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Updated: 1 week 21 hours ago

Le Setúbal portugais et le Dixmude français, de concert, dans le Golfe de Guinée

Tue, 02/03/2021 - 16:30

(B2) Le patrouilleur océanique de la marine portugaise Setúbal, parti début mars, rejoint le porte-hélicoptères français Dixmude déjà sur place. La première illustration du projet pilote décidé par l’Union européenne dans une zone où les attaques pirates sont nombreuses

Le patrouilleur de haute mer portugais Setubal à son départ de Lisbonne (crédit : Joao Bico / MinDéf Portugal)

Des patrouilles dans le Golfe de Guinée

Durant trois mois, le patrouilleur de haute mer portugais (P-363), commandé par le capitaine de frégate Dias Marques, avec un effectif de 58 militaires, va participer à des exercices, des actions de coopération et patrouillera dans tout le Golfe entre l’Angola, le Cap-Vert, la Côte d’Ivoire, le Ghana, la Guinée-Bissau, le Nigeria et São Tomé e Príncipe. Le porte-hélicoptères amphibie français Dixmude (L9015) est déjà présent sur zone, pour une durée de quatre mois au total. L’objectif commun pour les deux navires : assurer une présence maritime, déjouer les attaques pirates, venir en aide aux navires attaqués, renforcer les marines locales par des exercices et des entrainements en commun.

Une première action dans le cadre des présences maritimes coordonnées

Cette mission est la première dans le cadre du projet pilote des présences maritimes coordonnées décidé par l’Union européenne en janvier dernier (1). Ce concept assez original vise à coordonner les différentes présences maritimes européennes, sans avoir le format complet d’une opération au titre de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) (lire : La présence maritime coordonnée. Un nouveau concept européen ? Explications). Ainsi, durant tous les mois de l’année, entre un à trois navires européens seront présents dans la zone en permanence, venant essentiellement d’Espagne, d’Italie, du Portugal et de France (1). Les planifications ont été harmonisées et ajustées pour éviter d’avoir des ‘trous’.

Un concept plus souple que des opérations

Ce concept a un avantage sur les opérations. Il est plus souple, permettant de garder à chaque pays membre son autonomie d’action, son propre calendrier. Et surtout, il ne prive pas les pays riverains de leurs responsabilités premières, en leur donnant l’impression d’une force militaire qui se superpose à leurs propres forces (2). Rien n’interdit d’évoluer d’ailleurs vers une opération en bonne et due forme.

Des présences anciennes

La marine portugaise a une présence régulière dans une zone historiquement locale. Mise au point depuis 2008, l’Initiative Mar Aberto promeut ainsi les missions de coopération en matière de défense avec la communauté des pays de langue portugaise (CPLP). Du côté français, l’opération Corymbe existe depuis 1990. Mise en place d’abord pour assurer la sécurité des populations françaises présentes dans les différents pays du pourtour du Golfe de Guinée (Côte d’Ivoire notamment) et pouvoir intervenir en évacuation, en cas de tension locale, elle est, peu à peu, montée en puissance et s’est diversifiée, avec de nombreuses interactions avec les pays de la zone.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Deux navires de chaque pays (Italie, Espagne, Portugal) s’y relaieront, trois ou quatre navires pour la France.
  2. Malgré les apparences, la situation n’est pas tout à fait comparable à celle de la Somalie. D’une part, les actes des pirates se déroulent aussi régulièrement dans les ports ou eaux territoriales (et non en haute mer). D’autre part, il n’y a pas dans le Golfe de Guinée de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies autorisant à pénétrer dans les eaux territoriales (comme pour la Somalie).

A noter que la zone de ‘chalandise’ des pirates s’est récemment étendue, les pirates ayant pris le large. Lire : Les pirates adorent le Golfe de Guinée. La zone la plus dangereuse.

Lire aussi :

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Categories: Défense

Task-force Takuba. Les Italiens arrivent

Wed, 17/02/2021 - 08:35

(B2) Le contingent italien pour la task-force Takuba devrait arriver au cours de la deuxième semaine de mars

(crédit : 9e régiment Col Moschin – armée italienne)

L’information est donnée par le quotidien Il Foglio. Une première équipe de reconnaissance partie sur le terrain est revenue en Italie, donnant en quelque sorte le feu vert final au déploiement.

20 véhicules et huit hélicoptères

Le contingent devrait être composé d’une bonne centaine d’hommes, venus en grande partie des forces spéciales. Ils seront équipés avec vingt véhicules et huit hélicoptères : quatre appareils d’attaque de type AW-129D Mangusta et quatre hélicoptères de transport NH-90, selon Difesa on Line. Cette contribution s’inscrit dans l’autorisation donnée par le Parlement italien, à l’été 2020, d’envoi d’une force de 200 hommes (lire : Les Italiens entrent dans la task-force Takuba au Mali). (1)

Des forces spéciales

Les effectifs pourraient être fournis, par rotation, par le 9e régiment d’assaut parachutiste Col Moschin, du GOI (Gruppo Operativo Incursori) de la marine, du GIS (Gruppo di Intervento Speciale) des Carabinieri et du 17e Stormo Incursori de l’armée de l’air, indique le site Difesa on Line qui se base sur le format similaire engagé par l’armée italienne en Irak et en Afghanistan. Des personnels de ces unités ont également été déployés en Libye. Des équipes issues du 4e régiment alpin de parachutistes de Monte Cervino et du 185e RRO Folgore (le Régiment de reconnaissance pour l’acquisition d’objectifs ou Reggimento Ricognizione Acquisizione Obiettivi) pourraient aussi être déployées.

Le premier déploiement du gouvernement Draghi

Dans tous les cas, ce sera la première opération extérieure déployée par le nouveau gouvernement italien dirigé par Mario Draghi regroupant une large coalition (de la Ligue du Nord à droite au parti démocrate, à gauche, en passant par le Mouvement 5 Etoiles et le parti Italia Viva de l’ancien Premier ministre Matteo Renzi).

Commentaire : Un contingent apprécié

Le contingent italien devrait particulièrement être apprécié sur place. D’une part par son importance — Rome envoie un contingent similaire aux Suédois — ; d’autre part, par sa qualité. Les Italiens ont une certaine habitude de l’Afrique (Libye, Centrafrique…), des déploiements difficiles, et une proximité linguistique (le manque de francophones dans le détachement suédois rend plus difficile les contacts avec les Maliens). La présence de huit hélicoptères (si elle est confirmée) est un apport aussi notable.

(NGV)

  1. Le chiffre de 200 correspond au maximum autorisé, non pas automatiquement à l’effectif engagé.

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Categories: Défense

La Royale revient dans l’opération Irini. Le Premier maitre l’Her sur place

Tue, 16/02/2021 - 20:36

(B2) Le patrouilleur de haute mer a intégré l’opération européenne de lutte contre les trafics au large de la Libye, EUNAVFOR Med Irini

Parti de Brest, son port d’attache, le 5 février, le patrouilleur de haute mer, est entré dans la zone d’opération le 11 février et est opérationnel selon le QG de l’opération européenne (EUNAVFOR Med Irini). Il devrait rester engagé pour « une durée de deux mois environ » selon l’état-major (français) des armées.

