant tous les pays concernés, notamment l’Iran et la Russie mais aussi l’Arabie Saoudite, le Qatar ou la Turquie. Et la préservation dans une certaine mesure du régime de Bachar el Assad (sans Bachar El Assad au besoin. Ce qui, aussi, est très hypothétique).

Comment vaincre Daech ?

C’est une vraie interrogation. La crainte de Daech / Etat islamique est bien réelle. Sa pression est constante sur le régime syrien, comme sur le régime irakien, et les Etats environnants (Liban et Jordanie surtout, Turquie dans une moindre mesure). Sans action décisive aujourd’hui, son pouvoir risque d’augmenter. Mais l’action militaire semble insuffisante. Le risque de pertes collatérales même limité au maximum produirait un effet contre-productif rapidement. Quant à la solution « politique » tant souhaitée, elle n’apparait pas vraiment facile.

L’action politique est-elle possible ?  La « solution politique » que tout le monde prône en Syrie est aujourd’hui un leurre. Sans parler des difficultés de trouver une solution, la liste même des pays à impliquer de façon active dans la négociation de paix suscite des discussions. Une solution politique impliquerait de mettre à contribution des pays — comme la Russie, l’Iran — ainsi que le régime de Bachar. Ce que veulent éviter certains pays pour différentes raisons. Certains pays européens considèrent la Russie comme un ennemi après son intervention en Ukraine ; certains pays alliés de la région voient en l’Iran un rival, agitateur de troubles dans leur pays. Quant au régime de Bachar, il suscite des allergies (justifiables) pour les Français notamment. JY Le Drian à Strasbourg résumait ce hiatus à Strasbourg. « La stabilité ne reviendra que sur la base d’une solution politique, qui tienne compte des causes profondes de la crise, et notamment pour la Syrie de la responsabilité de Bachar el-Assad dans le chaos de son pays » . Mais « inversement, une solution exclusivement politique, qui méconnaîtrait les impératifs de sécurité, se mettrait elle-même dans une impasse que nous devons également éviter ».

L’action militaire est-elle suffisante ? Mais le vecteur militaire contre Daech/Etat islamique n’est qu’un des aspects de la lutte contre ce mouvement. Sans une action sur ses finances propres (la revente de pétrole notamment en Turquie), sur ses soutiens (financiers, militaires, …) dans les pays du Golfe, sans l’établissement d’un Etat irakien, solide et pluraliste, l’offensive militaire apparait une goutte d’eau qui pourrait même provoquer une contre-réaction. A cela s’ajoute le jeu ambigü des Etats de la région. L’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie et l’Iran se livrent en Syrie et en Irak à un jeu d’influence sournois. Leur engagement contre l’organisation de l’Etat islamique et les autres mouvances extrêmes n’est pas toujours très déterminé et pourrait saper les quelques victoires militaires obtenues. Le gouvernement turc est ainsi plus intéressé, et engagé, à combattre les Kurdes du PKK que Daech.

Le risque de pertes collatérales contre-productives ? Les frappes aériennes permettent de faciliter une action au sol, en détruisant certaines installations fixes, certains mouvements de troupes ou véhicules. Les dispositifs actuels (bombes guidées laser notamment) autorisent des tirs d’une certaine précision. Et le repérage, le renseignement préalable sont aujourd’hui une condition sine qua non à une frappe aérienne. Les forces armées ont pris l’habitude de surveiller une potentielle cible des jours auparavant d’intervenir. Mais la tactique de l’organisation de l’Etat islamique est aussi perverse. « Ils n’hésiteront pas à mettre une école, ou un hôpital sur un lieu qu’ils savent sensibles » afin de mêler victimes civiles et militaires, expliquait un militaire. Même limitées au maximum, une perte collatérale n’est donc pas totalement exclue et serait immédiatement exploitée par les groupes terroristes. Un risque dont on est bien conscient au plus haut sommet de l’armée. « La propagande de Daech est puissante, réactive et de très grande qualité. Il faut en avoir conscience » rappelait à l’université d’été de la Défense, mardi à Strasbourg, le chef d’Etat-major de l’armée française, le général Pierre de Villiers.

