Valdis Dombrovskis aujourd’hui face à la presse (crédit : EBS / B2)
(BRUXELLES2) Pour les institutions européennes, le sort de la Grèce après le référendum « c’est compliqué »… Valdis Dombrovskis, le vice-président chargé de l’Euro et du Dialogue social, l’a répété sur tous les tons, à chacune des questions, que les journalistes lui ont posé lors de la conférence de presse quotidienne qui se tient au Berlaymont. Maintenant c’est place à la négociation en quelque sorte. « Tout le monde doit se retrouver autour d’une table. (…) Si tout le monde travaille bien, il est possible de trouver une solution même dans ce contexte… complexe ! »
C’est compliqué !
L’ancien Premier ministre letton — qui avait démissionné au lendemain de la catastrophe du supermarché de Riga (54 morts) (lire : La catastrophe de Riga. Inaperçue) —, avait été envoyé au charbon par Jean-Claude Juncker pour déminer le terrain face à la presse. ">Son discours froid, méthodique, sans aucune chaleur humaine pour le sort des citoyens grecs, ne pouvait en aucune manière faire de l’ombre au plan politique à celui qu’aurait pu faire le président de la Commission. Il s’en est tiré très bien ne lâchant rien d’autre que « c’est compliqué ». Un peu comme ces profils ‘facebook’ où les intervenants pour marquer qu’ils ne sont plus tout à fait mariés, mais ne veulent pas s’afficher encore célibataires, voir pluricélibataires affichent que, bon, c’est compliqué. En fait, Valdis sous des dehors très froids, doit avoir beaucoup d’humour et a voulu envoyé un message subliminal aux journalistes. On est au bord de la séparation…
">Le Non complique tout
">« La Commission européenne prend note du résultat du référendum d’hier en Grèce. ">Nous respectons le choix démocratique du peuple grec » a-t-il précisé. Cela a été la seule concession au vote démocratique. Car V. Dombrovskis a immédiatement essayé de contester la validité du référendum « La question posée au référendum n’était pas correcte. Car elle reposait sur un projet qui n’était pas approuvé par l’Eurogroupe. Et ce n’était pas la dernière mouture. Le seul fondement du référendum était politique. » Et d’ajouter que le vote ‘Non’ ne faisait « qu’affaiblir la position gouvernement hellénique ». Car ">« ">le «non» élargit malheureusement l’écart entre la Grèce et d’autres pays de la zone euro.
">Beaucoup de temps perdu, la faute à Tsipras…
">« Beaucoup trop de temps et trop d’occasions ont été perdues » "> a précisé ensuite Valdis Dombrovskis, un peu amer. « L’Europe a toujours été au côté du peuple grec pendant la crise. ">Les contribuables européens ont offert une aide financière sans précédent. Depuis 2010, 184 millions d’euros ont été décaissés de la facilité de prêt à la Grèce et du Fonds européen de stabilité financière » a-t-il précisé.
">Mais « ">Les réformes ont souvent été retardées ou mis en œuvre que partiellement, amenant une récession prolongée et des réformes plus difficiles à mettre en œuvre plus tard. ">Il y a seulement huit mois, la Grèce avait finalement tourné la page, l‘économie était en pleine croissance, l’investissement commençait à reprendre, et des emplois étaient de nouveau en création. ">Le pays était proche d’un retour sur les marchés et de mettre fin à son programme de sauvetage à la fin de l’année dernière. ">Malheureusement, le gouvernement grec actuel n’a pas été en mesure d’utiliser l’extension (de programme) pour produire une stratégie crédible, pour sortir de cette crise, retrouver la stabilité financière et le retour à la croissance économique. »
La place de la Grèce dans l’Europe… mais dans la Zone d’euro
La Commission est prêt à utiliser tous les moyens dans le cadre de notre mandat » a-t-il ajouté. « Une chose est claire. La place de la Grèce est dans l’Europe. » En revanche, il a refusé de répondre de façon précise si la Grèce avait toujours un avenir dans la Zone Euro. « Le résultat du référendum a évidemment compliqué les choses » a-t-il affirmé B2 lui a posé la question. « Il faut à partir de là choisir la voie à suivre, pour développer un plan clair, retrouver la stabilité financière, revenir à la croissance économique, et aussi répondre à la préoccupation sociale. »
">Pas de nouveau programme sans mandat de l’Eurogroupe
">C’est l’autre leitmotiv de l ">‘exécutif européen. "> « La Commission est prête à continuer à travailler avec la Grèce. ">Mais pour être clair, la Commission ne peut pas négocier un nouveau programme sans mandat de l’Eurogroupe. » etc. ">Et « le résultat d’hier marque un rejet de réformes proposé, dans une large mesure, par les autorités grecques elles-mêmes, et liés à un programme de soutien maintenant expiré pour la Grèce. »
La restructuration de la dette : c’est compliqué !
