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Diplomacy & Defense Think Tank News

EuropaCity : le projet du Triangle de Gonesse où certains voudraient créer une nouvelle ZAD

IRIS - Tue, 29/05/2018 - 14:54

Quelles sont les raisons qui suscitent l’opposition à ce projet ?

Eddy Fougier : Principalement l’artificialisation des 80 hectares de terres agricoles très fertiles , qui a déclenché une mobilisation réunissant José Bové, la FNSEA et Pierre Rabhi, ce qui assez exceptionnel, mais au-delà, la contestation est surtout le fait des fédérations de commerçants qui craignent la désaffection du centre-ville au profit des commerces implantés sur le site Europcity. Les riverains n’y sont pas opposés, ils manifestent plutôt un certain intérêt pour cet investissement potentiellement créateurs d’activités et d’emplois.
A l’heure actuelle, ce site est une zone en friche, et la commune pourrait logiquement bénéficier d’importantes retombées économiques.

Europacity s’inscrit-il dans les « projets inutiles et controversés » de type Notre Dame des Landes ou encore le site de Bure qui prévoit l’enfouissement des déchets nucléaires ?

Contrairement à ce que laissent entendre certains opposants, ce projet ne réunit pas les caractéristiques ni les conditions pour susciter une mobilisation d’ampleur. En dehors de l’opposition des agriculteurs soutenus par des écologistes “venus de Paris” et des commerçants qui s’inquiètent pour des raisons économiques justifiant éventuellement une compensation, ce complexe ne représente pas d’enjeux politiques et sociétaux concrets. Au contraire, ce projet représente peu d’inconvénients au regard des bénéfices qu’il peut apporter. Par ailleurs, pour qu’une mobilisation prenne forme, il faut qu’elle se manifeste sur des lieux que les opposants vont pouvoir occuper sur le long terme. Non seulement la géographie du site ne le permet pas, mais de plus, ces terres sont actuellement exploitées par des agriculteurs. On voit mal comment une « ZAD » pourrait prendre forme…

Le site a donc toutes les chances de voir le jour, même si une bataille juridique a été lancée ?

Cette bataille est un procédé classique de ralentissement des projets contestés. Mais il est peu probable qu’un tel investissement – c’est le plus gros investissement privé en France depuis Disneyland- échoue. Au contraire, c’est un projet « post-Notre-Dame-des-Landes », dans la mesure où le groupe Auchan et l’investisseur Wenda ont parfaitement pris en compte les impératifs locaux d’acceptabilité sociale de leur projet. Ils ont « coché toutes les cases » en organisant des présentations et des consultations auprès des différentes parties prenantes. Même si des éléments imprévisibles peuvent toujours se produire, le projet en lui-même n’est pas foncièrement clivant. C’est plutôt un projet « tiède » qui n’offre pas d’effet de levier pour une réelle contestation.

« Le foot va-t-il exploser ? » – 3 questions à Richard Bouigue et Pierre Rondeau

IRIS - Tue, 29/05/2018 - 14:53

Richard Bouigue est Premier adjoint à la mairie de Paris 12e et responsable du pôle Sport à la fondation Jean-Jaurès. Pierre Rondeau est économiste du sport et professeur à la Sports Management School. Ils répondent à mes questions à l’occasion de la parution de l’ouvrage, « Le foot va-t-il exploser ?  Pour une régulation du système économique du football », aux éditions de l’aube.

Y a-t-il trop d’argent dans le football ?

Le marché du football est un secteur en pleine croissance, qui draine beaucoup d’argent. C’est indéniable. Depuis le début des années 2000, la croissance annuelle moyenne du budget des 98 clubs du big-five (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne, France) est de 9%. La masse salariale a quant à elle augmenté de 450% entre 1996 et 2016. Les dépenses en matière de transfert ont également considérablement crû, passant de 1 million d’euros, dans les années 1970, pour la superstar Johan Cruyff, de l’Ajax d’Amsterdam au FC Barcelone, à 222 millions d’euros cet été pour Neymar, du Barca au Paris Saint-Germain.

La première question qui se pose est de savoir si cette évolution exponentielle est saine et durable, ou si elle traduit un grossissement incontrôlable d’une bulle jusqu’à son éclatement. La plupart des spécialistes et des observateurs, satisfaits de la toute-puissance du football, rappellent que son économie est pérenne, que ce sport attire de plus en plus de monde et que les diffuseurs paient de plus en plus cher les droits télévisuels à destination des clubs. Pour la ligue 1 française, les droits sont ainsi passés de 800 000 € par an dans les années 1980, à 748 millions d’€ aujourd’hui (et on annonce le milliard dès 2021). Ne craignez donc rien, tout va très bien dans le meilleur des mondes. Sauf que, et c’est l’objet de notre livre, quand bien même l’argent afflue dans le foot, quand bien même les clubs bénéficient d’une économie florissante et d’un assainissement des comptes certain, nous nous inquiétons des conséquences externes, des défaillances et des inégalités créées par ce système et des risques systémiques. En effet, l’argent est finalement accaparé par une petite caste particulière de joueurs et de clubs. À titre d’exemple, en France, les 10% des joueurs les plus riches touchent 48% de l’ensemble des salaires versés. L’intensité compétitive et l’équité sportive ont disparu, le suspense a été annihilé, qu’il s’agisse des compétitions européennes ou des compétitions nationales, le classement est quasiment déjà couru d’avance. Il y a en somme moins d’intérêt à regarder le football tant la glorieuse incertitude du sport tend à disparaître.

La deuxième question qui se pose est celle de la télédépendance du football. Or, si l’argent est grandement dépendant des droits de diffusion payés par les chaînes de télévision, que se passera-t-il si ces dernières ne font plus l’audience escomptée et qu’elles n’ont plus intérêt à payer autant pour du foot ? Le risque est grand, d’autant plus que certains clubs sont dépendants à 60% de ces droits télévisuels.