Une équipe de visite de sept fusiliers marins

Mission principale : surveiller « l’embargo sur les armes à destination de la Libye imposé par le conseil de sécurité des Nations unies ». Un élément de défense et d’intervention maritime (EDIM), composé de sept fusiliers marins, est d’ailleurs à bord, afin d’effectuer les opérations de visite et d’inspection.

Plusieurs fois en Méditerranée

Cet aviso de la classe Estienne d’Orves a été engagé à plusieurs reprises en Méditerranée, notamment au titre de l’opération Sophia en 2016 (lire : Contrôle des armes au large de la Libye : le Jacoubet relaie le Premier maître L’Her) puis en 2017 (lire : Le Premier maitre L’Her embarque dans Sophia). Il est commandé par le capitaine de corvette Fabien Antoine, qui vient d’en prendre le commandement en janvier.

Trois navires et trois ou quatre avions

Le Premier Maître l’Her (F-792) rejoint la frégate grecque HS Aegeon (F-460), qui est le navire amiral de l’opération, et le patrouilleur de haute mer italien Comandante Borsini (P-491). Côté aérien, l’opération dispose de trois ou quatre avions (luxembourgeois, polonais et allemand), selon les moments et la bienveillance mécanique, ainsi que d’un drone Predator italien.

Un avion français Falcon 50 est ainsi détaché, venant relayer un Atlantique 2, qui a permis de compenser les défaillances mécaniques du P3 Orion C allemand (lire : Un Atlantique 2 français à Irini. Les P3 Orion allemands en panne).

(NGV)

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Categories: Défense

Victoire du parti de l’auto-détermination au Kosovo

Mon, 15/02/2021 - 17:31

(B2 à Pristina) Avec 48% des voix selon les premières estimations, Vetëvendosje (« autodétermination ») remporte les élections législatives de dimanche (14 février). Une victoire nette pour ce parti de gauche qui, juste 13 ans après la déclaration d’indépendance, entend tourner la page des anciens combattants de la guerre et lutter énergiquement contre la corruption qui gangrène le pays.

Dimanche soir, des Kosovars se sont rassemblés dans le centre de Pristina, la capitale, ici sous le regard de l’ancien président Ibrahim Rugova (LDK) (Aurélie Pugnet/B2)

Dimanche soir, à 19 heures, les bureaux de votes ont fermé au Kosovo. Peu après, les premiers résultats sont tombés et le centre ville de la capitale, Pristina, s’est animé à coups de klaxons et de défilés de drapeaux albanais (1).

Victoire pour la gauche

Les partisans du parti Vetëvendosje (« auto-détermination ») ont fait entendre leurs cris de joie dans les rues piétonnes de Pristina. Des enfants de trois ans tenant à peine debout dans la neige, aux vieux messieurs, en passant par les troupes d’étudiants, tous chantaient les noms de ‘Vetëvendosje’ et ‘Albin Kurti’, le leader de ce parti de gauche. La victoire était attendue. Et elle est sans équivoque pour ce parti anti-corruption et anti-establishment. Pour Albin Kurti, cette élection « s’est transformée en un référendum », s’est-il félicité sur son fil twitter. À droite, le PDK (parti démocratique/ECR)— historiquement parti des héros de la guerre et la « libération » du Kosovo du joug serbe —, réunit environ 17% des voix. L’autre parti historique du pays, la LDK (ligue démocratique/PPE), doit se contenter d’environ 13%.

Dans le nord du Kosovo et dans les différentes ‘enclaves’ à communauté majoritairement serbe, c’est la Liste serbe (Srpska lista) qui a récupéré la quasi-totalité des voix — plus de 80% dans les trois régions du nord. Là encore, aucune surprise. Au milieu des drapeaux de la Serbie, les posters de la Liste Serbe ne rencontrent aucune opposition.

À Mitrovica Nord, la Liste Serbe est omniprésente (Aurélie Pugnet/B2)

Les discussions à venir avec les Européens

Ces élections interviennent alors que la révision stratégique de la mission de l’Union européenne pour le soutien de l’état de droit au Kosovo (EULEX Kosovo) est en cours, et le dialogue entre Pristina (Kosovo) et Belgrade (Serbie) à peine relancé. Celui qui devrait devenir premier ministre, Albin Kurti, a déjà annoncé que la relance du Dialogue avec Belgrade figure en « cinquième ou sixième » position de ses priorités, rapporte la Deutsche Welle. Par ailleurs, il est connu pour sa position très critique envers la mission des Nations Unies (UNMIK) au Kosovo et la mission européenne EULEX. Vis-à-vis de EULEX, « les critiques datent d’il y a plus de deux ans », note le chef de la mission, Lars-Gunnar Wigemark. Il a depuis rencontré Albin Kurti au cours de sa brève expérience de premier ministre, début 2020 (2). Notamment, il précise, « nous avons discuté de certaines questions opérationnelles très spécifiques, par exemple il nous a demandé de l’aide sur la question des personnes disparues ».

(Aurélie Pugnet, envoyée spéciale à Pristina)

  1. Le drapeau albanais est le drapeau ‘national’ du pays, affiché par la majorité albanaise. Alors que le drapeau bleu, avec la forme du pays, est le drapeau officiel de l’État du Kosovo.
  2. Albin Kurti a été premier ministre de février à juin 2020, avant que son gouvernement soit renversé par une motion de censure déposée par la LDK, membre de sa majorité parlementaire. Cette motion est intervenue après le renvoi par A. Kurti d’un ministre de la LDK qui avait soutenu la mise en place de l’état d’urgence du président H. Thaci.

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Categories: Défense

Le pilier militaire du G5 Sahel monte en puissance, Takuba aussi. Le GISM ennemi numéro 1 (v2)

Sat, 13/02/2021 - 11:05

(B2) A la veille du sommet de N’Djamena sur le Sahel, il n’est pas inutile de revenir sur le pilier militaire de l’effort entrepris par la France et les alliés européens. Un pilier qui a bien progressé en un an, si on écoute les officiels français

Task force Takuba (crédit : DICOD / EMA)

La montée en puissance des forces sahéliennes

Du côté français, on l’assure : « beaucoup de choses ont été faites ».

Une fragilité mais des progrès

Certes, les armées sahéliennes restent « encore fragiles » en général, mais leur engagement est « indéniablement accru ». Elles ont « progressé ». La force conjointe du G5 Sahel aligne désormais sept bataillons et « peut-être huit avec la perspective du déploiement d’un bataillon tchadien ». Donc 5000 hommes. Ces armées connaissent « encore des difficultés » reconnait un militaire. Il ne faut pas « l’éluder ». Mais nous cherchons à les « atténuer ».

Une capacité d’opération et de résilience

La force a pu mener notamment des opérations : Samar 1 et Samar 2, planifiées « en étroite coordination avec Barkhane » et les forces internationales (Minusma). Aujourd’hui, « elles sont capables de défendre leurs positions, elles l’ont montré à plusieurs reprises au cours des mois passés. Elles sont capables de réagir à leurs propres niveaux. Elles savent se coordonner entre elles, et se coordonner avec les forces internationales ». Bref « leur autonomisation » — objectif fixé par la France et les Européens au G5 Sahel —, « progresse ». Un PC interarmées de théâtre à Bamako a été monté sous l’impulsion du général Namata, depuis un an et demi.