Quant à la restructuration de la dette… « c’est compliqué. l’Eurogroupe a annoncé en 2012 un débat sur ce sujet une fois le programme FSEF parachevé. Malheureusement, le programme du FSEF n’a pas été parachevé, il reste en suspens, pas terminé. Dès lors cette offre n’est plus d’actualité, comme la totalité du programme. Il faut reprendre les discussions. ». Lors des discussions récentes, « on avait vu que les pays de la Zone Euro étaient prêts à se pencher sur l’endettement de la Grèce, et le coût du service de la dette. (Mais) c’est à l’Eurogroupe de décider du mandat de la Commission européenne et de décider si la question oui ou non de la dette doit être traitée. »
(Nicolas Gros-Verheyde)
(B2) La nouvelle est arrivée en fin de semaine dernière. En pleine crise grecque, un des vétérans de l’actualité européenne, Europolitics (anciennement Europolitique ou Europe information Services), a mis la clé sous la porte. Les journalistes ont été avertis qu’ils pouvaient prendre leurs affaires. Le journal s’arrête. L’investisseur ne veut plus remettre la main à la poche. L’effet de « souffle » Politico est passé par là. Mais pas seulement sans doute. Les « salaires » (*) ne sont pas payés pour juin. Un petit air de licenciement à l’américaine…
Europolitique a une histoire très particulière dans le panorama européen. Il été créé en 1972 par des journalistes de l’agence de presse agricole Agra, qui voulaient se démarquer de la seule publication existante à l’époque, l’Agence Europe, en ayant un traitement plus professionnel, plus indépendant aussi des institutions européennes. Il passera ensuite dans plusieurs actionnaires – essentiellement français – notamment le groupe Expansion, puis le groupe Siac (éditeur de publications agricoles, un retour au bercail en quelque sorte) et ensuite dans un autre actionnaire, de nationalité autrichienne, qui a fini par jeter l’éponge définitivement apparemment.
J’ai une tendresse particulière pour Europolitique non seulement car j’y compte beaucoup d’amis. Mais aussi parce que c’est une excellente école de journalisme. Nombre de personnes (portes-paroles, journalistes…) qui se trouvent à Bruxelles sont passés un jour ou l’autre sur les chaises d’Europolitique/Europolitics. Malgré les difficultés au quotidien, c’était aussi un des seuls médias où il y avait une certaine propension laissée aux journalistes pour travailler à leur guise. La pression était énorme certes. C’était la pression de l’actualité. Mais on pouvait quasiment écrire autant que l’on voulait. Un luxe aujourd’hui où la place est comptée dans les journaux.
Enfin, c’est un journal où, même si l’essentiel se déroulait en anglais, le « coeur » et le vivier restait francophone. Les nombreuses nationalités s’y croisaient – de l’ouest et de l’est, du sud ou du nord – voire s’y entrechoquaient. Et les points de vue – de droite ou de gauche – pouvaient trouver à s’y exprimer. Il n’y avait pas de pensée unique. Parfois les discussions pouvaient être intenses, non pas par un désaccord profond, mais par des divergences de vues, d’analyse, de positionnement géographique tout simplement. Les portes claquaient, même, de temps à autre… En bref, c’était une petite Europe, cette rédaction…
(NGV)
(*) Pour être exact, il ne s’agit pas de salaires. Tous les journalistes d’Europolitique sont employés comme « indépendants ».
