Dernière ligne droite pour la campagne des élections parlementaires en Pologne. Ce dimanche 15 octobre 2023, près de 30 millions de Polonais sont appelés aux urnes pour renouveler l’intégralité de la Diète et du Sénat, les deux assemblées qui forment le Parlement polonais, et ce pour un mandat de quatre ans. Un scrutin qui sera largement observé dans le reste de l’Union européenne.
Deux blocs s’y opposent. Deux camps dont les relations avec Bruxelles et les autres partenaires européens sont aux antipodes. Le PiS d’une part, parti conservateur au pouvoir depuis 2015. Celui-ci a multiplié les sujets de discorde avec l’UE isolant régulièrement la Pologne, aux côtés de la Hongrie, du reste des Etats membres. La Plateforme civique d’autre part, formation libérale et pro-européenne menée par l’ancien président du Conseil européen, Donald Tusk.
À LIRE AUSSIFiche pays : Pologne “Poil à gratter de l’UE”Depuis un an, les deux formations font la course en tête dans les sondages. Le PiS, dont le chef de file n’est pas l’actuel Premier ministre Mateusz Morawiecki, mais le président du parti, Jarosław Kaczyński, tient la corde. Droit et justice est donné aux alentours de 36 % d’intentions de vote par les dernières études d’opinion, contre 30 % pour la Plateforme civique.
Le clivage du paysage politique polonais entraîne ainsi celui de la population. Mais au-delà des enjeux nationaux, “cette échéance électorale est importante pour l’avenir de l’Europe, car les orientations de politiques étrangère et européenne des deux camps sont bien différentes”, explique Cédric Pellen, maître de conférences en science politique et responsable du master franco-polonais en études européennes à Sciences Po Strasbourg.
À LIRE AUSSIEtat de droit : chronologie du conflit entre l’Union européenne et la PologneÀ LIRE AUSSIComment l’UE conditionne-t-elle les fonds européens au respect de l’état de droit ?Depuis l’arrivée au pouvoir du PiS en 2015, les relations entre la Pologne et l’UE se sont fortement dégradées. En cause, les nombreuses réformes mises en œuvre par le parti conservateur qui ont progressivement affaibli l’état de droit dans le pays, souvent à contre-courant des valeurs démocratiques défendues par l’UE. Bruxelles et Varsovie se sont notamment affrontées sur les atteintes à la liberté de la presse, à l’indépendance de la justice ou aux droits des personnes LGBT portées par le parti Droit et justice.
En réprimande à ces atteintes, la Commission européenne a bloqué pendant plus d’un an les 35 milliards d’euros destinés à la Pologne dans le cadre du plan de relance européen. Depuis l’invasion russe en Ukraine, les relations entre Bruxelles et Varsovie se sont un peu réchauffée, la Pologne étant en première ligne pour accueillir les réfugiés ukrainiens et partisane de sanctions toujours plus lourdes à l’encontre de la Russie, quitte à froisser son partenaire hongrois Viktor Orbán, réputé proche du Kremlin. Une situation qui a joué en la faveur de Varsovie, participant sans doute au déblocage de son plan de relance, en juin 2022.
“D’un point de vue institutionnel, on est déjà dans une démocratie ‘illibérale’ en Pologne”, estime toutefois Cédric Pellen. “Si on regarde la chaîne de télévision nationale, c’est devenu un instrument de propagande. Le système judiciaire et la Cour constitutionnelle ont été mis au pas”. Une situation qui inquiète les autres partenaires européens, notamment parce que la Pologne et la Hongrie, deux “poils à gratter de l’UE” tel que les qualifie l’universitaire, pourraient bientôt être rejoints par un troisième. En Slovaquie, c’est le populiste de gauche et pro-Kremlin Robert Fico qui a remporté les élections législatives le 30 septembre. “En termes de politiques européennes, si le PiS l’emporte, cela va continuer de complexifier la vie des Européens”, poursuit le chercheur.