Aller à terre ? Les frappes aériennes ne permettront pas de victoire militaire sans intervention terrestre. Or, pour l’instant, il n’est aucunement question d’une intervention terrestre, qui serait mettre le pied dans un bourbier inqualifiable. Et dans la région, les pays alliés capables d’aller au sol sont en nombre limité — mis à part l’Iran et le Hezbollah (à supposer qu’on les considère comme des « alliés »…). Quant aux groupes rebelles, ils paraissent encore trop atomisés. Leurs actions ne semblent pas vraiment coordonnées. Ils évoluent. Et la coalition vis-à-vis de certains de ces groupes (comme Al Nosra) est très fluctuante.

(Nicolas Gros-Verheyde)

NB : Un article rédigé dans un premier temps pour répondre aux questions de mes confrères de Matin Première sur la RTBF, complété et enrichi ces derniers jours, notamment après l’université d’été de la défense.

(1) Le Club des Cinq yeux (Five Eyes) créé au moment de la Seconde guerre mondiale regroupe les pays alliés anglophones : Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada, Nouvelle Zélande, Australie

Les Européens passent la deuxième en Méditerranée

Mon, 14/09/2015 - 17:11

Equipes de visite britanniques (archives B2 – Crédit : EUNAVFOR Atalanta)

(B2) L’opération de lutte contre les trafiquants en Méditerranée va passer à une phase plus offensive. Les ministres des affaires européennes ont approuvé aujourd’hui (lundi 14 septembre) le principe d’un passage en « phase 2a », selon le jargon en usage dans la PSDC.

Lors de cette phase, les forces européennes ne se contenteront plus d’observer mais pourront « arraisonner les navires, les fouiller, saisir et dérouter les navires, appréhender les trafiquants et les conduire à la justice » a résumé un diplomate européen à B2.

La phase 2a permet, en effet, d’intervenir contre des navires et des embarcations « soupçonnés d’être utilisés pour la traite des êtres humains ou le trafic illicite de migrants », dans les conditions prévues par le droit international de la mer. Faute de résolution du Conseil de sécurité des Nations-Unies, cette intervention n’aura lieu que dans les eaux internationales — et non dans les eaux territoriales libyennes — et contre des navires suspects (sans pavillon, qui portent un pavillon qui n’est pas le leur, etc.).

Cet engagement pourrait cependant changer la donne en mer. L’ambition n’est « pas vraiment d’arrêter le trafic mais d’obliger les trafiquants à changer leur business model, de les perturber, les dissuader » explique un diplomate. En quelques semaines, « nous avons eu près de 16 opportunités où nous aurions pu intervenir contre des trafiquants » soulignait Federica Mogherini, la Haute représentante de l’UE, il y a quelques jours. Un chiffre en augmentation permanente. Selon nos informations, en quelques jours, quatre nouvelles opportunités d’arrêter des passaeurs ont été ratées dans les derniers jours.

L’élément clé de cette seconde phase va donc reposer sur les « équipes de visite ». Des équipes robustes, au pied marin, prêtes à faire face à toutes sortes de situation. Il s’agit tout d’abord de mener à bien l’abordage, de faire face à des personnes parfois déterminées, et armées (les trafiquants ont déjà été vu en possession d’armes de type AK47 – Kalachnikov). Un rôle assuré en général, selon les pays, par les fusiliers marins, des commandos marine ou des équipes des forces spéciales.

Du côté français, Jean-Yves le Drian a confirmé la volonté française de participer de façon décisive à cette seconde phase « en fournissant une frégate ». Le ministre de la Défense a estimé qu’au-delà de « l’obligation de venir au secours des personnes » qui risquent leur vie, il fallait réagir « contre ceux qui profitent de ce trafic inhumain ».

