Le général de corps d’armée Bernard de Courrèges d’Ustou, directeur de l’IHEDN et de l’Enseignement militaire supérieur a décerné les prix scientifiques de l’année 2016-2017, ...
Ein Zusatzprotokoll zum deutsch-ägyptischen Kulturabkommen soll eine neue Rechtsgrundlage schaffen, um die Tätigkeit der politischen Stiftungen in Ägypten zu regeln. Es ist jedoch unwahrscheinlich, dass sich ihre Arbeitsmöglichkeiten dadurch tatsächlich verbessern werden. Zum einen beschränkt das Protokoll die Aktivitäten der Stiftungen in entscheidenden Punkten. Zum anderen wird der öffentliche Raum für politische Betätigung in Ägypten ohnehin immer kleiner, weil die Regierung die Repression gegen zivilgesellschaftliche Akteure zunehmend verschärft. Die Stiftungen können deshalb keinen wirksamen Beitrag zur Entwicklung einer unabhängigen Zivilgesellschaft leisten. Voraussetzung dafür wären weniger restriktive Rahmenbedingungen – ein Anliegen, für das sich die deutsche Politik nachdrücklicher als bisher einsetzen sollte. Geschieht dies nicht, trägt das Protokoll nur dazu bei, die politischen und gesellschaftlichen Rückschritte am Nil zu legitimieren. Damit könnte es zum Vorbild für andere autoritäre Regime werden.
François-Bernard Huyghe, docteur d’État en sciences politiques, est directeur de recherche à l’IRIS et enseignant au CELSA Paris IV Sorbonne. Spécialiste de l’influence stratégique et médiologue, il répond à mes questions à l’occasion de la parution de l’ouvrage : « Daech : l’arme de la communication dévoilée », aux éditions VA Press.
Comment expliquer l’attractivité d’un discours califal, à rebours de celui – hédoniste et apaisant – diffusé par nos sociétés ?
Le « grand récit » de Daech, le cœur de son idéologie, repose sur une promesse spirituelle – le salut éternel par l’obéissance et le sacrifice -, sur un projet géopolitique illimité – s’emparer de la Terre entière pour la soumettre à la loi divine à partir du califat – et sur un mécanisme victimaire – les « vrais » musulmans sont persécutés depuis le VIIe siècle (y compris par les chiites, par les sunnites non djihadistes ou non soumis au calife), il faut les venger -.
Cette trilogie – mourir pour son âme, conquérir pour sa loi, punir pour sa communauté – implique un système de valeur et même un mode de raisonnement (tout étant contenu dans le Coran et dans les hadiths, la réponse à toute question doit être trouvée par la « méthodologie prophétique » et l’interprétation littérale) ; le tout s’oppose point par point à notre système mental. Comme un logiciel qui affecterait d’un signe inverse ce que nous estimons positif – la démocratie, l’autonomie des individus, le plaisir, la tolérance, l’innovation, la paix – et vice-versa pour la soumission, la conquête, la punition de toute déviance, le sacrifice, etc. Et comme les djihadistes sont, de surcroît, persuadés de l’imminence de la bataille finale, qu’ils vont l’emporter juste avant la fin des temps et qu’eux, ou leurs enfants, vivront dans le monde parfait défini selon leurs critères, la promesse est également garantie par l’Histoire.
Vous décrivez Daech comme une « scission ultra » d’Al-Qaida. Pourquoi ?
C’est vrai si l’on retrace la genèse de l’organisation. Sommairement, face à l’invasion américaine, Al-Zarqaoui fonde en 2004 Al-Qaïda en Irak, qui privilégie déjà les attentats-suicides et s’en prend aux chiites ; il fusionne en 2006 avec d’autres groupes dans l’État islamique d’Irak. À la suite de complications, le groupe devient, sous Abou Bakr al Baghdadi, en 2013, un État Islamique en Irak et au Levant (EIIL) qui prétend donc soumettre Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaïda. D’où ce conflit sanglant entre les deux organisations.
