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Union européenne

Spanish BPC (projection and command ship) to Turkey

CSDP blog - jeu, 14/05/2015 - 22:15

The projection ship ordered by Turkey will based on the Spain LHD ship Juan Carlos 1 (built by the Spanish shipyard Navantia) which also serve as the base of 2 futurs Australian Canberra-class landing helicopter dock (LHD) HMAS Canberra and HMAS Adelaide.

In 2004, French company Direction des Constructions Navales (DCN) and Spanish company Navantia were invited to tender proposals, with DCN offering the Mistral-class amphibious assault ship and Navantia proposing the "Buque de Proyección Estratégica" design (later commissioned as Juan Carlos I). The Spanish design was selected in 2007, with Navantia responsible for construction of the ships from the keel to the flight deck, and BAE Systems Australia handling the fabrication of the superstructure and fitting out.
The construction of the first ship, HMAS Canberra, commenced in late 2008, with the hull launched in early 2011, and sea trials in early 2014. Canberra was commissioned in November 2014. Work on the second vessel, HMAS Adelaide, started in early 2010. Adelaide is predicted to enter service in 2016. They are the largest vessels ever operated by the RAN, with a displacement of 27,500 tonnes (27,100 long tons; 30,300 short tons).

The French Mistral class is an Amphibious general assault ship (LHA) that means an Amphibious general assault ship with flush deck and dock for amphibious craft. Tarawa Class ships (US Navy) are an other example. The Spanish Amphibious Assault-Ship, Multi-purpose (LHD) Juan Carlos 1 is identical to the LHA but with a capacity to lead maritime space control operations and force projection missions using ASW helicopters and V/STOL aircraft. Other examples of these type are the Wasp (US Navy).

This Turkish decision is a bad news for the French shipyard DCNS unable the deliver Sevastopol and Vladivostok Mistral class BPC ordered by Russia, due to political reason (EU embargo) and after the loss of the Australian tender France can lost the confidence of others futur potential customers.

Jean Arthuis: "il y a une restructuration implicite de la dette grecque"

Coulisses de Bruxelles - jeu, 14/05/2015 - 17:56

Pour Jean Arthuis (UDI), président de la commission des budgets du Parlement européen, l’annulation d’une partie de la dette grecque est inévitable. Celui qui fut le ministre des finances français (95-97) qui a négocié le Pacte de stabilité, analyse, pour Libération, une crise grecque qui n’en finit pas.

Pourquoi les négociations avec la Grèce s’éternisent-elles ?

Il faut bien comprendre que, quel qu’ait été le gouvernement issu des élections du 25 janvier, la négociation actuelle aurait eu lieu : si la Grèce veut toucher les 7,2 milliards d’euros promis par la zone euro et le Fonds monétaire international, elle doit s’engager à mener davantage de réformes. La précédente majorité dirigée par le conservateur Antonis Samaras avait d’ailleurs échoué à se mettre d’accord avec ses créanciers et c’est en partie à cause de cet échec que des élections législatives anticipées ont été organisées. Or, le gouvernement d’Alexis Tsipras persiste à refuser une partie des réformes demandées, les plus douloureuses, parce qu’il veut appliquer le programme sur lequel il a été élu. Le problème est qu’il n’en a absolument pas les moyens : il doit comprendre que ce n’est pas aux Européens de financer les dépenses publiques de l’État grec en lui prêtant de l’argent sans limites et sans condition. Ainsi, ramener la retraite à 60 ans alors que son système est déjà déficitaire, c’est faire financer la retraite des Grecs par les autres citoyens européens qui, eux, doivent parfois travailler jusqu’à 67 ans et plus. C’est évidemment inacceptable ! Surtout, Tsipras doit réaliser que ces réformes ne sont pas exigées pour punir ou humilier la Grèce, comme on l’entend parfois : il s’agit de remettre le pays durablement sur les rails de la croissance. À ce moment-là, il retrouvera des marges de manœuvre budgétaires qui lui permettront de faire davantage pour son peuple. Le Premier ministre grec commence à réaliser qu’il va devoir en passer par là. Mais ce processus est laborieux et c’est dangereux pour l’ensemble de la zone euro.

Certains affirment que c’est la zone euro qui est responsable des problèmes grecs.

Il n’y a aucun acharnement malveillant dans ce qui se passe : il faut, zone euro ou pas, que le budget grec soit à l’équilibre puisque les marchés refusent de lui prêter de l’argent. On qualifie cette politique d’austéritaire, mais ça n’a aucun sens. Quand une entreprise est proche de la faillite, on prend des mesures de redressement, notamment en coupant dans ses dépenses et ses effectifs... La conséquence de cet ajustement a certes été une baisse de près de 30 % de son PIB qui est revenu à son niveau du début des années 2000. Mais la période 2001-2008 a été une bulle : l’État a financé à crédit des augmentations de salaire, des embauches de fonctionnaires, des travaux publics, etc.. Si la Grèce était restée hors de la zone euro, elle n’aurait simplement pas connu cette bulle et son PIB ne serait pas plus élevé qu’il ne l’est aujourd’hui. Et il faut bien avoir conscience que si la Grèce sortait maintenant de l’euro, elle connaitrait le sort que connaît l’Argentine depuis 2002, lors de la rupture de la parité fixe entre le dollar et le peso et du défaut qui a suivi, sans les matières premières et les capacités exportatrices de ce pays…

Comment se sortir de cet imbroglio grec ?

La réalité est en train de s’imposer au gouvernement Tsipras. Les citoyens grecs ont arrêté de payer leurs impôts fonciers, car Syriza avait imprudemment promis qu’il allait les abroger, les comptes publics se sont dégradés au point que le gouvernement aura du mal à maintenir l’équilibre primaire (hors charge de la dette), la fuite des capitaux prend des proportions inquiétantes et la croissance économique qui devait atteindre 2,4 % en 2015 est désormais proche de zéro. Ma conviction est qu’on va finir par trouver un accord. Il faut y arriver parce que si les Grecs en sont là, c’est aussi en partie de notre faute.

Pourquoi ?

Les Européens ont été irresponsables d’admettre ce pays dans la monnaie unique en 2001 essentiellement parce qu’on ne pouvait pas claquer la porte de la zone euro au nez de Platon ! Cela a été une faute politique majeure alors que tout le monde savait que la Grèce n’était pas un État fonctionnel et qu’elle mentait sur l’état réel de ses comptes publics. Une fois admise, on aurait pu au moins la surveiller comme on surveille le lait sur le feu, ce qu’on n’a pas fait au nom du respect de la souveraineté nationale. Cet aveuglement s’explique en partie par le fait que les pays européens, et notamment la France et l’Allemagne, y trouvaient leurs comptes : ils exportaient massivement vers la Grèce sans se préoccuper de savoir comment ces dépenses figureraient dans ses comptes publics. Si elle était surendettée, ce qui l’a conduit au défaut de paiement, c’est parce qu’en face il y avait des surcréanciers… On n’a alors pas eu d’autre choix que d’aider la Grèce, à la fois pour éviter des effets systémiques sur le reste de la zone euro, mais aussi pour que les créanciers privés (banques, assurances, entreprises) ne se retrouvent pas seuls à gérer un défaut de paiement. On a en fait transféré le mistigri des banques aux États.

La Grèce remboursera-t-elle sa dette ?

