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Institut de Relations Internationales et Stratégiques
Updated: 1 week 6 days ago

C’est une première pour un président français : pourquoi Hollande se rend à Cuba

Sun, 10/05/2015 - 16:58

Sans le rapprochement entre Cuba et les Etats-Unis, cette visite aurait-elle eu lieu ?
C’est une bonne question, mais il faut replacer cette visite dans son contexte. Ce passage à Cuba s’intègre dans un voyage aux Antilles françaises et dans les Caraïbes (ndlr : après Cuba, le chef de l’Etat ira à Haïti) où François Hollande a abordé la question de la traite négrière etpréparé avec les pays de la région la conférence sur le climat qui aura lieu en décembre à Paris.

Certes, mais rien n’imposait spécifiquement de passer par Cuba.
Tout à fait. Il s’agit probablement d’une opportunité proposée par l’entourage de François Hollande pour symboliser sa « diplomatie économique ». Opportunité qui se combinait très bien avec son agenda politique personnel, la préparation de Cop21 et surtout sa volonté d’encourager ce qui se passe entre les Etats-Unis et Cuba afin de lui donner une dimension européenne.

C’est-à-dire ?
L’Union européenne a un temps de retard dans sa politique de normalisation de ses relations avec Cuba par rapport aux Etats-Unis. Au milieu des années 90, elle avait suivi le durcissement de l’embargo décidé par Washington. Depuis le 17 décembre dernier et l’annonce du dégel par Barack Obama et Raul Castro, elle est obligée de suivre le mouvement. Mais, comme sur chaque sujet de politique étrangère, il est très compliqué de faire converger les 28. En raison des droits de l’homme, les pays nordiques sont réticents à une normalisation, tout comme les anciens pays communistes d’Europe de l’Est. En revanche, la France, l’Italie ou l’Allemagne sont en phase avec la position américaine.

Comment qualifier les relations entre la France et Cuba depuis l’arrivée au pouvoir de Fidel Castro 1959 ?
Sur le plan strictement bilatéral, elles n’ont jamais rien eu de particulier et n’ont jamais été suspendues. N’oublions pas par exemple que Fidel Castro a été reçu par François Mitterrand à Paris en 1995. Plus récemment, Nicolas Sarkozy avait nommé Jack Lang comme son représentant spécial à Cuba et les visites ministérielles se sont multipliées. Sur le plan économique, de nombreuses entreprises françaises sont aussi déjà présentes à Cuba et beaucoup de touristes s’y rendent.
Bref, il n’y a rien de bien original là-dedans puisque c’est le cas de nombreux pays à l’exception des Etats-Unis. Cette visite de François Hollande ne fait ainsi que conforter ce qui existe déjà. Mais elle est évidemment importante puisque c’est la première d’un président français en exercice dans le pays. Elle a donc une portée symbolique liée à ce qui se passe entre les Etats-Unis et Cuba et avec les autres pays de l’UE.

Accompagné de nombreux dirigeants français, François Hollande semble vouloir, sur le plan économique, placer ses pions pour profiter de la future levée de l’embargo.
Comme nous venons de le voir, la France est déjà bien présente à Cuba. Accorgère des complexes touristiques, Pernod-Ricard exporte le rhum cubain, Alcatel ou Total ont chacun des intérêts dans leur secteur et l’industrie automobile française possède des contrats avec le gouvernement. Sur le plan purement économique, il s’agit donc moins de profiter de cette future levée de l’embargo et de donner une impulsion que de préserver les acquis français.
Le jour où l’embargo sera levé -ce qui prendra encore du temps-, une déferlante américaine va évidemment arriver sur l’île, située à moins de 200 km des côtes de Floride. Pour toutes les entreprises étrangères déjà installées à Cuba, la concurrence sera rude et agressive. Autant se préparer dès maintenant.
En outre, à moyen-terme, grâce à l’élargissement du canal de Panama, Cuba, en face du Mexique, des Etats-Unis, de la Colombie et du canal, bénéficiera d’une position géographique stratégique pour le commerce maritime. Les Brésiliens se sont déjà placés sur ce créneau en construisant un port de porte-conteneurs près de La Havane.

Comme on a encore pu le voir au début de la semaine avec le voyage de François Hollande dans les monarchies sunnites du Golfe, la diplomatie économique ne se marie pas forcément bien avec les droits de l’homme. Que peut-on attendre à Cuba ? Les droits de l’homme sont en effet toujours un dossier délicat à manier. Une chose est sûre : après que Barack Obama a admis que demander la fin du régime communiste ne sert à rien, sinon à le renforcer, la France ne le fera pas. Mais il est possible qu’elle aborde des cas particuliers, de manière discrète.

Une rencontre Hollande-Fidel Castro est-elle possible ?
Quand une personnalité étrangère vient à Cuba, une rencontre avec Fidel Castro est un passage obligé, qu’elle le veuille ou non. Cette rencontre dépend aujourd’hui uniquement de la santé de Castro. Si elle a lieu, elle intéressera bien sûr la presse. Mais ce n’est pas l’essentiel du voyage, loin de là.

L’Algérie

Sat, 09/05/2015 - 16:52

Le nouvel égoïsme territorial : Quels défis pour les États ? Quels enjeux pour la cohésion nationale ?

Thu, 07/05/2015 - 18:05

Laurent Davezies est professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM), titulaire de la chaire « Économie et Développement des Territoires». Il répond à nos questions à propos de son ouvrage  récemment paru « Le nouvel égoïsme territorial » (éd. du Seuil et La République des Idées) :
– Qu’entendez-vous par « égoïsme territorial » ?
– Au vu des trois cents mouvements régionalistes existant dans le monde, faut-il selon vous refonder notre modèle d’organisation territoriale ?
– Vous parlez dans votre ouvrage de trois grandes périodes historiques. Pouvez-vous nous en dire plus ?
– Dans quelle mesure la fragmentation territoriale est-elle une boîte de Pandore ? Quels risques représentent l’accession à l’indépendance des régions qui la souhaite ?

 

Qui est Jokowi ?

Thu, 07/05/2015 - 17:40

L’Indonésie est sous le feu des projecteurs. C’est rarement le cas. Il faut même remonter au terrible tsunami au large de Sumatra de décembre 2004 pour voir ce pays trop souvent ignoré figurer en bonne place dans l’actualité internationale. En marge des condamnations à mort (et exécutions dans plusieurs cas) de ressortissants étrangers (dont le Français Serge Atlaoui) jugés coupables par la justice indonésienne de trafics de stupéfiants, c’est le président de l’immense archipel, arrivé au pouvoir à l’automne dernier, qui est l’objet de toutes les attentions. Mais qui est donc ce Joko Widodo, plus connu sous son surnom de Jokowi ? Septième président de la République d’Indonésie depuis l’indépendance, et surtout le cinquième depuis la chute de Suharto en 1999 et la mise en place d’un système démocratique, l’homme fort du quatrième pays le plus peuplé de la planète, plus grand pays musulman, mais aussi première puissance économique de l’ASEAN, a refusé d’accorder la grâce présidentielle aux condamnés. Derrière ce qui est perçu comme une grande fermeté, quel est son profil ? Souvent comparé à Barack Obama (la ressemblance physique et le fait qu’ils ont exactement le même âge n’y sont sans doute pas étrangers) par ses partisans et dans la presse indonésienne qui mettent en avant son grand pragmatisme, Jokowi rompt surtout avec une tradition de dirigeants membres de l’establishment. Issu d’un milieu très modeste (il a même dû travailler dans la petite entreprise de meubles de son père dès douze ans pour payer les frais de sa scolarité), né près de quinze ans après l’indépendance (le 21 juin 1961), il est également perçu par la population comme moins autoritaire et surtout moins corrompu que ses prédécesseurs. Voilà donc des perceptions qui, dans le contexte actuel, sont presque l’opposé de la manière dont le président indonésien est présenté dans les pays occidentaux. Au-delà des idées reçues et des jugements hâtifs, il convient donc de présenter son parcours, ses convictions, mais aussi ses bilans dans ses fonctions successives, à Solo puis à Jakarta.