Pressé de trancher et d’apaiser la guerre interne, Al-Zahouari, successeur de Ben Laden, ne peut imposer ni accord des parties, ni obéissance des « durs » : la scission est consommée en 2014, et l’EIIL, qui, comme son nom l’indique, veut établir immédiatement un État islamique en Irak et en Syrie, devient le califat, proclamé en juin 2014.
Face à Al-Qaïda, canal historique, cette tendance s’est démarquée, outre le déni évident d’autorité et de légitimité, par la volonté d’établir immédiatement une puissance théologico-politique. Elle prend la succession du prophète et a vocation à commander à tous les musulmans sincères en attendant la conversion du reste de la Terre.
Ceci implique aussi que la stratégie initiale d’Al-Qaïda, qui consistait notamment à combattre l’ennemi « lointain » occidental pour déstabiliser l’ennemi « proche », les régimes arabes, soit fausse. Idem pour toute priorité mise entre les adversaires ou les fronts, toute trêve ou alliance. Le califat veut une sorte de guerre universelle contre tous ses ennemis à la fois ; il pousse à l’extrême le principe que qui n’est pas avec lui est contre lui et le « tout, tout de suite ».
En prétendant à la fois établir un système territorialisé mais aussi prolonger la guerre par un terrorisme mondial (« guerre du pauvre »), en voulant accélérer l’Histoire et en condamnant ceux qui ne font pas immédiatement allégeance à Al-Baghdadi, Daech, impatient et maximaliste, déborde Al-Qaïda, stratégiquement et idéologiquement.
Comment expliquer le manque d’efficacité des stratégies occidentales de contre-propagande ?
Il reflète d’abord une incompréhension de fond. On ignore le logiciel adverse évoqué plus haut, en traitant le djihadiste ou le radicalisé, qui sont des convertis, comme des “paumés » relevant d’un traitement psychologique ou comme des cas sociaux, sans même s’intéresser au contenu de la croyance ni à ses justifications. Nous imaginons parfois des victimes de la propagande en ligne qu’il faut ramener à la complexité du réel. Les campagnes pour « révéler » au malheureux les mensonges qu’il a subis (« tu risques de mourir là-bas » alors qu’il part en quête du martyr) ou à démonter les manipulations de propagande califale (« ils t’endoctrinent ») échouent. L’État qui subventionne ces opérations avec des méthodes inspirées de la désintoxication des alcooliques signifie au djihadiste qu’il est un abruti à normaliser.
Plus habiles sont les méthodes acceptant le point de vue religieux ; elles sont destinées à montrer que le djihad n’est pas licite, que le califat est une déviation et qu’il s’y pratique un mauvais islam. Mais encore faudrait-il que les djihadistes n’aient pas été mis en garde contre les « hypocrites », les imams qui tenteraient ainsi de les raisonner et seraient de mauvais bergers et que le contre-discours n’apparaisse pas estampillé par le gouvernement : à leurs yeux nous sommes les agresseurs, ne l’oublions pas.
Enfin on peut agir sur les vecteurs de la communication djihadiste. Soit par censure, soit plus habilement en amenant les moteurs de recherche à renvoyer les demandes susceptibles, au vu de leurs mots-clefs, de concerner le djihad vers des « bons » sites militants contre la radicalisation et le discours de haine. Mais il n’est pas très difficile de trouver du contenu djihadiste sur les réseaux sociaux.
Il serait sans doute plus efficace de produire de la fausse propagande djihadiste, de créer des divisions, de faire du piratage informatique, voire d’utiliser l’arme de l’intoxication ou de l’ironie… mais ce sont des méthodes difficiles à recommander à des bureaucraties d’État.
L’IHEDN en partenariat avec la Direction générale de l'armement (DGA) accueille, du 24 au 28 avril 2017, dans le cadre de ses sessions internationales "Armement et économie de défense",...
Alors que la santé et la protection sociale sont au cœur des préoccupations des Français, ces thèmes sont peu ou pas présents dans les débats présidentiels. Afin de remettre ces enjeux au centre des débats, la Mutualité Française, en partenariat avec la Fondation pour l’innovation politique, la Fondation Jean-Jaurès et Terra Nova, lance PlacedelaSanté.fr. L’objet […]
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On April 25, IPI hosted the next event in its Leading for Peace: Voices from the Field event series, featuring Erik Solheim, Executive Director of UN Environment, who discussed how the environment can be a powerful ally when it comes to preventing conflict and sustaining peace.
