(B2) Entre sommets, mini-sommets et rencontres extraordinaires, c’est bien la dixième fois en trois ans que les leaders de l’Union européenne se retrouvent ce jeudi (28 mai) avec, sur leur table, un des dossiers les plus chauds : les migrations
Une crise qui n’est pas que politique, elle est réelle
Certes les chiffres ne sont plus aussi alarmants qu’en 2015 ou 2016, où l’Europe devait faire face à un pic d’environ 1,2 million de demandeurs d’asile. Mais la situation n’est pas réglée pour autant. La Grèce fait toujours face à des arrivées continuelles de migrants (environ 2000 par mois). En Italie, on n’est plus au chiffre de 15 ou 20.000 arrivées par mois comme en 2015. Le flux a diminué environ de 75% selon les dernières estimations. Il continue cependant à raison de quelques milliers par mois et il devrait s’accélérer durant ces semaines d’été où la mer est plus calme.
Une arrivée concentrée de navires toujours possible
Si la tendance actuelle se poursuit, on pourrait donc se retrouver certains jours avec une petite dizaine de bateaux lancés à partir des côtes libyennes, et plusieurs milliers de personnes à secourir dans le même temps. C’est le même principe : entre juin et août, le nombre d’arrivées double ou triple par rapport aux mois d’hiver. Une série de naufrages, avec plusieurs dizaines de morts n’est pas à exclure. A cela il faut ajouter que l’Italie est à bout de souffle. Avec près de 700.000 personnes recueillies en mer (678.298 très exactement selon le dernier chiffre OIM) depuis 2012, dont près des 2/3 par les navires des garde-côtes, de la Guardia di Finanza et de la marine italienne, l’effort n’est pas négligeable. Accueillir des dizaines de milliers de migrants ou de réfugiés n’est pas une aubaine.
Une politique de tête dans le sable
Dire qu’il y a une crise politique est donc plutôt réducteur, et trop facile. C’est, une nouvelle fois, se mettre la tête sous le sable. Oui, il y a une crise politique qui est latente, celle d’un lent repli sur soi, de petits nationalismes, mais elle n’a pas commencé au printemps 2018 avec l’arrivée au pouvoir de la Ligue du nord en Italie (article à suivre). Mais il y a aussi un vrai problème non pas tant de flux, mais de déséquilibre migratoire en Europe, de désorganisation du secours en mer, de la gestion et de la répartition des personnes récupérées ensuite, et d’un manque de solidarité patent. Et ceci ne date pas d’une dizaine de jours et d’un ou deux bateaux (Aquarius et Lifeline) laissés à la dérive. La réalité, honteuse, c’est qu’on a laissé l’Italie (et la Grèce) se dépatouiller tous seuls avec le problème. On peut ne pas être d’accord avec l’idéologie de Matteo Salvini. Mais l’impétueux ministre italien de l’Intérieur a une qualité : il a réussi à mettre les pieds dans le plat et a obligé les Européens à se pencher sur le problème. Il serait temps !
L’alarme donnée depuis quatre ans
Depuis plusieurs années, les différents dirigeants qui se sont succédé à Rome (qu’ils s’appellent Enrico Letta, Matteo Renzi, Paolo Gentiloni) ont sonné l’alarme et appelé à l’aide les Européens (Lire : Ne laissez pas l’Italie seule en Méditerranée (Letta)). Les Européens ont bougé mais à leur manière, lentement, sans se presser.
Les Italiens ont fait le job
L’Italie a pris en charge les secours dans le no man’s land — normalement la zone libyenne. Jusqu’à aujourd’hui, le centre MRCC de Rome a géré les appels, réparti les navires et coordonné tous les secours bien au-delà de sa zone légale de secours. Personne ne s’est jamais plaint. L’Italie est même allé au-delà de ses responsabilités en autorisant tous les navires à débarquer les rescapés ainsi récupérés. Il existe d’autres ports sûrs à proximité des côtes libyennes (en Tunisie notamment). Mais tout le monde trouvait cela bien, sans chercher à combler ce vide ou pallier les carences.