Une rupture dans la vie politique indonésienne

Listé en 2014 par le magazine Fortune parmi les 50 « plus grands dirigeants de la planète » alors qu’il n’était pas encore élu à la fonction suprême [1], le président indonésien est un personnage atypique. Originaire de Solo (Surakarta), l’un des centres historiques et culturels de Java, et accessoirement le lieu de graves émeutes antichinoises en 1999 et souvent identifié comme un foyer de l’islamisme radical dans l’archipel, Jokowi en fut le maire de 2005 à 2012. Consacrant des résultats jugés remarquables, sa réélection en 2010 fut fracassante, avec 91% des suffrages, et faisait déjà de lui un potentiel présidentiable. En 2012, il était candidat au poste de gouverneur de Jakarta dans un scrutin qui n’était pas gagné d’avance, car Jokowi s’affichait avec un colistier chrétien (dans un pays qui compte 85% de musulmans, et plus encore dans la capitale) et le gouverneur sortant était explicitement soutenu par le président. Pourtant, il a remporté une large victoire avec 54 % des voix, lors d’un scrutin que le magazine local Tempo qualifia d’« élection modèle », renversant « la carte du pouvoir habituellement dominée par une élite alliée au pouvoir de l’argent ». Une fois au pouvoir dans la capitale, il a multiplié les mesures populaires, comme la mise en place d’un réseau de métro qui permettra à terme de désengorger l’immense métropole, et des mesures concrètes dans les quartiers les plus défavorisés. Bien qu’installé seulement deux ans sur le siège de gouverneur de Jakarta, son train de vie très modeste et un souci permanent de transparence lui ont par ailleurs permis de recueillir le soutien des plus démunis et des médias, qui lui furent particulièrement utiles pour l’élection présidentielle. C’est aussi grâce à ce poste prestigieux qu’il parvint à se faire connaitre de tous les Indonésiens. Sa marche vers la présidence en portant les couleurs du PDI-P (Parti démocratique indonésien de lutte) n’en fut que facilitée, et c’est finalement sans grande surprise qu’il s’imposa avec plus de 53% des voix contre Prabowo Subianto, candidat du Partai Gerindra (parti d’inspiration nationaliste créé en 2008), et accessoirement ancien gendre de Suharto. Au sein même du PDI-P, Jokowi se distingue également de Megawi Sukarnopotri, la fille de Sokarno présidente de 2001 à 2004 et battue à deux reprises à l’élection présidentielle par Susilo Bambang Yudhoyono (qui fut au passage, avant Jokowi, le seul président indonésien élu).

Le soutien de Megawi dans l’investiture du PDI-P et la course à la présidentielle joua un rôle évident dans le succès de Jokowi, mais peut-être pas autant que son allure décontractée – il apparait souvent en public vêtu d’une simple chemisette – son goût prononcé pour le hard rock qui le rend populaire auprès des jeunes, et lui valut au passage des critiques pendant la campagne électorale, à coup de décibels parfois insupportables, et sa proximité avec les milieux défavorisés, qu’il visita très régulièrement en tant que gouverneur. Ses détracteurs y voient d’ailleurs la marque d’un populisme auquel il répond par des actions fortes, comme des mesures pour le contrôle des inondations ou le développement de programmes scolaires pour les plus pauvres, et met en avant son propre parcours, d’un milieu modeste jusqu’à la plus haute fonction de l’État. Le New York Times a rapporté à ce sujet des propos qu’il aurait tenus, selon lesquels « maintenant, c’est un peu comme l’Amérique, n’est-ce pas ? Il y a le rêve américain, et ici nous avons le rêve indonésien » [2], comme pour illustrer une rupture avec le passé.

Des défis en cascade

Non issu d’une lignée de dirigeants ni des milieux militaires, Jokowi semble de fait tourner la page des années Sokarno et Suharto et incarne le renouveau de la politique, dans un pays où les élites au pouvoir ne sont pas parvenues à modifier une image négative qui perdure depuis le régime de Suharto et à laquelle sa chute en 1998 n’a pas totalement mis fin. Le successeur de Suharto, Bacharuddin Jusuf Habibie (1998-1999), ouvrit les portes à la démocratie. La liberté de la presse fut rétablie et plus de cent partis politiques furent rapidement enregistrés. La Constitution de 1945 fut de son côté revue en profondeur, avec notamment un code complet des droits de l’homme. Ce processus spectaculaire de démocratisation, caractérisé par l’organisation d’élections libres, fut un succès et ouvrit une ère de modernisation profonde dans l’archipel [3].

Ces avancées ne se sont cependant pas traduites, quinze ans plus tard, par une bonne image des responsables politiques auprès de l’opinion publique. Un rapport intituté Indonesian Governance Index 2012, publié en septembre 2013 par l’organisation Partnership for Governance Reform, montre que la population juge le service public mal organisé, peu efficace, trop couteux, et gangréné par la corruption jusqu’aux niveaux les plus élevés [4]. D’innombrables affaires de corruption impliquant des personnalités politiques importantes ont été ainsi relevées au cours des dernières années, et malgré plusieurs condamnations, l’opinion publique a perdu foi en ses dirigeants.

L’économie indonésienne est de son côté dynamique et pleine de promesses, mais elle reste également fragile et confrontée à une multitude de défis, dont les effets sur la société et la vie politique sont importants [5]. La corruption reste un fléau considérable, et elle a même progressé selon deux rapports rendus publics pendant l’été 2013 [6] ; les déséquilibres économiques et sociaux entre les différentes provinces de l’immense archipel n’ont fait qu’augmenter au cours des deux dernières décennies ; la dépendance aux exportations, très forte dans l’industrie minière, est potentiellement déstabilisante ; et la pauvreté reste très visible. Les transformations de l’économie indonésienne ont eu des effets positifs au niveau macro-économique, en favorisant la croissance du PIB, mais restent trop déséquilibrées [7]. On relève ainsi que l’emploi n’a pas bénéficié de l’industrialisation du pays, et les disparités sociales restent en conséquence très marquées. La crise de 1997 a par ailleurs eu des effets désastreux pour les économies locales, tandis que les grandes entreprises en sont sorties considérablement renforcées [8], au point qu’elles dictent deux décennies plus tard, directement ou à distance, les trajectoires économiques du pays. L’introduction de techniques de microfinance fut de son côté exposée aux réalités locales, et connut une trajectoire aux résultats mitigés [9]. Enfin, dans certaines régions, les mécanismes économiques et sociaux restent très exposés à la résilience d’un conservatisme fortement inscrit dans la société et des pratiques religieuses et sociales que la période coloniale n’a pas éliminées, et qui se sont même parfois renforcées pendant l’occupation hollandaise [10].

