Image prise par un drone de l’OSCE le 14 janvier 2015, montrant l’impact d’un cratère d’une bombe à Volnovakha, qui avait atteint un bus la veille (crédit : OSCE)
(B2) L’OSCE a bien du mal à imposer ses vols de drones dans l’est de l’Ukraine, pourtant indispensables pour surveiller le cessez-le-feu et la ligne de front. Tour à tour, Ukrainiens et Russes, forces régulières et irrégulières, s’ingénient à entraver le vol de ces engins, non armés, mais équipés de caméras, ce qui est autrement plus dangereux pour les fauteurs de troubles qui sont ainsi souvent pris sur le fait, de mouvements divers de troupes ou faire revenir des armes lourdes vers la ligne de front…
B2 a compté dans les 30 derniers jours, 7 incidents frappant les « ailes » de l’OSCE. La routine selon ce qu’a dit le chef de l’OSCE de passage à Bruxelles.
Le 28 décembre 2015, un mini-drone est atteint par des tirs d’armes légères dans la zone contrôle par les séparatistes de la LPR (république de Louhansk). L’engin revient à sa base, sans dommage. Une « incompréhension » selon représentant russe au centre de contact qui promet que cela ne se reproduira plus…
« An SMM mini-unmanned aerial vehicle (mini-UAV) was caught in small-arms fire. In “LPR”-controlled Yurivka (26km south-west of Luhansk), the SMM heard 20 single shots of small-arms fire and saw that an armed person – 800m south-west of its position – was firing an AK-47 at an SMM mini-UAV, which it was operating to observe a training ground. The SMM called the mini-UAV back and left the area immediately. The mini-UAV did not sustain any damage. Subsequently, the SMM held a meeting with Ukrainian and Russian Federation representatives of the Joint Centre for Control and Co-ordination (JCCC), where it expressed its concern that the incident happened in spite of the fact that the flight had been notified beforehand with both the JCCC and “LPR” members. Russian Federation representatives of the JCCC stated that due to miscommunication, the “LPR” armed members on the ground had not received necessary information in advance. He added that “LPR” members controlling the area where the incident took place had apologised and given an assurance that such incident would not happen again. (extrait rapport 28.12.2015)
Fin décembre 2015, un militaire séparatiste de la LPR (république de Louhansk) interdit le décollage d’un drone, pour finalement l’autoriser, après avoir reçu un ordre de ses supérieurs (l’OSCE ayant joint le centre joint de contrôle et de coordination)
Armed “LPR” members delayed the SMM launching its unmanned aerial vehicle (UAV) for 30 minutes near “LPR”-controlled Krasnyi Lyman (30km north-west of Luhansk). The “LPR” “commander” initially told the SMM that it could not fly the UAV over the area. The SMM was allowed to conduct the flight after the Joint Centre for Control and Co-ordination intervened and the armed men received instructions from their superiors » (extrait rapport 29.12.2015)
Coup sur coup, les 2 et les 3 janvier, les drones de l’OSCE sont victimes de brouillage dans des zones gouvernementales ukrainiennes.
« SMM unmanned aerial vehicles (UAVs) were subject to jamming on two occasions – on 2 January when flying near the landing site in government-controlled territory and also on 3 January near government-controlled Marinka (22km west of Donetsk city centre) and Maksymilyanivka (30km west of Donetsk city centre). » (extrait rapport 4.1.2016)
Début janvier 2016, un officier ukrainien interdit le déploiement d’un drone pour « raisons de sécurité ».
« In government-controlled Pisky (11km north-west of Donetsk), a Ukrainian Armed Forces officer did not allow the SMM to fly its unmanned aerial vehicle (UAV) in the area. He stated that he had been ordered to prevent the launching for security reasons ». (extrait rapport 5.1.2016)
Le 15 janvier 2016, un drone est atteint par des tirs d’armes légères au dessus de la république de Louhansk, il réussit à revenir à sa base, mais devient inopérable…
An SMM UAV was hit by small-arms fire over “LPR”-controlled Stakhanov (49km west of Luhansk) as it attempted to observe a factory complex occupied by armed “LPR” members.* Although the UAV’s observation capacity was lost, it was able to return to the take-off location. The UAV has been rendered inoperable due to the damage sustained. (extrait rapport 16.1.2016)
Le 29 janvier 2016, le vol des drones est restreint dans la république de Donestsk. L’officier russe de contact avertissant que la sécurité ne peut pas être assuré au-delà d’une certaine zone
« A “DPR” member in “DPR”-controlled Horlivka said that flights of the SMM unmanned aerial vehicle (UAV) – in support of facilitating and monitoring adherence to the ceasefire to enable repair works – would be restricted to a small area over the power line and pipeline works only. A Russian Federation Armed Forces officer from the Joint Centre for Control and Co-ordination (JCCC) agreed and claimed that if the UAV deviated from that small area, its safety could not be guaranteed. As a consequence, the UAV was not launched. » (extrait rapport 30.1.2016)
Etre un drone dans l’est de l’Ukraine n’est donc pas une synécure. A suivre…
(Nicolas Gros-Verheyde)
Départ du Ludswighahen par RHIIB direction : le Numancia (crédit : Etat-Major espagnol)
(B2) Un migrant, récupéré il y a quelques jours en mer au large de la Libye par la corvette allemande ‘Ludwigshafen‘, a dû soigné sur le navire amiral de l’opération de lutte contre les trafiquants en mer Méditerranée (EUNAVFOR MED / Ops Sophia), le Cavour. Il souffrait d’une fracture à la cheville gauche.