Mr. Solheim reflected on how violence against the environment creates harmful social and economic impact, which can lead to the escalation of conflict and civil strife. He explained how innovative policies, structures and practices can instead use the environment to meet human needs, uphold justice and lay the foundations for lasting peace. He also showed how the 2030 Agenda for Sustainable Development provides a strategic gateway for this approach to deliver benefits far beyond the environment or peacebuilding.
Following an extensive career focusing on environment and development in government and international organizations, Mr. Solheim became Executive Director of the UN Environment Programme on May 13, 2016. Prior to joining UN Environment, Mr. Solheim was the chair of the Development Assistance Committee of the Organization for Economic Co-operation and Development, the main body of the world’s development donors. He emphasized the role of private sector and tax in development finance, spearheading the Sustainable Development Investment Partnership and the Addis Tax Initiative. He focused on the need to channel more aid to least-developed countries, and expanding the Development Assistance committee to new members and partners.
Speaker:
Mr. Erik Solheim, Executive Director of UN Environment
Moderator:
Dr. Youssef Mahmoud, Senior Adviser, International Peace Institute
Every summer since 2014 has seen an increase in the number of refugees and migrants risking their lives to cross the Mediterranean Sea to Italy and Malta. This increase in migration is having a wide-ranging impact on countries of origin, transit, and destination, creating new and complex challenges for governments, humanitarian agencies, the European Union, and the international community at large.
This paper focuses on mixed migration along the Central Mediterranean route, which reemerged as the world’s deadliest maritime migration route in 2015 and again in 2016. It investigates the underlying causes for this mixed migration, arguing that push factors have become more relevant than pull factors in driving mixed movements. It also maps the route and examines European responses to mixed migration across the Mediterranean.
The paper offers a number of lessons learned that should inform policy discourse on how the EU and the international community can better respond to the challenges of mixed migration along the Central Mediterranean route:
Depuis début avril, des manifestations contre le pouvoir se succèdent au Venezuela. Alors qu’elles ont déjà été marquées par plusieurs morts, une marche pacifique a été organisée dimanche. Le point de vue de Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’IRIS.
Comment expliquer que l’opposition au président Nicolás Maduro ait autant grandi ? Cette crise politique est-elle uniquement due à la situation économique dégradée du pays ?
Depuis l’arrivé au pouvoir d’Hugo Chávez le 1er janvier 1999, il y a toujours eu au Venezuela un refus frontal de la part de l’opposition d’accepter l’alternance. Il faut se rappeler qu’il y a eu une tentative de coup d’État armé en 2002. Cette opposition politique, qui représente environ 40% des électeurs, est restée mobilisée de 1999 à aujourd’hui. Mais aux élections parlementaires de décembre 2015, l’opposition a dépassé le seuil des 40% et obtenu 70% des suffrages. La crise est passée par là.
Depuis quatre ans, une crise économique grave touche le pays. Les Vénézuéliens peinent à s’alimenter et à se soigner à cause d’importantes pénuries. Les manifestations de ces dernières semaines étaient certes politiques mais il y a eu aussi des pillages de magasins – huit personnes sont notamment mortes électrocutées en forçant les portes d’une boulangerie. On peut donc parler, à côté des cortèges politiques, d’émeutes de la faim. Ainsi, une partie des opposants au pouvoir sont des personnes qui auparavant soutenaient Maduro. Aujourd’hui en grande difficulté, elles se sont éloignées du gouvernement. Ces anciens soutiens du président – sans rompre ouvertement – parfois ne vont plus voter, ce qui confère un poids relatif plus important à l’opposition. Cette dernière est donc composée, d’une part, d’un socle politique datant de 1999, auquel sont venus s’ajouter, d’autre part, les déçus et les victimes des pénuries.
Dans un tel contexte de division, comment la situation peut-elle se débloquer ? Peut-on envisager que Nicolás Maduro ne parvienne pas au bout de son mandat, qui court normalement jusqu’en 2019 ?