L’armée malienne en recomposition

Point de satisfaction pour les Français : l’armée malienne (les FAMA). « Le haut commandement s’est remobilisé. Les unités se sont renforcées et les unités ont pu se renforcer. » Ce malgré la suspension d’EUTM pour cause de Covid-19 et de coup d’état. Si personne n’ose le dire, l’effet coup d’état parait effacé (voire même positif)… On voit « la montée en puissance des unités légères de reconnaissance et d’investigation » : l’ULRI 1 à Gossi, une à Ménaka, une troisième à Gao. Ces ULRI « ont mené des opérations, dans un cadre national ou multinational voire avec les unités européennes de la Task Force Takuba » (NB : celle de Ménaka). Les forces maliennes qui avaient dû abandonner en 2019 certains postes « reviennent ». A Labbezanga, le poste militaire a pu être bâti. « D’autres projets arrivent » : à Indelimane, Anderaboukane. L’aérien n’est pas oublié. Les Maliens « font intervenir leur aviation quand un poste est attaqué ».

Forces nigériennes en formation

Les forces armées nigériennes, elles « poursuivent la formation des bataillons spéciaux d’intervention ». La France forme un bataillon à Dosso. L’Allemagne et la Belgique travaille aussi sur les forces spéciales.

La coordination des forces mieux assurée

C’est un point acquis important depuis le sommet de Pau selon les autorités françaises. Un mécanisme de commandement conjoint s’est installé à Niamey à proximité du PC du fuseau centre de la force conjointe. Mécanisme « régulièrement » utilisé pour coordonner les différentes opérations, nationales, de la force conjointe ou de Barkhane. Il est épaulé par une cellule de fusion de renseignement « par laquelle les différentes armées échangent des informations sur l’adversaire ». Essentiel selon les militaires.

L’arrivée des Européens au sein de la Task Force Takuba

Le concept de Takuba est le bon

La force européenne monte aussi lentement en puissance dans la zone de Trois frontières. Outre les Estoniens, les Tchèques, les Suédois, les Italiens doivent « commencer à se déployer à partir de mars 2021 ». Le rythme est « progressif, certes ». Un euphémisme pour dire lent. Mais le concept, qui repose non sur le combat direct, mais l’accompagnement (mentoring) des Maliens dans le Liptako est « le bon ». Il « attire des partenaires européens ».

Huit pays supplémentaires à terme

D’autres contingents pourraient arriver dans les mois (ou années qui viennent). Le Danemark, le Portugal, la Belgique, les Pays-Bas devraient venir « en soutien », avec des contingents « moindres » sans doute. Mais ils « vont venir », affirme-t-on d’un ton sûr à l’Élysée. D’autres pays européens ont « annoncé leur intérêt et leur volonté de s’engager dans cette opération ». Une contribution annoncée de manière « plus ou moins ferme » par les chefs d’État ou Premiers ministres de quatre pays : la Grèce (2), la Hongrie, la Serbie (3), même l’Ukraine. Chaque contribution pourrait alors se monter « à quelques dizaines, voire à près d’une centaine » de personnels.

8000 militaires engagés

C’est le nouveau chiffre défendu publiquement. Il y a 8000 Européens engagés au Sahel, affirme-t-on à Paris. Ce chiffre comprend les 5100 militaires français de Barkhane et environ 3000 Européens investis dans quatre missions (MINUSMA, EUTM Mali, Barkhane et Takuba ou actions bilatérales). Soit un tiers de l’effectif (lire : Combien de soldats européens sont présents au Sahel ? Combien sont dans Barkhane ? (v3)).

  • NB : un chiffre qui a un double intérêt : montrer que ce n’est pas la France, qui intervient, à titre historique, mais toute l’Europe, au nom d’un intérêt commun. Ensuite, permettre des évolutions plus souples de la France, pour éviter une image de désengagement. Quel que soit le recadrage, il restera ainsi un chiffre public de 8000 personnels.

Un réajustement de Barkhane : pour plus tard ?

La réflexion sur le réajustement de Barkhane est « en cours », précise-t-on du côté de l’Elysée. Mais elle pourrait ne pas être annoncée lors du sommet, mais plus tard. Les modalités seront discutées « au cours des prochaines semaines [ou] des prochains mois ». Les partenaires européens et sahéliens seront associés « étroitement ».

Un tournant tactique

A Pau, en janvier 2020, était affirmé la volonté de concentrer les efforts militaires contre l’État islamique au Grand Sahara, dans la zone des trois frontières. Aujourd’hui, l’objectif est de cibler davantage un autre groupe armé, le Groupe de soutien à l’Islam et aux Musulmans (dénommé RVIM ou GSIM ou JNIM en arabe), dirigé par Iyad Ag-Gahli et affilié à Al Qaida.

Un objectif : le RVIM

C’est « la menace principale, la plus forte ». Dans une zone en particulier : « le Gourma », où il « a mené des actions ces dernières semaines ». Une région à cheval sur plusieurs frontières (Mali, Burkina Faso) qui signifie littéralement  » la rive droite du fleuve Niger ». Mais le RVIM est aussi actif « dans l’extrême nord du Mali » ou surtout « dans le centre, avec la Katiba Macina ».

L’Etat islamique, en perte de vitesse

Explication, venant d’un militaire : l’EIGS « est en perte de vitesse notoire ». Il « ne mène plus d’actions contre les forces sahéliennes. Du moins, plus d’actions majeures. Il n’y a plus d’attaques majeures de postes militaires. Ces groupes sont dispersés et n’agissent plus que par très petits éléments ». Ils pratiquent plutôt « une stratégie d’évitement » comme cela a pu être observé « depuis le mois de janvier 2020 ». Les luttes fratricides avec les autres groupes armés, notamment le RVIM l’ont affaibli (4).

La lutte contre la Katiba Macina dans le centre du Mali

Il faut renforcer « la pression sur le groupe dit ‘Katiba Macina’ », dont la principale zone d’activité est le centre du Mali. C’est le troisième volet de la stratégie qui devrait être définie à N’Djamena (avec la consolidation de l’action dans les Trois Frontières et le RVIM). Cette pression sera renforcée avec l’opérationnalisation progressive du ‘fuseau ouest’ de la force conjointe du G5 Sahel. Un volet que « jusqu’à présent, nous n’avons pas réussi à mettre en œuvre », reconnait-on à l’Élysée.

… avec le renforcement du fuseau ‘Ouest’

La « réactivation du dialogue militaire entre la Mauritanie et le Mali » permet d’espérer un changement. Ce sera aux forces maliennes et mauritaniennes d’agir. Le PC de ce fuseau est en Mauritanie. Il n’est pas ainsi prévu que les troupes de Barkhane se déploient dans cette région. L’opération Barkhane pourra juste fournir « un appui général » par des moyens en amont ou d’autres moyens par exemples aériens.