(Nicolas Gros-Verheyde)

En savoir plus : sur B2 Club (l’édition professionnelle de B2), tous les détails de cette seconde phase : La seconde phase d’EUNAVFOR approuvée. Durée, format, objectif… les détails

(*) Pour être exact, le Danemark ne participe pas au processus décisionnel en matière d’opérations militaires de l’UE.

Une première pour la marine espagnole. Un drone Scan Eagle embarqué dans l’Océan indien

Mon, 14/09/2015 - 09:10

(B2) Les marins espagnols ont mis en oeuvre un drone Scan Eagle sur le navire amphibie Galicia (1) qui opère dans l’Océan indien et sert de navire amiral à l’opération EUNAVFOR Atalanta. Une première pour la marine espagnole qui n’avait pas testé ce drone dans une opération maritime (2).

Scan Eagle est « devenu l’un des moyens de produire des renseignements plus précieux » pour la Force navale de l’Union européenne (EUNAVFOR) dans l’opération Atalanta, qui opère dans les eaux de l’océan Indien, souligne-t-on à l’état-major de l’armée espagnole. Spécialement conçu pour l’acquisition des données, de l’imagerie et de la vidéo, de jour comme de nuit, il fournit « des images en temps réel, en toute discrétion, et durant une longue période (il peut voler en continu pendant plus de 18 heures). Ce qui aide grandement à la prise de décision ».

Début septembre, le «Scan Eagle» a déjà effectué 175 heures de vol « sans dommage notable ». Il a ainsi effectué en juin des missions de reconnaissance sur la côte Nord de la Somalie, et plus récemment sur la côte Est de la Somalie afin de « identifier et localiser d’éventuelles activités illégales dans la bande côtière, liées à la piraterie ».

Le système se compose de quatre appareils, dont l’un est spécialement conçu pour l’acquisition des images et le vol de nuit. Les drones sont lancés à partir d’une catapulte du pont du navire. La collecte des informations est effectuée au moyen d’une caméra, située dans l’aile du drone. Des antennes assurent l’échange des informations entre la station de commande, et le drone. La station de pilotage est située dans le vol du hangar du navire où se trouvent les opérateurs du 11e escadron nouvellement formé, au sein de l’aéronautique navale espagnole. Cette unité aérienne embarquée (UNAEMB), dédiée entièrement au «Scan Eagle», se compose de 3 officiers pilotes, ainsi que de 3 sous-officiers et 1 marin pour les travaux d’entretien et de préparation pour le vol

(NGV)

(1) Le navire d’assaut amphibie Galicia » est le navire amiral pour l’opération EUNAVFOR Atalanta pour cette période été-automne jusqu’au 6 octobre prochain, date du passage de commandement.

(2) Ce système a déjà été déployé en Afghanistan, sur la base d’appui avancée (FSB) de Qala i Naw jusqu’au retrait du contingent espagnol en 2013.

La quinzaine de B2 Pro (Septembre 2015 I)

Fri, 11/09/2015 - 14:04

(B2) Les deux premières semaines de septembre ont été marquées par le discours du Président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, sur l’état de l’Union, par la réunion informelle des ministres de la Défense suivie de celle des ministres des Affaires étrangères mais aussi par la démission du ministre de la défense Hongrois, Csaba Hende, en pleine crise des migrants et réfugiés. Voici un aperçu des informations détaillées et décryptées sur Le Club de B2, l’édition professionnelle de B2.