Vers l’hôpital de bord du Cavour
Le migrant avait d’abord été récupéré par la corvette allemande ‘Ludwigshafen‘ (F-254). Mais son état nécessitait des soins rapides. La corvette allemande n’étant pas équipée pour recevoir un hélicoptère, l’homme a d’abord été évacué par mer, vers la frégate espagnole anti-aérienne ‘Numancia’ (F-83), avant d’être placé dans l’hélicoptère de bord AB-212, puis évacué sur le Cavour. Le porte-aéronef italien dispose en effet d’un hôpital de bord (le Role 2), apte à prodiguer l’ensemble des soins courants ou d’urgence.
121 migrants secourus
Cet homme fait partie des 121 migrants secourus en mer par la corvette allemande Ludwigshafen, lors de sa première journée de participation à l’opération européenne (lire : Le Cavour reprend le commandement de EUNAVFOR Med. Rotations espagnole et allemande). C’est un avion luxembourgeois, Seagull Merlin III, qui avait lancé l’alerte jeudi (28 janvier) au matin. Il avait repéré deux canots pneumatiques en détresse « dans les eaux internationales au nord de la côte libyenne » selon le QG d’EUNAVFOR Med. L’information, « immédiatement transmise » au commandement de la force (FHQ), embarqué sur le porte-avions italien Cavour, a été répercutée sur le Centre italien de coordination du sauvetage maritime (MRCC). De façon formelle, c’est lui qui a demandé à la corvette allemande d’intervenir (1). Après été mis au sec, à bord du Ludwigshafen, les migrants ou/et réfugiés ont ensuite été transférés à bord d’un navire de la marine italienne, qui opère dans l’opération Mare Sicuro (2), pour être réapatriés à terre.(NGV)
(1) C’est la procédure habituelle, les moyens européens sur la zone se coordonnant étroitement (pour le sauvetage en mer) avec le centre italien qui a, toujours, la responsabilité du sauvetage en mer dans la zone. En revanche, pour toute l’action de lutte contre les trafiquants et de surveillance, l’opération EUNAVFOR Med garde une autonomie opérationnelle (en haute mer).
(2) opération de sécurisation similaire à l’opération européenne, mais sous mandat italien
Chrystos Stylianides à Dadaab (crédit : CE)
(B2 à Dadaab) Depuis 25 ans et le début du conflit somalien, le Kenya et la Somalie doivent gérer une crise des réfugiés. Le commissaire européen à l’Aide humanitaire a voulu se rendre compte sur le terrain avec les acteurs internationaux. Présent sur place, dimanche à mardi (19 au 21 janvier 2016), Christos Stylianides a voulu réaffirmer la mobilisation de l’Europe. Dans un entretien exclusif avec B2, à Dadaab (au Kenya), il évoque, aussi, face à l’augmentation des besoins, la nécessité de trouver d’autres sources de financement, notamment privées.
Vous êtes à Dadaab, considéré comme le plus grand camp de réfugiés du monde. Un camp créé il y a 25 ans. Est ce que cela a encore du sens qu’un camp de réfugiés existe si longtemps ?
Dadaab est le symbole d’une solution temporaire pour réfugiés qui, jour après jour, devient une solution permanente. Cela renforce ma conviction que chaque crise soit appréhendée dans toute sa globalité et qu’un réel dialogue politique s’instaure le plus vite possible pour amener la paix. Car quand vous décidez de fuir votre pays, c’est très difficile d’y retourner.
« La situation humanitaire reste très critique »La crise somalienne semble évoluer de façon positive. Une évolution tenable ?
L’évolution de la situation sur le terrain montre, en effet, des signes positifs au regard de la crise des réfugiés, je pense notamment au programme de rapatriement de réfugiés somaliens. En Somalie, le projet d’accord vers un nouveau processus électoral progresse. Mais la situation humanitaire reste, elle, très critique. Près de cinq millions de personnes ont toujours besoin d’une assistance humanitaire. Et plus d’un million de Somaliens sont toujours déplacés à l’intérieur du pays.
La menace terroriste d’Al Shabaab reste forte. Le lendemain de votre visite en Somalie, une nouvelle attaque a frappé des civils à proximité de Mogadiscio. La semaine précédente, des soldats kenyans, engagés depuis 2011 ans dans le cadre de l’AMISOM (mission de l’Union africaine), ont été visés…
Ce regain de violence est sans doute le signe que le développement d’une solution politique en Somalie dérange Al Shabaab. Au travers de cette attaque, ils essayent de retarder ou défaire ce processus essentiel pour rétablir une paix longtemps attendue. La seule à même d’apporter une solution à la crise humanitaire que vit ce pays.