(BRUXELLES2) Une fois de plus, le coeur européen a été battu largement lors d’une consultation par référendum. Une fois de plus, les sondages qui prédisaient un Oui-Non ont été totalement démentis. Une fois de plus, les Européens ont été abasourdis par le résultat, hésitant entre l’admonestation et le ton froid sans penser à chercher où était l’erreur. Est-ce pour autant l’idée européenne qui est vaincue ? Ou la façon de la défendre ? Je pencherai pour la seconde option.
Des informations distillées qui n’ont cessées d’être démenties par les faits
A écouter le martèlement qu’ont produit les différentes structures européennes, on avait comme un malaise à être Européen la semaine dernière. Les arguments utilisés étaient partiaux, qu’il s’agisse de l’analyse juridique et économique, et de l’appréciation politique. Que n’a-t-on en effet entendu dans les couloirs européens. Tout d’abord, le parlement grec n’allait pas voter pour l’organisation du référendum (c’était samedi 27 juin). Le parlement a voté à une large majorité. Deuxième ‘ligne de défense’ : ce référendum est illégal et il va être annulé par la justice. Cela n’a pas été le cas. Le Conseil d’Etat a validé l’organisation. Pour l’instant, personne ne conteste le résultat. La participation a été importante (62,5% selon les résultats définitifs) sans être pour autant massive mais suffisante pour donner un résultat incontestable. Troisièmement, l’organisation du référendum va entraîner immédiatement la coupure de toutes les lignes budgétaires de la Banque centrale européenne. Et, le chaos sera immédiat. Rien de tout cela n’est arrivé. Le Financial Times a même été jusqu’à prédire un prélèvement sur les comptes en banques… Enfin, on a laissé entendre que le Oui était tout proche de l’emporter. On en était presque à discuter de la constitution d’un gouvernement technique etc. Tout cela est tombé comme un château de cartes dès les premiers résultats partiels qui donnaient plus de 60% de Non. Un chiffre qui s’est confirmé et même amplifié au fil de la soirée avec 61,31% selon le résultat définitif. L’écart de voix entre le Non et le Oui : plus d’un million de voix étant assez notable.
S’inspirer de la théorie de la contre-insurrection
Il y a comme une ‘erreur système’ au dispositif européen qui martèle si fort des arguments tout aussi populistes et fallacieux que ceux qu’il prétend combattre. La volonté d’intégrer les peuples à la « chose » européenne paraissait bien lointaine. Les institutions européennes n’ont pas réussi à « Convaincre les coeurs et les esprits » comme en 2005 en France et aux Pays-Bas. Les dirigeants européens feraient bien de relire le général Petraus, qui a le plus récemment théorisé cette conception de la contre insurrection : « Gagner les cœurs signifie persuader la population que leur meilleur intérêt est servi par les succès des contre-insurgés. Gagner les esprits signifie convaincre la population que la force peut les protéger et que la résistance est inutile ». Comme dans les référendum en France et aux Pays-Bas en 2005, ce ‘Non’ n’est pas un refus à l’Europe ou à leur gouvernement, malgré ce que proclament certains commentateurs ou mouvements extrêmes. C’est un ‘Non’ à une certaine idée de l’Europe, lointaine, arrogante qui dit ‘moi je sais’, ‘il n’y a qu’un seul choix’, celui que je vous propos. Et vous êtes ‘un ignare, un incapable’.
A cent lieues des idées qui font la base de l’Europe
Dire que ce vote entraîne un « Grexit » automatiquement, voire la sortie de l’Europe, est un parfait exemple de cette attitude. Certes en terminant le dernier plan mis sur la table, fin juin, ce qui n’était qu’auparavant qu’une supputation devient une option de crise. Il n’est aujourd’hui tabou. Mais l’agiter comme une menace, la peur, a eu l’effet contraire de l’effet recherché. Chez certains responsables européens, notamment dans plusieurs Etats membres, était bien perceptible la volonté d’humilier la Grèce et les Grecs… Dans une sorte de chantage : c’est çà où le chaos. Si présente chez certains qu’elle ne pouvait que provoquer un vrai malaise chez ceux qui croient vraiment à l’idée européenne. Méconnaître, sous-estimer un adversaire est partir au combat avec un sacré désavantage. L’humilier au surplus, c’est la défaite assurée. « Ne poussez pas à bout un ennemi aux abois. » dit Sun Tzu.