Le désarmement des milices

Quant au désarmement des milices d’autodéfense dans le centre du Mali, objectif du sommet de Pau, « on est effectivement loin du compte » aujourd’hui reconnait notre interlocuteur. D’où l’importance d’avoir un retour de l’État dans cette région.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Témoins de cet engagement, deux opérations. L’opération Bourrasque, fin d’année 2020, en octobre surtout, qui a mobilisé 3000 militaires, dont près de la moitié (1400) fournis par le Niger et le Mali. L’opération Eclipse en janvier avec à peu près autant d’hommes (3000), dont 1000 Maliens, Nigériens et Burkinabés.
  2. Quelques dizaines pas plus selon nos informations, en soutien ou logistique.
  3. Il s’agit sans doute d’un soutien médical selon nos informations.
  4. L’EIGS avait une composition « plus homogène », plus organisée, avec « différentes katibas ou différents groupes ». Ce qui lui a apparemment porté tort à côté d’un RVIM, à l’organisation plus ‘plastique’. Ce groupe a une certaine « diversité » et est « géographiquement beaucoup plus étendu ».

(mis à jour) Complément apporté sur l’action dans le fuseau Ouest

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Categories: Défense

Journalistes qui avez écrit sur l’Europe. Candidatez au Prix Louise Weiss !

Sat, 13/02/2021 - 09:40

(B2) Vous avez réalisé des productions journalistiques ayant trait aux affaires européennes et à l’Europe en général durant l’année 2020 (janvier à décembre) ? Nous serions ravis de vous compter parmi nos candidats !

(crédit : Parlement européen)

Créé en 2005, le Prix Louise Weiss récompense les journalistes qui traitent en langue française les sujets européens de la manière la plus systématique, pédagogique et originale, quel que soit le support (écrit, audio, vidéo, web). Il est organisé par l’Association des Journalistes Européens,, organisée (avec le soutien du ministère des Affaires étrangères et de la fondation Hippocrène.

Trois prix seront décernés

Vous pouvez donc concourir dans une des trois catégories suivantes :

  • Prix Reportage : 1500 euros
  • Prix Décryptage : 1500 euros
  • Prix jeune journaliste (destiné aux moins de 25 ans, étudiants en école et stagiaires) : 1000 euro

Le concours est ouvert à toute personne issue d’un pays de l’Union européenne (nationalité ou résident dans un pays de l’UE) dont l’activité professionnelle est le journalisme. L’important est d’avoir un bon papier !

Les candidats seront sélectionnés par un jury composé de journalistes professionnels. Le Prix sera décerné lors d’une cérémonie au Quai d’Orsay fin juin 2021. 

La candaidature doit s’accompagner des éléments suivants : 

  • Formulaire d’inscription rempli
  • Preuve de publication du document
  • Une photocopie de pièce d’identité

NB : Toute information, ainsi que les précédents lauréats et reportages primés, se trouvent sur www.prixlouiseweiss.com.

(Nicolas Gros-Verheyde)
vice-président de l’AJE-France

Règlement du prix Louise WeissTélécharger

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Combien de soldats européens sont présents au Sahel ? Combien sont dans Barkhane ? (v3)

Wed, 10/02/2021 - 23:24

(B2) Entre le ministère de la défense et le Canard Enchainé, la guerre des chiffres fait rage sur l’engagement européen au Sahel

Un Chinook britannique ‘baladant’ un container en soutien à Barkhane- Camp Roberts, Gao, Mali (crédit : Royal Air Force)

2500 Européens nous aident au Sahel (Parly)

Tout est parti d’une déclaration de Florence Parly sur la base d’Orléans le 1er février… Suivant le motto de l’Élysée ‘nous ne sommes pas seuls au Sahel, les Européens nous aident’, la ministre des Armées déclare : « Aujourd’hui au Sahel, il y a toujours 5100 Français, comme vous le savez ; mais, et c’est moins connu, il y a aussi près de 2500 Européens. » Et plus loin elle ajoute : « Nos alliés européens sont également à nos côtés au sein de la force Barkhane ».

Parly et ses Européens fantômes ! (Le Canard)

Dans le Canard Enchainé paru ce mercredi (10.02), les collègues du ‘plumitif’ partent à l’assaut, baïonnette au canon, allumant « Parly et ses Européens fantômes ». Ils recollent les deux bouts de phrase sur la présence de « au sein de la Force Barkhane » et le chiffre de « près de 2500 Européens sur place. » Même en « additionnant les instructeurs européens auprès des armées locales, les Casques bleus européens et le contingent d’une trentaine d’Estoniens de la force Takuba, on est loin des élucubrations chiffrées de Parly » assènent notre confrère, avec la verve qu’on lui connait.

Il y a environ 2900 Européens réplique Balard

A l’Hotel de Brienne (le siège du ministère français de la Défense), comme à Balard (le siège du ministère), le sang ne fait qu’un tour, et on réplique, calculette à la main. Il y en réalité « environ 2900 militaires européens » au Sahel (hors France) explique le porte-parole Hervé Grandjean dans un message envoyé à la presse de défense (dont B2):

  • « 1500 à la MINUSMA, (Allemands et Britanniques principalement)
  • « 600 actuellement à EUTM, (ils seront 1070 à l’été 2021)
  • « 425 au sein de Barkhane (Suédois, Estoniens, Tchèques, Britanniques)
  • « 320 dans des missions bilatérales (exemple : mission de formation d’un bataillon nigérien conduite par 200 militaires allemands. Italiens, Belges mènent aussi des formations pour le Niger, en format bilatéral). »

La bataille des chiffres

Soyons nets : y voir clair n’est pas toujours évident, tant avoir tous les chiffres n’est pas facile.

Pan sur le bec !

Mais, il semble un fait certain : le Canard Enchainé (qu’on a connu plus exact) s’est littéralement vautré. Est-ce que nos confrères se sont reposés sur des chiffres anciens, ou se sont-ils tombés dans le pêché mignon de taper à la fois sur l’armée, Florence Parly et les Européens, en ajoutant le plaisir de faire un bon mot ? Toujours est-il que l’exactitude… D’une part, la ministre a bien séparé l’aspect Takuba (« Les Européens sont désormais au rendez-vous ») se gardant de donner un chiffre qui aurait été un peu ridicule. Et ce n’est que sur la présence au Sahel qu’elle assène le chiffre de ‘près de 2500’.

Soyons fous, soyons flous !

Le ministère des armées adore ainsi jouer avec les mots et les chiffres. On peut s’y laisser prendre si on n’y prend pas garde. Ainsi il a tendance à compter à la fois le présent et le futur (les Allemands de la mission Gazelle sont ainsi comptés une fois dans le bilatéral et une fois dans le futur d’EUTM Mali… mais ce sont les mêmes qui changent de casquettes). A B2 nous avons aussi appris à nous méfier de ces rigueurs approximatives, notamment du côté des politiques. Ainsi mardi (9.02), Florence Parly, devant le Sénat, affirme que les Allemands, « deuxième contributeur à cette formation [= EUTM Mali] ! fournissent 800 soldats, et il y en aura 250 de plus fin 2021. » Un peu osé ! Dans EUTM aujourd’hui, les Allemands sont une centaine. Mais c’est vrai que si on cumule EUTM + MINUSMA, le compte est bon…

Les effectifs reconstitués

il faut donc être prudent. Car, même en vérifiant d’un côté et de l’autre, il est difficile d’avoir des chiffres collant à la réalité du jour. Mais voici ce que j’ai dans mes tablettes.