Il faut être réaliste. D’ici 2023, date à partir de laquelle la Grèce est censée commencer à rembourser les intérêts de sa dette vis-à-vis du Mécanisme européen de stabilité et des États de la zone euro, ses créanciers auront déjà inscrit en perte leur créance sur la Grèce. Il ne faut pas se faire d’illusion sur la capacité qu’auront les Grecs - et d’autres pays d’ailleurs -à rembourser leurs dettes. Ce qui est en train de se passer est une restructuration implicite.

Personne ne le reconnaît pour l’instant…

Car il faut garder un moyen de pression sur la Grèce ! Elle doit assumer ses responsabilités et moderniser son Etat afin d’éviter de répéter les erreurs du passé. A cet égard, les membres de la zone euro doivent aussi tirer les leçons de la crise. Le pacte de stabilité et de croissance n’est pas une politique, il n’est qu’un règlement de copropriété. C’est dire l’urgence d’un véritable gouvernement économique et financier, dirigé par un président à temps plein, disponible et non suspect de conflits d’intérêts, prenant appui sur un véritable Trésor européen, dans l’attente d’un budget et d’une chambre de la zone euro. Cet embryon de fédéralisme européen implique, bien sûr, que l’on révise les traités.

N.B.: English version

N.B.: entretien paru dans Libération du 11 mai

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Frontex : la Médiatrice fait des recommandations qui laissent deviner un certain « laisser-aller » regrettable.

EU-Logos Blog - jeu, 14/05/2015 - 16:59

Ce n’est la première fois que le médiateur intervient, la première de ses interventions remonte à plusieurs années comme le montre clairement une lecture attentive de la rubrique « Pour en savoir plus » ci-dessous.

La Médiatrice Emily Emily O’Reilly a fait à l’Agence Frontex de gestion des frontières extérieures communes un certain nombre de propositions pour qu’elle respecte davantage les droits fondamentaux des migrants faisant l’objet de procédures de retour forcé vers leur pays d’origine. Rappelons que de 2006 à 2015, Frontex a coordonné 267 vols conjoints de retour, ramenant en tout 13 000 personnes indique la médiatrice dans son communiqué. La réforme de Frontex ne semble pas avoir déjà porté tous les fruits attendus . (cf. l’article du 22.10 2011 de Nea say « de nouvelles règles pour renforcer Frontex » http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=2240&nea=113&lang=fra&lst=0

Aujourd’hui ses recommandations portent notamment sur la situation des enfants et des femmes enceintes qui doivent être installés séparément des autres rapatriés. Frontex devrait également promouvoir des règles communes sur l’usage de la contrainte et obliger les Etats membres à améliorer les procédures de traitement des plaintes. La Médiatrice se dit également être déçue par le fait que Frontex refuse toujours de se doter de son propre mécanisme de traitement des plaintes. Ses préconisations concernent également et encore l’examen médical des migrants et la formation aux droits de l’homme du personnel escortant ces rapatriés .

Pour en savoir plus :

     -. Avis de la Médiatrice http://www.ombudsman.europa.eu/en/cases/correspondence.faces/en/11758/html.bookmark

     – . Propositions pour améliorer les opérations de retour : http://www.ombudsman.europa.eu/en/cases/summary.faces/en/59743/html.bookmark

   -. Recommandations de la Médiatrice concernant le respect de droits fondamentaux (FR) http://europa.eu/rapid/press-release_EO-13-17_fr.htm (EN) http://europa.eu/rapid/press-release_EO-13-17_en.htm

– . Dossier des articles de Nea say sur Frontex http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3500&nea=156&lang=fra&arch=0&term=0

 

 

 

 


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LA CYBERCRIMINALITÉ: UNE PRIORITÉ DU PROGRAMME EUROPÉEN EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ

EU-Logos Blog - jeu, 14/05/2015 - 09:19

Le nouveau cadre d’action européen en matière de sécurité qui couvre la période 2015-2020 permet une renforcée sur trois grands axes de la sécurité en UE: le terrorisme et la radicalisation; la grande criminalité transfrontalière organisée; mais également la cybercriminalité.

Les événements des derniers mois concernant les attaques informatiques, notamment le récent piratage de la chaîne française TV5 Monde, ont encouragé l’UE à agir le plus rapidement possible.

«La lutte contre la criminalité transfrontalières et le terrorisme relève de la responsabilité commune de l’Europe». Les mots de Jean-Claude Juncker résonnent à l’heure de l’adoption du programme européen en matière de sécurité. Un agenda fondé sur les politiques et les instruments juridiques déjà adoptés par l’UE avec le but de promouvoir un meilleur échange d’informations, plus de confiance mutuelle, mais aussi d’harmoniser les dimensions extérieures et intérieures de la sécurité.

Le programme définit une approche globale dans le cadre de cinq principes: en premier lieu le respect absolu des droits fondamentaux; la nécessité de respecter les principes de transparence, de responsabilité et de contrôle démocratique pour maintenir la confiance des citoyens; une meilleure utilisation et mise en œuvre des instruments juridiques en vigueur de l’UE; plus de coordination en ce qui concerne l’approche intersectorielle et les agences de l’UE; enfin la nécessité de concilier les dimensions intérieures et extérieure de la sécurité.

En ce qui concerne le dernier principe, les avancés technologiques ont révolutionné les modes et la rapidité des communication, en résulte une majeure ouverture de nos sociétés outre que nos frontières. En conséquence les menaces pour la sécurité exigent l’ensemble des mesures combinant la dimension intérieure et extérieure à travers une coopération renforcée avec les partenaires internationaux.

La cybercriminalité est particulièrement reliée à l’aspect extérieur de la sécurité car elle représente une menace mondiale pour nos systèmes d’informations ; elle met en œuvre une technique transfrontalière et anonyme pour nos systèmes d’informations. Selon les données de Eurobaromètre de février 2015, environ 85% d’internautes européens sont alarmés par la perspective de pouvoir être victimes des actions de phishing. Il a été constaté en plus que seulement la moitié (46%) des internautes européens sont bien informés des risques connexes à cette menace.

Freiner les nouvelles modalités d’actions de ces «criminels entrepreneurs» est une priorité essentielle dans le programme en matière de sécurité de l’UE. Cette inquiétude majeure a été prouvée en ce qui concerne l’utilisation des réseaux informatiques au service du terrorisme. Une forme du terrorisme est celle aussi de recruter à travers l’exploitation des techniques d’anonymisation pour promouvoir et encourager la radicalisation et la diffusion de messages de propagande sur Internet, ce qui vient d’être défini comme cyber-terrorisme.

Une mention particulière concerne tout particulièrement le risque d’exploitation sexuelle des enfants via la diffusion des actes pédopornographiques sur Internet : une forte inquiétude est apparue sur la tendance de faire du profit à travers la diffusion en ligne de vidéo concernant l’abus et le viol des mineurs. Ce crime haineux pose de nouveaux et complexes défis pour les forces de l’ordre européen.

Un plan opérationnel pour lutter contre le cyber-crime.

Il faut souligner en premier lieu l’importance d’adopter la directive sur la sécurité des réseaux informatique (SRI) car les systèmes informatiques, notamment Internet, sont devenus d’importance fondamentale pour l’économie et la société européenne dans son ensemble. L’approbation de ce texte indiquera que , pour sera la première fois, l’Europe adopte une législation en la matière, en effet elle se trouve dans une situation précaire, notamment sur la question de l’élément de savoir ce que le secteur privé sera contraint de signaler officiellement lorsqu’il a été victime d’une cyber-attaque, conformément aux nouvelles règles. Il apparaît, donc, qu’on va insister sur la mise en œuvre par les Etats d’une capacité de réaction rapide aux demandes d’aides urgentes en cas de cyber-attaque, ainsi que sur le partage des informations.