« Le caractère volontaire du retour des réfugiés somaliens (doit être) absolument respecté »Vous avez évoqué le plan de rapatriement. Vous avez justement rencontré des Somaliens quelques minutes avant qu’ils prennent un bus pour quitter le camp de réfugiés de Dadaab au Kenya pour retourner en Somalie. Aviez-vous besoin d’être rassuré ?
Ce programme de rapatriement résulte d’un accord tripartite entre la Somalie, le Kenya et le Haut commissariat aux réfugiés (UNHCR). La réussite de sa mise en œuvre suppose que le caractère volontaire du retour des réfugiés somaliens soit absolument respecté. J’ai pu le vérifier. Ensuite, en tant que commissaire à l’aide humanitaire, il m’importe que ces réfugiés puissent disposer, à leur retour, des services sociaux et d’éducation minimum. C’est ce que nous devons continuer à soutenir.
Près de 6000 Somaliens ont pris cette décision ces derniers mois. Est-ce un exemple pour d’autres situations notamment les Syriens en Europe ?
Je ne crois pas. Il est difficile de faire le parallèle avec d’autres situations, notamment en Syrie. Les conditions sont très différentes ici. Pouvons-nous croire que pour la majorité des réfugiés syriens ayant trouvé refuge en Europe, au Canada ou ailleurs, le retour dans leur pays sera si simple ? Je n’en suis pas certain.
Quelle est l’aide européenne débloquée aujourd’hui ?
Nous avons donc décidé de débloquer une nouvelle aide de 29 millions € pour les Somaliens. Un montant qui s’inscrit dans un effort plus vaste. En 2016, l’Union européenne consacre 77 millions d’euros à la crise humanitaire de la Corne de l’Afrique. 17 millions serviront à l’aide d’urgence pour les plus vulnérables au Kenya (nourriture, soins de santé, eau, assainissement et hygiène, logement, protection et éducation dans les situations d’urgence).
Vous citez l’éducation en situation d’urgence. C’est une nouvelle priorité ? Qu’est ce que cela signifie concrètement ?
Je prendrais un exemple pour l’illustrer, celui de la crise syrienne. Lors de ma première visite en tant que commissaire européen, dans la vallée de Bekaa, au Liban, j’ai vu que la majorité des enfants réfugiés n’étaient pas scolarisés. Plus précisément, nous avons évalué à 80% le nombre de ces enfants n’allant plus à l’école. C’est pourquoi nous avons cherché, avec des partenaires, un moyen d’y remédier. Nous avons mis en place des écoles informelles, mais en collaboration avec les autorités puisque nous utilisons leurs locaux. Dans cette vallée, nous avons déjà réussi à diminuer le nombre d’enfants n’allant pas à l’école, de 80 à 50 %. La philosophie de l’éducation en situation d’urgence, c’est donc cela : quand la situation est telle que l’accès ordinaire à l’école n’est plus possible, nous devons absolument trouver des solutions pour surmonter ces difficultés. L’accès à l’éducation en situation d’urgence est un problème autant qu’un enjeu majeur. Comme je l’ai dit à des jeunes filles et garçons du camp de Dadaab, c’est grâce à l’éducation que chacun doit pouvoir construire son avenir, résister à la radicalisation.
« Je suis persuadé que nous devons aller chercher du coté du secteur privé » de nouveaux moyensLa crise des réfugiés a provoqué une forte hausse du budget humanitaire. Les ONG craignent que cela ne soit aux dépens de l’aide humanitaire en 2016. Ont-elles raison d’avoir peur ?
Nous faisons face à une réalité. Face à une multitude de contextes instables, les besoins augmentent, jour après jour. Et, malheureusement, les fonds diminuent…
…même ceux de l’Union européenne ?
Oui, nos ressources ne sont tout simplement pas illimitées. Je travaille pour trouver les moyens de dépasser cette équation qui ne peut plus tenir. Je suis, pour ma part, persuadé que nous devons aller chercher du coté du secteur privé. Nous devons réfléchir à un nouveau cadre d’instruments mondiaux qui favoriserait l’engagement du secteur privé au regard de ses responsabilités sociales.
Ces nouvelles ressources, ce sera l’un des enjeux du sommet humanitaire mondial d’Istanbul en mai prochain ?
Nous devons mettre à profit ce sommet pour améliorer l’efficacité dans la réponse aux crises, ce qui suppose l’engagement d’un plus grand nombre de donateurs. Nous devons améliorer la protection des personnes vulnérables, ainsi que des acteurs humanitaires. Ce sont les objectifs sur lesquels je me concentre.
(Propos recueillis par Emmanuelle Stroesser, à Dadaab)