La troisième question qui se pose est celle de la pérennité d’un système qui génère beaucoup d’argent, mais aussi de fortes inégalités salariales ainsi qu’une incroyable précarité, souvent peu évoquée. D’après l’UNFP, le principal syndicat des joueurs dans l’hexagone, le taux de chômage moyen dans le football français est de 15% depuis quatre ans, alors qu’il est passé sous la barre des 10% en France en 2017. Le syndicat estime en outre que 25% des joueurs commencent la saison, chaque année, sans avoir signé le moindre contrat professionnel. En France, où la situation est en comparaison moins difficile, on estime qu’un aspirant footballeur sur six deviendra professionnel, ce qui en laisse cinq sur le bas-côté, sans aucune formation qualifiante ni diplômante et avec le goût amer d’avoir échoué à réaliser leur rêve. La situation des entraîneurs n’est pas plus enviable. Si quelques-uns, très connus, sont bien payés, la plupart ne le sont pas et la durée de vie moyenne d’un entraîneur à la tête d’une équipe professionnelle, en Europe, n’est que de dix-sept mois…

C’est pourquoi nous voulons tout mettre en œuvre pour réguler le football, renforcer la protection des joueurs, entraîneurs et formateurs. L’argent n’a pas à être diabolisé, le marché n’a pas à être contraint. Au contraire il faut, en bonne intelligence, profiter de l’hypercroissance du football et assurer sa pérennité.

Pourquoi le football est-il davantage critiqué que d’autres sports (Formule 1, golf, etc.) ou milieux culturels (cinéma, etc.), qui attirent pourtant également énormément d’argent ?

Le football continuera à être méprisé et jugé par les classes dominantes, par les classes d’influence. Du fait de son origine populaire et sa population, les clichés et les stéréotypes sociaux ne s’arrêteront pas de véhiculer. Pratiqué et célébré par les classes précaires, les classes pauvres, les classes laborieuses, suivi par des millions de fans et de supporters, il serait victime d’une forme de racisme social.

L’élite verra toujours d’un mauvais œil cette pratique sportive et jugera incompréhensible l’intérêt accordé au sport numéro 1 sur Terre. Le sociologue Stéphane Beaud, dans son livre Traitres à la Nation ! présente très bien ce phénomène. Lors d’un séminaire à l’École normale supérieure, il a subi les foudres de certains de ses collègues, qui s’étonnaient qu’un « intellectuel tel que lui » s’intéresse à un sport aussi méprisable et vil, pratiqué par des « abrutis milliardaires ».

L’un des auteurs du livre Le foot va-t-il exploser ?, Pierre Rondeau, a lui-même été victime des moqueries de ses pairs, à l’université, qui s’étonnaient de son intérêt porté aux phénomènes entourant le ballon rond. « Le football n’est pas un objet académiquement acceptable » lui a-t-on répété. Pourtant, le football est un sport, un business, une religion, un métafait social planétaire auquel il est impossible de ne pas s’intéresser.

Ces éléments expliquent en partie les critiques adressées à ce sport, alors même que d’autres, comme la Formule 1 ou le golf, drainent autant de richesses. Le football, et les footballeurs, parce que sport numéro 1, sera toujours victime de moqueries et d’un mépris de classe.

Cela est surement dû à son caractère profondément désuet. C’est un sport facile à pratiquer, facile à comprendre : n’importe qui, avec un ballon, peut jouer au foot ; n’importe qui, devant sa télévision, peut comprendre les règles. À l’inverse, piloter une voiture de formule 1, pratiquer le golf ou jouer dans un blockbuster hollywoodien, demanderait peut-être un peu plus de travail et la rémunération des agents s’en trouverait ainsi légitimée pour l’opinion publique. Ce n’est pas donné à tout le monde, alors que le football, finalement, c’est facile.

Qu’est-ce que la taxe coubertobin ?

Nous proposons la mise en place, à échelle internationale, de la contribution Coubertobin, en référence au baron Pierre de Coubertin, militant de l’équité sportive internationale, et de l’économiste James Tobin, fondateur d’un impôt sur les opérations de change internationales. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une taxe, mais plutôt d’une contribution qui consisterait en une part de 1% sur toutes les indemnités de transferts. Cela permettrait d’abonder un fonds de développement qui financera la mise en œuvre effective de programmes scolaires et de formations professionnelles ainsi que d’un fonds dédié à la reconversion des sportifs.

L’idée d’un tel prélèvement est gagnante-gagnante. Il agirait comme un outil désincitatif pour les clubs acheteurs refusant de payer une somme supplémentaire sur les joueurs, et comme un outil de financement pour la protection sociale des sportifs, en cas de paiement.

Nous préconisons de rendre la contribution dégressive en fonction de l’âge des footballeurs. Plus ils sont achetés jeunes, plus le taux augmenterait jusqu’à atteindre un montant confiscatoire dans le seul but de limiter « la fuite des muscles » et de veiller à la formation et au développement des jeunes joueurs.

Nous voulons imposer un grand débat national et international. Le football, sport le plus populaire du monde, ne peut pas se laisser prendre par l’idéologie mortifère de l’égoïsme libéral. En imposant une telle contribution, nous allons plus loin que la simple volonté de contrôler juridiquement le marché, en internalisant toutes les externalités négatives.

 

Los riesgos del español en Brasil

Real Instituto Elcano - Tue, 29/05/2018 - 13:27
Comentario Elcano 30/2018 - 28/5/2018
Ángel Badillo y Carlos Malamud

La historia de la reciente debilidad del español en Brasil refuerza una conclusión inevitable: la necesidad de apoyarse en la cooperación multilateral panhispánica para defender nuestro recurso cultural más preciado.