Dans cette campagne, on était très loin des idées européennes à la fois de la solidarité, de l’intégration et de la négociation… en bref de la communauté et de l’union. L’objectif de l’Europe ce n’est en effet pas d’unir ce qui est semblable, c’est d’unir dans une communauté de destins des peuples et des Etats dissemblables, de les solidariser dans une union qui les rapproche et non pas les éloigne. Le raté de cette campagne éclair, c’est cela…
(Nicolas Gros-Verheyde)
(BRUXELLES2) B2 a interrogé Philippe Lamberts, le coprésident du groupe des Verts au Parlement européen sur la crise grecque. Mathématicien, passé par le privé (chez IBM) avant de se lancer en politique, Philippe Lamberts incarne sans doute – avec quelques autres – ce qu’il peut y avoir de meilleur dans les eurodéputés. De solides convictions mais aussi un travail de fond. Un sens de l’à-propos mais aussi une réflexion sur le long terme. Le Vert s’est taillé une réputation en suivant les différentes réformes des marchés financiers mis en place au niveau européen. Et son point de vue aide à y voir plus clair…
Comment a-t-on pu échouer à trouver une solution avant le 30 juin ?
Du côté grec, beaucoup de choses pouvaient être acceptées à condition qu’il y a un engagement ferme sur la restructuration de la dette. Ce auquel on se refusait du côté européen. Ce qui est absurde car chacun sait que, de gré ou de force, il faudra restructurer la dette. C’est une position totalement idéologique. Le FMI voulait bien restructurer la dette mais avec des conditions au coût trop important. Le FMI et les Européens ont, en fait, combiné leurs inflexibilités et ont raté la négociation. On peut dire beaucoup de choses sur l’amateurisme et la volte face des Grecs. Mais que ne peut-on pas dire sur l’absence du sens de responsabilités des leaders politiques européens ?
Le référendum grec n’était pas vraiment opportune cependant ?
La convocation du référendum intervient à un moment bizarre. Si la question était la restructuration de la dette, il fallait le faire le plus tôt. Mais le faire à cheval au moment juste où le programme se termine, c’est créer des crispations inutiles. Ce n’est pas très responsable. Mais les irresponsables politiques sont des deux côtés. Dans une négociation, c’est celui qui le plus de pouvoir qui doit avancer, avoir justement ce sens de responsabilités. Et celui-ci n’était pas présent. Pour certains, il y a eu une idéologie écrasée du réel et, pour d’autres, un amour propre blessé par les Grecs. La cause européenne ne doit pas servir à faire mordre la poussière à un gouvernement qui n’est pas de votre bord. Et il faut savoir surmonter les mauvaises relations personnelles. Il ne s’agit pas seulement de discipline budgétaire et de finances, c’est un choix politique.
Les dirigeants européens n’ont pas été à la hauteur ?
J’attends de voir un leader européen assurer aujourd’hui ses responsabilités. J’attendais Juncker. Et, clairement, il a pris parti sans prendre la hauteur nécessaire. Les Juncker, Merkel et autres ont une responsabilité écrasante dans ce qui est un échec européenne.
Une solution était possible ?
On était à deux doigts. Si Jean-Claude Juncker avait dit je m’engage à étudier la restructuration de la dette. C’était la gâchette qui pouvait déclencher le reste. Il n’a pas osé faire sauter ce tabou. Mais Juncker n’a pas osé … C’est une erreur politique grave. (…) Il faut voir que derrière Juncker, il y a des relais de l’ordolibéralisme à l’Allemande, incarné par Martin Selmayr et Frans Timmermans. On n’est pas vraiment bien servi
Juncker n’est pas seul, les leaders européens semblent aussi aux abonnés absents ?