À LIRE AUSSISlovaquie : après la victoire de Robert Fico aux législatives, la crainte d’un virage pro-russe Une indispensable coalition pour gouverner ?Malgré sa nette avance dans les études d’opinion, le parti du Premier ministre Mateusz Morawiecki n’est toutefois pas assuré de diriger le prochain gouvernement, selon Cédric Pellen. “Si l’on en croit les sondages, la capacité de mobilisation du PiS, comme de Plateforme civique s’est réduite. Se pose ainsi la question de voir l’un des deux partis en capacité d’obtenir une majorité absolue à l’issue de ce scrutin. Trois autres listes, certes secondaires, pourraient alors jouer un rôle important dans la formation du prochain gouvernement”.
A une semaine du scrutin, ces trois listes sont annoncées autour de 10 % dans les différents sondages. La Gauche (Lewica) et Troisième voie (une coalition centriste et libérale), deux listes d’opposition au PiS, pourraient ainsi se rallier à la Plateforme civique pour constituer une coalition gouvernementale qui renverserait le PiS. Le parti au pouvoir, lui, ne semble pouvoir compter que sur un allié potentiel : la Confédération (Konfederacja), un parti nationaliste et eurosceptique qui formerait potentiellement avec le PiS “un gouvernement encore plus marqué à l’extrême droite”, note Cédric Pellen.
La complexité du système électoral polonais laisse ainsi libre cours à toutes les éventualités. Il est difficile de prédire qui gouvernera la Pologne d’ici quelques semaines et avec quels alliés. La composition du nouvel exécutif polonais est d’autant plus importante qu’il jouera prochainement un rôle crucial sur la scène européenne, la Pologne assumant la présidence tournante du Conseil de l’UE à partir de janvier 2025. Elle succédera d’ailleurs à… la Hongrie de Viktor Orbán. Pour Cédric Pellen, si le PiS se maintient au pouvoir, comme Viktor Orbán, “ils seront incapables de construire des majorités au Conseil de l’Union européenne. Ce seront deux présidences pour rien, ce qui est dramatique”.
Cédric Pellen est maître de conférences en science politique à l’Université de Strasbourg - SAGE (Sociétés, Acteurs, Gouvernement en Europe). Il est également directeur adjoint du Centre universitaire d’enseignement du journalisme (CUEJ) de Strasbourg et responsable à Sciences Po Strasbourg du master franco-polonais en études européennes.
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La réforme du marché européen de l’électricité va-t-elle pouvoir enfin aboutir prochainement ? C’est ce qu’Emmanuel Macron a laissé entendre ce mardi 10 octobre, en marge de sa rencontre avec le chancelier allemand Olaf Scholz à Hambourg. “Nous avons acté de pouvoir travailler ensemble […] dans les semaines à venir pour chercher à conclure d’ici la fin du mois un accord nécessaire”, a déclaré le chef de l’Etat français.
Depuis des mois, un des principaux points de divergence entre Paris et Berlin sur la question réside dans le rôle de l’énergie nucléaire au sein du mix électrique européen. Les deux pays “partent de modèles nationaux qui sont extrêmement différents” a souligné le président de la République, ajoutant qu’il s’agissait là “d’une chance, parce qu’ils peuvent être complémentaires”.
La France plaide pour que le nucléaire puisse bénéficier des contrats de long-terme prévus dans la réforme, donc de prix plus stables et d’une aide de l’Etat. Tandis que l’Allemagne, qui a décidé d’abandonner cette production d’énergie à l’époque où Angela Merkel était encore chancelière, refuse que la filière puisse bénéficier de ce soutien, lui préférant davantage d’investissements dans les énergies renouvelables.
À LIRE AUSSIL’énergie dans l’Union européenneÀ LIRE AUSSIEnergie : comment fonctionne le marché européen de l’électricité ? Une réunion des ministres européens de l’Energie prévue le 17 octobreEn 2022, la production électrique française venait à 63 % de la filière nucléaire, à 24 % des énergies renouvelables et à 10,5 % des énergies fossiles. En Allemagne pour la même année, 6 % de la production d’électricité était issue des centrales nucléaires, 44,5 % des énergies renouvelables et 46 % d’énergies fossiles.
Les ministres de l’Energie de l’Union européenne doivent se réunir le 17 octobre pour tenter de trouver un compromis sur la réforme du marché de l’électricité, dont l’objectif est de faire baisser les factures des consommateurs et encourager la décarbonation de la production énergétique. S’ils parviennent à s’entendre, cela permettrait ensuite d’entamer d’ultimes négociations avec le Parlement européen pour parvenir à un accord final.
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