Du côté de la task-force Takuba (intégrée à Barkhane), contrairement à ce que dit Le Canard, il n’y a pas que des Estoniens (une bonne trentaine), on trouve des Tchèques (environ 35 + 20 de soutien ?) et des Suédois qui arrivent (bientôt 150). (Lire aussi : Force Takuba : qui participe, observe ou simplement soutient ?)

Coté Barkhane, on trouve aussi une centaine de Britanniques (opération Newcombe) avec leurs trois hélicoptères Chinook (du 27e Squadron de la RAF basé à Odiham) qui apportent un soutien inestimable (même si Outre-Manche on estime qu’ils pourraient être plus utiles à l’ONU). Il ne faut pas oublier le détachement espagnol (‘Marfil’), basé au Sénégal, qui effectue des rotations régulières de transport (pour Barkhane comme EUTM Mali ou la Minusma), avec un effectif de 66 personnels et deux Casa C-295 (du 35e wing de Getafe). Un soutien très utile. Un officier confiait il y a quelque temps que cela représentait 15% des transports ! Enfin, on a une petite cinquantaine d’Estoniens qui continuent à participer à l’opération Barkhane (force protection d’après mes informations).

Coté EUTM Mali (la mission de formation de l’armée malienne), on est effectivement aujourd’hui (11.02) au-dessus de la jauge des 600 soldats. Très exactement on approche les 800 militaires déployés : un peu moins de 170 au QG et 24 à l’aéroport, un peu moins de 600 sur le camp de formation de Koulikoro . Et effectivement on devrait arriver à un effectif de 1077 (très exactement) d’ici l’été 2021. Du moins c’est l’effectif inscrit dans le mandat, avec l’intégration de l’équie de formation allemande actuellement au Niger. (lire : EUTM Mali reprend le collier. Nouvelles bases, sorties dans tout le Mali, Gazelle intégrée. En attendant le Burkina et le Niger).

Coté Minusma (la mission de l’ONU), j’ai effectivement de mon côté 930 Allemands et 300 Britanniques (250 dans le task group et 50 en soutien à Gao) venus du Light Dragoons et Royal Anglian Regiment ). Chiffres confirmés à B2 à Londres et Berlin. Il y a aussi environ 250 soldats d’autres pays européens (60 Portugais, 95 Belges, Norvégiens, Danois, Irlandais)… et une vingtaine de Français. On arrive ainsi à l’effectif mentionné des 1500 personnels du ministère.

  • NB : l’effectif allemand a nettement augmenté depuis le début de l’année (le dernier bilan de la Minusma, datant de décembre, indique toujours 425 personnels). L’effectif autorisé (théorique) par le Bundestag est de 1100 personnels. La relève venant de la 12e Panzerbrigade appuyée par la 2e brigade d’infanterie de montagne se prépare

Du côté bilatéral, le chiffre donné de 300 semble correct avec notamment une petite centaine de Belges dans la mission de formation ‘Nero’ au Niger (atteinte récemment par le Covid-19), et un peu moins de 200 Allemands dans la mission de formation ‘Gazelle’ (qui vont être intégrés dans la mission EUTM Mali).

Conclusion : Parly 1, Canard 0

Au final, si on additionne le tout (environ 400 Barkhane-Takuba + 800 Eutm + 1500 Minusma + 300 bilatéral), on arrive largement au-dessus du chiffre des 2500 cité par la ministre Florence Parly. Et dans la zone des 2900 personnels donnés par le ministère (même légèrement au-dessus). Et, encore, on n’a pas compté les effectifs de soutien aux forces de sécurité intérieure, présents dans les deux missions européennes EUCAP au Mali et au Niger, souvent composés de personnels policiers ou gendarmerie aguerris. Si on les prend en compte, on dépasse largement le chiffre de 3000. Ce n’est pas négligeable du tout !

Si on reste sur la dimension Takuba, on est loin du compte. Avec un peu plus de 200 hommes aujourd’hui en fait, on est très loin de l’objectif de 600 personnels (si mes souvenirs sont bons) affiché au début de la réflexion sur la mise en place d’une task-force de forces spéciales européennes par l’état-major des armées).

Un engagement de seconde ligne, non sans risques

Les Européens s’engagent au Sahel, c’est un fait, et de façon assez notable. Mais ils restent sur des missions de seconde ligne (formation, logistique, transport, sécurisation). Peu s’engagent de fait en première ligne (moins de 10%). Mais cet engagement n’est pas à négliger. S’engager au Sahel n’est pas de tout repos. Les forces sont toutes exposées à un risque. Des diplomates européens l’ont payé de leur vie à Bamako. Ce n’est pas identique à déployer des forces en Bosnie-Herzégovine ou au Kosovo, qui ressemble (soyons honnêtes) à une promenade de santé.

Un dossier délicat pour Paris

La France se retrouve cependant au Sahel dans la même position que les Américains en Afghanistan, obligée, régulièrement, d’aller sonner les cloches de ses alliés pour leur demander du personnel et des moyens. Sauf que Paris n’a pas les moyens de Washingon, il faut user de persuasion, d’échanges de bons procédés (tu viens au Sahel, je t’aide sur telle ou telle mission). La communication publique est donc essentielle, surtout au plan européen. D’où la grande sensibilité (soudaine) du ministère dès qu’on prononce le mot Européen. Sensibilité qui va aller s’accentuant. Car au 1er semestre 2022, c’est-à-dire rapidement, viendra la présidence française de l’Union. Où le gouvernement entend briller de mille feux (mantra européen de E. Macron… mais surtout échéance électorale présidentielle obligent).

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi :

(mis à jour) Article mis à jour et corrigé avec les derniers chiffres fournis par la Bundeswehr et EUTM Mali (à jour au 11.02). Commentaires revus en conséquence.

Cet article Combien de soldats européens sont présents au Sahel ? Combien sont dans Barkhane ? (v3) est apparu en premier sur B2 Le blog de l'Europe géopolitique.

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La menace terroriste se déplace vers le Golfe de Guinée

Tue, 09/02/2021 - 08:23

(B2) Pour Bernard Emié, le chef de la DGSE, le chef du renseignement extérieur français, on n’en a pas fini avec le terrorisme en Afrique. À partir du Sahel, les groupes terroristes essaiment et étendent leur influence vers le Sud et l’Ouest de l’Afrique

Le général François Lecointre (Chef d’état-major des armes) et Bernard Emié (directeur de la DGSE), aux côtés de la ministre des Armées, Florence Parly (crédit : DICOD France)

Au sahel : l’objectif désorganiser les groupes armés

Le propos de Bernard Emié se veut volontairement offensif, reprenant le propos du président de la république : « Avec les terroristes, on ne discute pas. On combat. ». L’action menée a permis « d’affaiblir durablement nos ennemis », notamment en Iraq ou sur le plan intérieur. Au Sahel, aussi, elle a permis « de désorganiser les groupes terroristes et d’entraver la plupart de leurs chefs ». Une bonne partie du travail est ainsi d’identifier les chefs, afin de les éliminer.