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le nouveau programme en matière de sécurité insiste sur la coordination et la coopération d’Europol pour prévenir le terrorisme et la radicalisation à travers la mise en commun de ressources et la maximisation de l’utilisation de structures, outils, et services. À ce sujet, il sera intégré à Europol un Centre européen de lutte contre le terrorisme, dont le centre européen de lutte contre la cybercriminalité sera la base (EC3). Une des cellules du centre sera l’unité de signalement des contenus sur Internet (EU IRI), à savoir un centre d’expertise pour aider les États membres à détecter et éliminer les contenus extrémistes violents en ligne.

Au cours de cette année 2015, la Commission européenne lancera également un forum européen avec le secteur informatique afin de développer une coopération avec les entreprises informatiques pour adopter de meilleures actions afin de lutter contre la propagande terroriste sur internet et dans les réseaux sociaux et aussi pour répondre aux interrogations des services répressifs provoquées par les nouvelles techniques de cryptage.

Le nouveau cadre européen concerne plus de sécurité des réseaux informatiques par rapport aux risques liés au terrorisme, un enjeu pour la Commission Juncker qui s’engage dans ses orientations politiques à promouvoir une Europe plus forte en ce qui concerne la sécurité et la défense: « (…) en dotant d’un nouvel environnement politique et juridique où nous nous engageons à nous faire mutuellement confiance, afin de nous coordonner et d’échanger des informations face à des menaces de nature changeante», Dimitris Avramopoulous, commissaire désigné à la Migration et aux Affaires intérieures.

Annalisa Salvati

Pour en savoir plus :

– . Le programme européenne en matière de sécurité (2015-2020)http://ec.europa.eu/dgs/home-affairs/e-library/documents/basic-documents/docs/eu_agenda_on_security_fr.pdf

-. Plénière du Parlement européen 28 avril 2015, Décision adoptée sur le programme européen pour la sécurité (débat) http://www.europarl.europa.eu/sides/getVod.do?mode=chapter&language=FR&vodDateId=20150428-15:00:08-964

-. Eu-logos, La menace virtuelle du crime organisé et son avenir: un rapport d’Europol et les stratégies à adopter http://europe-liberte-securite-justice.org/2015/03/24/la-menace-virtuelle-du-crime-organise-et-son-avenir-un-rapport-de-europol-et-les-strategies-a-adopter/

-. Eu-logos, Une stratégie à adopter en matière de cyber-sécurité au sein de l’UE: l’attaque de cybercriminalité de la chaîne française TV5 Monde http://europe-liberte-securite-justice.org/2015/04/27/une-strategie-a-adopter-en-matiere-de-cybersecurite-au-sein-de-lue-lattaque-de-cybercriminalite-de-la-chaine-tv5-monde/

-. Euroactiv, La Commission veut lutter en priorité contre le terrorisme et la cybercriminalité http://www.euractiv.fr/sections/leurope-dans-le-monde/la-commission-veut-lutter-en-priorite-contre-le-terrorisme-et-la

 


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Réseau Judiciaire européen : un rapport 2011-2012 placé sous le signe du progrès. Vers une coopération judiciaire accrue en Europe ?

EU-Logos Blog - jeu, 14/05/2015 - 08:32

Le 6 mai dernier, Monsieur Ola Löfgren, secrétaire du Réseau judiciaire européen (RJE), a présenté devant les eurodéputés de la commission LIBE (Libertés civiles, Justice et Affaires intérieures) le rapport 2011-2012 sur le fonctionnement et la gestion du RJE.

Qu’est-ce que le Réseau judiciaire européen ? Le RJE a été créé le 29 juin 1998 par l’action commune 98/428/JAI du Conseil, qui regroupe les Ministres des Etats membres de l’Union européenne. Il s’agit d’ « un réseau de points de contact judiciaires entre les États membres » de l’Union européenne. Cela signifie que dans chaque Etat membre, une ou plusieurs personnes sont désignées comme « points de contact », c’est-à-dire comme intermédiaires, et chargées de faciliter la coopération judiciaire entre les Etats membres. En 1998, le RJE a été envisagé comme un outil de lutte contre « les formes graves de criminalité ». Pour ce faire, les points de contact, qu’ils soient juges, procureurs ou représentants des Ministères de la Justice, à côté de leurs activités professionnelles quotidiennes, « fournissent les informations juridiques et pratiques nécessaires aux autorités judiciaires locales de leur pays, aux points de contact des autres pays et aux autorités judiciaires locales des autres pays, pour leur permettre d’établir de façon efficace une demande de coopération judiciaire ou pour améliorer la coopération judiciaire en général. » La structure du RJE est donc décentralisée dans la mesure où les points de contact travaillent depuis leur Etat membre. Un secrétariat est « chargé de la gestion du réseau » conformément à la Décision 2008/976/JAI du Conseil du 16 décembre 2008 qui a renforcé le RJE et remplacé l’action commune 98/428/JAI. L’article 4 relatif aux fonctions des points de contact s’est également étoffé. Chaque point de contact ou « correspondant national » est ainsi chargé « dans son État membre, des questions liées, au fonctionnement interne du réseau, y compris de la coordination des demandes d’information et des réponses apportées par les autorités nationales compétentes » ainsi que « des contacts avec le secrétariat du Réseau judiciaire européen ».

Parallèlement, l’Union européenne dispose depuis 2002 d’un organe chargé de renforcer la coopération judiciaire entre les Etats membres afin de lutter contre les formes graves de criminalité : Eurojust. Cet organe est composé d’un membre national, détaché par chaque État membre de l’Union. Quelle est alors la nature des relations entretenues par Eurojust et le RJE ? L’article 10 de la Décision 2008/976/JAI stipule : « Le Réseau judiciaire européen et Eurojust entretiennent des relations privilégiées, fondées sur la concertation et la complémentarité, en particulier entre les points de contact d’un État membre, le membre national d’Eurojust de ce même État membre et les correspondants nationaux du Réseau judiciaire européen et d’Eurojust. » A cet égard, Ola Löfgren a indiqué en réponse à une question de Caterina Chinnici (S&D, Italie) qu’il y avait encore beaucoup à faire pour intensifier les relations entre le RJE et Eurojust. Il s’agit de veiller à ce que les représentants dans les Etats membres travaillent ensemble. Pour ce faire, le secrétariat du RJE travaille sur un plan d’action avec Eurojust mais « ce n’est pas toujours facile » a-t-il indiqué, avant d’ajouter qu’il était plus difficile pour les grands pays d’atteindre la coordination des activités. A noter tout de même que le secrétariat du RJE est placé sous l’autorité d’Eurojust.

La coopération judiciaire dans l’Union européenne est basée sur le principe de reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires en matière pénale. Ce principe, introduit par le Traité de Maastricht signé le 7 février 1992, signifie que les autorités judiciaires nationales doivent normalement traiter les requêtes formulées par l’autorité judiciaire d’un autre Etat membre avec le minimum de formalités administratives. Le rapport sur le fonctionnement et la gestion du Réseau judiciaire européen en 2011 et 2012 fait valoir que les activités du Réseau judiciaire européen via ses points de contact est cruciale pour la mise en œuvre concrète des outils de reconnaissance mutuelle, en ce qu’elle constitue une plateforme d’échange et établit des contacts directs entre les Etats membres ; l’objectif final étant de contribuer à la réalisation d’un espace de liberté, de sécurité et de justice à l’échelle de l’Union européenne. Dans cette optique, un atlas et une bibliothèque judiciaires sont également mis à disposition sur le site du RJE pour faciliter l’accès à l’information en matière de coopération judiciaire. Ils comportent des informations pratiques, des rapports, répertorient les législations nationales et la jurisprudence notamment.

