La seule question qui se pose est en effet celle de la
responsabilité de l’ONU. Pourquoi le général Roméo Dallaire qui avait tous les
moyens de le faire, ne fit-il rien de sérieux pour empêcher le génocide ?
Devant le TPIR (Tribunal pénal international pour le
Rwanda), loin du héros médiatique, « capitaine courageux » face
à l’indicible génocidaire, c’est tout au contraire le portrait d’un homme
désemparé qui est ressorti des longues audiences. Ses fautes de commandement,
ses atermoiements, ses hésitations, son absence de décision sur le terrain
ainsi que ses initiatives politiques aberrantes, et parfois même incohérentes,
prises en violation de la chaîne de commandement de l’ONU, font que nous sommes
désormais devant l’alternative suivante :
- Soit le général Dallaire commandant des
Forces de la Mission d’assistance des
Nations Unies au Rwanda fut dépassé par les évènements.
- Soit, comme l’a écrit son supérieur, M. Booh-Booh[1],
il avait reçu pour ordre de faire gagner le général Kagamé et le FPR[2].
En
application des accords de paix d’Arusha, l’ONU devait en effet garantir la
Transition démocratique. La
Résolution 872 (1993) du Conseil de Sécurité
du 5 octobre 1993 porta ainsi création de la
Mission des Nations Unies pour
l’assistance au Rwanda (MINUAR).
Le
chef de cette mission était M. Jacques Roger Booh-Booh, nommé
Représentant
spécial du Secrétaire général de l’ONU au Rwanda. Il avait sous ses ordres
le général canadien Roméo Dallaire qui était le chef militaire de la mission.
Or, ce dernier était un officier qui n’avait aucune expérience du commandement
opérationnel. De plus, il ne connaissait rien de l’Afrique.
Après
l’attentat du 6 avril 1994, le général Dallaire ne fit rien pour s’opposer à la
reprise des hostilités par les forces du général Kagame.
Alors
qu’il se devait de sécuriser au moyen de ses 2539 hommes et de ses blindés,
l’axe menant du centre-ville de Kigali à l’aéroport, au lieu de montrer sa
force, il la replia tout au contraire dès la nuit du 6 au 7 avril, en
commençant par abandonner cet axe vital pourtant sous sa garde et que le FPR
coupa…
Plus
largement, dès la reprise des hostilités, le général Dallaire aurait dû imposer
un couvre-feu et déclarer qu’il ferait tirer sur quiconque le violerait. Le
général Kagamé aurait alors hésité à lancer son offensive. Avec la compagnie
para-commando belge, il disposait d’une excellente unité qui pouvait sans
problèmes majeurs remplir une telle mission. Il lui aurait également fallu,
avec ses blindés, occuper en ville les points stratégiques dont la tenue aurait
freiné l’extension des massacres et des débordements, ce qu’il n’a pas
davantage fait.
Le
7 avril, quand le FPR eut unilatéralement rouvert les hostilités, le général
Dallaire ne condamna pas cette violation gravissime des accords d’Arusha. Encore plus insolite, au lieu d’agir sur
la partie qui avait déclenché la reprise de la guerre, il somma au contraire
les forces gouvernementales de rester dans le cadre des
Accords d’Arusha, leur interdisant de fait de simplement se
défendre.
Les
manquements du général Dallaire qui présida au plus grand échec militaire de
l’ONU depuis sa création sont à ce point nombreux qu’il est licite de demander
si une telle incompétence est concevable chez un officier général, ou si
l’explication de tels errements ne se trouve pas dans l’hypothèse de M.
Booh-Booh, à savoir la « connivence » avec le général Kagamé.
Ce
général canadien aurait-il donc été nommé à la tête de la MINUAR afin de permettre
la réalisation du plan américain visant à évincer la France du Rwanda puis du
Zaïre, et pouvoir faire main basse sur les richesses du Kivu ?
Page
123 de son livre qui a pour sous-titre éloquent « Révélations sur les
dérives d’un général de l’ONU au Rwanda », J.R. Booh-Booh qui était donc
le supérieur hiérarchique de Roméo Dallaire écrit ainsi sans détours que :
« Dallaire n’était pas neutre : il était
plutôt de connivence avec le FPR. Voilà la clé qui permet de comprendre cette
situation ».
Tant
que François Mitterrand eut la capacité de gouverner, ce plan anglo-saxon fut
mis en échec. Mais, après les élections législatives de 1993, et la
« cohabitation » qui s’en suivit, le suivisme atlantiste des
dirigeants français fit que tout fut bouleversé.
Ces
évènements provoquèrent même une totale redistribution des cartes en Afrique
centrale au profit du Rwanda, principal allié de Washington qui reçut un
blanc-seing pour mettre l’est de la RDC (l’ex-Zaïre), à savoir le Kivu, en
coupe réglée.
Monsieur
le président Macron étiez-vous informé de cela, avant de faire porter la
responsabilité des évènements sur votre propre pays et sur son armée… ?
[1] Booh-Booh,
P-R., (2005)
Le patron de Dallaire parle. Révélations sur les dérives d’un
général de l’ONU au Rwanda. Paris.
[2]
Pour tous les détails concernant l’attitude et les responsabilités du général
Dallaire, on se reportera au chapitre VIII de mon livre «
Rwanda, un génocide en questions »