A l’image du jeu de carte distribué par les Américains au moment de l’intervention en Iraq contre Saddam Hussein, la DGSE affiche clairement les ‘neutralisations’ (= ‘élimination’) de certains chefs d’Al Qaida (source image : DGSE)

En expansion vers l’Ouest de l’Afrique, voire l’Europe

Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) développe actuellement un « projet d’expansion » vers le golfe de Guinée, en particulier la Côte d’Ivoire et le Bénin. Depuis le Mali, les terroristes « réfléchissent à des attaques dans la région et en Europe » a lâché le directeur général du renseignement extérieur français (DGSE), Bernard Emié, lors d’un déplacement de la ministre sur la base aérienne des forces spéciales à Orléans, pour un comité exécutif anti-terroriste lundi (1.02).

Les deux réseaux terroristes. L’un descendu plutôt des ‘poches’ rebelles du Nord Mali, proche frontière Algérienne, l’autre (Daesh) plus endogène, qui a pris sa croissance dans le Liptako, dans la zone des trois frontières entre Mali, Niger et Burkina Faso (Source Carte : DGSE)

Pris en étau, les réseaux s’étendent

En plus de « financer déjà des hommes qui se disséminent » dans ces deux pays, « des combattants ont été envoyés aux confins du Nigéria, du Niger, du Tchad, où plusieurs groupes issus de Boko Haram continuent de tisser leur toile et d’assassiner », a-t-il décrit. « Ces pays sont désormais une cible » pour les terroristes. La raison ? Selon lui, les terroristes sont en fait « pris en étau » et donc « s’étendent vers le Sud ».

La menace venue du Moyen-Orient et d’Afghanistan se répand en Afrique (Source Carte : DGSE)

Direction l’Afrique de l’Est et australe, voire l’Europe

Toutefois, la dispersion des forces terroristes ne s’arrête pas aux frontières sahéliennes. Et ne doit pas être prise à la légère. Le chef de la DGSE est formel : « La situation en Afrique orientale, depuis les Shebabs de Somalie [Al Qaïda NDLR] jusqu’aux infiltrations récentes de l’État islamique au Mozambique », deux pays sur la côte Est du continent africain « nous préoccupent également beaucoup ».

Des chefs d’AQMI pris sur le fait

Le clou de la conférence est la présentation d’une vidéo. On peut y voir un groupe d’hommes réunis sous la tente pour discuter de leurs opérations futures. Sont là les principaux chefs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, notamment Lyad ag-Ghali, le chef du GSIM (Groupe de soutien de l’islam et des musulmans) la filiale ‘Sahel’ d’AQMI (avec le turban rouge), le chef de la Katiba Macina, Amadou Kouffa (considéré comme le numéro 2 d’Al Qaida au Sahel) (avec le turban noir), Abdelmalek Droukdel, le chef dAQMI (avec le turban, tué par les forces Barkhane le 3 juin 2020).

Commentaire : une action de com’ stratégique avant tout

Cette sortie publique d’un directeur du renseignement, qui reste traditionnellement dans l’ombre, est loin d’être anodine, d’autant qu’elle n’a rien d’improvisé.

Sur le plan des informations, il n’y a pas grand chose de concret à glaner, à part cette vidéo. Et encore, elle ne prouve pas grand chose, à part le fait que des chefs de bandes armées se rencontrent pour coordonner leur action. Ce qui est la base d’un mouvement armé. On a cependant la confirmation que c’est surtout Al Qaida et ses filiales au Sahel qui est visé, et moins l’Etat islamique (Daesh) et qu’ne partie de l’action du renseignement a pour objectif l’élimination (‘neutralisation’ dans la terminologie officielle) des différents chefs des mouvements. Une stratégie plutôt limitée si on en juge par les résultats sur le terrain.

Sur le plan des menaces, on sait déjà que la Somalie n’est pas un havre de paix et qu’il y a un risque terroriste au Mozambique, comme en Afrique de l’Ouest. « Il y a toujours des risques majeurs de développement de djihadistes dans la zone qui va de la Corne de l’Afrique à la Guinée-Bissau » disait déjà Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, en juillet 2014, lors de la transformation de l’opération Serval en opération Barkhane, évoquant déjà un risque pour l’Europe.

« Le but de cette présence, c’est d’empêcher que [le nord des cinq pays du Sahel] ne devienne une filière, un lieu de passage permanent de reconstitution des groupes djihadistes entre la Libye et l’océan Atlantique, ce qui entraînerait ensuite des conséquences graves pour notre sécurité ». Effectivement quand un directeur du renseignement le dit face caméras, cela peut avoir plus de poids qu’un responsable politique, qu’on pourrait soupçonner d’arrières pensées.

Comment l’analyser alors ? Le premier message est à but interne. Il s’agit d’indiquer que la menace n’est pas vaincue, mais qu’elle est suivie. Cela permet de contrer les quelques critiques sur l’utilité de Barkhane, comme les tentations d’en réduire le spectre ou de négocier avec les groupes armés. Des ‘ennemis’, des ‘terroristes’, le vocable est on ne peut plus guerrier. Le deuxième objectif est à usage externe, vis-à-vis des Européens comme des Américains. Un petit rappel de l’importance de l’opération française, et de son efficacité, au moment où l’administration Biden révise tous ses objectifs de présence militaire, y compris en Afrique, n’est pas inutile. Idem pour les Européens — des Britanniques aux Espagnols, en passant par les Allemands ou Italiens — qui peinent à s’engager de manière plus prononcée.

(Nicolas Gros-Verheyde, avec Aurélie Pugnet)

Le discours de Bernard Emié à OrléansTélécharger

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Un Atlantique 2 français à Irini. Les P3 Orion allemands en panne

Mon, 08/02/2021 - 14:33

(B2) Un avion de patrouille maritime Atlantique 2 de la marine française prête son concours actuellement à l’opération EUNAVFOR Med Irini. L’ATL2 opère à partir de la base aérienne de la La Sude en Grèce.

Un moyen associé

L’appareil a été déployé depuis la fin de la semaine dernière annonce l’état-major des armées, le 6 février. Il s’agit de ce qu’on appelle « un moyen associé ». C’est-à-dire que l’avion effectue des missions de façon ponctuelle, mais n’est pas soumis de façon permanente au commandement et contrôle de l’opération.

Le P3 Orion de la marine allemande en panne

Cet apport est cependant très utile. La France vient suppléer ainsi un passage à vide allemand. La marine allemande a dû en effet suspendre sa participation à l’opération en janvier car son avion de patrouille P3 Orion C a a subi une panne, comme nous l’a appris notre collègue d’Augengeradeaus. Ce n’est pas un cas isolé.