En ce qui concerne l’évaluation du fonctionnement du RJE, l’article 13 de la Décision 2008/976/JAI indique que « le Réseau judiciaire européen présente tous les deux ans à partir du 24 décembre 2008 au Parlement européen, au Conseil et à la Commission un rapport sur ses activités et sa gestion ». C’est dans ce cadre qu’Ola Löfgren s’est présenté devant les membres de la commission LIBE le 6 mai. Le rapport 2011-2012 souligne que l’assistance apportée par les quelques 400 points de contact à travers l’Union européenne croît chaque année. Au cours des deux années considérées, le nombre de requêtes adressées et reçues par les points de contact s’est ainsi accru d’environ 1 300, passant de plus ou moins 14 000 à un peu plus de 15 000 requêtes. Cette tendance témoigne, selon le rapport, non seulement d’une plus grande efficacité, mais aussi d’une prise de conscience et d’une reconnaissance de la valeur ajoutée du RJE chez les praticiens européens du droit. De même, le rapport fait état du renforcement des relations extérieures du RJE avec les institutions de l’Union européenne (Commission et Conseil), le Conseil de l’Europe, mais aussi avec d’autres réseaux judiciaires comme le Réseau des équipes communes d’enquête et le Réseau des points de contact traitant de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, entre autres. Ola Löfgren a d’ailleurs souligné cet aspect lors de son passage à LIBE en indiquant que les points de contact devaient développer leur coopération avec les réseaux judiciaires internationaux tels que le Réseau des procureurs des Balkans occidentaux. Le RJE a un rôle important à jouer en matière de coopération judiciaire, a t-il conclu.

La dernière partie du rapport est consacrée aux propositions visant à améliorer la coopération en matière pénale. En ce qui concerne le Mandat d’arrêt européen adopté en 2002, les points de contact et le RJE sont autant de ressources permettant aux Etats membres de franchir les obstacles à sa mise en œuvre ; encore faut-il que ceux-ci soient sollicités par les autorités des Etats membres. De même, le RJE considère que le renforcement des réseaux judiciaires est un moyen d’accroitre la coopération en matière pénale, tout comme la formation des praticiens européens du droit. Combattre le crime implique également un renforcement des actions et du dialogue entre les autorités judiciaires pénales des Etats membres de l’Union européenne. Un travail de sensibilisation est donc essentiel.

Charline Quillérou

 

Pour en savoir plus

      -. Action commune 98/428/JAI du 29 juin 1998 adoptée par le Conseil concernant la création d’un Réseau judiciaire européen http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=uriserv:OJ.L_.1998.191.01.0004.01.FRA (FR) http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/HTML/?uri=CELEX:31998F0428&from=FR (EN)

      -. Décision 2008/976/JAI du Conseil du 16 décembre 2008 http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32008D0976 (FR) http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/HTML/?uri=CELEX:32008D0976&from=FR (EN)

     -. Rapport 2011-2012 sur le fonctionnement et la gestion du Réseau judiciaire européen http://www.ejn-crimjust.europa.eu/ejnupload/StaticPages/THE_EJN_Report_on_operation_and_management_2011-2012_PDF_EN.pdf (EN)

 

 


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Le nouveau plan UE sur les migrations provoque un bras de fer entre Bruxelles et Londres

Euractiv.fr - mer, 13/05/2015 - 16:54

La Commission européenne a proposé mercredi que 20.000 migrants soient accueillis et répartis à travers l'Union au cours des deux prochaines années. Une proposition décriée par la Grande-Bretagne, qui bénéficie pourtant d'une clause d'exemption.

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Un possible réengagement avec la Russie à l’ordre du jour du Parlement Européen

EU-Logos Blog - mer, 13/05/2015 - 16:08

Les relations entre l’Union Européenne (UE) et la Russie ont été à l’ordre du jour des deux dernières réunions de la Commission Affaires Etrangères (AFET) du Parlement Européen, qui a discuté le 5 mai 2015 le projet de rapport présenté par Gabrielius Landsbergis (PPE, Lituanie) et adopté le rapport le 11 mai avec 53 voix en faveur, 10 contre et 3 abstentions.

 Les relations entre l’Union Européenne (UE) et son plus grand voisin ont été à l’ordre du jour des deux dernières réunions de la Commission Affaires Etrangères (AFET) du Parlement Européen. Nous rappelons que la base légale de la coopération UE-Russie est constituée par un Accord de Partenariat et Coopération qui date de 1994.
Suite au refus de la Russie de prendre partie à la Politique Européenne de Voisinage (lancée par l’Union Européenne en 2004), les deux partenaires ont décidé de lancer quatre « espaces communs » couvrant respectivement l’économie et l’environnement ; la liberté, sécurité et justice ; la sécurité extérieure ; la recherche, éducation et les aspects culturels. En parallèle, suite à l’expiration de l’Accord de Partenariat et Coopération, des négociations ont été lancées en 2008 lors du sommet de Khanty-Mansiysk pour un nouvel accord, censé fournir un cadre global pour les relations UE-Russie et reflétant une coopération accrue entre les deux par rapport au contexte de l’accord précédent. Néanmoins, les négociations n’ont abouti à aucun accord. Ensuite, en 2010, lors du sommet de Rostov, l’UE et la Russie ont établi un « Partenariat pour la Modernisation », couvrant les aspects économiques, techniques, d’Etat de droit et judiciaires.
A la suite des évènements en Ukraine et de l’annexion de la péninsule de Crimée par la Russie, la plupart des aspects de la coopération entre l’UE et la Russie ont été suspendus, et l’Union Européenne a adopté une série de mesures restrictives face à la Fédération. De plus, la Banque Européenne d’Investissement et la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement ont suspendu la signature de nouveaux programmes de financement en Russie.
De son côté, la Russie a adopté des contre-mesures, qui incluent une interdiction d’importer certains produits alimentaires de l’Union Européenne.

C’est donc dans ce contexte tendu que s’inscrit le projet de rapport présenté par Gabrielius Landsbergis (PPE, Lituanie), qui a été discuté par les députés lors de la réunion de la Commission AFET du 5 mai 2015. Lors de sa présentation, le projet de rapport a initialement reçu quelque 463 amendements. Suite aux négociations, le rapport a été adopté par la Commission lors de la réunion du 11 mai avec 53 voix en faveur, 10 contre et 3 abstentions.