Il semble peu vraisemblable que Nicolás Maduro ne termine pas son mandat, dans la mesure où il s’appuie un élément de force important, l’armée. En 2002, une partie des forces armées avait pris part au coup d’État. Hugo Chávez avait procédé à une épuration des forces armées et les avait aussi étroitement associées à la gestion du pouvoir. Aujourd’hui, au sein du gouvernement Maduro, plusieurs ministres sont des militaires. Ces derniers sont également présents dans l’appareil administratif de l’État, ainsi que dans la gestion de l’économie d’entreprises publiques. Il y a donc une coresponsabilité de l’armée dans le gouvernement du pays. Bien dotée en matériel et cogérant les affaires nationales, l’armée reste relativement préservée en cette période de pénurie et fidèle au président.
Le président Maduro a donc les moyens de tenir bon pour les prochains dix-huit mois. Cela dit, l’opposition reste mobilisée, bien qu’étant divisée en deux franges. Une partie souhaite en effet arriver au pouvoir par la voie constitutionnelle. Elle est donc prête à respecter les délais électoraux, en demandant toutefois au gouvernement de jouer le jeu. Une autre partie de l’opposition, très radicale, pense que le président ne va pas respecter ses engagements. Elle estime donc nécessaire de le faire tomber, comme cela avait été tenté il y a deux ans lorsque de graves affrontements avaient fait une quarantaine de morts.
Toutefois, des éléments non violents existent dans l’opposition et dans le camp du gouvernement. Les approches différentes de Primero Justicia et Voluntad Popular reflètent ces divergences au sein de l’opposition. La procureure générale de l’État vénézuélien – Luisa Ortega Díaz, pourtant nommée par Hugo Chavez -, a appelé au respect du droit de manifester inscrit dans la Constitution. Il y a quelques semaines, elle avait sanctionné la tentative de mainmise du Tribunal supérieur de l’État sur le pouvoir législatif, mesure annulée quelques jours plus tard à la demande du président. Un membre de la Commission nationale électorale – nommé par les autorités exécutives – a lancé un appel au respect du calendrier et à la tenue des élections régionales du 16 décembre 2016, qui n’avaient pas pu avoir lieu à cause d’obstacles administratifs. Nicolás Maduro a entendu la critique et signalé que cette consultation pourrait être assez vite organisée.
Par ailleurs, la pression extérieure pousse à un compromis, souhaité par les voisins du Venezuela. Ces derniers sont effectivement de plus en plus préoccupés par l’instabilité du pays, comme le montre la déclaration des 11 chefs d’États d’Amérique latine la semaine dernière. Cette déclaration a été très mal reçue par le président Maduro. Mais on ne peut pas imaginer que le Venezuela, vivant de ressources pétrolières exportées, puisse se replier sur lui-même – comme l’Albanie d’il y a 50 ans. Le pays est dépendant de l’international. Il critique les pressions extérieures, attribuées aux États-Unis, mais Nicolás Maduro est obligé d’en tenir compte. En particulier, des efforts de médiation sont proposés par l’Union des nations sud-américaines (UNASUR) et le Vatican. Le pape doit visiter la Colombie en septembre, ce qui pourrait relancer une médiation vaticane. Le ministre des Affaires étrangères du pape François, ancien nonce apostolique à Caracas, entretient de très bonnes relations avec le pays. Le président vénézuélien a d’ailleurs relancé la possibilité de médiation le 23 avril.
Ces éléments permettent donc de penser qu’un compromis permettrait de parvenir aux prochaines élections présidentielles. Élections qui seront vraisemblablement perdues par le pouvoir, ce qui laissera beaucoup de marge de négociations.
Cette crise est-elle révélatrice de l’échec et de la fin du chavisme dans le pays ?
Il est difficile de parler de la fin du chavisme, étant donné que toutes les politiques sociales datant de l’époque d’Hugo Chávez ont bénéficié à des millions de vénézuéliens, qui lui sont donc reconnaissants. Ils le sont beaucoup moins en revanche envers le gouvernement de Nicolás Maduro, auquel on fait porter le chapeau des difficultés actuelles.