Au-delà des symboles et de l’espoir qu’a suscité son arrivée au pouvoir (qui peut dès lors être à la hauteur de l’insatisfaction dans le cas d’un échec), Jokowi sera-t-il, dans la durée, en mesure de répondre aux immenses défis et de modifier en profondeur la relation entre les Indonésiens et leurs dirigeants politiques ? Plébiscité par le public avant même d’être officiellement candidat, son élection a bénéficié d’un soutien populaire en aucune mesure comparable avec celui de ses prédécesseurs, qui n’ont pas su générer d’enthousiasme dans la population. Jokowi pourrait-il poursuivre la lune de miel, et ainsi se démarquer encore plus des différents présidents qu’a connus l’Indonésie depuis 1999, dont la popularité était de manière presque chronique en berne ? S’il réussit ce pari, sa présidence s’inscrira réellement dans une rupture avec le passé. Mais il devra pour ce faire clarifier et au besoin concrétiser ses convictions profondes, et faire face à une multitude de défis.

L’heure des choix ?

C’est ici que l’intransigeance du président indonésien sur la lutte contre le trafic de stupéfiants entre en jeu. A cet égard, il convient d’ailleurs de rappeler quelques faits. D’une part, si l’Indonésie n’a procédé à aucune exécution en 2014, année électorale, il serait erroné de considérer que ce pays se découvre une « passion » soudaine pour la peine capitale, ou que celle-ci serait directement liée à son nouveau président, puisque l’archipel la pratique de façon régulière, bien que dans des proportions modestes face à des pays comme la Chine, l’Iran, ou même les États-Unis. D’autre part, les condamnés à mort qui ont fait la une des manchettes de l’actualité internationale ces dernières semaines ne l’ont pas été depuis l’arrivée au pouvoir de Jokowi, mais bien avant. C’est notamment le cas de Serge Atlaoui, arrêté en 2005, et condamné en 2007. Reste que le président indonésien a refusé d’accorder sa grâce aux condamnés, et c’est sur ce point qu’il est montré du doigt dans les sociétés où la peine de mort est abolie.

Comment donc expliquer cette intransigeance, surtout chez celui qui fut souvent présenté comme un « réformateur » (cette appellation devant cependant être appréhendée avec précaution, la notion de réforme pouvant revêtir une forme très différente selon les régimes politiques et, plus encore, les cultures) ? Il convient d’abord de mettre en relief la marge de manœuvre limitée dont il dispose. Pour s’imposer et imprimer sa marque, le président indonésien a adopté la fermeté, qu’il estime indispensable pour mener à bien les réformes qu’il a promises. Dans ce cadre, la lutte contre le trafic des stupéfiants (dont on peut bien sûr s’interroger sur le fait de savoir dans quelle mesure des condamnations à mort sont efficaces) figure en bonne position. S’ajoute à cela une demande de la population – qui n’est pas étrangère à la victoire de Jokowi l’an dernier – en faveur d’une plus grande indépendance face aux pressions étrangères. En janvier, quelques mois avant l’arrivée au pouvoir de Jokowi, son prédécesseur repoussait sine die une loi minière devant renforcer le contrôle des pouvoirs publics sur l’exploitation des richesses du pays, véritable superpuissance dans le domaine. Cette décision fut le résultat de très fortes pressions des groupes miniers internationaux, inquiets de voir leurs bénéfices baisser comme conséquence directe d’une plus grande mainmise de l’État sur leurs activités – la loi minière devait notamment garantir des partenariats entre groupes étrangers et entreprises indonésiennes. Jokowi est attendu au tournant, par ses supporters autant que ses détracteurs. Il est ainsi hautement probable qu’en se montrant inflexible sur la question des condamnations des ressortissants étrangers, il pense à d’autres enjeux.

A la question « qui est Jokowi ? », devrait donc s’ajouter « que pense Jokowi ? ». En choisissant comme colistier le très expérimenté Jusu Kalla (né en 1942 comme, pour l’anecdote et pour pousser plus loin la comparaison, l’actuel vice-président américain Joseph Biden), le nouveau président indonésien apporte des éléments de réponse. Kalla est issu du Golkar, l’ancienne formation politique de Suharto dont il fut président de 2004 à 2009 et qu’il quitta pour rejoindre Megawi en 2012, occupa plusieurs fonctions ministérielles et fut surtout déjà vice-président, entre 2004 et 2009, lors du premier mandat de Susilo Bambang Yudhoyono, avant d’échouer lui-même à la présidentielle de 2009 (avec 12,5% des voix). Originaire de Sulawesi (Célèbes) – et offrant ainsi un profil moins « javanais » à Jokowi – Kalla est surtout un pragmatique très proche des milieux économiques et financiers, lui-même anciennement dans les affaires et accessoirement étudiant de l’INSEAD à Fontainebleau dans les années 1970. Le nouveau vice-président indonésien est une sorte de caution pour les milieux d’affaires, qui contraste avec le profil « populaire » de Jokowi, qui s’est davantage distingué jusqu’à présent par ses mesures sociales. Le choix de Kalla comme colistier, quelques semaines seulement avant l’élection présidentielle, répondait ainsi à la volonté de Jokowi de présenter un gouvernement associant son parti de centre-gauche à la mouvance conservatrice dont est issu Kalla, qui sont également les deux principaux partis en nombre de sièges au Parlement. Il est en revanche encore difficile, comme le note le spécialiste australien de l’Indonésie Peter McCawley, de savoir si cette alchimie va, dans la durée, se traduire par une libéralisation de l’économie en Indonésie en lien avec l’international, ou au contraire une accélération des réformes sociales à l’intérieur de l’archipel, ce qui nous invite à considérer que Jokowi est à la croisée de modèles socialistes et libéraux [11]. Sans doute les défis économiques et sociaux et la manière dont ils sont évalués par le président détermineront ces orientations, et à ce titre, son intransigeance sur la peine de mort est à replacer dans son contexte et ne saurait à elle-seule résumer son profil et ses positionnements.