Une impéritie de quelques États
C’est cette impéritie, non pas des institutions européennes, qui ont plutôt bien fait leur travail, présenté des idées, des plans, des propositions (1), mais de l’ensemble des États européens qui fait qu’il y a crise aujourd’hui. Outre la solidarité naturelle qui devrait jouer entre tous les pays, deux pays en particulier ont une responsabilité particulière dans cette crise. La France et le Royaume-Uni notamment — ainsi que l’OTAN — ont joué en 2011 un jeu dangereux non pas vraiment dans l’intervention militaire (à ses débuts) mais dans sa poursuite et sa transformation dans un objectif de faire tomber le régime Kadhafi (2).
Quelles solutions mettre en place à court terme ?
Ce ne sont pas les plate-formes de débarquement ou autres hotspots qui vont résoudre la question.
Réagir dans les 24h ou 48h
La crise d’aujourd’hui mérite une réponse rapide non pas d’ici quelques semaines ou quelques mois, mais dans les 24 ou 48 heures qui viennent. Les navires vont continuer de partir de Libye ou de Tunisie, de déjouer les (éventuels) blocages des garde-côtes, et arriver au large. Il faudra bien alors venir en aide aux naufragés. Si ce ne sont les navires des ONG, ce seront (comme avant que les ONG arrivent) les navires marchands ou les navires de guerre qui croisent nombreux au large qui devront s’y coller. Droit de la mer oblige. Une règle de fer obligeant à répondre à tout SOS.
Avoir une structure de gestion de crise des navires
Actuellement, la répartition des responsabilités en cas de prise en charge d’un navire par l’Italie ou Malte se fait un peu au petit bonheur, au niveau politique, ou par les diplomaties directement entre elles. Il n’existe pas de structure dédiée à cette coordination et répartition européenne. On pourrait penser à Frontex pour être dotée de ce rôle. Mais des solutions provisoires peuvent être trouvées.
Renforcer le MRCC italien
La solution la plus simple et la plus rapide, c’est de renforcer le MRCC italien avec des officiers venant de différents pays et des agents en charge de l’asile pour permettre la coordination de l’accueil des navires et la répartition de leur ‘cargaison’ humaine. L’idée des plate-formes de débarquement (hors UE) ou des centres contrôlés (semi-fermés) dans l’Union européenne est une solution à moyen terme, pas une solution d’urgence.
Quelles solutions mettre en place à moyen terme ?
Le moyen terme ce n’est pas trois quatre ans mais plutôt dans les six prochains mois.
Soutenir les garde-côtes libyens
On ne peut pas se cacher les yeux. Il est nécessaire de remettre sur pied une force de garde-côtes bien dotée, bien payée. Cela nécessite de fournir les vedettes et bateaux demandés (une bonne dizaine), et de mettre en place un plan de formation plus important. Seuls 213 marins ont été formés. Ce n’est pas suffisant. Cela nécessite de former plusieurs centaines de personnes.
Mettre en place un MRCC à Tripoli ou en Libye
Il importe, si on veut avoir une zone de secours libyenne conséquente, d’avoir un centre de coordination des secours en mer, reconnu comme tel et doté de moyens conséquents. Une expertise européenne pourrait être bienvenue. NB : Un tel soutien avait été procuré au centre de gestion de crise en Égypte et dans le Golfe.
Conclure un accord avec les Tunisiens
Une bonne partie des flux (qui s’est monté à un cinquième récemment) arrive désormais de Tunisie, avec des Tunisiens. En cause sûrement la situation économique. Car il est difficile de considérer qu’il y a une situation générale impliquant un droit d’asile quasi-automatique (comme pour les Syriens). Il importe de mettre en place un accord avec Tunis, avec financements et soutiens matériels à la clé.
(Nicolas Gros-Verheyde)
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(B2) Tous les trois mois, au moins, les 28 se retrouvent à Bruxelles au sommet. Comment se déroule la réunion ? Nous avons pu pénétrer dans les backstages. Récit.
Le tapis rouge que foulent les Chefs avant de faire une halte devant les photographes ou la presse pour une déclaration. Le ‘doorstep’ dans le jargon (© NGV / B2)
Il ne reste plus que quelques minutes avant l’arrivée des chefs. Dans les coulisses, hommes et femmes du protocole, de la sécurité, huissiers, cuisiniers, diplomates s’activent. Objectif : que tout soit fin prêt pour recevoir les 28 leaders, qu’ils soient premiers ministres ou présidents de la république. L’organisation d’un sommet européen obéit en effet à une mécanique préparée au millimètre. Mais il faut aussi pouvoir faire face aux imprévus ou aux impondérables : un invité surprise à convoyer en urgence, un Chef qui claque la porte, une réunion qui dure toute une nuit, des bilatérales à organiser, etc. Bref… tout doit se dérouler sans anicroche.