Italie : l’Europe contre la volonté des peuples ?

Fondapol / Général - Tue, 29/05/2018 - 12:00

ITALIE : L’EUROPE CONTRE LA VOLONTÉ DES PEUPLES ? Le 27 mai, le président italien a refusé la proposition d’un gouvernement de coalition eurosceptique formé par Guiseppe Conte poussant ce dernier à refuser la fonction de chef de gouvernement. À la demande de Sergio Mattarella, Carlo Cottarelli, ancien haut fonctionnaire du FMI est appelé à former un […]

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La Palestine est-elle une cause perdue ?

IRIS - Tue, 29/05/2018 - 11:07

Gaza subit un blocus depuis plus de dix ans. Enclavée entre l’État d’Israël, la mer Méditerranée et l’Égypte, cette bande du territoire palestinien concentre une densité de population parmi les plus élevées au monde, avec 1,5 million d’habitants sur 45 kilomètres de long et 5 à 12 km de large, soit une superficie totale de 365 kilomètres carrés. Aux prises avec une situation humanitaire dramatique, sa population se mobilise depuis le 30 mars. Dans l’indifférence générale de la communauté internationale des États. À moins que la Cour pénale internationale ne soit à l’origine d’un sursaut d’un semblant de conscience mondiale.

Destinée à commémorer la « Nakba » (« grande catastrophe » de l’exode des réfugiés palestiniens en 1948), des dizaines de milliers de Palestiniens se sont mobilisés le long de la bande de Gaza. Leur manifestation fondamentalement pacifique a été réprimée dans le sang par l’armée israélienne qui continue à revendiquer une éthique d’exception…

UN NOUVEAU MASSACRE DE PALESTINIENS

C’est dans ce conteste que le 14 mai dernier, jour de l’implantation illégale de l’ambassade américaine à Jérusalem et veille de la triste commémoration de la Nakba, les soldats israéliens ont tiré à balles réelles sur des manifestants à Gaza, faisant des dizaines de morts (62 officiellement) et plus de 1 300 blessés (destinés à devenir des handicapés à vie). Des Palestiniens qui manifestaient pour leurs droits et leur liberté, le long de la bande de Gaza, seuls face au recours à la violence disproportionnée des snipers de l’armée israélienne.

Il revenait à l’ONU de pouvoir mener une enquête indépendante sur ces faits. Ce à quoi le gouvernement de droite et d’extrême droite dirigé par Benjamin Netanyahou, via le soutien de l’administration Trump, a pu à nouveau s’opposer. Une position de force renforcée par l’absence de « solidarité arabe ». Le sentiment palestinien est exprimé par cette interpellation populaire : « Wen Al-‘Arab ? » (« où sont les Arabes ? »)…

LE SENTIMENT D’IMPUNITÉ D’ISRAËL

Le massacre est intervenu dans un contexte où le gouvernement de droite et d’extrême droite israélien jouit d’un sentiment d’impunité et de toute puissance, fort de l’appui inconditionnel des États-Unis et de la passivité de la communauté internationale (y compris des pays arabes en général, et de l’Arabie saoudite en particulier, devenue l’alliée objective d’Israël dans la région). Le gouvernement nationaliste dirigé par Benjamin Néthanyaou a rejeté les appels internationaux à une enquête indépendante sur ces faits et le recours à la violence armée contre des manifestants pacifiques. Le cynisme du Premier ministre israélien l’a conduit à féliciter son armée. Un cynisme indigne d’un responsable d’un État de droit démocratique digne de ce nom.

Les Palestiniens sont-ils condamnés à l’injustice ? Le 22 mai dernier, le ministre palestinien des affaires étrangères, Riyad Al-Maliki, a officiellement référé à la Cour Pénale Internationale (CPI) les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, dont l’apartheid, commis par « le gouvernement d’Israël ou ses agents. » Il a ainsi appelé la procureure de la CPI, la Gambienne Fatou Bensouda, d’ouvrir une enquête de manière « immédiate ». S’adressant à des journalistes à La Haye, Riyad Al-Maliki a expliqué avoir « pris cette mesure en raison de l’intensification de la fréquence et de la gravité des crimes commis contre notre peuple, y compris l’expansion des colonies, l’accaparement des terres et l’exploitation illégale de nos ressources nationales, ainsi que le ciblage brutal et calculé de manifestants non armés, en particulier dans la bande de Gaza. »

LE RECOURS À LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

Cette saisine de la CPI est intervenue quelques jours après celle de l’ONG Reporters Sans Frontières (RSF), qui vise « la perpétration de crimes de guerre commis par l’armée israélienne contre des journalistes palestiniens. » L’organisation explique avoir saisi la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, sur le fondement de l’article 15 du statut de Rome, qui stipule que la procureure peut ouvrir une enquête si des faits qui lui sont transmis relèvent de la compétence de la cour. Dans la requête transmise à Madame Bensouda, Reporters Sans Frontières mentionne des tirs directs de snipers israéliens sur des journalistes palestiniens.

Pour Christophe Deloire, secrétaire général de RSF : « Les autorités israéliennes ne pouvaient ignorer la présence, parmi les civils manifestant, de journalistes. Elles ont manqué à leur élémentaire devoir de précaution et de distinction en visant à balles réelles ces personnes protégées. Ces violations délibérées et répétées du droit humanitaire international sont constitutives de crimes de guerre. En saisissant la Cour Pénale Internationale, RSF appelle les autorités israéliennes au strict respect du droit international. »

Certes, l’État israélien n’est pas membre de la Cour. En conséquence, pour que ses actes criminels puissent être portés devant la CPI, l’adoption d’une Résolution du Conseil de Sécurité des Nations unies est théoriquement nécessaire. Il s’agit en effet du seul organe habilité à rendre le statut de la CPI applicable à un État non-partie, comme ce fut le cas pour le Soudan et la Libye. Or, il est évident que le véto américain écarte d’emblée une telle hypothèse.