Des P3 Orion allemands au bout du rouleau

Comme le raconte notre collègue allemand, Thomas Wiegold, la flotte des avions de surveillance maritime est au bout du rouleau. Sur les huit appareils P3 Orion, quatre ne sont plus réparables et ont pratiquement été mis hors service. Deux machines sont en processus de grande révision (avec de nouvelles ailes) : la première devrait être disponible avant la fin février. Pour la seconde, aucune date n’est précisée, ce sera plus tard. Le septième avion n’est pas non plus disponible : revenu de l’opération anti-piraterie de l’UE (EUNAVFOR Atalanta) il est en inspection ‘600 heures’. La dernière machine opérationnelle, engagée dans l’opération EUNAVFOR MED Irini, a été mise hors service le 8 janvier, avec une défaillance dans le système d’alimentation en carburant !

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Au départ, cette modernisation devait concerner tous les appareils, mais elle a été arrêtée en juin de l’année dernière, et n’ira à son terme que pour les deux machines dont le processus a déjà commencé.

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Pour Josep Borrell, le divorce est consommé entre Russes et Européens. Il faut en tirer les conséquences

Sun, 07/02/2021 - 23:33

(B2) Dans un message posté sur son blog, ce dimanche (7.02) le chef de la diplomatie européenne revient sur sa visite à Moscou. Non sans panache

  • Ce message a un triple intérêt. Il révèle la teneur de certains échanges, vigoureux, le constat d’un divorce profond entre Russie et Europe et appelle à prendre résolument la mesure de cette attitude agressive. Au passage, il vient défendre son rôle de diplomate fustigeant les critiques trop faciles.

Le refus du dialogue

Venu avec l’esprit du diplomate, prêt à résoudre les différends, Josep Borrell a trouvé face à lui une direction russe refusant d’avoir « un dialogue plus constructif ». Entre une conférence de presse « organisée de manière agressive » (lire : Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell piégé à Moscou) et l’expulsion de trois diplomates européens annoncée par surprise (lire : Avec Moscou, les relations diplomatiques se compliquent). Pour le chef de la diplomatie européenne, c’est clair.

Le divorce est consommé

« L’Europe et la Russie se séparent. […] la Russie se déconnecte progressivement de l’Europe et considère les valeurs démocratiques comme une menace existentielle ». Les relations entre l’Union européenne et la Russie étaient déjà « au plus bas » depuis un certain nombre d’années. Elles se sont encore « détériorées après les récents développements liés à l’empoisonnement, l’arrestation et la condamnation d’Alexei Navalny ». Les autorités russes n’ont pas voulu saisir cette « opportunité ». « C’est regrettable et nous devrons en tirer les conséquences. ».

L’Heure du choix

Aujourd’hui, l’Europe est à donc un tournant dans ses relations avec Moscou. En tant qu’Union européenne, « nous devrons réfléchir attentivement à la direction que nous voulons donner à nos relations avec la Russie et agir de manière unie avec détermination », y compris par des sanctions, indique-t-il. NB : Ce devrait être à l’ordre du jour de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères, lundi (22.02), comme du sommet européen des Chefs en mars.

Un aggiornamento diplomatique

Ce choix n’est pas juste un choix tactique ou conjoncturel, il s’agit d’un « choix stratégique » ! Un choix qui va déterminer « la dynamique internationale du pouvoir au XXIe siècle ». Les Européens veulent-ils avancer « vers des modèles plus coopératifs ou plus polarisés », basés sur « des sociétés fermées ou plus libres » ? Et sont-ils prêts à « influencer ces évolutions » ?

En clair, il s’agit de déterminer une politique. Dans ce cas, cela « nécessite une vision et des objectifs clairs, un engagement diplomatique intense, et de nos nombreux moyens d’action extérieure et de projection d’influence ». Trois éléments qui semblent bien manquer aujourd’hui.

Le rôle d’un diplomate c’est de prendre des risques

Au passage, Josep Borrell ironise sur ceux qui bien à l’abri « derrière des murs » sécurisés, hurlent avec les loups. « Appeler les autres à partir de la sécurité de cette position n’apportera pas une plus grande sécurité à l’UE. Et ce n’est pas de cette façon que je considère mon rôle comme le premier diplomate de l’UE ».

Il préconise une diplomatie d’action plutôt qu’une diplomatie de la rancoeur. « Nous devons […] rencontrer les autres sur leur propre territoire, juste au moment où des événements négatifs se déroulent. […] Je préfère cela à devoir réagir [après coup] et attendre que les choses se passent. » Et d’assumer ce choix : « Si nous voulons un monde plus sûr pour demain, nous devons […] être prêts à prendre des risques. »

(Nicolas Gros-Verheyde)

Traduction libre par nos soins

Une expulsion annoncée par surprise. La discussion avec Serguei Lavrov « a atteint des niveaux élevés de tension » surtout quand le Haut représentant de l'UE a abordé la question des droits de l'Homme et « demandé la libération immédiate et inconditionnelle de M. Navalny, ainsi que l’ouverture d’une enquête complète et impartiale sur sa tentative d’assassinat ». Les autres nombreux points de « désaccord » ((Ukraine, Biélorussie, Géorgie, Haut Karabagh, crises syriennes et libyenne) ont été abordés. Inutile de préciser que l'ambiance n'était donc très chaleureuse. Mais les Russes réservaient une surprise à leur visiteur. Ce n'est qu'« à la toute fin de notre réunion » que les Européens ont appris « par le biais des médias sociaux », l'expulsion de trois diplomates européens sur la base « d'allégations non fondées (lire : Avec Moscou, les relations diplomatiques se compliquent. Trois diplomates européens expulsés). La goutte d'eau qui a fait déborder le vase pour J. Borrell en même temps qu'une conférence de presse qui s'est révélée un vrai traquenard. My visit to Moscow and the future of EU-Russia relationsTélécharger

LIre à suivre : Le cas Navalny : un cas d’école pour la liste Magnitski à l’Européenne ? Mais pas suffisant pour bloquer le gaz russe et notre fiche sur le régime de sanctions des droits de l’Homme

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Takuba. Les Suédois sur place au Mali

Sun, 07/02/2021 - 19:45

(B2) La majeure partie des forces spéciales multinationales suédoises de la Task Force Takuba est désormais en place au Mali. C’est ce qu’affirme le général de brigade Anders Löfberg, chef du commandement des forces spéciales

Le C-130 Hercules suédois (crédit : MOD Suède)

Un engagement important

L’engagement suédois est aujourd’hui un des plus importants engagements européens sur le terrain, avec 150 militaires, certains issus des forces spéciales, d’autres de forces conventionnelles. Les Suédois vont constituer ainsi un task-groupe avec les Français pour former une UERI malienne. Leur tâche : « assister, conseiller et accompagner les forces de sécurité maliennes ». Il peut, au besoin, être renforcé de 100 personnels supplémentaires, selon l’autorisation donnée par le Parlement.

Hélicoptères à Menaka, C-130 à Niamey

Les Suédois forment aussi une force d’intervention rapide héliportée, basée à Ménaka, dans le nord-est du Mali, bien utile pour réagir en cas d’incident. Avec trois hélicoptères UH-60 Black Hawk. Tandis qu’un avion de transport, de type C-130 Hercules, sera basé à Niamey, au Niger, pour assurer les transports tactiques, voire stratégiques.