[1] The World’s 50 Greatest Leaders (2014), Fortune, 20 mars 2014. / Jokowi occupait le 37ème rang de ce classement dominé par le Pape François et Angela Merkel.
[2] Cité dans Joe Cochrane, “Joko Widodo, Populist Governor, Is Named Winner in Indonesian Presidential Vote”, The New York Times, 22 juillet 2014.
[3] Edward Aspinall, Opposing Suharto: Compromise, Resistance and Regime Change in Indonesia, Stanford, Stanford University Press, 2005.
[4] Arfianto Purbolaksono, “The image of State officials: A response to the results of the Indonesian Governance Index in 2012”, The Indonesian Update, Vol. 8, n°2, août-septembre 2013.
[5] Lire Sarah Anaïs Andrieu, « Indonésie. Une année préélectorale mitigée », in Jérémy Jammes et François Robinne (dir.), L’Asie du Sud-est 2014. Bilan, enjeux et perspectives, Bangkok, IRASEC, 2014, pp. 191-218.
[6] Il s’agit d’un rapport de l’ONG Transparency International-Indonesia (www.ti.or.id). Lire Maya Nawangwulan, “Corruption in Indonesia Increases: Survey”, Tempo, 11 juillet 2013. L’autre rapport, d’Indonesian Corruption Watch (ICW), est paru fin août de la même année, et dresse le même constat.
[7] H. Hill, Indonesia’s Industrial Transformation. Singapore, Institute of Southeast Asian Studies, 1997.
[8] D. A. Narjoko et H. Hill, “Winners and Losers during a Deep Economic Crisis: Firm-level Evidence from Indonesian Manufacturing”, Asian Economic Journal, Vol. 21, n°4, 2007, pp. 343-368.
[9] J. Rosengard, R. Patten, D. Johnston et W. Koesoemo, “The Promise and the Peril of Microfinance Institutions in Indonesia”, Bulletin of Indonesian Economic Studies, Vol. 43, n°1, 2007, pp. 87-112.
[10] Sur ce sujet, lire Mary Zurbuchen (ed.), Beginning to Remember: The Past in the Indonesian Present, Singapore, Singapore University Press, 2005.
[11] Peter McCawley, Joko Widodo’s Indonisia. Possible Future Paths, Canberra, ASPI, septembre 2014.

Ce texte reprend certains passages d’un article publié dans le numéro 183 de la revue Le Débat, mars-avril 2015, intitulé « Indonésie, archipel d’espoirs et d’incertitudes ».

« La conscription en France » – 3 questions à François Cailleteau

Thu, 07/05/2015 - 11:02

François Cailleteau a été chef du Contrôle général des armées puis Inspecteur général des finances. Il répond à mes questions à l’occasion de la parution de son dernier ouvrage « La conscription en France, mort ou résurrection ? », aux éditions Economica.

A l’heure où renait une nostalgie pour le service national, vous montrez qu’il était injuste socialement et inefficace militairement. Pourquoi ?

Le service national était devenu inefficace militairement parce qu’il était trop court, par rapport aux besoins d’une armée aux matériels de plus en plus sophistiqués et de moins en moins nombreux. Si le service était court (dix mois en 1992), c’est parce que le volume de chaque classe d’âge était très supérieur aux besoins des armées. Cela ne laissait le choix qu’entre une brièveté et un taux insupportable d’exemption du service dans un pays aussi attaché à l’égalité, au moins formelle, que la France.
Inefficace aussi parce qu’on ne pouvait envoyer que des volontaires, dont l’expérience prouvait qu’ils ne dépassaient guère le dixième des appelés dans les opérations extérieures (OPEX), alors que ces OPEX devenaient, après la fin du bloc soviétique, l’essentiel des missions des armées.
De plus, il était injuste parce qu’environ 30% des jeunes gens en étaient dispensés ou exemptés, pour des motifs souvent discutables, ce qui donnait à la sélection l’allure, soit d’une loterie, soit du règne de la fraude ou du piston.
Enfin, pour ceux qui étaient appelés, les conditions de service étaient très différentes, allant de l’emploi profitable dans une entreprise à l’étranger à celui de fantassin dans les camps de l’est de la France ou de l’Allemagne, en passant par les « planques » largement répandues dans tout l’appareil militaire. Force était de constater que les emplois les plus doux étaient réservés aux bénéficiaires du capital social (études, relations) et qu’au sein des emplois les plus rudes, à l’exception de quelques volontaires, se concentraient les plus démunis de ce capital (faible niveau scolaire, pauvreté, chômage).

Serait-il matériellement possible de faire renaître le service national ?

Le service national obligatoire et principalement militaire, tel qu’il existait jusqu’en 1997, ne peut matériellement pas être remis en place. Les armées ne disposent ni des casernements, ni des équipements correspondant au volume des armées des années 1990. Il y faudrait un énorme effort financier qui serait en outre un non moins énorme gaspillage.
En effet, en partant de l’hypothèse du maintien de l’interdiction d’employer les appelés non volontaires dans les OPEX (et cette hypothèse peut être considérée comme une certitude), les unités composées d’appelés ne pourraient servir qu’à renforcer, dans les tâches les plus basiques (gardes, patrouilles) les forces de police et de gendarmerie. Leur volume serait considérablement supérieur aux besoins, même avec un service très court et un taux très élevé d’exemptions (un service de quatre mois avec un taux d’exemptions et de dispenses de 40% donnerait un effectif permanent de 70 000 appelés).

Un service national obligatoire et principalement civil pose d’autres problèmes. D’abord, il n’est pas sûr qu’il soit juridiquement possible, dans la mesure où il pourrait être considéré comme un travail forcé, interdit par des conventions internationales signées par la France. A supposer cet obstacle levé, on se heurterait ensuite à la question du volume. D’abord, parce que les jeunes femmes ne pourraient évidemment pas en être dispensées du seul fait de leur sexe. Ensuite, parce qu’il serait difficile de pratiquer de forts taux d’exemptions sur la base de l’aptitude physique, puisqu’on ne pourrait exciper des contraintes de l’activité militaire. Cela exigerait donc de faire faire chaque année un service à quelques 700 000 personnes. Même avec une durée très courte du service (et, plus c’est court, moins c’est utile), une organisation de masse devrait être mise en place. Enfin, il faudrait décider de la nature des activités des appelés à ce service. Il faut qu’elles soient utiles, soit à eux-mêmes, soit à la collectivité. Dans le premier cas, on trouverait principalement le rattrapage de formation, mais peut-il être efficace s’il ne s’adresse pas exclusivement à des volontaires suffisamment motivés ? Dans le second cas, le risque est de faire tenir aux appelés des emplois que devraient tenir des salariés.
Toutes ces considérations conduisent à renoncer à l’idée d’un service national universel (et donc obligatoire), qu’il soit principalement militaire ou principalement civil, et à revenir aux idées de service civil volontaire.

Est-ce la bonne réponse aux défis actuels de la société : absence de cohésion sociale, terrorisme, etc. ?

L’histoire nous montre que c’est la cohésion sociale qui a permis le service militaire universel, et non l’inverse. Il ne faut donc pas attendre d’une forme quelconque de service qu’elle pallie toutes les insuffisances que les familles, l’éducation nationale et la société, dans son ensemble, ont laissé s’installer dans les jeunes générations.
Ceci étant, des formes de service volontaire peuvent être utiles pour aider à l’insertion des jeunes dans la vie active et pour répondre au besoin d’engagement d’une fraction de la population jeune. Elles existent déjà et il s’agit seulement de les développer.
Encore faut-il que ce développement se fasse avec un souci d’efficacité et non avec celui de « faire du nombre ». Il faut s’assurer que les volontaires aient une motivation suffisamment forte. De plus, leur service doit être assez long, assez encadré pour être efficace ce qui suppose qu’il ne soit pas trop fait à l’économie.
Quant à lutter contre le terrorisme, pour l’essentiel, laissons cela aux professionnels. Tout au plus, on peut imaginer une forme de service volontaire qui permettrait d’assurer l’essentiel des missions de garde et de patrouille, actuellement confiées à l’armée de terre, au détriment de la préparation des militaires professionnelles aux OPEX ou à celui de leur repos après ces missions exigeantes.