Afin de contourner cet obstacle, l’Autorité palestinienne avait déjà déposé une requête en son nom propre pour qu’une enquête soit ouverte à propos des « événements » de 2009 à Gaza, requête rejetée à l’époque par le procureur de la CPI, au motif que la Palestine ne serait pas un « État » capable de faire une telle demande auprès de la Cour. Toutefois, La CPI est compétente depuis que l’Autorité palestinienne y a adhéré fin 2014, à la suite de l’échec d’une négociation pour obtenir des Nations unies un calendrier du retrait israélien des territoires occupés de Cisjordanie. Quelques jours après, et à la demande de Ramallah, la procureure avait ouvert un « examen préliminaire ». Mais cette première étape n’a jamais abouti. Jusqu’ici, Fatou Bensouda n’a pas osé ouvrir une quelconque enquête.

Pourtant, lors de la récente tragédie, la procureure de la CPI a appelé à mettre fin à l’escalade de la violence à la frontière de Gaza, et affirmé que l’utilisation de tirs réels par Israël afin de disperser les protestations et l’utilisation de civils par le groupe terroriste palestinien du Hamas dans les affrontements avec les soldats israéliens pourraient être constitutives de crimes violant le droit international.

Une analyse que partage Francis Perrin, vice-président d’Amnesty International France : « Très clairement, il y a eu une nouvelle fois un usage excessif de la force de la part de l’armée israélienne à qui l’on donne des ordres illégaux consistant à tirer sur des manifestants qui sont non-armés (…).

Cette assimilation [de Benyamin Netanyahou qui assimile chaque manifestant à un représentant du Hamas, considéré comme une organisation terroriste par Israël] permet aux autorités israéliennes de se dédouaner complètement de toutes les graves violations des droits humains commises ce lundi et depuis des semaines », s’est-il insurgé, en insistant sur le fait que « plusieurs de ces violations peuvent probablement s’apparenter à des crimes de guerre au regard des conventions de Genève. »

En attendant une hypothétique issue judiciaire à ce dernier épisode du conflit israélo-palestinien, la résolution de celui-ci suppose un accord politique global. Si l’assertion relève de l’utopie aujourd’hui, une chose est sûre : le statu quo est moralement et politiquement intenable.

“Les patients peuvent aider à soigner le soin”.

Institut Montaigne - Tue, 29/05/2018 - 09:38

Avec plus de 15 millions de malades chroniques, quelle place notre système de santé fait-il au patient ? Quelle expertise complémentaire les malades chroniques peuvent-ils apporter dans les parcours de soins ? Comment faire de l’expérience douloureuse d’une maladie un atout et une expertise ? Entretien avec Catherine Tourette-Turgis, Professeur en Sciences de l'Éducation et fondatrice de l’Université des Patients…

“Les patients peuvent aider à soigner le soin”. Entretien avec Catherine Tourette-Turgis

Institut Montaigne - Tue, 29/05/2018 - 09:38
“Les patients peuvent aider à soigner le soin”. Entretien avec Catherine Tourette-Turgis Institut Montaigne mar 29/05/2018 - 09:38 Avec plus de 15 millions de malades chroniques, quelle place notre système de santé fait-il au patient ? Quelle expertise complémentaire les malades chroniques peuvent-ils apporter dans les parcours de soins ?

»Kein Blick in die Glaskugel«

SWP - Tue, 29/05/2018 - 00:00

 

 

Prof. Dr. Norbert Lammert: „Keine Gründe, sich vom westlichen Projekt loszusagen“

Konrad Adenauer Stiftung - Tue, 29/05/2018 - 00:00
Der Vorsitzende der Konrad-Adenauer-Stiftung sprach beim Global Solutions Summit 2018 über die Verantwortung der G7, über Demokratie und Rechtsstaatlichkeit.

Colombie : paradoxes de la paix et élection présidentielle

IRIS - Mon, 28/05/2018 - 18:50

La paix, si l’on en croit la présentation médiatique internationale, aurait été au cœur de la campagne présidentielle colombienne, dimanche 27 mai. La paix, c’est-à-dire l’accord signé le 26 septembre 2016 entre le président sortant, Juan Manuel Santos, et la guérilla des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie). Il convient de mettre quelques bémols à cette approche.

La paix avec les FARC n’a pas été l’enjeu principal de l’élection. Les candidats ont parlé de beaucoup de choses, de fiscalité, d’éducation, de services de santé, de soutien aux agriculteurs …, et du Venezuela. Mais assez peu des accords de paix. Quant aux FARC, elles avaient dans un premier temps envisagé de participer aux présidentielles. Avant de renoncer. Rodrigo Londono, « Timochenko », secrétaire général du part héritier de la guérilla, la Force alternative révolutionnaire du commun, contesté, parfois violemment, tout au long de la campagne des parlementaires du 11 mars dernier, a fait un accident cardiaque. Il s’est retiré pour raisons de santé. Et n’a pas été remplacé. Les FARC ont obtenu un peu moins de 0,5% des suffrages exprimés aux législatives.

Le regard sur les FARC et les accords de paix, il est vrai, n’est pas le même à Bogota et à Genève. La « communauté internationale », les grands de ce monde, en mal de processus de paix abouti, d’Afghanistan au Sahel, ont applaudi à tout rompre au lendemain de la signature des accords signés par les FARC avec les autorités colombiennes. L’accord, on le sait, a été soit boudé, soit rejeté par une majorité des électeurs colombiens le 2 octobre 2016. 50,5% de non, et plus de 62% d’abstentionnistes. Il a fallu comme pour le Traité européen une session de rattrapage parlementaire pour remettre sur rail un compromis rejeté par le suffrage direct.