 Le rapport Landsbergis

Le préambule du projet de rapport affirme la volonté de l’Union Européenne de « retrouver un cadre coopératif avec la Russie », en rappelant que, malgré l’attitude agressive montrée par la Russie à l’égard de la Géorgie, l’UE a, à cette occasion-là, évité des mesures restrictives en optant pour une coopération intensifiée. Pourtant, poursuit-il, avec ses actions en Ukraine (annexion de la Crimée et « guerre non déclarée » contre le pays) – où la Russie « est en train de redessiner les frontières de l’Europe » – la Russie a « profondément et durablement porté préjudice à ses relations avec l’Union ». A ce propos, le préambule fait également référence aux conflits gelés présents dans le voisinage commun à l’UE et à la Russie, dans lesquels cette dernière participe directement ou indirectement.
Pour ces raisons, on lit dans le rapport, la Russie ne peut plus être considérée comme un partenaire stratégique de l’Union, (son statut officiel)et cette dernière « ne peut envisager de reprendre le cours normal de ses relations comme si de rien n’était ».
En rappelant que les mesures restrictives adoptées par l’UE ne visent pas le peuple russe, mais ont pour but d’inciter la Russie à revoir sa politique envers son voisinage, le rapport affirme que le dialogue entre UE et Russie doit être « soumis à des préalables », et que les sanctions pourraient être levées, partiellement ou intégralement, « dès que la Russie se sera engagée à mettre en oeuvre, dans leur entièreté et en toute transparence, les dispositions des accords de Minsk et à restituer la Crimée à l’Ukraine ».

Ensuite, le projet de rapport se penche sur la nécessité de l’unité et de la solidarité entre les Etats membres de l’UE, « essentielles pour garantir l’efficacité des politiques de l’Union et sa capacité de faire face à des défis et pressions extérieures. A ce propos, il prône ainsi un renforcement des politiques internes de l’UE notamment en matière de commerce, services et transactions financières, migration, énergie, gestion des frontières extérieures, information et cybersécurité.
Toujours en matière d’unité, le rapport invite les EM à s’abstenir de décisions susceptibles de compromettre la vision commune de l’UE, notamment en matière de coopération avec la Russie dans le secteur de la défense.

Le rapport Landsbergis considère enfin la question de la propagande russe, en affirmant que la Russie a élaboré des politiques et des instruments de « guerre hybride », parmi lesquels figure l’utilisation d’« informations militarisées » (définies comme « informations délibérément modifiées et diffusées dans le but de porter atteinte aux structures sociétales, politiques et institutionnelles) ». Les médias russes contrôlés par l’Etat, déplore le projet de rapport, jouent un rôle également au sein de l’information dans l’Union Européenne.
Pour ces raisons, le rapport appelle au développement de capacités européennes d’analyse et de surveillance de ces informations militarisées, et invite la Commission à allouer des fonds à des projets visant à « contrecarrer la propagande russe au sein et en dehors de l’Union ». De plus, le rapport exprime son soutien au développement de médias russophones visant à offrir aux minorités russophones dans l’UE et dans les pays du Partenariat Oriental « un accès crédible à d’autres informations que les informations tendancieuses largement diffusées ».

Le débat au sein de la Commission AFET (5 mai 2015)

Le débat au sein de la Commission Affaires Etrangères du Parlement européen a été ouvert par le rapporteur Gabrielius Landsbergis, qui a souligné l’importance d’envoyer à Moscou un message claire et uni, ce qui implique que le rapport devrait être soutenu par une large majorité.
Il a insisté sur le fait qu’il faut fournir des encouragements à la Russie pour qu’elle « retrouve le chemin », mais que ces encouragements ne suffisent pas face à la volonté de la Russie de ne pas adhérer aux accords. Il a ensuite réitéré que si les accords de Minsk, l’intégrité territoriale de l’Ukraine et le droit international,il a réitéré l’opinion que si les engagements sont respectés, il y aura moyen de progresser dans les relations ; si au contraire la situation ne s’améliorera pas, l’Union Européenne pourra recourir à d’autres mesures pour envoyer un message plus musclé à Moscou.

Le rapporteur fictif Liisa Jaakonsaari (S&D, Finlande), tout en estimant que ce rapport a une importance politique essentielle, il constate une certaine incohérence entre les différentes prises de position du Parlement au sujet des relations UE-Russie. Pour cette raison, elle a appelé à ce que ce rapport permette de dégager une position appuyée par le plus grand nombre de députés, afin de mener une politique « commune et forte » vis-à-vis de la Russie.
Elle a ensuite exprimé la position de son groupe, selon laquelle le Parlement doit être ferme quant à la réalisation des conditions de Minsk, afin que l’OSCE puisse garder son prestige. Elle a également rappelé l’objectif à long terme que l’Ukraine puisse retrouver le droit de faire ses choix et qu’on puisse arriver à mener un dialogue fructueux avec la Russie, d’autant plus qu’existent de nombreux domaines dans lesquels l’UE et la Russie peuvent entretenir de bonnes relations. Enfin, elle a affirmé que, si un message ferme doit être envoyé aux dirigeants russes, il faut de l’autre côté maintenir un dialogue avec la population. Elle a ainsi proposé à cet égard un dialogue en matière de facilitation de visas avec la Russie, ce qui a suscité un certain débat parmi les différents groupes.
A son avis, si l’UE souhaite avancer vers l’objectif de paix sur le continent européen, il faut alors que la Russie y participe, même si ce sera un objectif à long terme, celui d’un espace de « paix et de prospérité économique de Lisbonne à Vladivostok ».

Pour Anna Elżbieta Fotyga (CRE, Pologne), qui a qualifié les politiques suivies par la Russie d’agressives et de « menaces pour notre sécurité collective », le message du Parlement Européen doit affirmer de façon précise et cohérenet que l’UE n’accepte pas les violations de l’intégrité territoriale d’un Etat souverain et l’imposition par la Russie de ses politiques et de ses méthodes dans son voisinage.
De son côté, Johannes Cornelis van BAALEN (ALDE, Pays-Bas) a constaté une certaine lassitude parmi les EM concernant l’Ukraine, et a affirmé que, si la Russie choisit de revenir dans les limites du droit international, l’UE pourra alors réengager le dialogue – contrairement à un scénario où la Russie serait isolée, ce qui permettrait de ne rien obtenir.

Le député allemand Helmut Scholz (GUE/NGL) a exprimé la difficulté de son groupe à s’associer au compromis, puisque, à son avis, des conditions préalables politiques ne permettront pas de trouver une nouvelle relation entre UE et Russie. Il faudrait donc se concentrer sur les problèmes actuels (Minsk II, le rôle de l’OSCE, le respect du droit par les russes et les ukrainiens, la modernisation technologique de la société russe, l’économie et le développement de la société russe) et voir quelle contribution le Parlement Européen pourrait y apporter.
Sandra Kalniete (PPE, Lettonie) a averti que dans le rapport il faudrait éviter d’employer des termes qui laisseront une marge d’interprétation, sachant « à quel point la Russie est forte en matière de propagande ». Il faudrait également, à son avis, éviter de rentrer dans les détails : s’agissant par exemple d’un accord de facilitation des visas, elle estime que dans la situation actuelle il serait très ambigu de parler d’un tel accord. En outre, d’après la députée, le Parlement devrait affirmer clairement que le contrôle par l’Ukraine de ses frontières est une des conditions préalables à la reprise du dialogue.

Si Knut Fleckenstein (S&D, Allemagne) s’est dit d’accord dans une large mesure avec la description de la situation des relations UE-Russie faite par le rapport, il a exprimé son désaccord quant à la teneur du message. En reconnaissant les difficultés du Conseil à trouver un accord sur la ligne à suivre en raison d’intérêts et d’approches divergents, il a affirmé qu’il ne peut pas exprimer son accord avec un rapport dont le message aille au-delà de l’accord intervenu au Conseil.
Le britannique Charles Tannock (CRE) a souligné que la Russie est actuellement « autre chose qu’un alliée stratégique : c’est de la propagande totalitaire et de l’expansion territoriale par la force ». Il a aussi averti que certains EM (comme par exemple la Grèce et la Hongrie) sont une cible de la Russie pour essayer de « briser le front européen ». Il a enfin appelé la Commission à continuer ses enquêtes sur Gazprom.