Ici, pas de luxe inutile. Dans ce bâtiment inauguré tout récemment, en décembre 2016, peu de dorures ou de grand luxe. Juste un assemblage recherché du verre et du bois, des couleurs chatoyantes. Tout est fait pour faciliter la circulation des responsables, de l’entrée à la sortie, en passant par les salles.
Un côté ‘coin de feu’ sans cheminée
Dans le dispositif européen, assez bien huilé, la réunion des leaders garde un petit côté anachronique. Malgré toutes les innovations technologiques, chacun cherche à tout prix à préserver l’esprit d’origine : la « conversation au coin du feu » chère à Valery Giscard d’Estaing. Dans la salle qui leur est réservée, au 7e étage du bâtiment Europa, fraîchement inauguré, les Chefs seront, ainsi seuls, ou presque. Il n’y a pas de chaise prévue à côté d’eux.
Seuls à table
Pas question ainsi, comme pour une réunion ministérielle d’avoir des collaborateurs à leurs côtés, qui entrent ou qui sortent provoquant un vrai tourbillon. « Cela change totalement l’ambiance. C’est plus austère », précise un habitué de ces réunions. Pas question non plus de se faire remplacer par un ministre. De toute façon, « il n’y a qu’une seule chaise et qu’un seul pin (de sécurité) par délégation » rappelle notre interlocuteur. Si le Chef ne peut être là, la chaise reste donc vide à moins d’autoriser un autre leader à parler en son nom (1). « C’est comme dans un club. Seuls les membres du club peuvent parler. »
Quelques happy fews discrets
Sont autorisés uniquement à pénétrer dans le saint des saints quelques hauts fonctionnaires, tels le jurisconsulte du Conseil, appelé à la rescousse quand se pose un problème juridique, les secrétaires généraux ou chefs de cabinets (2), et les preneurs de notes (notetakers dans le jargon courant). Mais ils sont bien placés derrière les chefs, et n’ont accès à la table que si on leur demande expressément.
En anglais… ou dans toutes les langues
Derrière les vitres, prennent place des traducteurs qui vont officier, si nécessaire. La crème de la crème des traducteurs, sélectionnés et bien entraînés. « Ils ne font pas que cela. » Mais ce sont souvent les mêmes. Ils sont spécialement préparés à la réunion, bénéficiant des principaux de langage. Il n’est pas question, là, de faire des approximations. L’anglais est cependant couramment pratiqué par plusieurs Chefs qui préfèrent ainsi s’exprimer sans intermédiaire. Mais « souvent, surtout quand la question est sensible ou technique, un Chef va préférer s’exprimer dans sa langue d’origine », nous confie un diplomate européen. Si les coloris peuvent être chatoyants au sol, et la politesse de rigueur, les conversations n’en sont parfois pas moins rudes en effet. On se souvient de la soufflante qu’avait passé Nicolas Sarkozy sur José-Manuel Barroso à propos des Roms. Une soufflante qui avait résonné jusque dans les couloirs, même si les intéressés avaient démenti ensuite.
Un interlude photographique
Simple concession à cette collective solitude, le moment du tour de table. Quelques photographes et cameramans triés sur le volet sont autorisés au début de la réunion à filmer l’arrivée des chefs, leurs sourires ou leurs crispations. Pas trop longtemps et micros éteints. Au bout de quelques minutes, les portes se referment. Les échanges peuvent commencer. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, ancien Premier ministre polonais, ouvre le débat, donnant la parole en premier à celui qui a une proposition à faire : ce peut être le président de la Commission ou la Haute représentante de l’Union, Federica Mogherini ou un des 28 leaders.
Des débats assez libres
Puis intervient qui veut. Il n’y a pas de règle précise. « Certains préfèrent parler au début, d’autres préfèrent attendre la fin du débat. Tout est question de tactique et de sentiment personnel » explique un diplomate. Celui qui veut parler met son chevalet debout ou fait un signe. Le secrétaire général du conseil tient le registre (une petite feuille) de ceux qui veut parler et la tend au président du Conseil européen. Une discussion peut être courte, résumée à une ou deux personnes qui s’expriment. Et cela dure quelques minutes. Parfois, elle peut être plus longue. Sur les sujets politiques, tout le monde veut pouvoir s’exprimer, même s’il s’agit parfois de répéter la position d’un autre. Un simple tour de table à 28 peut prendre déjà deux heures. Et si la question est très politique, la discussion va se prolonger… Ces prises de parole — tout autant que les silences ou non prises de parole — sont importantes.