Cependant, si le gouvernement n’est plus en mesure de financer ces politiques sociales, il en subira un contre coup politique et électoral. Avec cette contestation, c’est in fine la viabilité du modèle chaviste « socialiste-extractiviste », c’est-à-dire reposant sur les revenus tirés des matières premières, qui est posée. En effet, ce modèle étant nécessairement victime des aléas des cours du pétrole, il ne peut être ni stable, ni pérenne.
Jean-Dominique Giuliani préside la Fondation Robert Schuman, centre de recherche de référence sur l’Union européenne et ses politiques. Il répond à mes questions à l’occasion de la parution de son dernier ouvrage : « Pour quelques étoiles de plus…Quelle politique européenne pour la France ? », aux éditions Lignes de repères.
Vous estimez que la voix de la France en Europe est éteinte. Qu’est-ce qui vous amène à cette conclusion ?
Depuis la création de l’euro, à l’exception de Nicolas Sarkozy pendant la crise financière, la France n’a fait aucune proposition concrète pour améliorer le fonctionnement des institutions européennes. Initiatrice de l’Union européenne (UE), elle est attendue pour ses propositions, ses idées, ses concepts. C’est l’un de ses rôles. Elle s’est pourtant contentée de commenter en permanence les défauts de l’euro, de l’Europe et de réagir dans l’urgence plutôt que d’agir dans la durée. Elle a participé au désamour des citoyens envers la construction européenne au lieu de pousser cette dernière à endosser une vraie vision stratégique. C’est particulièrement flagrant s’agissant de la relation franco-allemande, politisée à tort, alors qu’il s’agit d’une relation bilatérale indispensable. Entre ces deux États, les visions sont souvent différentes. Les partager, les échanger, chercher des compromis, demeurent les moteurs d’un rebond de l’Europe.
Nos dirigeants au plus haut niveau n’ont jamais porté en interne les débats européens. Avez-vous déjà lu dans un compte-rendu du Conseil des ministres, une ligne expliquant comment une décision nationale s’inscrit dans le cadre européen ou contre une décision prise en commun à Bruxelles ? Peu de parlementaires s’en soucient, se contentant de slogans tout faits. Même les succès européens, en matière d’environnement, de concurrence (Apple, Google) sont systématiquement passés sous silence.
Cette attitude d’indifférence, de timidité et de distanciation a gravement porté atteinte à nos intérêts nationaux qui ne sont jamais mieux défendus qu’en partenariat avec nos alliés les plus proches.
Vous proposez la création auprès du Premier ministre d’un vice-premier ministre en charge des Questions européennes. Pouvez-vous développer ?
La politique européenne ne relève plus de la pratique diplomatique traditionnelle. Elle concerne la plupart du temps la politique intérieure. Les ministères, le Premier ministre, doivent la prendre en compte en permanence, sans l’expliquer, sans l’assumer et parfois dans le désordre interministériel. Nombreux sont nos experts des ministères qui siègent dans des comités à Bruxelles. Leur coordination est assurée par le Secrétariat général aux Affaires européennes.
Je propose qu’un vice-Premier ministre soit placé auprès du Premier ministre, partage avec lui les mêmes collaborateurs et regroupe sous son autorité, même à titre temporaire, tous les services qui concourent à la politique européenne de la France, y compris nos ambassadeurs dans les États membres, pour ce qui la concerne. Il procèdera, au nom du gouvernement, aux arbitrages nécessaires, aura pour tâche de rendre compte au Parlement et de l’associer en amont des décisions ; il sera le porte-parole du gouvernement pour les questions européennes qui doivent plus largement être débattues en transparence avec les Français. Notre pays est en retard sur ses partenaires en matière de démocratisation de la politique européenne. Elle concerne désormais presque toutes les missions gouvernementales et touchent désormais des prérogatives régaliennes de l’Etat. On ne peut pas continuer à passer des accords avec nos partenaires sans débats préalables, sans présenter aux citoyens les alternatives à trancher, sans expliquer des choix qui engagent pour longtemps la politique intérieure.