Ivo Vajgl (ALDE, Slovénie) a, lui, rappelé que l’UE a des intérêts de long terme en commun à développer avec la Russie. Il a ensuite salué la mention faite par le rapport Landsbergis des conflits gelés dans le voisinage auxquels la Russie est partie prenante, et a souligné que l’UE devrait agir plus activement dans l’effort de trouver une solution à ces conflits. Vajgl a également rappelé l’importance d’actions en faveur de la société civile et de tous les acteurs en Russie qui essayent de mettre en avant des alternatives politiques.
Néanmoins, il a exprimé une certaine perplexité quant à la place « trop large » qu’occuperaient dans le rapport les questions de propagande, traitées avec « un vocabulaire dépassé ». Il est à son avis absurde de faire référence à un besoin de programmes en langue russe afin d’informer un public qui se trouve dans des états démocratiques : d’après lui, ce serait le devoir des états démocratiques de toute façon de fournir des programmes dans des langues minoritaires, sans devoir en faire une stratégie.

Lors de son intervention, Michael Gahler (PPE, Allemagne) a été très critique vis-à-vis de « ceux qui dans cette assemblée continuent à être fascinés ou financés par la politique de M. Poutine » et il a affirmé que, même s’il serait souhaitable que le rapport soit approuvé par une large majorité, il n’est par contre pas désirable d’obtenir leur soutien.
Ensuite, après avoir réitéré que la mise en oeuvre des accords de Minsk c’est « un préalable absolu » à une amélioration des rapports avec la Russie, Gahler a mis en avant que jusqu’à présent la Russie n’a pas apporté une indication claire sur ce qui dans l’accord de libre-échange avec l’Ukraine compromettrait les intérêts russes.

Le député slovaque Boris Zala (S&D) a observé que le souhait des pays voisins de la Russie de choisir la voie européenne a changé la situation géopolitique dans la région, et que l’Union Européenne doit être prête à faire face à ces changements. A son avis, le fait que l’UE se soit présentée comme un « soft power » a signifié qu’elle n’a pas été capable d’entreprendre des étapes géopolitiques fortes vis-à-vis de la Russie. Il estime ainsi que l’UE devrait changer de l’intérieur pour devenir enfin un «hard power».
Enfin, il a souligné que l’UE ne devrait pas « fermer les portes ». Au contraire, elle devrait laisser suffisamment de marge de manoeuvre pour la négociation et pour que les ukrainiens puissent discuter avec les russes.
Marek Jurek (CRE, Pologne) a souligné une dimension supplémentaire qui, estime-t-il, devrait être intégré dans le rapport, concernant notamment une compréhension de la nature du régime de Poutine. Il a en effet qualifié la Russie d’un régime postsoviétique dont le caractère profond est par contre soviétique. Jurek a donc appelé le Parlement Européen à envoyer un message à long terme condamnant le communisme. A ce propos, le président Elmar Brok (PPE, Allemagne) a répliqué que ça serait plus simple s’il s’agissait vraiment de communisme, mais que ce n’est pas le cas.

L’allemande Rebecca Harms (Verts/ALE) a rappelé que le dernier sommet qui s’est penché sur cette question a affirmé que les modifications dans les relations avec la Russie devraient être liées au respect de l’accord de Minsk II. Or, d’après la députée, cette résolution devrait contribuer à établir ce lien de façon contraignante et obligatoire. Il serait à son avis très regrettable de parler avec enthousiasme d’un accord sur les visas avec la Russie, d’autant plus que l’UE n’a envoyé aucun message positif à l’Ukraine en la matière.
Jean-Luc Schaffhauser (non-inscrits, France) a exprimé une vue très critique sur le rapport, affirmant qu’il ne serait pas équilibré et qu’il ne contiendrait par la vérité. Il a reproché à l’Occident de faire un usage exclusif et partisan du droit et a mis en avant les responsabilités de Kiev dans la violation des accords de Kiev, accusant le Parlement d’oublier les assassinats de l’Ukraine.

Le député letton Andrejs Mamikins (S&D) a exprimé son accord avec la position du rapporteur fictif Liisa Jaakonsaari et a ajouté que l’approche du Parlement ne doit pas viser à donner des leçons à la Russie. Il a ensuite rappelé que le régime de Poutine et la population russe sont deux choses différentes, et que souvent en condamnant le régime on punit aussi les russes.
Urmas Paet (ALDE, Estonie) a, de son côté, appelé à introduire dans le rapport une dimension humaine, en référence notamment aux cas de Nadiya Savchenko et d’un policier estonien, prisonniers en Russie.

Suite au débat, le rapporteur Gabrielius Landsbergis a souligné que, s’agissant de la Russie, l’UE se retrouve souvent dans la situation où elle donne plus en échange de moins, contrairement aux principes « more for more » et « less for less » qui sont au coeur de l’approche de l’UE vis-à-vis de ses voisins. Face à une situation où le respect des accords de Minsk n’est pas assuré, le Parlement peut à son avis réfléchir à des incitations, mais il doit faire preuve d’une très grande prudence, afin d’éviter d’envoyer à la Russie un message « indésirable ».
En matière de cohérence, il a indiqué l’adoption du paquet des mesures restrictives vis-à-vis de la Russie comme un exemple d’unité au sein de l’Union.
Enfin, aux députés qui s’opposaient à l’idée de donner des leçons à la Russie, Landsbergis a répliqué que, plutôt que de leçons, il s’agit de réaffirmer des principes et des règles qui sont communes à tous les partenaires avec lesquels l’UE s’engage dans un dialogue.

Giulia Bonacquisti

 

Pour en savoir plus:

– Texte du Projet de rapport Landbergis et amendements déposés en Commission
FR : http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2014_2019/documents/afet/pr/1054/1054054/1054054fr.pdf
http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2014_2019/documents/afet/am/1059/1059122/1059122fr.pdf
http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2014_2019/documents/afet/am/1056/1056328/1056328fr.pdf
EN : http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2014_2019/documents/afet/pr/1054/1054054/1054054en.pdf
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fNONSGML%2bCOMPARL%2bPE-551.966%2b03%2bDOC%2bPDF%2bV0%2f%2fEN
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fNONSGML%2bCOMPARL%2bPE-554.689%2b01%2bDOC%2bPDF%2bV0%2f%2fEN

– Page web du SEAE sur la Russie (EN) : http://eeas.europa.eu/russia/about/index_en.htm

 

 


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Surveillance et services de renseignement : le projet de loi français sur le renseignement à la lumière du rapport de la Commission de Venise sur le contrôle démocratique des services de renseignement et agences de collecte de renseignements d’origine...

EU-Logos Blog - mar, 12/05/2015 - 22:22

  A l’occasion de sa 102e session plénière les 20 et 21 mars 2015, la Commission de Venise du Conseil de l’Europe a adopté un document intitulé « Mise à jour du rapport de 2007 sur le contrôle démocratique des services de sécurité et rapport sur le contrôle démocratique des agences de collecte de renseignements d’origine électromagnétique ». Alors que le très controversé projet de loi français sur le renseignement vient d’être voté en première lecture par l’Assemblée nationale le 5 mai, ce rapport de la Commission de Venise acquiert une importance toute particulière. Cet article, sans avoir vocation à être exhaustif, entend démêler les principaux enjeux.