Une décision au consensus
Toutes les décisions se prennent au consensus. Une procédure définie par un vieux routier des sommets comme ceci : « Si personne ne s’exprime, c’est que tout le monde est d’accord ». S’il n’y a pas d’accord… la conversation continue, ou on décide de remettre cela à plus tard. Parfois on procède plus subtilement, en confiant à la Commission européenne, à la Haute représentante ou à un autre sage européen le soin d’étudier ou d’approfondir des solutions. Ce qui permet de gagner du temps, et de parfaire le consensus. « L’objectif est d’avoir tout le monde à bord, pas de minoriser un tel ou un tel. »
Des preneurs de note très utiles
Le sommet ne serait pas un sommet sans un rouage très discret : les Antici, ainsi nommés par le diplomate italien qui avait inauguré la fonction (sous la présidence italienne de 1975!). Ces diplomates de haute volée, un par État membre, sont placés dans une petite salle très discrète, non loin des Chefs. Ils sont régulièrement informés par un des trois notetakers, qui se relaient dans la salle principale, et se rend dans la salle antici. Une information orale uniquement.
Une sorte de téléphone arabe à l’européenne
Les diplomates, munis de leur laptop (3), répercutent ensuite ces informations vers les délégations, où patientent pêle-mêle, dans une ambiance plus ou moins décontractée, le directeur de cabinet du président, ses conseillers et quelques diplomates. Une sorte de téléphone arabe à l’européenne qui a un gros intérêt : préserver au maximum la discussion « la plus ouverte et la plus franche possible ». Les réseaux sociaux ont, bien sûr, changé la donne. Munis de leur portable, les chefs s’autorisent de temps à un autre un tweet, qui font la joie des journalistes et des diplomates (ou leur ire parfois). Mais le secret des discussions reste, globalement, préservé…
(Nicolas Gros-Verheyde)
Papier publié dans Sud Ouest ce jour, complété et détaillé
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(B2) Selon un dernier bilan (obtenu par B2), l’Union européenne a formé, par l’intermédiaire de son opération militaire déployée en Méditerranée (EUNAVFOR Med Sophia), en tout 213 membres du personnel des garde-côtes de la marine libyenne.
Cinq équipages formés
Cela a permis notamment de constituer cinq équipages de patrouilleurs complets. Ce n’est pas mal. Mais on est très loin des plus de 500 espérés, comme l’avait confié le commandant de l’opération, le contre-amiral Enrico Credendino.
Un première vague de formation début 2017
La formation a été à la fois pratique (en mer) et théorique. Le premier train de formation en mer a été achevé début 2017 en faveur de 93 stagiaires libyens issus des garde-côtes et de la marine libyens après 14 semaines de formation à bord du navire italien San Giorgio et deux premières semaines à bord du navire néerlandais Rotterdam (Lire : Les premiers garde-côtes libyens diplômés !). Plusieurs États membres et des organisations / agences comme que Frontex, le HCR et l’OIM ont également contribué avec des équipes de formation.
Quelques formations spécialisées depuis
Des formations ont également été effectuées à terre pour 20 personnes Crète (Grèce), pour 20 personnes à Malte, et 3 personnes à Rome (Italie). Récemment, deux modules ont ainsi été réalisés à Tarente en Italie pour 65 marins et en Crète (Grèce) pour 22 marins et 3 autres à Rome (*). Un module de formation supplémentaire est prévu en Espagne pour 34 candidats début juillet 2018.
Un suivi qui pêche encore
Selon le dernier rapport de suivi, datant de mars, les capacités et le professionnalisme « s’améliorent », mais le suivi des garde-côtes reste toujours aléatoire. Le personnel de EUNAVFOR MED n’est toujours ainsi pas présent en permanence dans les centres d’opération des garde-côtes de la marine libyenne, contrairement à ce qui était prévu (Lire : Les Européens veulent mieux assurer le suivi des garde-côtes libyens. Comment ?).
