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Emmanuel Macron se retrouve bien seul : Jean-Claude Juncker a opposé mercredi à Strasbourg, dans son discours annuel sur «l’état de l’Union», une fin de non-recevoir à la vision d’une Europe à plusieurs vitesses développée par le chef de l’Etat français, dont une zone euro davantage intégrée, tant sur le plan économique que sécuritaire, deviendrait le cœur nucléaire. Ce qui en soi ne serait pas très grave si le président de la Commission ne reflétait pas fidèlement les réticences de Berlin, où l’on répugne à se lancer dans un tel exercice, qui couperait l’Union en deux parties définitivement inconciliables. «Le fossé entre l’Ouest et l’Europe centrale risque de se creuser davantage. Il est préférable de jeter des ponts entre eux», a ainsi confirmé Jean-Claude Juncker à Libération.
«Poumons».
Pour lui, tous les pays de l’Union ont vocation, à plus ou moins brève échéance, à rejoindre l’euro, l’union bancaire, l’espace Schengen, la défense, la coopération policière, etc. Juncker, qui s’est même abstenu de mentionner les problèmes démocratiques posés par la Pologne et la Hongrie, propose ainsi «la création d’un instrument d’adhésion à l’euro» offrant assistance technique et financière aux pays n’utilisant pas encore la monnaie unique afin de les appâter. «L’Union doit respirer avec ses deux poumons, avec celui de l’est, avec celui de l’ouest, sinon notre continent s’essouffle», a-t-il martelé. Mais cette conviction que les Vingt-Sept partagent la même vision de l’avenir a une conséquence pratique immédiate : la création d’institutions et d’instruments ad hoc pour la zone euro ou la défense n’est pas nécessaire. Ce n’est pas un hasard si cette partie du discours, la plus importante, a été prononcée en allemand, le message étant à destination de Berlin. Ainsi, pas question de créer un parlement de la zone euro, le Parlement européen étant le lieu où doit s’exercer le contrôle des activités de la Commission et de l’Eurogroupe (l’assemblée des ministres des Finances). Il suffira que les députés non ressortissants de la zone euro soient privés de leur droit de vote pour les sujets qui ne concernent pas leur pays. Sur le déséquilibre démographique qui fait qu’un député luxembourgeois représente environ 70 000 citoyens contre 900 000 pour son collègue français, pas un mot. Pourtant la Cour constitutionnelle allemande a considéré que ce déséquilibre disqualifiait le parlement en tant qu’institution démocratique…
De même, le «budget de la zone euro» est ramené par Juncker à une «simple ligne» dans le budget communautaire : or les grandes masses financières sont adoptées pour cinq ans à l’unanimité des Vingt-Sept, ce qui donne un droit de veto à la Pologne ou la Hongrie… Et comme le réclame l’Allemagne, le Mécanisme européen de stabilité, doté de 700 milliards d’euros, serait transformé en Fonds monétaire européen capable de restructurer les dettes publiques, mais pas en embryon de Trésor européen. Seule vraie concession à Paris, Juncker se rallie à la création d’un ministre des Finances fusionnant les postes de commissaire européen aux Affaires monétaires et de président de l’Eurogroupe.
Trente-Deux.
On est donc très loin des ambitions affichées par Macron à Athènes le 7 septembre. «Nous avons besoin d’une zone euro plus intégrée, et donc d’un vrai budget de la zone euro, d’un ministre des Finances permanent qui dirige cet exécutif, une responsabilité démocratique au niveau de la zone euro, et à ce titre il faut le maximum d’ambition»,avait dit le président français. Pour Juncker, l’ambition doit se situer au niveau des Vingt-Sept, notamment en utilisant les dispositions du traité de Lisbonne, qui permettent de passer (sur décision unanime des Etats) au vote à la majorité qualifiée, notamment dans le domaine de la fiscalité. Mais les Vingt-Sept pourraient bientôt être les Trente-Deux. En effet, le président de la Commission plaide pour une poursuite de l’élargissement à l’ensemble des Balkans (Albanie, Serbie, Kosovo, Monténégro, Macédoine) alors même, comme l’a rappelé Macron en Grèce que «par l’ampleur qu’il a prise, l’élargissement qu’il a connu, la diversité qu’il a adoptée, le projet européen s’est soudain heurté voilà un peu plus de dix ans à un refus du peuple, des peuples». Il est curieux que la Commission propose d’en rajouter une louche. Seule consolation pour les pays qui, comme la France, réclament une pause : la candidature de la Turquie, qui «s’éloigne à pas de géant de l’Union»,est officiellement mise entre parenthèses.