On manque de stratèges politiques. La Chancelière allemande Angela Merkel est une tacticienne pas une stratège. Elle l’a montré sur le nucléaire, en changeant d’avis après Fukushima. Ce n’est pas une visionnaire, non plus. Elle ne sait pas prendre d’altitude. Elle ne se comporte pas comme un homme d’Etat. Quant à François Hollande, c’est la mouche du coche. Et ce n’est pas la première fois. Le seul sujet où il a été le coche, c’est le Mali. Wolfgang Schäuble et les autres se drapent dans la vertu, dans le sens des responsabilités. Mais ils sont écrasés par des courtes vues à ‘trois balles’. Sur la crise européenne dans l’ensemble, on assiste à une défaillance de courage.
Un manque de courage ?
Oui. Il y un manque total de courage politique. Et la Grèce n’est pas le seul exemple. On l’a vu au dernier Conseil européen sur la question de l’accueil des réfugiés. Pour accueillir 60.000 réfugiés sur deux ans, l’Europe hésite aujourd’hui alors qu’au moment de la guerre en ex-Yougoslavie, l’Allemagne ou l’Autriche accueillaient à eux seuls plusieurs centaines de milliers de réfugiés. Où est l’Europe aujourd’hui ? Il y a une crise très profonde de l’idée européenne. J’attends que Merkel se réveille. Il faut siffler la fin de la récréation.
Pourquoi s’attaquer à la restructuration de la dette semble si difficile ?
C’est une question à la fois d’orgueil et d’obsession politique. Car s’attaquer à la dette, c’est quelque part reconnaitre que le Policy mix imposée depuis cinq ans à la Grèce n’a pas marché.
La restructuration de la dette ne suffit pas. Il faut des réformes importantes en Grèce, à commencer par l’Etat grec ?
C’est évident. Tout le monde le sait. Il faut construire un Etat grec. Il faut sortir du clientélisme, remettre sur pied une administration fiscale. Cela ne peut être fait en un ou deux ans. C’est le travail de toute une génération. Regardez combien de temps, il a fallu à l’Allemagne de l’Ouest pour remettre à niveau l’Allemagne de l’Est. Et c’était l’Allemagne…
Syriza a cependant gaspillé ses chances ?
Au lieu de travailler directement après leur élection, ils ont continué la campagne électorale durant plusieurs mois. Ils ont gaspillé du capital politique inutilement. C’est vrai. Quand l’équipe de négociation a été restructurée, en avril – début mai, le travail a réellement commencé. Mais il y a une vraie volonté chez Syriza de tourner la page de clientélisme. C’est la première fois qu’un parti politique depuis le début la crise a cette volonté. Il faut saisir cette chance.
Il n’y a plus de gras pour la Grèce dit-on souvent. Y-a-t-il des coupes encore possibles sans dommage ?
Il faut toucher aux dépenses de défense. L’armée grecque aligne plus d’unités et d’avions que l’armée allemande et a des dépenses de défense disproportionnées. Personne n’a jamais trouvé à redire à cela. Il faut encourager ce gouvernement qui a envie de faire quelque chose à aller dans ce sens.
Chacun semble se résoudre aujourd’hui à un Grexit, une sortie de la Grèce de la Zone euro. Est-ce une bonne chose ?
Ce serait un échec catastrophique pour l’Union européenne. Un Grexit, au niveau comptable, c’est d’abord un défaut de paiement. Et donc le passage de la dette comme une charge pour nos Etats membres. Cela veut dire que la France se retrouve avec environ 40 milliards de dette en plus, l’Allemagne 56 milliards d’euros, la Belgique 7 milliards, etc. Cela ne fait pas passer tout le monde au rouge, car c’est s’étale sur plusieurs années. Mais cela ne facilite pas la tenue des objectifs du pacte de stabilité. Pour moi cependant, la principale conséquence négative n’est pas là.
Vous estimez que les conséquences sont davantage politiques que financières ?
Oui. Le Grexit, c’est surtout ancrer dans la réalité que la construction européenne n’est pas une construction à sens unique, qu’on peut aller en arrière. C’est un signal de défiance qui est envoyé aux marchés financiers, d’une part. Les instruments de la Banque centrale européenne sont plus solides aujourd’hui certes. Mais on ouvre un champ des possibles qu’on aurait mieux fait de ne pas ouvrir. C’est aussi et surtout un signal de défiance envoyé aux citoyens européens. On trace un boulevard à tous ceux qui veulent sortir de la Zone Euro et de l’Europe, les Le Pen et Melenchon qui ne rêvent que de cela. C’est un encouragement au départ de l’Europe. On a tous les paramètres de la crise politique.