(Nicolas Gros-Verheyde)
(*) Le total aboutit à 226 personnes formées. C’est normal : certaines (13) ont suivi plusieurs formations. On arrive ainsi à 213 personnes.
Lire aussi : Une operation passée sous les écrans radars : Sophia. Quel est son bilan ?
Sur la formation des garde-côtes :
Mis à jour 28.6 avec le détail des formations théoriques
Cet article Combien de garde-côtes libyens ont été formés par les Européens ? (V2) est apparu en premier sur Bruxelles2.
Cet article Albanie et Macédoine. Une ouverture des négociations en 2019 sous conditions est apparu en premier sur Bruxelles2.
Cet article Carnet (27.06.2018). Russie (sanctions). COPS (Agenda). Russie-Ukraine (sanctions). Belgique (Libye). Centrafrique (rapport ONU). EUNAVFOR Atalanta (évolution). Airbus (Brexit). Roumanie (menaces russes). Erdogan (félicitations critiques). Chypre (bilan ligne verte). UE-Inde (sécurité). UE-Canada (priorités). Iran-UE (migrations). Iran-Onu (rapport). UNRWA (collecte). Asile (réforme/big data). Migrants (aide humanitaire). Agenda (présidence autrichienne). Hongrie (Commission). MFF 2021 (note). People (DGRIS, CEIS) est apparu en premier sur Bruxelles2.
(B2) Après 14 mois de présence, les Allemands ont mis fin à l’engagement de leurs hélicoptères de combat Tigre dans la mission des casques bleus au Mali (MINUSMA). Les quatre hélicoptères et 363 militaires du 36e régiment d’hélicoptères d’attaque Hessian de Fritzlar rentrent au pays
Hélicoptère Tigre allemand de le hangar à Gao (© NGV / B2)
Soutien rapproché, surveillance..
Ces hélicoptères de combat ont été utilisés dans la MINUSMA « environ 185 fois », indique la Bundeswehr. Ils ont rempli plusieurs types de missions. Tout d’abord, le soutien aérien rapproché quand les forces terrestres ont été attaquées. « L’utilisation des armes [dont sont dotées l’hélicoptère] n’a jamais vraiment été nécessaire », racontent les Allemands, « les attaquants s’enfuyaient à l’arrivée du Tigre ».
… et show of force
Les convois de troupes des Nations Unies étaient souvent escortés depuis les airs pour les protéger des attaques ou les avertir des endroits dangereux. Les Tigres ont aussi été utilisés pour surveiller les routes importantes ou les points de terrain. Enfin, ils ont fait du ‘Show of Force‘, un passage à basse altitude destiné à impressionner. Ces survols et les escortes de convois ont dissuadé les attaquants et également contribué à la protection des forces terrestres.
Comme un vide
Les hélicos d’attaque allemands partis, tout comme les hélicos belges de transport NH 90, demeure un petit vide pour quelques jours certes. Mais un vide crucial. En cette fin juin début juillet, le Mali est en pleine période électorale. Les Canadiens doivent prendre le relais, mais un peu plus tard. Ils arrivent avec moins de moyens que les Européens : deux hélicoptères de transport type Chinook (au lieu de cinq hélicoptères NH 90 fournis par les Belges et Allemands), accompagnés de quatre hélicoptères Grillon. Et apparemment avec des conditions d’emploi un peu plus limitées.
Des Canadiens un peu hésitants
Au Canada, la décision a été un peu longue et compliquée. Il a d’abord fallu plusieurs mois au gouvernement pour confirmer son engagement. Les capacités d’emploi des engins pourraient aussi être plus limitées : les hélicoptères de combat auront surtout une vocation d’accompagnement des Chinook, mais pas automatiquement des missions autonomes. Un débat à visée essentiellement interne a miné l’intérêt stratégique du déploiement ; l’opposition conservatrice mettant en évidence les risques (1) et critiquant jusqu’à l’opportunité d’une telle mission (Lire chez nos collègues de 45e degré nord).