Ce qui s’apparente à une incapacité à entendre l’épuisement des peuples face à une certaine façon de faire l’Europe se retrouve dans la volonté de Juncker de poser l’Union en champion toute catégorie du libre-échange. Après le Canada et le Japon, Juncker annonce de nouveaux accords d’ici la fin de l’année avec le Mexique et l’Amérique du Sud et le lancement de négociations avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Seule consolation : la Commission s’engage à publier tous ses projets de mandat de négociation. Enfin, si Juncker se rallie à l’idée de Macron de surveiller davantage les investissements stratégiques en Europe, il ne dit rien d’un «Buy european act», qui réserverait les marchés publics aux entreprises européennes, à l’image de ce qui existe partout ailleurs. Si Juncker confie à Libération ne pas croire «que le danger de l’extrême droite soit définitivement écarté en Europe», on ne peut pas dire qu’il fasse beaucoup d’efforts pour les priver de leurs principaux arguments.
N.B.: article paru dans Libération le 14 septembre
On September 6th 2017, the EU Court of Justice has officially ruled against appeals from both Hungarian and Slovakian governments concerning the 2015 decision which stated that asylum seekers must be relocated among EU Member States. On the contrary, with this ruling the ECJ showed support for this mechanism, and thus confirms its opinion that relocating asylum seekers was a rightful decision at the time it has been taken.
To remedy the migration crisis that the EU has been facing since 2015 onwards – and especially Southern European countries such as Italy and Greece – the Council of the EU had indeed decided to trigger and temporarily use the relocation mechanism. When this decision has been taken, it was planned that more than 120 000 asylum seekers should have been relocated from Italy and Greece towards other Member States.
However, to this day, only about 28 000 persons have actually been ‘moved’ to another EU country, according to the most recent reports from the EU Commission.
Hungary and Slovakia, among others, have always shown some discontentment against the Council’s decision, and have been backed by others such as Poland. Hungary and Poland have therefore decided not to fulfil their legal obligations to welcome these refugees. Slovakia, while strongly disagreeing with the Court’s judgment, indicated that it respected this verdict and would fully meet the quotas that have been set up by the EU institutions.
The Member States which are not achieving their goals have been urged by numerous EU officials to host asylum seekers on their territory. Dimitris Avramopoulos, the EU’s Commissioner for Migration, estimated that “It is now absolutely urgent and necessary that all Member States show solidarity and speed up the rate of relocation”, underlying the slow rate at which refugees are currently being relocated throughout the EU.
The EU Commission already condemned Hungary and Poland for not meeting the quotas of refugees they are supposed to take in. It also initiated legal action against them, which could lead to financial penalties for the defaulters.
While the Court’s verdict has already been given, the Hungarian government, through the voice of its Foreign Minister Peter Szijjarto, reaffirmed its intentions to oppose any EU plans to resettle migrants in Hungary. He added that he thought the Court’s ruling was “outrageous and irresponsible”, and that “the real (legal) battle is only just beginning” between the Court and the Hungarian government
Raphaël Moncada
For further information:
ECJ cases C-643/15 and C-647/15: http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=9ea7d0f130d5b4f456204ce1408685e9caf3ba2b2c0d.e34KaxiLc3eQc40LaxqMbN4PaN4Se0?text=&docid=194081&pageIndex=0&doclang=EN&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=839745
Gatestone Institute: https://www.gatestoneinstitute.org/10956/european-court-migrants
Washington Post Site: https://www.washingtonpost.com/world/europe/eu-court-rejects-hungary-slovakia-appeal-in-refugee-case/2017/09/06/a6ea517e-92dc-11e7-8482-8dc9a7af29f9_story.html?utm_term=.9721eb0957ae
In a statement released on Monday, the G7 leaders condemned « in the strongest possible terms the new nuclear test conducted by North Korea » during the weekend.
Today, South Korea continues the cycle of military activities in response to the ongoing Pyongyang provocations. According to Seoul’s Navy, some of the assets mobilized in the waters of the Japanese Sea include the 2,500-ton Gangwon frigate, and three patrol boats.
Seoul said the North appeared to be preparing the launch of more missiles after Sunday’s test shook up the region. South Korea conducted a series of live-fire drills, therefore the US warned it would bolster its military presence.
South Korea is talking to Washington about deploying aircraft carriers and strategic bombers to the Korean peninsula, and has been ramping up its own defenses in the meantime.
Washington tried to ease South Korean doubts about America’s commitment to South Korean security, after Donald Trump openly stated its East Asian ally was “appeasing” Pyongyang. The United States agreed to remove warhead restrictions on South Korean missiles, allowing Seoul to develop more powerful weapons that would boost its pre-emptive strike capabilities against the North.
For further information:
Washington Post Site: https://www.washingtonpost.com/world/asia_pacific/the-latest-report-says-north-may-be-readying-missile-launch/2017/09/04/8751a360-913a-11e7-8482-8dc9a7af29f9_story.html?utm_term=.44ced86671f5
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L’Union européenne peut-elle faire davantage pour lutter contre le terrorisme, un phénomène qui ignore les frontières ? À chaque attentat, le premier réflexe des politiques est de promettre un renforcement de la législation antiterroriste, non seulement sur le plan intérieur, mais aussi européen. « Même si des ajustements sont toujours possibles, on a été au bout de ce qu’on pouvait faire tant d’un point de vue pénal qu’organisationnel, celui de la coopération entre les services », affirme Arnaud Danjean, député européen LR, spécialiste des questions de défense et ancien des services français.