L’engagement des pays du Sud aux Nations unies pour une meilleure restructuration des dettes souveraines

Tue, 05/05/2015 - 18:30

Le 5 décembre 2014, à l’Assemblée générale des Nations unies, cent vingt-sept pays, essentiellement les pays du groupe G77 + Chine rassemblant les pays dits du Sud, ont voté pour une résolution présentée par l’Argentine, visant à mettre en place un cadre légal multilatéral pour la restructuration de dettes souveraines. Déjà en septembre 2014, cent vingt-quatre de ces pays avaient fait adopter, à l’initiative de la Bolivie, une résolution en ce sens.

C’est là un tournant historique, selon Sacha Llorenti, le représentant de la Bolivie au sein de l’organisation. Ce cadre pourrait permettre de lutter contre les pratiques inhumaines des « fonds vautours », fonds d’investissements spéculatifs qui se spécialisent dans le rachat à bas prix de dettes, comme cela a été le cas pour la dette souveraine de l’Argentine, qu’ils ont rachetée lors de la crise économique qu’a traversé le pays dans les années 2000. Ces fonds vautours ont refusé de participer à la renégociation de cette dette (héritée en partie de la période de la dictature, de 1976 à 1983), demandant un remboursement au plus proche de la valeur nominale. En 2013, Thomas Griesa, juge de la Cour de Justice de New York, a donné raison aux fonds vautours et a condamné l’Argentine à payer 100% de sa dette en litige. Les fonds vautours rachètent de la dette à prix cassé, refusent de participer à la restructuration de cette dette et exigent ensuite la valeur totale ainsi que les intérêts des obligations qu’ils ont achetées.

A l’opposé des pays du Sud, seize pays, essentiellement du Nord, comme les États-Unis, le Japon et plusieurs pays européens, ont voté contre cette résolution, estimant que le Fonds monétaire international (FMI) est un lieu approprié pour traiter de ces questions. Cet argument les avantage car ces pays de la Triade, qui ne pèsent qu’un peu plus de 8% des voix aux Nations unies, représentent plus de 45% du pouvoir de décision au sein du FMI. En effet, au sein de ce dernier, les voix sont pondérées en fonction de la richesse de chaque État, système moins démocratique que celui de l’Assemblée générale de l’ONU, où la règle veut que chaque État, riche ou pauvre, dispose d’une voix. En outre, le représentant des États-Unis a justifié le vote de son pays contre cette résolution par le risque d’incertitudes qu’un tel texte pourrait faire peser sur les marchés financiers.
Depuis longtemps, des réseaux progressistes, comme le Comité pour l’annulation de la dette du Tiers monde (CADTM) militent pour l’abolition ou la réduction et le rééchelonnement de la dette des pays du Sud.

En février 2015, l’Assemblée générale des Nations unies a élu la Bolivie présidente du nouveau « Comité sur le processus de restructuration de la dette souveraine », un comité plus grand que le groupe G77 + Chine, qui vise à favoriser le développement durable de tous les pays du monde. « Cela sera une fierté pour les Boliviens que nous dirigions ce processus de changement de la nouvelle architecture financière du monde », a affirmé le 3 février dernier le président bolivien Evo Morales, qui a précisé que ce comité œuvrera à ce que les organismes internationaux ne se comportent pas comme « des prédateurs qui arrachent des fonds ou qui donnent des fonds en arrachant des intérêts ». Il s’agit pour Evo Morales de faire en sorte « qu’il n’y ait plus de fonds vautours ».

Pour Sacha Llorenti, une des raisons pour lesquelles la Bolivie a été choisie pour diriger ce Comité tient au fait qu’elle a, au sein du groupe G77+ Chine, donné l’impulsion à la recherche d’un mécanisme pour permettre une juste restructuration des dettes souveraines, et qu’elle est une référence en matière de politique sociale et de gestion de ses finances publiques. Sacha Llorenti a reconnu que « c’est un processus qui n’est pas simple, il est compliqué et difficile, mais c’est pour cela qu’ont été créées les Nations unies, pour mener à bien les processus difficiles et compliqués et pour y parvenir dans le cadre du dialogue et dans le respect des principes de la Charte des Nations unies ».

Le Comité est chargé de mettre sur pied d’ici septembre 2015 un cadre légal multilatéral pour les processus de restructuration des dettes souveraines, ce qui comblerait un vide juridique. Les réunions ont commencé en janvier-février 2015, consacrées à l’analyse des brèches du système de restructuration actuel. Des experts d’organismes internationaux (comme par exemple la Banque interaméricaine de Développement) y ont participé, ainsi que des représentants de divers pays.

Si les Nations unies parviennent à mener à bien cette action, elle constituerait un premier pas pour faire prévaloir des principes humains sur ceux du capitalisme débridé en matière de gestion et de paiement des dettes souveraines, jalon important vers la réduction des inégalités Nord-Sud.

Vers une intensification des relations de la France avec les pays du Golfe ?

Tue, 05/05/2015 - 15:45

François Hollande est en visite officielle au Qatar et en Arabie saoudite. Le développement d’une diplomatie envers les pays du Golfe, parfois critiqués pour leurs atteintes aux droits de l’Homme et à la liberté d’expression, peut-elle être problématique pour la France ?
C’est une question qui revient très fréquemment avec une opposition parfois un peu manichéenne entre Realpolitik et droits de l’Homme. Cette question ne concerne pas uniquement les États du Golfe mais de nombreux autres pays avec lesquels la France entretient des relations sans avoir le même système politique. La France est sensible aux questions des droits de l’Homme mais ces dernières ne peuvent pas constituer l’ensemble de la politique étrangère française. La France, tout comme n’importe quel autre État, ne peut pas entretenir de relations diplomatiques et commerciales uniquement avec des pays qui seraient des démocraties certifiées observant une application totale des droits de l’Homme. Il apparait impossible de demander à un pays membre du Conseil de sécurité des Nations unies de n’avoir des relations qu’avec ses égaux. A partir du moment où la France a une industrie d’armement, l’exportation est une nécessité. Par ailleurs, on ne peut pas dire qu’il y ait un lien direct entre le statut des femmes dans les pays du Golfe et la vente de Rafale. Le refus de vendre des Rafale n’améliorerait pas sensiblement la situation des femmes et leurs droits. D’ailleurs, si la France ne les vendait pas, ce serait les États-Unis qui se précipiteraient sur le marché.
Il faut bien sûr être conscient de la situation et l’évoquer. On ne peut pas négliger les rapports annuels d’Amnesty International ou de Human Rights Watch, mais l’époque où les pays occidentaux faisaient la leçon aux autres pays est révolue. C’est désormais plus dans le dialogue que les choses se font et il est nécessaire que les sociétés bougent en interne. Un chef d’État n’est pas un responsable d’ONG. François Hollande doit prend en compte la dimension des droits de l’Homme, notamment parce qu’elle fait partie de l’ADN français, mais il ne peut pas uniquement tenir compte de cela.