Si je reviens sur les conséquences financières, peut-on prévoir les conséquences d’un éventuel Grexit. Peut-on le calculer, le prévoir ?
S’ils sortent, personne ne sait vraiment ce qui va se passer. Le mécanisme financier n’est pas une mécanique déterministe. Ce sont des êtres humains, qui réagissent de façon pas toujours rationnelle. On l’a vu avec Lehman Brothers. Ici ce n’est pas pareil car nous sommes en présence d’Etats. Mais on peut avoir des attaques sur des Etats. Et ce que je crains ce sont les réactions en chaîne. Car l’économie est fragile. Pour répondre à la crise, on a inondé le pays de liquidités. On n’a pas réinvesti dans le réel. Regardez aujourd’hui le prix des actions. On est revenu aux prix de 2007, à des niveaux exubérants, avec des cours largement surévalués par rapport au bénéfices réels. Il peut y avoir une correction à un moment. Nous avons aussi des éléments de fragilité dans le système. Il existe des bulles dans certains secteurs, immobiliers par exemple, financiers aussi. Les prêts étudiants représentent une masse de 1500 milliards $ aux Etats-Unis. On ne sait pas s’ils seront tous remboursables. Une partie de ces prêts peut avoir été titrisée et se retrouve aujourd’hui dans d’autres mains que les créanciers initiaux. Si la Grèce ne rembourse, pourquoi pas l’Irlande ou le Portugal ou même l’Italie. Dès le moment où il y a le doute s’instille, il va y avoir un surenchérissement de la dette qui peut provoquer le défaut. C’est un cycle de la prédiction autoréalisante.
Pourquoi faire une exception sur la Grèce et pas pour les autres ?
Il faut arrêter de faire de l’idéologie et retourner au réel. Il faut voir l’effet systémique d’une faillite grecque au plan économique, au plan politique. Et on touche là au cœur de l’idée européenne d’une prospérité partagée. Quand on voit l’intégration du Portugal, de l’Espagne… il y a eu cette progression partagée. Il n’y a pas d’intégration européenne sans transferts financiers. C’est comme cela que cela marche. C’est comme cela que l’Allemagne de l’Ouest a procédé avec l’Allemagne de l’Est avec transferts colossaux. Sans solidarité financière, c’est fini de l’UE.
Mais cela coûte cher la solidarité avec la Grèce ?
Avoir une solidarité financière permet d’augmenter la croissance sur le continent. Si l’Allemagne croit qu’elle pourra assurer sa croissance uniquement par les exportations hors d’Europe, elle se trompe. L’essentiel de ses exportations est à l’intérieur du marché européen. Etrangler la Grèce, c’est étranger sa croissance de demain. Si les Européens croient qu’ils auront toujours un poids dans le monde, ils se trompent. L’Europe qui pèse environ 1/6e aujourd’hui n’en pèsera plus qu’1/20e d’ici quelques dizaines d’années. Croire que chaque pays gardera une souveraineté est illusoire. Ce n’est qu’ensemble qu’on arrivera à garder et regagner de la souveraineté, un pouvoir d’agir. C’est là où devrait être le message que devraient tenir Merkel, Hollande et les autres… Je suis un souverainiste européen. Et je pense que nous devons nous doter d’outils pour cela.
Comment l’Europe peut regagner de la souveraineté, être efficace. Que reste-t-il à faire ?