Pour les Colombiens des villes, pour les Colombiens les plus aisés, les FARC sont un groupe terroriste délinquant qui devait être traité comme tel. Ils rejettent le principe même des accords et toute augmentation des impôts visant à construire une vraie paix consensuelle. Les Colombiens de la gauche parlementaire considèrent que leurs échecs électoraux successifs doivent beaucoup à la perpétuation des FARC et du conflit intérieur. Les uns et les autres savent aussi que les facteurs de violence en Colombie vont bien au-delà des FARC. Toutes sortes de groupes armés restent sur le pied de guerre dans les périphéries du pays. Politisés comme l’ELN ou l’EPL, ou groupes d’intérêts délinquants, qualifiés pour faire simple de bandes criminelles (Bacrims).

Le sujet, donc, d’un point de vue colombien, celui des acteurs politiques en présence, a été au mieux contourné pendant la campagne.  Le candidat de droite, Ivan Duque, n’avait pas à traiter un sujet qui de son point de vue relève de la justice ordinaire et de la police. Le candidat de gauche a préféré centrer sa campagne sur l’égalité et la solidarité, garants selon lui de paix sociale. Implicitement l’un, Ivan Duque, de fait remet en question la philosophie des accords de paix. Alors que l’autre, soucieux de paix sociale ne les remet pas en cause.

Ivan Duque est arrivé en tête avec une avance confortable, mais insuffisante, 39% des suffrages exprimés. Gustavo Petro, 25% des suffrages exprimés s’est difficilement qualifié pour le deuxième tour. La victoire de l’un ou de l’autre aura nécessairement un effet destructeur ou consolidateur de paix intérieure. Alors que les accords sont déjà appliqués de façon aléatoire. Prix Nobel de la paix, le président Santos a laissé filer l’application des accords au fil des résistances de sa base sociale et de la conjoncture électorale. L’un des signataires des accords, au nom des FARC, Jesus Santrich, a été emprisonné en attente d’extradition pour trafic de stupéfiants à la demande des États-Unis. Relâché après une grève de la faim, sa situation judiciaire reste précaire. Les combattants des FARC, démobilisés et identifiés, survivent dans des camps sans perspectives claires de reconversion et d’intégration. Certains d’entre eux ont été assassinés. Tout comme des dizaines de syndicalistes et responsables de la société civile, mobilisés par l’application effective des accords de paix.

La victoire possible du candidat de droite pourrait accentuer ces évolutions. Protégé de l’ex-président Uribe, partisan du tout répressif, Ivan Duque, en remettant en cause l’esprit des Accords de paix, comme il l’a indiqué, signerait la reprise d’un cycle de violences. Déjà, environ 20% des anciens combattants des FARC ont repris du service, selon une logique que l’on avait constatée en Amérique centrale à la fin des conflits intérieurs, dans des groupes délinquants. Certains d’entre eux ont beaucoup fait parler d’eux sur les confins frontaliers de la Colombie et de l’Équateur. Les militaires de carrière participent par centaines à la guerre civile du Yémen, dans le camp des Émirats arabes unis, recrutés par l’intermédiaire de sociétés privées de sécurité nord-américaines.

Les 30 et 31 mai prochains, le président Santos sera à Paris et à Bruxelles. Pour acter le point de départ d’une étape nouvelle pour la Colombie, loin des Accords de paix. Le 30 mai, il signera l’acte d’adhésion de son pays à l’OCDE. Et le 31, celui de l’accession de la Colombie au statut de partenaire global de l’OTAN.

 

« Il n’y a pas un, mais des mondes arabes »

IRIS - Mon, 28/05/2018 - 18:42

Les Etats-Unis ont ouvert, le 14 mai, leur ambassade à Jérusalem. Quel signal cette décision américaine envoie-t-elle à la région?

Nous savons que le statut de Jérusalem est extrêmement délicat pour les trois grandes religions monothéistes. En prenant cette décision unilatérale, le président des Etats-Unis Donald Trump foule totalement au pied le droit international et toute idée de multilatéralisme. Cette décision exprime la volonté du plus fort, au mépris des Palestiniens, ceux-ci étant par ailleurs incapables de s’entendre au vu de la désunion qui existe entre l’autorité palestinienne et le Hamas. Cette décision de choisir Jérusalem comme capitale d’Israël par les Etats-Unis est à mettre en corrélation avec l’avancée irrépressible du mouvement de colonisation des Israéliens sur des terres palestiniennes, mouvement qui rend de plus en plus difficile les perspectives de la création d’un État palestinien souverain et viable.

Autre dossier d’actualité, celui du retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien. Quelles peuvent en être les répercussions?

M. Trump suit une logique similaire: il se contrefout du droit international, de ce qui régit difficilement les accords entre les différents états constituant l’échiquier international. La seule chose que je puisse souhaiter, c’est que les autres États qui avaient signé l’accord avec les Iraniens trouvent, dans les meilleurs délais, des solutions de contre-feu par rapport à la décision de M. Trump. Il n’y a aucune raison à ce que nous acceptions les décisions unilatérales de M. Trump. Si nous n’y parvenons pas, nous, les Européens, avec les Chinois, avec les Russes, et avec bien d’autres, alors les règles du droit international se dissoudront pour quelque temps et seul comptera la loi du plus fort.

Y a-t-il, suite à ces deux décisions, des risques d’embrasement dans la région?

Nous avons vu, il y a quelques semaines, des bombardements iraniens sur des positions israéliennes, mais surtout des bombardements israéliens sur des positions iraniennes en Syrie. Je ne crois pas que cela va se généraliser, car Israéliens et Iraniens et leurs alliés savent jusqu’où ne pas aller. Je n’ai pas de certitude absolue, car la situation est tellement délétère et volatile que tout peut déraper très rapidement. Malheureusement, il y a quelques pousses au crime, Donald Trump étant le premier d’entre eux. À moins que ce ne soit Benjamin Netanyahu. Pour le coup, Netanyahu et Trump sont strictement sur la même longueur d’ondes sur les deux dossiers que l’on vient d’évoquer. Je ne sais pas quel est celui qui conseille l’autre.