La France est par ailleurs invitée, le mardi 5 mai, à participer à un sommet extraordinaire du Conseil de coopération des États arabes du Golfe, une invitation considérée comme un privilège. Selon vous, comment interpréter cette invitation ?
Effectivement, on voit qu’il y a un raffermissement des liens avec l’Arabie saoudite qui se fait sur un schéma plus général. François Hollande, en arrivant au pouvoir, estimait que Nicolas Sarkozy avait trop privilégié le Qatar et souhaitait rétablir, non pas la priorité, mais un équilibre entre le Qatar, l’Arabie saoudite et les autres États du Golfe. Il a effectivement opéré ce rééquilibrage, tout en conservant des liens avec le Qatar. Cette situation est par ailleurs facilitée par la réconciliation en cours entre le Qatar et ses voisins du Golfe, le Qatar étant moins offensif qu’auparavant sur la question du soutien aux Frères musulmans ou encore sur la mise en accusation du général Al-Sissi en Egypte. On observe également que sur le dossier syrien, les Saoudiens et les Qataris ont une approche de plus en plus commune. Par ailleurs, ce rapprochement entre la France et les États du Golfe intervient aussi sur un fond plus général dans la mesure où ces derniers ont apprécié la fermeté dont Paris a fait preuve vis-à-vis de Téhéran dans la négociation 5+1 sur le programme nucléaire. La France est apparue comme étant plus intransigeante et plus désireuse d’obtenir un accord solide, tandis que les Américains ont été soupçonnés de vouloir un accord à tout prix et non pas un accord qui soit réellement capable d’empêcher l’Iran d’accéder à l’arme nucléaire. Tous ces éléments participent au rapprochement de la France et des pays du Golfe, non seulement sur le plan stratégique, mais également sur le plan économique car de très importants contrats civils d’équipements sont en négociation. On ne peut donc pas uniquement résumer la relation entre la France et les pays du Golfe à la vente de Rafale, pour spectaculaire qu’elle soit. Elle est beaucoup plus large que cela.

Cette visite de François Hollande intervient dix jours avant sa rencontre avec Barack Obama, les 13 et 14 mai. Les États-Unis et la France sont-ils en concurrence d’influence au Moyen-Orient ? La France bénéficie-t-elle de l’amitié des pays du Golfe, au détriment des États-Unis ?
Il est vrai que les pays du Golfe, dans l’ensemble, ont une déception par rapport aux États-Unis. Ils ont le sentiment d’une perte de crédibilité de la garantie américaine, notamment dans sa dimension stratégique. Les pays du Golfe, à tort ou à raison, ont estimé que les États-Unis avaient trop vite abandonné leur soutien à Hosni Moubarak – allié de longue date – au profit des Frères musulmans et qu’ils avaient été trop critiques du renversement des Frères musulmans par le général Abdel Fattah Al-Sissi le 3 juillet 2013. Toutefois, c’est surtout la volonté américaine de rapprochement avec l’Iran qui les inquiète le plus. Les pays du Golfe ont le sentiment qu’un accord ne conduira pas Téhéran à adopter un comportement plus modéré dans la région mais débouchera au contraire sur un Iran plus rassuré, qui pourrait avoir une volonté d’affirmation de sa puissance. De plus, des déclarations de dirigeants iraniens disant que l’Irak, la Syrie et le Yémen font partie de la sphère d’influence de Téhéran ont beaucoup inquiété les pays du Golfe. Enfin, le refus américain face à la volonté française d’opérer des frappes aériennes sur la Syrie après l’usage d’armes chimiques par le gouvernement Assad a ajouté à ce trouble. La France y est vue non pas comme une superpuissance – ce qu’elle n’est pas -, mais comme une puissance qui peut peser sur de nombreux dossiers.
Ceci étant, si la France n’a pas la capacité de prendre le relais de l’influence américaine dans le Golfe, elle peut en revanche répondre aux attentes de ces pays en leur offrant une sorte d’assurance complémentaire. Le signal envoyé à Barack Obama est qu’il n’y a pas de relation de dépendance absolue entre les États-Unis et les pays du Golfe, que ces derniers peuvent trouver d’autres partenaires et qu’il n’existe pas de monopole stratégique américain dans la région.

Is this France’s Own Patriot Act?

Tue, 05/05/2015 - 13:49

What does the new surveillance law passed by Parliament specify?
The idea is to modernize the capabilities of the intelligence services, particularly given the rise of digital media. This legislation is not limited to terrorism. It is designed to prevent organized crime and protect essential interests of foreign policy and essential economic or scientific interests of France.
One of the goals is to legalize activities that until now did not have a legal basis. This law is essentially designed to protect the intelligence services.
A Socialist deputy who is also the President of the Legislative Committee of the National Assembly noted that France is the last Western democracy not to have a formal legal framework covering the activities of its intelligence services.
In France there is 100 percent consensus on diplomacy and defense, and this is part of defense.

Critics see the legislation as a dangerous extension of mass surveillance, and have compared it to the US Patriot Act. Do you agree?
It is partly a response to the Charlie Hebdo attacks in January, but it is not a knee-jerk Patriot Act. It is an attempt to put an appropriate legal framework around intelligence-gathering activities and to include in that legal framework the new types of communications technology.
In one sense, it certainly goes in the direction of the Patriot Act because it formalizes what the intelligence services are allowed to do, but the view in the United States is that the Patriot Act and the response to 9/11 was overdone.
There are a couple of differences between France and the United States on this point. One, the French government is seen as the protector of civil liberties. There have been protests that this legislation will allow the government to spy on us, but I think everybody thinks that the government in France already has a lot of information.
The primary priority of the French people is security. That’s why when the Charlie Hebdo attacks happened there was 100 percent support for the way the security services responded. This legislation updates and fills the gap, something that the Charlie Hebdo attacks made clear needs to be done.
In France, a Constitutional Council has skilled advisors to opine on whether a law is constitutional in advance of it being adopted. In the United States, it could take a generation to know whether a law is constitutional because it has to go through a long appeals process, since the Supreme Court is both the ultimate court of appeals as well as the constitutional court.
François Hollande, with this particular law, is asking the Constitutional Council for an opinion as to the constitutionality of the law in advance of the law being promulgated. This is the first time since 1958 that the President of the republic has actually himself gone to the Constitutional Council and asked for such a clarification. So in terms of protecting civil liberties, the state is doing its job.

Following Edward Snowden’s revelations, many US lawmakers now favor scaling back the National Security Agency’s access to Internet data. How do you explain these divergent approaches?
In France, you don’t have an adversarial government system. In the United States, Congress is there to correct the excesses of the executive. In the United States, things happen because they happen and then they get adjusted afterwards. But in France things are designed in advance to work so that there isn’t an adversarial readjustment.
Today’s legislation won overwhelming approval in Parliament. Following the Charlie Hebdo attacks, did lawmakers feel they had very little political mileage to gain by opposing this law?
There is genuinely a national consensus that part of the state’s job is to provide security and they need a law that needs to be updated to include intelligence-gathering activities that were happening before without a specific legal basis, and to update it so that it includes new communications technologies. That’s a sensible thing to do. This is not a panic reaction.