D’autres hélicoptères présents avec moins de capacités… ou pour d’autres missions
Des hélicoptères MD-500 salvadoriens seront aussi présents. Mais ils n’ont pas la même élongation que les NH 90 (150-200 km seulement de portée). La MINUSMA dispose également d’une capacité d’hélicoptères civils de type Mi-8 fournis par une société ukrainienne, mais ils ne peuvent servir qu’au transport de fret ou d’hommes et nécessitent une protection sur place. Des hélicoptères lourds britanniques (trois Chinook CH-47) arrivent dans la zone, à Gao, mais dans le cadre de l’opération française anti-terroriste Barkhane.
Le taxi des airs : un besoin vital pour les casques bleus
Le besoin d’hélicoptères est fondamental pour la force des Nations unies : pour les évacuations médicales mais aussi pour le transport, la protection des troupes au sol, la dissuasion (comme l’ont bien expliqués les Allemands). Si les hélicoptères ne peuvent aller vers le nord (hélicoptères salvadoriens) ou sont limités dans leur emploi (hélicoptères canadiens), cela limite d’autant l’autonomie d’action de la MINUSMA et sa force de dissuasion. Le ravitaillement par voie terrestre reste toujours très risqué et parfois compliqué en période de saison des pluies. Toutes les bases de la force ne disposent pas également d’une piste d’aviation permettant aux avions d’atterrir. Celle de Kidal, par exemple, est hors circuit. Minée puis bombardée à deux reprises, elle est envahie en partie par la population.
Une sourde inquiétude à l’ONU
L’inquiétude est donc bien réelle autant dans les rangs de la MINUSMA que dans différents pays. Lors du débat au Conseil de sécurité des Nations unies, jeudi dernier (14 juin), sur le renouvellement de la mission, plusieurs délégués ont regretté « l’absence de moyens suffisants », comme l’a résumé le diplomate britannique Jonathan Allen. « Le déploiement de multiplicateurs de forces renforcerait les capacités de la MINUSMA », a plaidé son homologue ivoirien Ilhari Alcide Djédjé, estimant nécessaire que la mission soit dotée de capacités logistiques nécessaires pour la prévention des attaques et à la protection des convois. Quant au russe Dmitry Polyanskiy, il a rappelé que « les pays qui ont pris des engagements à ce titre doivent les honorer ».
Commentaire : comme un vide européen
Après le retrait néerlandais, les retours belge et allemand, on peut se poser la question pourquoi les Européens n’ont pas réussi à proposer une offre groupée pour permettre d’avoir une capacité continue et opérationnelle en matière d’hélicoptères. Alors que chacun en Europe brode sur l’intérêt primordial de défendre l’ONU et le multilatéralisme, de stabiliser la région du Sahel et d’assister les forces du G5 sahel et maliennes, de permettre la sécurité dans les régions d’origine des migrations, l’Europe n’arrive pas se mobilier pour offrir aux casques bleus une petite force héliportée de transport et de protection, soit une dizaine d’hélicoptères et 200 personnels. C’est faible et… dangereux. Car cette faiblesse est visible aux yeux de tous.
(Nicolas Gros-Verheyde, de retour de Gao)
(1) Deux pilotes allemands Tigre ont perdu la vie lors de ce déploiement lors du crash de leur hélicoptère au nord-est de Gao juillet 2017.
Le mémorial en honneur des six soldats tombés dans le cadre de l’engagement de la MINUSMA : deux Allemands et quatre Néerlandais.
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(B2) Une phrase est relativement passée inaperçue au sommet franco-allemand de Meseberg. Répondant à une question d’un journaliste sur le sort de l’Aquarius, le président français Emmanuel Macron a, une nouvelle fois, taclé le gouvernement italien de Giuseppe Conte, et en particulier son ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini.
Un tacle indirect certes. Mais très précis. Il rappelle un point important dans la trajectoire du navire de SOS Méditerranée, l’Aquarius.
« La problématique de l’Aquarius, c’est à partir du moment où le bateau quitte les eaux libyennes. C’est au moment où certains garde-côtes les mettent sur un bateau et commencent à les accompagner. Il ne se pose pas à quelques kilomètres des côtes. »
Le Dattilo (CP-940) navire des garde-côtes italiens amarré à Valence aux côtés de l’Aquarius (crédit : SOS Méditerranée)
Le gouvernement italien mis en cause
En utilisant le mot « certains », le président n’a pas voulu préciser « italiens ». Mais il y a pensé très fort. De même, il n’a pas accusé les Italiens d’avoir monté un coup. Mais il y a pensé très fort.
(Nicolas Gros-Verheyde)
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