Quel est le rôle de l’Iran aujourd’hui?

L’Iran est et restera incontournable, car c’est un grand pays de plus de 80 millions d’habitants, qui a une longue histoire, qui a une place géostratégique d’une importance considérable, et qui a parfaitement conscience de son rôle et de sa puissance potentielle. Pour autant, est-ce une menace? De mon point de vue, non. C’est un pays qui veut étendre son influence, mais ce n’est pas un pays qui veut exporter son régime. Beaucoup d’analystes sont encore à raisonner sur l’Iran comme ils auraient pu le faire au début de la révolution iranienne. Il est vrai que Khomeini, en son temps, avait eu des discours enflammés en disant qu’il voulait exporter la révolution islamique dans toute la région. Mais il est mort depuis longtemps. En réalité, il n’y a plus de volonté d’exportation de la révolution islamique depuis 1980, très précisément depuis la tentative d’invasion de l’Iran par l’Irak.

Le 12 mai, les élections législatives en Irak ont sanctionné le parti du Premier ministre sortant Haider al-Abadi, donnant la victoire à deux nouvelles alliances. Qu’en déduisez-vous?

L’Irak est une société très décomposée, atomisée et, malheureusement, les citoyens n’ont plus guère confiance en une bonne partie des dirigeants. Ceux qui ont voté ont visiblement reporté leur vote vers des partis qui n’ont pas eu de responsabilité gouvernementale directe au cours des dernières années. Ce qui est très intéressant, c’est l’alliance entre le vainqueur Moqtada Al-Sadr et le parti communiste irakien, qui indique la volonté non seulement de favoriser les plus pauvres, mais aussi de transcender les divisions communautaires et religieuses qui existent en Irak. S’ils parviennent à cela, ce sera une bonne nouvelle.

Qui est Moqtada Al-Sadr, qui sort victorieux du scrutin?

Moktada Al-Sadr est un chiite assumé, à la fois très proche de l’Iran pour des raisons théologiques, mais qui incarne aussi le nationalisme irakien. Ce n’est pas quelqu’un qui fera allégeance à l’Iran. C’est l’homme de 44 ans qui a toujours lutté contre l’occupation des Etats-Unis et qui se pare d’une sagesse théologique, ce qui compte beaucoup dans la perception des citoyens irakiens. C’est aussi un homme qui est issu d’une très grande famille. Son père était un opposant qui avait été assassiné par Saddam Hussein.

Le titre de votre livre fait référence aux « mondes arabes », au pluriel. Pourquoi?

Par commodité de langage, les uns et les autres parlent encore du monde arabe, mais c’est un mythe. Le monde arabe n’existe plus. Je reconnais qu’il y a un sentiment d’arabité qui traverse les 21 pays de la Ligue des États arabes. Mais ce sentiment d’arabité est très subjectif et difficile à définir scientifiquement. D’un point de vue géopolitique, il n’y a pas de monde arabe au singulier, il y a des mondes arabes. Entre le pays le plus riche de la Ligue arabe, le Qatar, et le plus pauvre, le Yémen, l’hétérogénéité de développement est abyssale. Deuxième chose, il n’y a pas de logique de solidarité entre ces pays. C’est la règle du chacun pour soi. En réalité, chaque état constituant les mondes arabes défend ses propres intérêts nationaux. On voit bien que la Ligue des États arabes, qui a été constituée en 1945, n’est pas un organisme susceptible de défendre les intérêts des États arabes. On le voit dans les jeux d’alliances et de contre-alliances. Par exemple, l’Arabie saoudite impose un blocus au Qatar, et pourtant ce sont deux états voisins où la religion majoritaire est identique. Je pourrais évoquer la guerre de l’Arabie saoudite contre le Yémen, les rivalités vives entre le Maroc et l’Algérie. Nous avons encore en tête de vieux schémas qui datent de la période qui suit les indépendances arabes, dans les années 50 et 60. À ce moment-là de l’histoire, il y avait, en effet, une profonde aspiration à l’unité du monde arabe, portée par le parti Baas et par le chef d’état égyptien Gamal Abdel Nasser, qui incarnait cette unité. Mais Nasser est mort en 1970. Ceux qui continuent à parler de monde arabe au singulier le font par habitude ou par incompétence.

Vous dites aussi que l’opposition systématique entre Sunnites et Chiites est obsolète?

Le facteur religieux n’est pas le facteur explicatif de tous les maux de la région, même s’il ne faut pas le négliger. L’opposition entre l’Arabie saoudite et l’Iran est présentée comme l’opposition irréductible entre Sunnisme et Chiisme. Je n’y crois pas une seconde. Je pense qu’il y a des oppositions fortes car l’Iran veut s’affirmer comme une puissance régionale influente et les Saoudiens veulent faire la même chose. L’opposition sunnisme contre chiisme est instrumentalisée au service d’intérêts géopolitiques. C’est un vernis que l’on met sur des questions politiques classiques. Regardez, il y a une crise aiguë entre l’Arabie saoudite et le Qatar. Pourtant, ce sont deux pays sunnites et wahhabites. Par contre, entre le Hezbollah libanais chiite et le Hamas palestinien sunnite les relations sont très bonnes. On pourrait multiplier les exemples.

Quel est le rôle de l’Occident dans les équilibres de la région?