Beaucoup ! Premièrement, je rêve d’un système où chaque citoyen serait doté d’un budget ‘éducation’ au départ, qu’il pourrait dépenser où il veut, avec des équivalences réelles de diplômes. Prenez la Belgique. Nous avons de bonnes écoles. On peut devenir exportateur de compétences que les autres n’ont pas. Mais il faut une compensation. Ensuite, il faut une réforme fiscale, une équivalence fiscale. Tout le monde peut y gagner. Cela suppose une volonté politique. On ne peut pas continuer à vivre avec des inégalités. Enfin, le marché intérieur. On vit sur une fiction d’un marché intégré, ce n’est pas vrai. Demandez aux PME quelles difficultés elles rencontrent. Avant de penser à faire un TTIP (traité transatlantique), il faut penser au marché intérieur, mettre en place un vrai système de reconnaissance des qualifications, d’accès à la profession, supprimer les possibilités de dumping social. Le dispositif de détachement des travailleurs ne marche pas bien. Il faut un embryon de sécurité sociale européenne. Le chantier est immense. Quatrième terrain d’action : la transition énergétique. Celle-ci ne peut pas marcher à l’échelle d’un pays. Il faut le faire au niveau européen. Le projet d’Union de l’énergie est loin de cela. Imaginez ce que signifierait une Europe souveraine énergétiquement, en termes politiques et économiques. Ce serait un formidable moteur de croissance économique. Mais un signal politique également. La marque d’une certaine autonomie et de sécurité. Ce qui est recherché par les investisseurs.
(Propos recueillis par Nicolas Gros-Verheyde)
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(B2)
P L’hypothèse de la destruction des ponts obligeait à la construction d’un point de passage entre deux rives. (Crédits: EUFOR Althea)
Derventa (Bosnie-Herzégovine) Exercice d’assistance pour catastrophe naturelle devient réel.
Pluies de déluge et inondations historiques. Tel était le scénario imaginé pour l’exercice d’assistance militaire en situation d’urgence humanitaire, qui a failli se transformer en réalité. Les ingénieurs autrichiens et slovaques de la mission EUFOR Althea se préparaient à de fortes pluies et des tremblements de terre dans la zone de la rivière Urina. Les militaires européens étaient soutenus par les forces locales de police, les pompiers, la protection civile locale. La Croix-Rouge était chargée d’établir un centre de crises. Exercice sans doute inspiré par les deux semaines de pluies continues qui frappent la région. Et pour cause, l’exercice de simulation était en cours lorsque l’alerte pour inondation a été lancée dans toute la région. Forces civiles et militaires se sont mises à disposition des autorités du pays pour répondre au risque réel d’inondation. Finalement, l’alarme a été levée et l’exercice a pris fin sans autre incident.
Sambir (Ukraine). Déploiement des patrouilles de police locale rénovées
Les protagonistes de l’actes ont été les quatre véhicules, fournis par EUAM, qui permettront une présence plus ample et une réponse plus rapide. (Crédits: EUAM Ukraine)
La mission européenne de conseil en Ukraine (EUAM) fait ses premiers pas. La station de police de Sambir, dans la région de Lviv, a été officiellement ouverte le passé 9 juin. Les 147 policiers qui la composent ont été formés par EUAM Ukraine. Les standards d’opération ont été améliorés et les descriptions de postes modernisées pour une meilleure réponse des agents locaux aux appels d’urgence au 102. Il s’agit d’un projet pilote pour l’introduction de nouvelles formes et méthodes de travail visant la mise en place d’une réponse efficace de la Police ukrainienne. Les patrouilles locales ont été déployées dans tous les secteurs de la ville.
Kapi/Izvor (Serbie/Kosovo). Mise en place de nouveaux points de passage de frontières
Serbes, Kosovars et Européens lors de la visite a Kapi. (Crédits: EULEX Kosovo)
Deux nouveaux points intermédiaires de passage de frontière sont prévus à Kapi (dans le sud) et Ivor (nord) du Kosovo. Leur usage est uniquement prévu pour le trafic frontalier local afin de faciliter les besoins de la communauté locale. Bernd Thran, responsable de l’équipe de Gestion de frontière de l’Union européenne, et les experts d’Eulex Kosovo, ont visité les deux sites avec leurs homologues de Belgrade et Prestina. « Ceci est à la base du dialogue et de l’accord IBM (gestion intégrée des frontières), qui se révèle être devenu un succès », a conclu Bernd Thran. Ces visites des 9 et 10 juin ont permis d’accorder les localisations exactes des nouveaux points de passage de frontière et de discuter des prochaines étapes, notamment l’expropriation des terres et la construction elle même. L’accord signé par les deux parties prévoit que les deux nouveaux centres soient opérationnels en 2016, au plus tard.