EUNAVFOR Med. Lopération de lutte contre les trafiquants en méditerranée bientôt en phase 2

Alors que le commandant de l’opération EUNAVFOR a rencontré les ministres européens de la Défense, la deuxième phase de l’opération pourrait être lancée. Cap décisif, au moment où le Conseil de sécurité des Nations-Unies, sous présidence russe, pourrait voter une autorisation du recours à la force dans les eaux internationales, dans le cadre de la lutte contre les trafiquants d’êtres humains en Méditerranée (2 septembre 2015)

Les Mig29 bulgares : les Russes éjectés de la maintenance des avions de chasse

La Bulgarie a officialisé la rupture avec son fournisseur russe pour la maintenance de ses avions de chasse Mig29 et opté pour une coopération approfondie avec la Pologne. Détails (2 septembre 2015)

Les ambassadeurs européens de la rotation 2015 : 19 derniers nominés

La Haute représentante de l’UE Federica Mogherini a procédé à une nouvelle vague de nominations d’ambassadeurs. Le bataillon des délégations européennes s’étend de la Turquie à la Colombie en passant par le Burkina Faso ou encore l’Inde (et Bouthan). Le profil des ambassadeurs est varié mais nombreux ont une importante expérience de la diplomatie au niveau national. Portraits… (4 septembre 2015)

La réunion informelle des ministres de la défense au Luxembourg : défense, défis, budget ?

Au Luxembourg, les ministres ont évoqué l’idée d’un Livre blanc de la défense européen, ce qui pourrait permettre la mise en place d’une véritable feuille de route en direction d’une défense européenne et donner à l’UE les moyens d’agir. Les discussions ont permis d’aborder le programme « train and equip » et montré un consensus sur le passage en phase de l’opération EUNAVFOR Med. Compte-rendu détaillé (3-4 septembre 2015)

Les ambassadeurs européens de la rotation 2015 : 19 derniers nominés

La Haute représentante de l’UE Federica Mogherini a procédé à une nouvelle vague de nominations d’ambassadeurs. Le bataillon des délégations européennes s’étend de la Turquie à la Colombie en passant par le Burkina Faso ou encore l’Inde et le Bouthan. Le profil des ambassadeurs est varié mais nombreux ont une importante expérience de la diplomatie au niveau national. Portraits… (4 septembre 2015)

 Le budget des missions PSDC pourrait évoluer en 2016 

Le budget des missions PSDC pourrait évoluer de façon notable en 2016. Il retrouve des marges financières notables grâce à une diminution du budget engagé pour les missions civiles de la PSDC. Une bonne santé financière qui cache mal un certain manque d’ambition et une frilosité des Européens pour s’engager sur des fronts extérieurs. Décryptage… (6 septembre 2015)

Changement de crise au ministère de la Défense hongrois

Insatisfait par le rythme de la construction du mur à la frontière serbe, Viktor Orban, le premier ministre hongrois a demandé la démission de son ministre de la défense, Csaba Hende. Il est donc aussitôt remplacé par l’actuel secrétaire d’Etat aux Sports, István Simicskó, Un amateur de Kung fu. Portrait… (9 septembre 2015)

La justice européenne rejette les plaintes du complexe pétrolier iranien

Les juges européens ont rejeté certaines demandes d’annulation du gel des avoirs déposées par le complexe énergétique et pétrolier iranien. Et la Cour de justice s’apprête à entériner cette jurisprudence. Les objectifs de maintien de la paix, et de la lutte contre la prolifération nucléaire, priment pour les juges et justifient que certaines valeurs fondamentales (droit de propriété…) soient limitées temporairement. Une jurisprudence finalement très politique. Décryptage … (10 septembre 2015)

Jean-Claude Juncker veut que l’Union européenne pèse sur la scène internationale

Dans son discours sur l’État de l’Union prononcé au Parlement européen de Strasbourg, Jean-Claude Juncker a fixé des priorités claires et ambitieuses en matière de politique extérieure. Pour lui l’Europe doit agir de façon plus active en faveur du maintien de la paix. La Libye et la Syrie doivent être au coeur de la politique diplomatique de l’UE qui doit être plus offensive. Mais le front Est est aussi prioritaire. Si « la situation en Ukraine est la plus pressante », il ne eut toutefois pas tourner le dos à la Russie, tout en maintenant un front uni sur les sanctions. Verbatim et Analyse de l’approche du président de la Commission européenne (10 septembre 2015)

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La liste des pays sûrs, une longue discussion jamais terminée

Wed, 09/09/2015 - 18:05

(BRUXELLES2) C’est à Tampere, en 1999, il y a plus de 15 ans que l’Europe décide de définir une nouvelle politique, complète, d’asile et d’immigration. Les objectifs fixés à l’époque ne sont toujours pas réalisés aujourd’hui !