Une meilleure coordination
Si l’Union n’a aucune compétence directe en matière de sécurité intérieure, d’antiterrorisme et de renseignements, des domaines qui relèvent des souverainetés nationales, elle n’est pas pour autant restée inactive dans ses quelques domaines de compétence et a été aussi loin qu’elle le pouvait afin d’améliorer la coopération entre États. Dès le lendemain des attentats de septembre 2001 aux États-Unis, elle a ainsi adopté toute une série de textes : mandat d’arrêt européen qui permet une remise rapide d’une personne recherchée même si c’est un national, harmonisation de l’incrimination de terrorisme, lutte contre le blanchiment, etc..
Depuis l’irruption du terrorisme islamique, les textes ont plu comme à Gravelotte : création du PNR (passenger name record, qui permet aux services d’avoir accès à toutes les données passagers détenues par les compagnies aériennes pour les vols intra et extra européens), contrôle systématique de tous les Européens entrant dans l’espace Schengen, création d’un corps de gardes-frontières européens, présence d’agents d’Europol et d’Eurojust dans les « hotspots » qui enregistrent les migrants arrivant sur les côtes européennes, extension de la définition du terrorisme afin qu’aucun comportement n’échappe à la justice, renforcement du contrôle et de la démilitarisation des armes à feu, durcissement de la lutte contre le blanchiment, extension des compétences et des moyens d’Europol, un organe qui organise la coopération entre les polices européennes, etc.. D’autres textes sont encore dans les circuits législatifs comme la création d’un ESTA européen (ETIAS), une déclaration d’entrée sur le territoire de l’Union, ou l’harmonisation, à défaut d’interconnexion, des multiples fichiers européens existants (Système d’information Schengen, Europol, Eurodac, etc.) afin de faciliter leur usage par les services de police et de renseignements. Bref, l’Europe n’a pas chômé.
Une agence européenne?
Certes, il n’est toujours pas question de créer un FBI, une CIA ou une NSA européenne, chaque pays étant particulièrement jaloux de sa souveraineté dans les domaines policiers et du renseignement. Mais il n’est pas certain que cela soit nécessaire pour lutter contre un phénomène essentiellement national : quelle serait la valeur ajoutée d’une superstructure européenne alors que la récolte du renseignement et son exploitation doivent se faire au plus près du terrain ? Surtout, peut-on faire confiance à tout le monde pour garder le secret nécessaire à l’exploitation des renseignements ? Une vraie question dont la réponse –désagréable pour certains pays – est connue.
L’échange de renseignements entre personnes de confiance est d’ailleurs systématique, même s’il reste artisanal. « Les services sont exaspérés par la tarte à la crème de la soi-disant absence d’échanges de renseignements », affirme Arnaud Danjean : depuis les attentats de Paris de janvier 2015, « elle fonctionne très bien, personne ne garde de renseignements qui mettrait en danger la sécurité d’un autre pays pour soi ». Très souvent, d’ailleurs, les hiatus en matière de transmission du renseignement sont internes et pas européens, comme on a pu le voir en Belgique, la localisation de Salah Abdeslam n’ayant pas été transmis au niveau fédéral par une police communale flamande. Mais « même la meilleure intégration du monde ne met pas à l’abri: ainsi, la Grande-Bretagne, après les attentats de 2005, a créé une vraie communauté du renseignement ce qui n’a pas empêché des attentats de se produire sur son sol ».
Une affaire d’une génération
De même, la question des quelques « returnees », ces personnes, pas toutes combattantes, revenant d’Irak ou de Syrie, qui n’a pas l’ampleur redoutée, la plupart des vrais combattants ayant été tués sur le terrain, est désormais traitée par tous les pays européens : « même si seulement quinze pays sur vingt-huit ont enregistré des départs, les pays de passage coopèrent plutôt pas mal », estime Arnaud Danjean. En réalité, désormais il s’agit essentiellement d’une question de moyens humains et matériels. « Quand vous avez entre 15 et 18000 signalements pour radicalisation, cela mobilise l’ensemble des services français pendant six mois pour vérifier ce qu’il en est vraiment », souligne le député européen. Autrement dit, c’est moins de lois dont la police, la justice et les services ont besoin que d’argent : « il faut prendre conscience que l’assèchement du vivier djihadiste, idéologiquement, matériellement, humainement, est l’affaire d’une génération ». De l’avis de tous les spécialistes, vu l’ampleur des défis, les polices et justices européennes ont jusqu’ici réussi, avec des moyens très limités, à limiter l’ampleur des attaques sur le territoire de l’Union.
N.B.: version longue de mon article paru dans Libération du 19 août
REUTERS/Stoyan Nenov
Mon article sur la tournée d’Emmanuel Macron à l’Est est ici. Bonne lecture!