            La Commission européenne pour la démocratie par le droit, plus communément appelée Commission de Venise où les séances plénières se déroulent quatre fois par an, est « un organe consultatif du Conseil de l’Europe sur les questions constitutionnelles ». Pour rappel, le Conseil de l’Europe est à distinguer de l’Union européenne. En effet, celui-ci est une organisation internationale de défense des droits de l’homme créée le 5 mai 1949 par le traité de Londres. Aujourd’hui fort de 47 États membres dont les 28 de l’Union européenne, le Conseil de l’Europe a pour objectif de défendre les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit sur le continent européen. Le Saint Siège, les États-Unis, le Canada, le Japon et le Mexique bénéficient du statut d’observateur tandis que la Turquie et la Russie sont membres de plein droit. Tous les États membres du Conseil de l’Europe ont signé la Convention européenne des droits de l’homme. Parmi ces Etats, 18 ont décidé de créer en mai 1990 la Commission de Venise. Cette dernière s’est vue confier la mission de leur « procurer des conseils juridiques » et « aider ceux qui souhaitent mettre leurs structures juridiques et institutionnelles en conformité avec les normes et l’expérience internationales en matière de démocratie, de droits de l’homme et de prééminence du droit ». En 2015, ladite Commission compte 60 États membres, à savoir les 47 États membres du Conseil de l’Europe ainsi que l’Algérie, le Brésil, le Chili, la République de Corée, les Etats-Unis, Israël, le Kazakhstan, le Kirghizistan, Kosovo, le Maroc, le Mexique, le Pérou et la Tunisie. Chaque membre désigne pour quatre ans un représentant, reconnu comme « expert indépendant éminent » en raison de son expérience au sein des institutions démocratiques ou de sa contribution au développement du droit et des sciences politiques. Ces professeurs d’université en droit public ou en droit international, juges des cours suprêmes ou constitutionnelles ou encore membres de parlements nationaux, une fois désignés par leurs Etats, agissent en leur nom propre.

En 2007, la Commission de Venise a adopté un rapport sur le contrôle démocratique des services de sécurité dans lequel la question du contrôle « du ou des services assumant la fonction de défense de la sécurité intérieure » était abordée. En l’espace de quelques années seulement, cette question a beaucoup évolué, à la faveur non seulement du développement de nouveaux outils et modes de communication, mais aussi des changements sécuritaires qui se sont opérés dans le monde. Par conséquent, la supervision des services de renseignement doit s’adapter et la nécessité d’un contrôle démocratique amélioré se fait de plus en plus pressante. Les conflits actuels en Syrie et en Iraq ainsi que le phénomène des combattants étrangers, ces Européens qui partent combattre aux côtés de l’organisation Etat islamique, ont changé la donne. Dès lors que le terrorisme devient le fait de « loups solitaires », il s’avère complexe de s’en prémunir et le nombre de cibles potentielles explose. Ce contexte particulier se traduit logiquement par une surcharge de travail pour les services de renseignement des Etats qui « réclament donc à juste titre un renforcement de leur pouvoir ». Ainsi, en mai 2013, tous les membres de la Commission de Venise ont reçu une requête concernant « l’évolution des questions pertinentes en matière de contrôle de la sécurité intérieure ». Parallèlement, à l’automne 2014, le projet « Droits fondamentaux, garanties et recours » a permis un échange de vues sur les services nationaux de renseignement et leur contrôle dans l’Union européenne. Sur la base de ces contributions, la mise à jour du rapport de 2007 a été discutée en sous-commission des institutions démocratiques le 19 mars 2015 avant d’être adopté en session plénière de la Commission de Venise.

Si le résumé du rapport de la Commission de Venise faisant office de préambule « ne saurait être interprété comme suggérant que tous les Etats se conforment à un modèle particulier de [renseignement d’origine électromagnétique] ou réglementent cette activité d’une certaine manière », un parallèle avec le projet de loi français sur le renseignement fournit quelques éléments au débat sur la surveillance. Ce projet de loi, déposé au Parlement français par le gouvernement, vise à « fournir un cadre légal aux services de renseignement ». Pour rappel, les « services de renseignement français » sont constitués de la Direction générale de la sécurité extérieure, la Direction de la protection et de la sécurité de la défense, la Direction du renseignement militaire, la Direction générale de la sécurité intérieure, la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, et enfin Tracfin qui est le service de renseignement rattaché au Ministère des finances.

Le développement du renseignement d’origine électromagnétique, à savoir des « moyens et méthodes permettant d’intercepter et d’analyser des communications transmises par ondes radio […] et par câbles », « fait peser un risque potentiel beaucoup plus important sur les droits individuels » peut-on lire dans le rapport de la Commission de Venise. Ce type de renseignement, qui visait auparavant des menaces militaires extérieures, peut désormais être utilisé dans le cadre de la surveillance de télécommunications ordinaires. Cette surveillance stratégique, contrairement à la surveillance ciblée, « n’est pas forcément déclenchée en raison d’un soupçon pesant sur une ou plusieurs personnes spécifiques » puisqu’elle « vise à trouver ou à identifier un danger au lieu de se contenter d’enquêter sur une menace connue ». Si ce système revêt une importance considérable pour les opérations de sécurité, les risques qu’il fait peser sur les droits individuels sont tout aussi considérables. C’est notamment ce qu’ont dénoncé certains détracteurs du projet de loi français sur le renseignement qui prévoit la mise en œuvre chez les opérateurs « d’un dispositif destiné à détecter une menace terroriste sur la base de traitements automatisés » de données. Qualifiés de « boîtes noires » par les opposants au projet de loi, ces dispositifs seront installés chez les fournisseurs d’accès à internet et ingéreront une quantité de données. Un algorithme détectera ensuite les potentiels comportements terroristes sur internet. Face à l’opposition des acteurs du numérique, un amendement introduit à l’Assemblée nationale restreint l’accès aux seules métadonnées qui sont des données de connexion (c’est-à-dire qui communique avec qui) et non aux contenus des communications. Les services de renseignement pourront seulement consulter les métadonnées. Le projet de loi français autorise également « le recueil des informations et des documents […] relatifs à des personnes préalablement identifiées comme présentant une menace ». La logique est donc celle d’une surveillance ciblée couplée à une surveillance stratégique, au sens du rapport de la Commission de Venise.

A cela s’ajoutent la légalisation de l’utilisation de dispositifs techniques « permettant la localisation en temps réel d’une personne, d’un véhicule ou d’un objet » mais aussi « la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, ou d’images dans un lieu privé » ainsi que « de données informatiques ». Sont également autorisées « les interceptions de correspondances émises par la voie de communications électroniques et susceptibles de révéler des renseignements relatifs aux intérêts publics », « l’introduction dans un véhicule ou dans un lieu privé » dans le but d’installer ou retirer les dispositifs techniques mentionnés, ainsi que l’introduction dans les systèmes de traitement automatisé de données. A cet égard, le rapport de la Commission de Venise précise que « la surveillance stratégique n’est pas forcément une surveillance « massive » mais peut le devenir lorsque la collecte porte sur des données en vrac et que les seuils d’accès correspondants sont bas ».