Plusieurs projets de textes sont rapidement présentés par la Commission européenne, dont l’un prévoit la fixation d’une liste de pays sûrs, permettant d’accélérer, voire d’automatiser, l’examen des demandes d’asile. Une liste commune qui ne verra jamais le jour… tant les Etats membres sont divisés et le Parlement européen opposé à la procédure. Attention ! on distingue les pays tiers sûrs (1) des pays d’origine sûrs (2).

Pour commencer, 5 ans de discussion sans liste

En septembre 2000, la Commission propose une directive fixant les conditions d’octroi et de retrait du statut de réfugié aux demandeurs d’asile. La discussion est ardue. Le sujet est (déjà) très sensible. Si les ministres ont pu se mettre d’accord sur les grands principes (pas de crainte pour la vie ou la liberté du demandeur, respect du principe de non-refoulement, possibilité d’obtenir le statut de réfugié), ils n’ont pas pu se mettre d’accord sur la liste des pays d’origine sûrs qui devait figurer en annexe. Au cours des négociations, le texte s’est considérablement durci sur pression des Etats membres. Un premier accord politique entre les ministres n’est ainsi obtenu qu’en avril 2004. Il faudra encore plusieurs mois avant de le finaliser, le 1er décembre 2005, soit plus de cinq ans après la proposition initiale.

Le 19 novembre 2004, le Conseil décide alors que la liste serait adoptée ultérieurement et séparément. Le texte final renvoie à la Commission européenne le soin de préparer un projet de liste. En fait, m’explique alors un expert du dossier, « chaque pays pourra établir sa liste de pays sûrs comme il l’entend », sous le contrôle de la Commission, en respectant les critères mentionnés (1).

Le texte est fortement critiqué par les ONG et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR). Dans une analyse détaillée présentée le 29 mars 2005, le HCR dénonce avec vigueur la proposition de directive européenne sur les procédures d’asile, dont il craint qu’elle n’entraîne des violations du droit international. Il craint de voir les demandeurs d’asile de pays jugés “ sûrs ” automatiquement rejetés sans avoir la possibilité de se défendre. Il s’insurge contre une clause qui permet de déporter les demandeurs d’asile déboutés, avant que l’issue de leur recours ne soit connue.

La Cour s’en mêle

En janvier 2006, les ministres de l’Intérieur réunis de façon informelle à Vienne (c’est la présidence autrichienne de l’UE) se montrent favorables à la mise au point d’une procédure harmonisée d’asile et un statut uniforme pour les personnes bénéficiant de l’asile ou d’une protection subsidiaire. « Ce n’est pas possible qu’on ait des jugements différents dans les 25 Etats membres sur l’octroi du statut de réfugié », résume la ministre autrichienne de l’Intérieur, Liese Prokop. « Non seulement c’est illogique, mais cette différence crée des mouvements migratoires entre nos pays », complète un certain Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur. Relayé par plusieurs pays comme la France, l’Espagne ou l’Allemagne, le consensus « semble général aujourd’hui pour résoudre cette question », écrivais-je à l’époque… un brin optimiste. Rien ne viendra vraiment

Dans son livre vert en juin 2006, la Commission européenne propose bien de réévaluer les concepts de pays d’origine sûr, de pays tiers sûr et de pays tiers européen sûr.