Vente des Rafale : « Les bons effets de la diplomatie américaine»

Tue, 05/05/2015 - 13:46

Dassault annonce de nouveaux contrats pour 2015. Pourquoi, ces déblocages soudains après de longues années de négociations ?
C’est le résultat d’années de prospection pendant lesquelles Dassault a été à la manœuvre pour essayer de vendre le Rafale. Même si cet avion a été conçu il y a longtemps, il reste dans la modernité. Contre lui, Il n’y avait plus qu’un concurrent, le Gripen (Saab) qui, depuis, a prouvé ses limites. L’Eurofighter n’est lui-même plus candidat à l’export. Il restait le F18 et le F35 américain à susciter encore des espoirs. Mais cet avion prend du retard, accroît ses coûts avec des transferts de technologie qui tardent aussi. Entre-temps, depuis la Libye en 2011, le Rafale est passé à des démonstrations pratiques et reste le seul avion multirôle en service. Aucun avion doté de telles fonctions n’est prévu à l’horizon. Même s’il n’a pas les caractéristiques du F35 ou du F22 de Boeing, du J20 ou du J 31 chinois, le Rafale fait à la fois de la reconnaissance, de la défense aérienne et de l’attaque au sol. C’est l’équivalent de trois avions, d’où l’intérêt pour les pays qui ont des flottes limitées.

Dans cette vente, la France ne doit-elle pas remercier Obama et son alliance avec l’Iran ?
On s’est retrouvés dans la même situation que lorsqu’on a commencé à exporter des Mirage dans les années soixante. À l’époque, nous vendions des avions à l’Inde, à l’Amérique du Sud, alors que nos avions étaient plus chers que leurs concurrents américains. Si ces contrats ont été conclus, c’est parce que ces pays ne voulaient pas être dépendants des États-Unis. Nous renouvelons la même situation. Il est intéressant aussi de constater qu’il y avait eu une brutale marche arrière causée par la décision du Général de Gaulle de décréter l’embargo sur les Mirage vendus à Israël. La conclusion fut un coup d’arrêt de nos ventes. Aujourd’hui, La France espère vendre à des pays opposés à l’Iran, et, de fait, les Sunnites déroulent le tapis rouge à François Hollande. La diplomatie française est plus sur le reculoir que les États-Unis et leur alliance avec l’Iran. Les Américains ont une position plus pragmatique en reconnaissant l’Iran comme un grand pays. Et les États-Unis n’ont pas grand-chose à vendre qui soit réellement adapté aux besoins des pays du Golfe. Permettez-moi de rappeler une chose : la France a hurlé contre l’existence de la peine de mort en Indonésie, mais que fait-elle sinon vendre des avions de chasse à des pays qui appliquent cette sentence ! Évitons la morale.

Reste que c’est une bonne nouvelle pour Dassault, Thales et Safran ?
J’espère que ce sera une bonne nouvelle. Faut-il que les Égyptiens honorent leur contrat ! Pour l’heure, on leur donne des avions en échange d’un prêt. Soyons objectifs jusqu’au bout sur les conditions de financement, car nous vendons à un régime qui n’est pas d’une solidité totale.

Ventes de Rafale : la fin d’une décennie d’échecs ?

Mon, 04/05/2015 - 17:44

Après l’Egypte et l’Inde, et peut-être la Malaisie et les Émirats arabes unis, le Qatar vient d’annoncer à son tour l’achat de 24 avions Rafale. Comment expliquer ce succès après une décennie d’échecs à l’exportation ?
Cela peut paraître étonnant mais cela est un peu dû au hasard. Il y a peu de débouchés pour ce type d’avions. Les échecs sur dix ans, c’est aussi moins d’une dizaine de pays dont certains étaient la chasse gardée des États-Unis comme la Corée du Sud ou Singapour. Avec ces trois contrats, la France atteint un taux de réussite d’environ 30%, ce qui n’est pas mal car il y a en général quatre concurrents sur les marchés à l’exportation : les Américains avec plusieurs types d’avions selon les demandes, les Russes, les Européens avec l’Eurofighter, et le Gripen suédois. Sur les trois contrats, deux d’entre eux étaient attendus car le choix du Rafale était arrêté : celui du Qatar et de l’Inde. En revanche, l’Egypte est une surprise ; la décision finale est liée au refroidissement de ses relations avec les États-Unis.
Une autre raison vient du fait que le Rafale est aujourd’hui à la fois un avion moderne mais éprouvé. Les Américains vont de plus en plus promouvoir le F-35, qui est plus cher, face au Rafale qui, en vieillissant, devient une meilleure option. De plus, le Rafale est un avion qui est régulièrement employé depuis cinq ans dans le cadre des opérations extérieures en Afghanistan, en Libye et au Mali.
En troisième lieu, l’État français et Dassault ont travaillé ensemble pour promouvoir cet équipement, ce qui ne fut pas toujours le cas dans le passé, notamment lors de l’échec au Maroc. On ne peut exporter des équipements aussi stratégiques et aussi chers sans une coordination étroite entre cette entreprise et l’État. Le fait que François Hollande signe en personne le contrat au Qatar, témoigne de l’importance de cette vente.
Enfin – et cela a été peu souligné -, l’Egypte, le Qatar et l’Inde disposaient de Mirage 2000. Les Indiens ont même décidé il y a quelques années de moderniser leur Mirage 2000-5. C’est une preuve de confiance quant à la qualité du matériel qui doit être soulignée.

Que penser de la négociation des contrats de vente des Rafale ? Peuvent-ils être préjudiciables à long terme, notamment ceux concernant l’Inde et le Qatar ?
Pour l’Inde, le contrat qui vient d’être signé ne comprend pas, pour l’heure, de transfert de technologie… et c’est sans doute plus un handicap qu’une bonne nouvelle sur le long terme. A court terme, il est certain que les trente-six avions vendus seront fabriqués en France. C’est de l’emploi garanti pour les cinq prochaines années, notamment en Aquitaine. Sur le long terme, l’Inde souhaite développer son industrie aéronautique militaire et ne peut pas le faire sans partenariat technologique. Nous connaissons parfaitement les mesures à prendre pour conserver une longueur d’avance, même avec des transferts de technologie, et donc limiter les risques de concurrence dans le futur. Le contrat pour la vente de cent vingt-six avions prévu initialement, et qui continuera à être négocié, nous permettrait d’avoir un partenariat avec l’Inde sur le long terme. C’est un choix politique qui est fait, c’est aussi un choix industriel et technologique qui est plus compliqué car il peut nous conduire à des obligations d’assistance technologique qu’il faut maîtriser.
En ce qui concerne le Qatar, on se trouve dans un cas plus classique de troc, c’est-à-dire que le pays acheteur souhaite obtenir des compensations vis-à-vis de son achat, qui ne sont pas directement liés à l’acquisition de Rafale. En l’occurrence, le Qatar aurait demandé des droits de trafic supplémentaires pour sa compagnie aérienne en France sur Nice et Lyon. Dans ce cas, il est donc nécessaire d’arbitrer entre l’intérêt commercial du constructeur aéronautique Dassault et celui d’Air France, qui ont chacun des intérêts qui relèvent de l’intérêt général tant l’impact en termes d’image et d’emploi est important dans les deux cas. Il est sûr que cette vente intervient dans une période très conflictuelle à ce niveau puisque la France et l’Allemagne ont par ailleurs demandé à la Commission européenne de négocier un accord équitable avec les compagnies aériennes du Golfe, accusées de concurrence déloyale.