Vous appartenez à la famille centriste généralement atlantiste. Pourtant, vous semblez développer une vision gaullo-mitterrandienne des relations entre l’Europe et les États-Unis…
Il est peut-être temps de sortir de ces clichés ! La campagne électorale pour l’élection présidentielle française a montré combien ils étaient dépassés. Il en est de même pour l’UE. Au stade de l’intégration qu’elle a atteint et compte-tenu des défis nouveaux qu’elle doit relever, elle ne peut plus se permettre, au moins pour un temps, de débats stériles entre l’intergouvernemental et le communautaire. De toute façon l’un conduit à l’autre si l’on obtient des résultats efficaces. Pour la sécurité, la défense, l’immigration et la politique monétaire, une Europe indépendante peut se construire par la volonté et l’exemple de quelques États membres.
En matière de politique étrangère, l’indépendance de l’Europe est aujourd’hui une nécessité. Or, une expression diplomatique forte doit être crédibilisée par une capacité militaire certaine. Plutôt que de poursuivre sur la voie d’une « défense européenne » improbable et incertaine, je propose de se concentrer d’abord sur la défense de l’Europe. Cela passe par d’importants efforts budgétaires mais aussi par une coopération à quelques-uns, par exemple par un traité de défense entre la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Ouvert aux autres, il doit permettre, chacun avec ses contraintes et ses spécificités, de démontrer que nous sommes capables d’organiser une défense crédible du continent, tout en restant dans l’OTAN, alliance nécessaire.
Cette avancée permettrait des développements diplomatiques et politiques que l’Union ne peut pas initier dans ces domaines régaliens.
Emmanuel Macron sera probablement élu président de la République le 7 mai prochain. Les mesures qu’il prendra en termes de politique étrangère demeurent, elles, relativement floues.
L’ampleur de la victoire du candidat du mouvement « En Marche ! », si on ne la connaît pas encore, devrait tout de même être nette, dans la mesure où Marine Le Pen ne semble pas disposer de beaucoup de réserves de voix. Ceux qui s’étaient inquiétés d’une possible victoire de la candidate du Front national (FN), en se fondant sur les votes de protestation aux États-Unis (Trump) ou au Royaume-Uni (Brexit), oublient que le système électoral français est à deux tours. Ainsi, Marine Le Pen est empêchée de gagner une élection de ce type en l’état actuel.
Concernant la politique étrangère, l’ampleur du score aura une importance certaine : plus haut sera le score de Marine Le Pen, plus le crédit de la France s’en trouvera affecté à l’extérieur. Le fait même qu’elle soit présente au second tour peut déjà constituer un choc, même si ce dernier était largement anticipé.
Marine Le Pen se réclame – de manière exagérée et mensongère – parfois du général de Gaulle. Le fait de vouloir entretenir des relations avec la Russie ne suffit guère à qualifier une politique de gaulliste : tout dépend s’il s’agit d’une relation saine et équilibrée ou d’une relation de dépendance (y compris financière à l’égard de Moscou, cf. le prêt bancaire de Marine Le Pen). Concernant les États-Unis, la candidate FN affirme paradoxalement vouloir en être indépendante tout en souhaitant un ralliement à Trump. Imagine-t-on le Général de Gaulle attendre dans une cafétéria dans l’espoir d’un rendez-vous ? C’est donc à tort que Marine Le Pen se réclame d’une diplomatie gaullienne, aussi bien par rapport aux États-Unis que par rapport à la Russie ; sans parler du rapport aux pays émergents et à l’islam : de Gaulle avait, lui, fait de la réconciliation avec les pays arabes un objectif prioritaire par la fin de la guerre d’Algérie.
Emmanuel Macron s’est, quant à lui, réclamé du gaullo-mitterrandisme au cours de la campagne. Il n’a cependant pas été plus explicite sur les implications d’un tel positionnement. Le candidat du mouvement « En marche ! » s’était notamment distingué de Manuel Valls à propos de la déchéance de nationalité, ce qui lui avait valu des soutiens initiaux forts. En outre, Emmanuel Macron a soigneusement évité de parler de « troisième guerre mondiale », d’islamo-fascisme et de choc des civilisations, sources de clivage, termes que Marine Le Pen et d’autres candidats n’hésitent pas à employer.