Il faut prendre en compte la totalité des facteurs: religieux, économiques, politiques et extérieurs. La Syrie est un exemple absolument tragique de l’influence néfaste des puissances extérieures, notamment occidentales. La politique des Occidentaux a concouru à aggraver la crise syrienne. Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne se sont mis, dans un premier temps, du côté de ce que l’on a appelé les rebelles pour virer Bachar el-Assad. Nous n’avions pas, nous, Occidentaux, me semble-t-il, à prendre parti pour l’un ou l’autre. Notre propos aurait dû se tenir à essayer de parvenir à une solution politique. Je vais plus loin. Je pense que la première puissance internationale, les Etats-Unis, a largement concouru à accroître le désordre dans la région. La guerre unilatérale de George Bush contre l’Irak à partir de 2003 a mis non seulement l’Irak, mais aussi une partie des États de la région à feu et à sang. Les décisions de Donald Trump sur Jérusalem et sur l’Iran risquent d’envenimer les tensions. J’espère que les États arabes parviendront, dans les meilleurs délais, à défendre leurs propres intérêts en fonction de leurs intérêts nationaux et non pas seulement en fonction de ceux des états occidentaux.

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Didier Billion vient de publier « Géopolitique des mondes arabes » aux éditions Eyrolles.

« 1968 : Quand l’Amérique gronde » – 3 questions à Jean-Éric Branaa

IRIS - Mon, 28/05/2018 - 16:41

Jean-Éric Branaa (https://www.branaa.fr/) est chercheur associé à l’IRIS, spécialiste des États-Unis. Maître de conférences à l’université Paris II Panthéon-Assas, il répond à mes questions à l’occasion de la parution de son dernier ouvrage « 1968, quand l’Amérique gronde », aux éditions Privat.

Pourquoi soutenez-vous le fait que Donald Trump souhaite revenir aux États Unis d’avant 1968 ?

Il nous faut nous rappeler de ce qu’ont été les États-Unis durant les années soixante : le pays n’avait pas encore atteint 200 millions d’habitants, mais 70 millions d’entre eux étaient encore quasiment des adolescents. C’est ce que l’on a appelé la génération du baby-boom, une conséquence du retour des soldats de la guerre, après une très longue absence. Les États-Unis pensaient alors s’appuyer sur cette jeunesse pour doper leur extraordinaire réussite de l’après-guerre.

Car c’était alors un pays non seulement très riche, mais qui connaissait aussi une croissance incroyable. Le pays produisait de plus en plus et s’était lancé à corps perdu dans la société de consommation de masse. On a vu de profonds changements dans la façon de vendre ou d’acheter et certains produits ont porté une symbolique forte. Ainsi, l’automobile, qui a tenu une place très particulière dans cette société. Elle est devenue un objet social, reflet de cette époque : les Américains la voulaient belle pour épater leurs amis et leurs voisins.

Cette décennie a souvent été décrite comme une société dirigée par l’acte de consommer. Les grandes surfaces se sont développées et multipliées partout, à la sortie des villes, qu’elles soient grandes ou petites, et en particulier le long des highways, ces routes qui traversent tous les États. La télévision a pris une place prépondérante dans la vie de chaque Américain : en 1968, il y avait déjà 56 millions de postes de télévision dans les foyers américains, qui étaient donc équipés à 95%. La télévision a véhiculé une vision très conservatrice de la société. Jusqu’aux années 1970, c’était un privilège d’apparaître à la télévision, plutôt réservé aux Américains caucasiens. Être blanc représentait une normalité qui n’était pas remise en question, quel que soit le type de programme (divertissement, sport, informations ou publicités).

Dans le poste, comme dans la société, il y avait un manque flagrant de diversité raciale ou de genre, absence que l’on retrouve avec la même vigueur au sein des classes sociales. La télévision s’adressait avant tout à ceux qui pouvaient s’offrir à la fois le poste et les produits qui étaient promotionnés par la publicité. Les classes sociales les plus modestes et le monde paysan ont en conséquence été délaissés et peu représentés. Les héros mis en avant étaient tous des médecins, des avocats, des journalistes et des chefs d’entreprise. Les autres professions, en particulier les métiers manuels, étaient dépeintes de manière négative ou peu reluisante, comme c’était déjà le cas avec les minorités raciales.

C’est dans ce monde qu’a grandi Donald Trump, lui qui était âgé de 22 ans en 1968. Il était donc un jeune adulte, tout comme la plupart de celles et ceux qui dirigent l’Amérique d’aujourd’hui. Leur imaginaire s’est formé autour de cette image très masculine – voire machiste – qui était projetée, avec une place très réduite pour les femmes, les minorités et les classes sociales les plus basses. C’est là qu’ils ont tous puisé leurs repères et leur construction d’adulte. Et c’est dans ce monde-là que le président américain veut effectivement revenir et ramener son pays. C’est le message subliminal, mais pourtant fort, de son slogan : « rendre à l’Amérique sa grandeur ».

Pourquoi percevez-vous la période 68-71 comme un bloc marquant la fin du siècle américain ?

Quand on évoque le siècle américain, on pense bien évidemment à Olivier Zunz et son ouvrage éponyme, au sein duquel il décrit l’attitude de ce pays qui réécrit sa propre histoire et en gomme les défauts. Depuis la fin du XIXe siècle, les élites libérales américaines ont tenté de construire une société parfaite, basée sur le capitalisme, qu’elles ont alors proposée aux autres peuples. Les Américains avaient la certitude que la classe ouvrière pouvait être détournée de la lutte des classes grâce à des salaires revus à la hausse. La société serait donc plus juste et plus prospère et cette classe ouvrière n’aspirerait qu’à un seul but, celui de devenir une classe moyenne.

La fin du XIXe siècle est un moment charnière dans l’histoire des États-Unis qui, avec la fin de la guerre hispano-américaine, jouent un plus grand rôle sur la scène internationale. Ils adoptent alors le protectionnisme pour protéger leur industrie et McKinley s’engage sur la voie de l’isolationnisme et de l’interventionnisme choisi, qui sera plus flagrant encore avec Theodore Roosevelt et son Corollaire à la doctrine de Monroe de 1904, proclamant le droit pour les États-Unis d’intervenir n’importe où en Amérique du Sud.