Ces 84 avions de combat vendus ou en passe de l’être, et bientôt 50 hélicoptères en Pologne, font de l’année 2015 une année record pour la vente d’armes à l’exportation de la France. Peut-on imaginer que cette situation perdure à l’avenir ou n’est-ce finalement qu’une bouffée d’oxygène sans lendemain ?
En moyenne, nous vendons pour six à sept milliards d’euros d’armement par an. En 2015, le chiffre des prises de commandes pourrait avoisiner les dix-huit milliards d’euros. C’est sans précédent. C’est une conjonction extraordinaire et cela va permettre d’alimenter notre industrie pendant cinq à six ans dans la mesure où on ne construit pas 84 avions de combat et 50 hélicoptères du jour au lendemain. Par le passé, nous avions déjà connu une autre année exceptionnelle en 1984, avec un montant de 61 milliards de francs. Si on prend en compte l’inflation, le montant n’était donc certainement pas très éloigné de celui qui sera atteint en 2015. La mesure des ventes d’armes se fait donc plus sur des périodes de cinq ou dix ans. L’objectif pourrait être de maintenir une moyenne de huit à neuf milliards d’euros, plus élevé qu’il ne l’est actuellement, mais en deçà du chiffre que l’on atteindra en 2015.

« It is not important that Britain is not important »

Mon, 04/05/2015 - 13:52

Why is this election important for Britain?
It is important because it represents new political ground. Most of the elections since World War II have returned a clear Labour or Conservative majority. The last one didn’t and proved that a coalition government, which is very unusual in the UK, could actually govern for five years.
This election is a test of whether a multitude of opinions can be expressed without achieving a clear majority in Parliament. The British first-past-the-post system means that if there are only two parties you are going to have a clear majority. Now, in addition to the LibDems, UKIP probably won’t get any seats. The Scottish National Party will take what Labour used to have in Scotland away from them. So it’s becoming a multiparty system and this is the first test of how that multiparty system will evolve.
What is also interesting is that this election is not important for any policy reasons. The probability is that whoever wins, there will not be any big changes.

Why are neither Labour nor the Tories in a position to win a majority?
It’s because neither of them has any ideas. There is no electoral battleground and consequently the campaign has been virtually devoid of substance and the leaders have virtually nothing concrete to propose.

Is foreign policy a factor in these elections?
With respect to foreign policy, it is not important that Britain is not important. There is no question that Britain is in the midst of an identity crisis, but I think it is going back to what it always was, which is a kind of turntable, not really part of Europe, definitely part of the Atlantic, very much an offshore island and one that is capable of supporting a lot of globalized phenomena. France, on the other hand, could not possibly do that because it is at the heart of Europe. It is very strategic about its military. The Brits are not strategic about anything. The Brits are pathetic at strategy, but they are fantastic at keeping calm and carrying on, “muddling through.”
There is minimal substance to this election and very little at stake. The reason why it is said to be the most important British election in a generation has to do with how the political system works, but it’s not about the policies that will be implemented afterwards.

What does a waning Britain mean for the United States? Is the “special relationship” between the United States and Britain still special?
The “special relationship” is waning on both sides. There is an increasing feeling in Europe generally that the United States is simply not as much a part of the strategic equation globally as it used to be.
The United States is seen as having fallen short strategically ever since 9/11. Obama has tried to repair this by means of a strategic retreat. But there is certainly the conviction in Britain that they don’t wish to toady to the American superpower because the American superpower has got it wrong repeatedly. There is no scope for repeating what is perceived as Tony Blair’s rather slavish following of George W. Bush.
The special relationship was born out of a situation of absolute desperation, which was Winston Churchill needing the United States to get into World War II. Indeed, Franklin Roosevelt was quite reluctant to get into an alliance with Britain, which was seen very much as an imperial and imperialist power.
Britain today doesn’t have any significant capability to project power globally. The only member of NATO besides the US that has that ability now is France. Britain’s military is at its lowest level since the 18th century—since England lost the American colonies and the United States came into being. They have no aircraft carrier, they have no homegrown defense industry, and their nuclear capability is essentially controlled by the United States.
The EU has basically discounted Britain as a political actor. Britain does not have that much significance in NATO because its defense capability is quite limited.
From a policy standpoint, the special relationship with the United States is less and less meaningful because there is no appetite amongst the British public to have their government follow a policy made by people in Washington that they disagree with.
There have been articles saying that, viewed from Washington, the special relationship isn’t that special. Viewed from London it’s not really that special either. The fact that the Brits decided to become members of the Asian Infrastructure Investment Bank at the invitation of the Chinese—and against American wishes—just shows that they are going back to historical type, which is to be a kind of international platform. They have little or no domestic industry of their own, they don’t have much besides financial services and media and retail in terms of business sectors, but they are a very globalized place that is excellent at attracting wealth and talent.

Under David Cameron, defense spending has fallen below the suggested NATO minimum of 2 percent of GDP. Is that likely to change?
I don’t think so. If you look at France, there is an absolute determination across all party lines that France should remain globally important in terms of diplomacy and defense. The British version of that is: “We are important anyway. We have the English language. We used to have a big empire.” Britain tends to see things in historical terms. They have no plan for the future.
Cameron’s success in making a coalition government work has been actually pretty impressive. Not that he has got that much done, but he certainly has managed to stay in power and more or less keep the coalition together.

Cameron’s coalition with the LibDems is in question. Where will the LibDems throw their support now?
They’ll support whoever offers them a better deal. Nick Clegg has made it reasonably clear that he is going to feel free to swing to the left or swing to the right. It is pretty certain that neither Labour nor the Conservatives are likely to get a parliamentary majority that enables them to govern on their own. If either of them has a chance to do this, it is probably the Conservatives.
This morning’s polls gave 34 percent support for the Conservatives and 33 percent for Labour. These percentages don’t mean anything more in Britain than they do in the United States in terms of the popular vote. What counts is whether you win seats in Parliament in individual constituencies.
The LibDems are not going to be as big a force as they were, and the SNP could actually end up with more seats than the LibDems. But both the Tories and Labour have ruled out doing a deal with the SNP. Consequently, even with fewer seats than before, the LibDems could still be the kingmakers.

What are the main issues in this election?
Personalities, taxes to some extent, and competency to run the economy. What you would expect to be the main issue after five years of rather ineffectual coalition government would be either a major, visionary strategy for Britain in the 21st century or the desire for some very strong, clear government policy that requires a majority for one party so it can implement its program. But there is no vision of any kind for Britain in the 21st century except muddle through, keep calm and carry on, and being a kind a globalized platform, which Britain is very good at.
Don’t forget: Britain is not a republic. Brits get one vote for one member of Parliament every five years and that’s it. So the British people are not especially politically engaged: they just want the freedom to earn a living, educate their children, amass some wealth, and go on holiday. The election is really about no more than that. And then it becomes, basically: Who do I have more faith in?

[GEOTALK] Situation en Somalie

Mon, 04/05/2015 - 11:41

Action contre la Faim (ACF) et l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) présentent “GEOTALK, improving our world’s understanding” :

Conférence du 16 avril 2015 avec Gérard Prunier, Consultant international pour l’Afrique centrale et orientale, sur la situation en Somalie.
Introduction de Mike PENROSE, Directeur Général d’Action contre la Faim, France. Présentation de Marie SARDIER, Référente Sécurité Alimentaire et Moyens d’Existence, ACF.

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