A cette difficulté politique s’ajoute une difficulté juridique et un conflit intra-institutionnel au plan européen. Le 6 mai 2008, la Cour de justice (CJCE) annule les dispositions de la directive de 2005 sur les pays d’origine sûrs. Ce qui suscite la colère du Parlement européen qui a porté plainte. Il estime que ces dispositions auraient dû prévoir l’adoption de ces listes en codécision et non sur simple consultation (3). La Cour rend justice au Parlement européen, annule les dispositions concernés et rappelle la règle de droit. « La procédure de codécision est applicable tant pour l’adoption et la modification des listes des pays sûrs par voie législative que pour la décision (sur) les compétences d’exécution ». Pour l’adoption future des listes de pays sûrs, ainsi que leurs modifications, « le Conseil devra (donc) respecter les procédures instaurées par le traité ».

En juin 2008, la Commission européenne propose dans une communication d’adopter une politique commune pour l’asile, avec un « régime commun » d’asile d’ici 2010. Objectif repris peu après par les chefs d’Etat et de gouvernement réunis en sommet le 16 octobre 2008 (sous présidence française). Le Conseil européen constate que « de fortes disparités » subsistent d’un État membre à un autre dans l’octroi de la protection et lance un appel en faveur de nouvelles initiatives, notamment une proposi­tion visant à instaurer une procédure d’asile unique comportant des garanties communes, pour achever la mise en place du régime d’asile européen commun.

Les 10 et 11 décembre 2009, le Conseil européen adopte le programme de Stock­holm qui réaffirme son objectif d’établir, « d’ici à 2012 au plus tard, un espace commun de protection et de solidarité ».

Le 21 octobre 2009, la Commission présente un certain nombre de propositions de refonte afin de « simplifier, rationaliser et consolider les procédures au sein de l’Union. Ce texte consacre le principe de liberté pour les Etats membres d’établir une liste de pays sûrs, à condition de la notifier à la Commission européenne (4). La notion de liste commune minimale de pays d’origine sûrs est supprimée. Et sont mis en place des normes « objectives communes » sur la désignation au niveau national de pays tiers comme pays d’origine sûrs. La directive est adoptée près de 4 ans plus tard, le 26 juin 2013.

Chaque Etat libre d’adopter sa liste

Dès lors chaque pays a adopté « sa » liste de pays d’origine sûrs qui varie de l’un à l’autre. En France, La liste des pays d’origine sûrs comprend par exemple 14 pays : Albanie, Arménie, Bénin, Bosnie-Herzégovine, Cap-Vert, Géorgie, Ghana, Inde, Macédoine (ARYM), Ile Maurice, Moldavie, Mongolie, Monténégro, Sénégal, Serbie, Tanzanie (actualisée en octobre 2014). En Belgique, elle ne comprend que 7 pays : l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Kosovo, la Serbie, le Monténégro, l’ARYM (l’ancienne république yougoslave de Macédoine) et l’Inde (actualisée en mai 2015). Dans son rapport en 2010, la Commission constait déjà une appréciation très diverse de la directive (voir encadré).

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) La notion de pays tiers sûr s’applique lorsqu’une personne a sollicité une protection dans un pays tiers qui est sûr, qui est en mesure d’offrir une protection conforme à la convention de 1951, et avec lequel la personne concernée a un lien de connexion. La directive prévoit que les « pays de l’UE peuvent appliquer la notion de pays tiers sûr uniquement lorsque les autorités compétentes ont acquis la certitude que dans le pays extérieur à l’UE concerné :

  1. les demandeurs n’ont à craindre ni pour leur vie ni pour leur liberté en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social particulier ou de leurs opinions politiques;
  2. le principe de non-refoulement est respecté, conformément à la convention de Genève;
  3. l’interdiction, prévue par le droit international, de prendre des mesures d’éloignement contraires à l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants, y est respectée;
  4. la possibilité existe de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié et, si ce statut est accordé, de bénéficier d’une protection conformément à la convention de Genève.

(2) Un pays est considéré comme un pays d’origine sûr lorsque, sur la base de la situation légale, de l’application du droit dans le cadre d’un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d’une manière générale et uniformément, il n’y est jamais recouru à la persécution telle que définie à l’article 9 de la directive 2011/95/UE, ni à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants et qu’il n’y a pas de menace en raison d’une violence aveugle dans des situations de conflit armé international ou interne.