Le vrai tournant est bien entendu l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, qui devient la norme commune pour tous les États membres de la nouvelle institution créée trois ans plus tôt, l’Organisation des Nations unies (ONU). Mais on en est encore à un niveau politique et institutionnel, sans que les peuples ne se soient véritablement associés au processus. C’est pourtant ce qui arrive bien vite, lorsque les Américains réalisent que leur démocratie, ainsi basée sur le capitalisme, n’a pas gommé les plus criantes inégalités. Les Noirs en ont été exclus, mais aussi, les femmes, et toutes les minorités. Pire, nous dit Harrington, les Blancs eux-mêmes ont créé un sous-ensemble qu’ils ont refusé d’assumer : celui des pauvres.

Les années soixante deviennent alors un long combat de tous ces exclus pour la reconnaissance de leur situation et la fin des sixties marque la fin de ce siècle américain qui a montré ses limites et n’est plus supportable pour une grande partie de ce peuple.

La révolte étudiante est-elle aussi aux États-Unis l’image la plus marquante de l’année 68 ?

La révolte américaine est plus globale et plus profonde que les mouvements qui éclatent un peu partout dans le monde. La comparaison avec un autre pays trouve donc rapidement ses limites. Ainsi, en France, le mouvement étudiant devient l’élément central de la contestation : il est voyant, bruyant, mais également bref, principalement centré sur le mois de mai. Le mouvement étudiant américain n’est qu’une composante d’une révolution plus complexe : sur le socle d’une contestation à la guerre du Vietnam, la contestation est plus longue, mais aussi multiple, et ne cesse de se réinventer. On peut considérer que l’étincelle allumée par Samuel Harrington, qui déclenche la guerre à la pauvreté, est un élément moteur bien plus structurant. En réalité, il s’agit à chaque fois d’un même mouvement, commun à tout ce qui va survenir ensuite : le mouvement étudiant, les grèves ouvrières, la lutte pour les droits civiques, la seconde vague du féminisme, l’émergence d’un mouvement gay ou d’une conscience écologiste, la contre-culture, qui envahit tous les espaces et voit de l’art et de la vie partout et en tout.

Pour autant, le mouvement étudiant américain est fondamental, car il pose les bases politiques de tous ces bouleversements : il introduit et adapte le socialisme, ce qui semblait impossible dans un contexte de guerre froide intense. Par cela, il intensifie encore le choc de l’affrontement entre deux sociétés, qui se retrouvent dès lors dans un autre choc, celui des générations. La société « d’avant » ne comprend pas sa jeunesse ou – dit autrement – les parents ne semblent plus capables de comprendre leurs enfants. Tout va trop vite et trop loin aux yeux des plus anciens et des plus conformistes. Tout doit être réinventé aux yeux des plus jeunes : ceux-là introduisent donc le progressisme et, en donnant le pouvoir aux fleurs et à l’amour, entendent contester tous les modèles pour faire leurs propres expériences de la vie. En 1994, Bill Clinton déclarait : « si vous regardez derrière vous, vers les années 1960, et pensez qu’il y a plus de bon que de mauvais, vous êtes sans doute un démocrate. »

Les femmes ont brulé les soutiens-gorges, les gays ont gagné leurs quartiers à New York, les artistes ont libéré leur imagination, les noirs ont regagné leurs droits civiques, il y a tant à décrire dans cette Amérique en ébullition ! L’image qui est à retenir n’est pas tant celle de la révolte étudiante, de ses luttes pour l’inclusion, la liberté d’expression, ou pour réinventer la société : l’image forte est bien celle de la révolte de TOUTE sa jeunesse et de la cassure entre deux mondes, celui d’avant et celui d’après, que l’on retrouve dans toutes les strates de la société, jusqu’à la mode, le sport, la musique ou les objets du quotidien. C’était toute la jeunesse de l’Amérique qui grondait alors.

 

Les bienfaits de la donnée

Institut Montaigne - Mon, 28/05/2018 - 15:43

Faut-il encourager ou restreindre l’utilisation des données personnelles ? 

Le 25 mai 2018, le Règlement général sur la protection des données, marqueur de la volonté européenne de se distinguer de ses voisins chinois et américains concernant l’utilisation des données personnelles, est entré en vigueur. 

Ancré dans un contexte de défiance croissante des utilisateurs envers les grandes plateformes…

Les bienfaits de la donnée : le point de vue des chargés d’études

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Macron-Poutine, une voie bien étroite

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En Syrie comme sur le dossier du nucléaire iranien, Moscou n'est plus sous-estimé comme il a pu l'être par le passé. Attention toutefois à ne pas commettre l'erreur inverse en surestimant sa puissance.

Pour un président français qui vient d'entrer dans la deuxième année de son mandat, il convenait d'abord de dissiper les "ombres" laissées par la récente rencontre à Washington avec le président américain : trop de…

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Jours sombres en perspective pour la démocratie en Turquie

Fondapol / Général - Mon, 28/05/2018 - 13:08

Dominique Reynié était l’invité d’Yves Calvi dans L’info du Vrai sur Canal Plus pour analyser la situation politique en Turquie. L’émission dans son intégralité ici.

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L'Europe et la puissance

Fondation Robert Schuman / Publication - Mon, 28/05/2018 - 02:00
Les formes de la puissance Définitions philosophiques de la puissance La "puissance" peut s'opposer à la notion d'impuissance ou de faiblesse. Mais elle peut aussi se référer à la distinction classique, remontant au moins à Aristote, de la puissance et de l'acte. On peut dire que les...

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