Concernant la politique étrangère de Macron, on constate que la composition de ses conseillers est très hétérogène : ni gauche, ni droite ; des néo-conservateurs comme des gaullo-mitterrandistes. Les nominations aux postes diplomatiques clefs, notamment au Quai d’Orsay et à la Défense, seront essentielles dans l’appréciation de sa politique étrangère. Quant à l’OTAN, la position de Macron reste relativement classique : il demande une défense européenne mais ne remet pas en cause la réintégration de la France dans l’organisation transatlantique. Ici encore, il faudra voir au pied du mur quel type de maçon sera le candidat en termes d’affaires extérieures.
Vis-à-vis de la Russie, Emmanuel Macron a pris des distances avec Vladimir Poutine, se démarquant ainsi de ses concurrents – Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et François Fillon – qui réclamaient un rééquilibrage des relations avec Moscou. Cependant, lorsque Macron sera à l’Élysée, il se rendra vite compte que la Russie est un partenaire important dont il ne faut pas s’éloigner trop fortement. Dans le passé, Nicolas Sarkozy, qui avait déclaré qu’il ne serrerait pas la main de Vladimir Poutine, a finalement eu une politique très coopérative avec Moscou ; au point de vouloir lui vendre des Mistral – ce qui n’a pas abouti à cause de l’affaire ukrainienne. Par ailleurs, Emmanuel Macron a appelé à la levée des sanctions contre la Russie, à condition que les accords de Minsk soient respectés. On peut penser qu’une fois président, Emmanuel Macron oubliera le soutien fort de Moscou envers Marine Le Pen, afin de mener la politique nécessaire aux intérêts de la France à l’égard de la Russie.
À propos du conflit israélo-palestinien, Emmanuel Macron semble ne pas vouloir prendre de positions qui pourraient lui attirer l’hostilité des institutions juives françaises. Il est effectivement resté plus que prudent et a même condamné les campagnes de boycott, tout en déclarant qu’il ne reconnaîtrait pas unilatéralement l’État palestinien. Emmanuel Macron se place en réalité dans les pas de François Hollande, qui avait promis durant sa campagne de reconnaître la Palestine pour finalement y renoncer, essentiellement pour des motifs de politique intérieure. On verra donc si Macron reprendra cette ligne ou bien s’il renouera avec la tradition française, consistant à être au premier rang parmi les pays occidentaux dans la défense du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, ainsi que de s’afficher comme le pays occidental le plus proche de la cause palestinienne.
Pour résumer, le candidat Emmanuel Macron a essayé d’attirer le maximum d’électeurs possible et de ne braquer personne, en étant pour cela relativement flou sur certains points qui pouvaient être jugés trop clivants en politique étrangère. Désormais, les prudences qui l’accompagnaient comme candidat ne sont plus de mises : en tant que président, il devra trancher, assumer et montrer quelle politique étrangère il souhaite mettre en œuvre. Et s’il confirme sa volonté de s’inspirer d’une filiation gaullo-mitterrandiste, il faudra qu’il n’hésite pas à être tranchant et aller contre les vents dominants à l’extérieur et les groupes de pression à l’intérieur, afin de mettre en place une politique qui ne prenne en compte que l’intérêt national.
Le point de vue de Pascal Boniface, directeur de l’IRIS.
Dans une tribune parue dans « Le Monde », le directeur de la Fondapol estime que le candidat du mouvement En marche!, en tête après le premier tour, est devenu celui des sortants. TRIBUNE. La première manière de juger la performance d’Emmanuel Macron est de souligner l’exploit d’un candidat qui, n’ayant exercé aucun mandat électif, […]
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LE CERCLE/INTERVIEW – Dominique Reynié, directeur général de la Fondapol, analyse l’élimination de François Fillon au premier tour de la présidentielle. Douche froide pour François Fillon et la droite de gouvernement. Avec seulement 20,01 % des voix, le candidat Les Républicains est éliminé de la course à l’Elysée. Il a appelé à voter pour Emmanuel […]
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