En ce sens, le mandat conféré aux services de renseignement a un rôle important. Du point de vue formel, le rapport souligne que « la plupart des Etats démocratiques ont défini au moins partiellement les modalités du [renseignement d’origine électromagnétique] conformément aux exigences posées par la [Convention européenne des droits de l’homme] ». Cependant, les autorités des Etats membres sont mises en garde contre les mandats trop larges qui accroissent « le risque de collecte excessive ». Du côté français, le projet de loi sur le renseignement identifie sept « intérêts publics » qui justifient le recours aux techniques de renseignement mentionnées plus avant :

  1. L’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale ;
  2. Les intérêts majeurs de la politique étrangère et la prévention de toute forme d’ingérence étrangère ;
  3. Les intérêts économiques, industriels et scientifiques de la France ;
  4. La prévention du terrorisme ;
  5. La prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions, des violences collectives de nature à porter atteinte à la sécurité nationale ou de la reconstitution ou d’actions tendant au maintien de groupements dissous ;
  6. La prévention de la criminalité et de la délinquance organisée ;
  7. La prévention de la prolifération des armes de destruction massive.

Au sujet de la collecte de renseignements pour le bien-être économique de la nation, le rapport de la Commission de Venise fait valoir que ce type de justification « peut aboutir à un espionnage industriel » mais que « la surveillance stratégique est cependant utile dans au moins trois domaines d’activité économique : la prolifération des armes de destruction massive […], le contournement des sanctions imposées par l’ONU et l’UE, et le blanchiment de capitaux à grande échelle ».

En matière de contrôle des activités de renseignement, les systèmes censés contrôler les services de renseignement « semblent généralement réduits à portion congrue ». Le rapport fait valoir que si certains avancent l’argument d’un accès aux seules métadonnées, celles-ci « peuvent révéler beaucoup de détails sur la vie privée d’une personne ». De même, « les contrôles tendent à faiblir en raison de la complexité technique et de la rapidité des progrès technologiques ». Du côté français, « la mise en œuvre sur le territoire national des techniques de recueil du renseignement […] est soumise à autorisation préalable du Premier ministre », délivrée « après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ». Cette dernière est une autorité administrative indépendante composée de trois députés et trois sénateurs, trois membres du Conseil d’Etat, trois magistrats de la Cour de cassation et une « personnalité qualifiée pour sa connaissance en matière de communications électroniques ». Le projet de loi prévoit également qu’ « en cas d’urgence absolue » la mise en œuvre de ces techniques peut être autorisée « sans avis préalable de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ». En cas de désaccord, ladite Commission « peut décider, après délibération, de saisir le Conseil d’Etat ».

Comme son nom l’indique, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement serait également chargée de veiller « à ce que les techniques de recueil du renseignement soient mises en œuvre sur le territoire national » conformément au droit. Pour ce faire, celle-ci « reçoit communication de toutes demandes et autorisations », « dispose d’un accès permanent aux relevés, registres, renseignements collectés, transcriptions et extractions », « est informée à tout moment, à sa demande, des modalités d’exécution des autorisations en cours » et enfin, peut solliciter un certain nombre d’éléments de la part du Premier ministre. Sur treize membres, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement compterait donc six parlementaires. Or, dans son rapport, la Commission de Venise souligne le caractère problématique du contrôle parlementaire. D’abord, la dimension technique du renseignement d’origine électromagnétique « empêche la plupart des parlementaires d’exercer un contrôle sans l’aide de spécialistes ». De plus, ces parlementaires « ont souvent d’autant plus de mal à trouver le temps nécessaire pour exercer le contrôle […] que la surveillance stratégique suppose un organe permanent. » Enfin, la collaboration entre les services de renseignement de plusieurs pays « explique les réticences à admettre un contrôle parlementaire susceptible non seulement d’affecter les services du pays collecteur, mais également ceux de ses alliés. » Ces techniques de renseignement ayant un impact sur les droits individuels, leur contrôle relève généralement du pouvoir judiciaire. Le législateur français n’a pour l’instant pas fait ce choix. Les opposants au projet de loi français ont pour certains dénoncé le choix d’un contrôle administratif. Cela d’autant plus qu’il est parfois complexe de trouver un équilibre entre le respect de la vie privée et d’autres intérêts, nationaux notamment.

Un autre aspect cristallise les débats en matière de renseignement et de surveillance : la durée de conservation des données collectées. Le rapport de la Commission de Venise précise que « l’exigence de conservation/transfert crée un risque potentiel de surveillance massive qui se concrétisera dès lors que les critères d’accès aux données sont laxistes et que l’accès aux données à caractère personnel d’un grand nombre d’individus devient par conséquent possible ». La Cour de Justice de l’Union européenne a d’ailleurs invalidé, par l’arrêt Digital Rights Ireland et Seitlinger e.a. du 8 avril 2014, la Directive européenne sur la conservation des données au motif qu’elle comportait « une ingérence d’une vaste ampleur et d’une gravité particulière dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel sans que cette ingérence soit limitée au strict nécessaire ». Le projet de loi français prévoit à cet égard que les renseignements collectés soient détruits à l’issue d’une durée de 30 jours à compter de la première exploitation pour les correspondances, de 90 jours pour les renseignements collectés et 5 ans pour les données de connexion. Pour les renseignements chiffrés, il est précisé que « le délai court à compter de leur déchiffrement ». L’Alliance des Libéraux et Démocrates du Parlement européen a adressé à la Commission européenne une question écrite relative à ce projet de loi le 14 avril dernier. Dans ce document, les eurodéputés s’interrogent notamment sur la conformité de ces durées de rétention des données collectées au regard de l’arrêt du 8 avril 2014 de la Cour de Justice, et s’inquiètent de méthodes intrusives voire dangereuses pour les libertés publiques. Aucune réponse n’a pour l’instant été apportée. La procédure législative française suivant son cours, le projet de loi doit maintenant être discuté au Sénat.

Au regard de l’actualité et des scandales qui émaillent les activités des services de renseignement, en Europe comme aux Etats-Unis, un encadrement des pratiques est nécessaire. Depuis deux semaines, le débat sur les pouvoirs du BND, les services de renseignement allemands, est virulent. Soupçonné d’avoir contribué à l’espionnage des Européens par les services américains de la NSA, le BND est au cœur d’une tempête qui affecte le gouvernement d’Angela Merkel. Reste à savoir si la mise à jour du rapport de la Commission de Venise sera prise en compte par les autorités de la planète. Rien n’est moins sûr.

Charline Quillérou

 

Pour en savoir plus

 

     -. Présentation de la Commission de Venise http://www.venice.coe.int/WebForms/pages/default.aspx?p=01_Presentation (FR)http://www.venice.coe.int/WebForms/pages/?p=01_Presentation (EN)

      -. Mise à jour du rapport de 2007 sur le contrôle démocratique des services de sécurité et rapport sur le contrôle démocratique des agences de collecte de renseignements d’origine électromagnétique, 7 avril 2015 http://www.venice.coe.int/webforms/documents/default.aspx?pdffile=CDL-AD%282015%29006-f (FR) http://www.venice.coe.int/webforms/documents/default.aspx?pdffile=CDL-AD%282015%29006-e (EN)

      -. Projet de loi sur le renseignement déposé par le gouvernement français le 19 mars 2015  http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl2669.asp (FR)

      – . Projet de loi sur le renseignement adopté par l’Assemblée nationale française le 5 mai 2015 http://www.senat.fr/leg/pjl14-424.html (FR)

      -. Arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne, Digital Rights Ireland et Seitlinger e.a., 8 avril 2014 http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2014-04/cp140054fr.pdf (FR)

 

 

 


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