Pour réaliser cette évaluation, il est tenu compte, entre autres, de la mesure dans laquelle le pays offre une protection contre la persécution et les mauvais traitements, grâce aux éléments suivants:

  1. les dispositions législatives et réglementaires adoptées en la matière et la manière dont elles sont appliquées;
  2. la manière dont sont respectés les droits et libertés définis dans la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et/ou dans le pacte international relatif aux droits civils et politiques et/ou la convention des Nations unies contre la torture, en particulier les droits pour lesquels aucune dérogation ne peut être autorisée conformément à l’article 15, paragraphe 2, de ladite convention européenne;
  3. la manière dont est respecté le principe de non-refoulement conformément à la convention de Genève;
  4. le fait qu’il dispose d’un système de sanctions efficaces contre les violations de ces droits et libertés.

Un pays d’origine sûr « ne peut être considéré comme tel pour un demandeur déterminé, après examen individuel de la demande introduite par cette personne, que si: 1) ce dernier est ressortissant dudit pays ou l’intéressé est apatride et s’il s’agit de son ancien pays de résidence habituelle, 2) si ce demandeur n’a pas fait valoir de raisons sérieuses permettant de penser qu’il ne s’agit pas d’un pays d’origine sûr en raison de sa situation personnelle, compte tenu des conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale. »

(3) La directive de 2005 mentionne en effet que le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après consultation du Parlement européen, adopte une liste commune minimale des pays tiers que les États membres considèrent comme des pays d’origine sûrs, ainsi qu’une liste commune des pays tiers européens sûrs. La modification suit la même procédure.

(4) Les États membres peuvent maintenir ou adopter des dispositions législatives qui leur permettent de désigner des pays d’origine sûrs, au niveau natio­nal, aux fins de l’examen des demandes de protection internatio­nale.

2. Les États membres examinent régulièrement la situation dans les pays tiers désignés comme pays d’origine sûrs confor­mément au présent article.

3. Lorsqu’ils déterminent si un pays est un pays d’origine sûr conformément au présent article, les États membres s’appuient sur un éventail de sources d’information, y compris notamment des informations émanant d’autres États membres, du BEAA, du HCR, du Conseil de l’Europe et d’autres organisations internatio­nales compétentes.

Une application très diverse (extrait du rapport de la Commission européenne, septembre 2010)

Pays d’origine sûrs (articles 29 à 31)

Il n’existe pas de notion de pays d’origine sûrs en Belgique, Italie, Pologne et Suède. Des divergences importantes ont par ailleurs été relevées entre les États membres qui sont dotés de procédures concernant les pays d’origine sûrs. A Chypre, en Estonie, Hongrie et Grèce, cette notion peut être appliquée pour une portion du territoire d’un pays. Un certain nombre d’États membres (Allemagne, Finlande, France, Pays-Bas et Royaume-Uni) peuvent s’appuyer sur des clauses de statu quo, en appliquant ainsi des critères moins rigoureux pour la désignation nationale, et le Royaume-Uni use de la possibilité de désigner comme sûre une portion du territoire ou de désigner comme sûr un pays ou une partie du territoire de ce dernier pour un groupe particulier de personnes. Bien que les législations nationales en général prévoient une liste de pays d’origine sûrs, ces listes n’ont réellement été adoptées que dans quelques États membres (Autriche, Allemagne, France, Luxembourg, Roumanie, Slovaquie et Royaume-Uni), et le contenu de ces listes est très variable. Estonie, Rép Tchèque, Finlande, Pays-Bas et Portugal n’ont prévu aucune liste et cette notion ne peut être appliquée qu’au cas par cas; en Bulgarie, France, Portugal, Malte et Roumanie, les règles nationales ne transposent pas pleinement et explicitement les critères établis par la directive pour considérer un pays comme un pays d’origine sûr.