Jericho (Palestine). Les Palestiniens prêts pour contrôler la frontière à Rafah
Européens et Palestiniens ont mis fin au programme de formation préparant l’Autorité palestinienne à reprendre le contrôle du point de passage de Rafah. La cérémonie de clôture, célébrée le 17 juin, a réuni les membres de la mission d’assistance aux frontières EUBAM- Rafah et leurs homologues palestiniens. Pendant huit mois, plusieurs dizaines de Palestiniens ont travaillé avec les Européens pour renforcer le contrôle de la frontière entre la bande de Gaza et l’Egypte. Guy Rolin, le chef par intérim d’EUBAM Rafah, a salué le dévouement des participants.
Une patrouille des gardes côtes somaliens a rapidement été envoyée à la zone du choc pour éteindre le feu à bord du pétrolier (Crédits: Eucap Nestor)
Seychelles. Simulation d’accident multiple
Les eaux au large de Mahé (Seychelles) ont été le théâtre d’un exercice de collision entre un pétrolier et un ferry, causant une fuite d’huile, un incendie à bord d’un pétrolier, le naufrage du ferry et l’abandon des navires par les équipages. Les radeaux de sauvetages étant attrapés par les courants marins et menés à la dérive loin du site de l’incident. Le but de cet exercice est de vérifier préventivement le niveau de coordination et de coopération entre les agences nationales et les partenaires internationaux dans le cas d’un incident environnemental en mer. Les capacités des agences nationales ont été confirmées, dans la mise en œuvre de leur plan d’urgence anti-pollution mais aussi de recherche et de sauvetage, et de lutte contre les incendies à bord d’un navire. Organisé par EUCAP Nestor le 19 Juin, l’exercice a regroupé le navire espagnol d’EUNAVFOR Atalanta, SPS Galicia, et plusieurs agences de sécurité des Seychelles.
Côtes somaliennes. Atalanta en mission de dépannage
Le navire marchant MV Roberto Rizzo a lancé un appel au secours le 18 juin. Des problèmes de moteurs l’obligeant à jeter l’ancre à seulement 55 miles nautiques des côtes somaliennes, la menace pirate était sérieuse. Le navire italien Libeccio, qui participe à l’opération EUNAVFOR Atalanta, a répondu à l’appel. Des mécanos militaires ont été hélitreuillés pour réparer les moteurs.
Avant l’événement, les étudiants ont effectué un exercice au cours duquel ils ont démontré les compétences qu’ils ont acquises au cours de leur formation. (Crédits: EUTM Somalie)
Mogadiscio (Somalie). Nouveau cycle de formations à EUTM Somalie : formateurs et commandants
Pour la première fois depuis sa création, la mission EUTM Somalie a mené en 2015 une formation de formateurs et une formation pour des commandants de compagnie. Environ 20 officiers de chaque formation ont ainsi passé trois mois au camp d’entraînement somalien Jazeera. Tactiques et techniques de commandement et formation ont été introduites par des cours théoriques et mis en pratiques lors d’exercices réels. Les cours ont été planifiés, organisés et menés par l’EUTM Somalie, en coordination avec l’armée nationale somalienne, l’AMISOM, et ONUSOM. Une cérémonie de remise de diplômes a eu lieu le 25 juin à Mogadiscio.
Koulikoro (Mali). Priorité à la formation des officiers
Au camp d’entrainement de Koulikouro, les formations se s’arrêtent pas. Pendant le mois de juin, les Européens ont entamé la deuxième phase du cours pour formateurs (TTT), qui vise à améliorer les connaissances des instructeurs de l’armée malienne. Au menu : topographie, méthodes de formation, cours de leadership … Pendant huit semaines, les étudiants du cours de TTT ont dû mettre en pratique les connaissances acquises en donnant cours aux étudiants de l’Académie militaire située dans la base de Koulikouro. À l’habituelle « formation des formateurs » s’est ajoutée le soutien à l’Ecole Militaire Inter Armes (EMIA). Depuis le 8 juin, les formateurs de EUTM Mali participent à l’instruction et à la formation des trois premiers cours impartis à l’Académie des officiers cadets au Mali.
(Leonor Hubaut)