L’exigence de procéder à un examen individuel est généralement reconnue, en tant que principe général ou spécifiquement dans le cadre de la notion de pays d’origine sûr. S’il en est de même pour la possibilité de réfuter la présomption de sûreté du pays, il semble que les demandeurs ne soient pas toujours informés de l’intention des autorités d’appliquer cette notion, et en Estonie, Grèce et Slovénie, l’entretien personnel peut être omis au cours des procédures en question.

Le concept de pays tiers sûr (article 27)

Certains États membres (BE, DE, FR, IT, PL et SE) n’ont pas transposé cette notion, tandis que d’autres l’appliquent rarement dans la pratique. En ce qui concerne les critères matériels d’application de cette notion à un pays tiers, en général, les règles nationales soit suivent la lettre de la directive, soit la reflètent en substance. Plusieurs problèmes ont été relevés: en République tchèque et au Royaume-Uni, la législation applicable ne prévoit pas qu’un pays tiers est tenu de respecter le principe de non-refoulement[47], tandis qu’en Roumanie et au Royaume-Uni, les critères nationaux ne mentionnent pas la possibilité de demander le statut de réfugié et de bénéficier d’une protection. En FI, IE et LT, l’accent est mis sur la participation du pays tiers aux traités relatifs aux réfugiés et aux droits de l’homme, et à leur respect, plutôt que sur le traitement d’une personne conformément aux critères spécifiques de la directive.

La notion de pays tiers sûr ne peut être appliquée que lorsqu’il est établi qu’il existe un lien de connexion avec un pays tiers, justifiant que la personne concernée s’y rende. Les mesures nationales ne comportent pas de règles détaillées à cet égard et font seulement référence à une personne «qui était présente» (SI), «a transité et a eu l’occasion, à la frontière ou sur le territoire, de contacter les autorités» (RO et UK), «a séjourné ou a transité dans ce pays et il existe un lien qui peut, en principe, permettre à cette personne de s’adresser à ce pays» (PT), «a séjourné» (CZ) ou «a résidé» (BG, EL et MT) dans un pays tiers. Aucune règle à ce sujet n’est établie en AT, FI, LT et SK. Les règles nationales de EE, ES, LU, CY exigent des autorités qu’elles établissent l’existence d’un lien, sans spécifier les critères applicables. Aux Pays-Bas, les règles pertinentes existent et font notamment obligation aux autorités nationales d’apprécier la nature, la durée et les circonstances du séjour d’une personne dans un pays tiers.

Les États membres peuvent soit désigner les pays tiers sûrs soit appliquer cette notion au cas par cas. BG, CZ, RO, SK, SI et PT ont opté pour la première solution, tandis que AT, EE, ES, FI, EL, LT, LV, MT, NL et SE appliquent la méthode du cas par cas. Le Royaume-Uni prévoit tant la désignation des pays tiers sûrs que l’examen au cas par cas de la sûreté du pays. Les approches adoptées par les États membres varient donc et ne sont généralement pas assez détaillées en ce qui concerne l’examen individuel de la sûreté pour une personne donnée. Dans plusieurs États membres, la personne a le droit de réfuter la présomption de sûreté dès la procédure en premier ressort (BG, CZ, EE, FI, NL, SI, SK), alors que dans d’autres, cette possibilité n’existe que par dans le cadre de l’exercice d’un recours (CY, RO, LT, MT, EL, ES, UK). Si la tendance générale est qu’une personne peut réfuter la présomption de sécurité pour tout motif, plusieurs États membres limitent cette possibilité aux seuls motifs prévus à l’article 3 CEDH (MT, NL, PT) ou aux motifs de la CEDH en général (UK). En Finlande et en Grèce, les motifs ne sont pas précisés dans la législation. La Commission est d’avis que les personnes concernées doivent être informées de leur droit de contester l’application de la notion de pays tiers sûr, et avoir la possibilité de l’exercer avant qu’une décision ne soit prise en premier ressort.

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