Capables d’intervenir au Mali comme au Niger

Ces militaires pourront opérer au Mali, comme au Niger. Ce qui est le principe de la task-force Takuba qui opère dans la zone des Trois frontières. Le Parlement suédois a autorisé cette double intervention (1). Durée de leur engagement : jusqu’au 31 décembre 2021.

Un bastion de la violence

Le pays est devenu un « bastion pour les groupes islamistes pro-violence, y compris les groupes liés à Daech et Al-Qaïda ». La population malienne est « gravement affectée par des groupes terroristes criminels et islamistes ». Et ces dernières années, on a noté « une augmentation des activités criminelles telles que le commerce illégal d’armes, de drogues et de personnes, les enlèvements et les actes terroristes ». Les forces spéciales sont la seule « ressource possible dans la lutte contre les groupes terroristes car elles peuvent être déployées rapidement dans différentes parties du pays et empêcher ainsi l’escalade des conflits et la propagation du terrorisme », indique Anders Löfberg selon le site de l’armée suédoise.

Une présence dans la Minusma également et un peu dans EUTM Mali

Ce n’est pas le seul engagement de la Suède dans la région. La Suède fournit également des troupes à la mission de l’ONU Minusma, avec 215 soldats, et la mission de formation de l’UE (EUTM Mali) avec 8 militaires.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Lire aussi : Force Takuba : qui participe, observe ou simplement soutient ? (v3)

  1. On peut remarquer un absent, de taille, le Burkina-Faso, qui n’a pas encore autorisé une telle opération sur son sol. Ouagadougou a toujours été réticent à ce type d’intervention.

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En Russie, la répression ne fait que se durcir, les autorités osent (presque) tout

Sun, 07/02/2021 - 09:05

(B2) C’est bien ce que l’on retient des témoignages de Denis Shedov et de Sacha Koulaeva, lors d’un échange d’une heure, à distance, avec des eurodéputés, ce vendredi (5.02)

Capture d’écran de la page d’accueil du site OVD-Info, plateforme d’information créée il y a dix ans pour surveiller les arrestations de masse en Russie

Denis est analyste juridique de la plateforme OVD-Info, lancée au moment des manifestations de 2011. Il s’agissait alors de suivre les arrestations de masses pratiquées par les autorités russes. Ce qu’il décrit aujourd’hui est pire. Les persécutions massives sont d’une ampleur « sans précédent ».

En prison pour avoir manifestés

Depuis le 23 janvier, « plusieurs milliers de personnes ont été détenues pour avoir participer à des rassemblements en soutien » de l’opposant Alexeï Navalny, de retour en Russie au terme de sa convalescence en Allemagne, après une tentative d’assassinat par empoisonnement. La détention peut durer « de quelques heures à quelques jours ». Les témoignages font état de « recours injustifiés à la force pendant l’arrestation » et de « maltraitantes physiques de la police ».

Qu’importe le prétexte légal

Tous les prétextes sont bons pour justifier de poursuites pénales : de la désormais classique « violation des règles sanitaires dans le cadre de la pandémie », à la plus originale « implication de mineurs dans des activités illégales », jusqu’à la plus inouïe « violation de droits de l’Homme » ! Comme en Biélorussie, les journalistes sont directement visés, « poursuivis pour avoir couvert des protestations ». De même que les avocats, empêchés de se rendre dans les commissariats. Certes, il n’y a « rien de nouveau », sourit presque Denys. Sauf que, « cette tendance ne fait qu’empirer ».

Une répression sans complexe

Sacha enseigne comme maître de conférences en droits de l’homme, à l’École des affaires internationales de Paris, Sciences Po. Elle a dirigé le bureau Europe de l’Est pour la FIDH (la fédération internationale des droits de l’Homme). Pour elle aussi, les pratiques russes n’ont finalement rien de surprenant. Sauf que « le pouvoir n’essaye même plus de se cacher derrière une procédure légale ».

Encore plus violente

Elle évoque des cas « de tortures pour récupérer le mot de passe d’un téléphone ». De « parents menacés de perdre leurs droits parentaux ». Les pressions s’exercent au travail, avec des employeurs « menaçant leurs salariés » au cas où ils iraient manifester, et même à l’école. « On est arrêté pour avoir tweeté ou simplement retweeté ». L’État ne cherche même « pas à justifier cette répression aveugle ni convaincre de sa légalité ». Son message est d’autant plus clair : « toute opposition sera passible de répression ». Et « le niveau de violence augmente d’un jour à l’autre, voire d’une heure à l’autre ».

(Emmanuelle Stroesser)

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Le Royaume-Uni ne veut pas élever la délégation de l’UE au rang d’ambassade. Inamical ! (v2)

Wed, 27/01/2021 - 22:10

(B2) Le refus du gouvernement britannique de reconnaître tous ses droits à la délégation de l’UE à Londres provoque l’ire européenne

(crédit : PE)

L’encre du traité sur la sortie du Royaume-Uni (conclu juste avant Noël) n’est pas encore sèche que déjà Londres sème le trouble. Le gouvernement de Boris Johnson n’accepte pas, en effet, de donner à la délégation de l’UE à Londres le rang qui lui est dû, notamment les privilèges et immunités diplomatiques habituels et en particulier le rang d’ambassadeur pour son chef. Cela suscite la fureur des Européens.

La rupture d’une pratique ancienne

Le Haut représentant de l’UE (le chef de la diplomatie européenne) Josep Borrell n’a pas caché son incompréhension face à la presse, lundi (25.01). « Nous ne demandons pas quelque chose de nouveau. Nous ne demandons pas un traitement spécial. Le statut extérieur de l’Union européenne est reconnu par les pays et les organisations internes du monde entier. Nous avons 143 délégations dans le monde entier. Sans une seule exception, tous les États hôtes ont accepté d’accorder à ces délégations et à leur personnel un statut équivalent à celui des missions diplomatiques des États en vertu de la Convention de Vienne. »

Un signal peu amical

« Nous attendons du Royaume-Uni qu’il traite la délégation de l’Union européenne en conséquence et sans délai. » Et d’ajouter : « Nous n’accepterons [donc] pas que le Royaume-Uni soit le seul pays dans le monde à ne pas reconnaitre l’UE comme une délégation et ne pas lui accorder des facilités diplomatiques. […] Ce n’est pas un signal amical. Si les choses doivent continuer ainsi, ce n’est pas de bon augure. »

Inacceptable pour le Parlement

Réaction identique au Parlement européen. « C’est inacceptable » a lancé Nathalie Loiseau, présidente de la sous-commission sécurité et défense, lors d’une audition ce mardi (26.01) avec le secrétaire général du service diplomatique européen (SEAE), Stefano Sannino. « J’espère que vous n’arriverez pas à un compromis boiteux sur cette question » a-t-elle lancé.

Le grand amour Europe-Royaume-Uni

De façon plus diplomatique, mais tout en fine ironie, le ministre portugais des Affaires étrangères, Antonio Santos Silva, nous confiait hier, au sortir d’un long entretien : « Tous les grands amours sont complexes. Et nous avons un grand amour avec le Royaume-Uni ».

Explications : une position britannique ancrée dans le temps

Dans la capitale britannique, de tous temps, la Commission européenne avait un bureau, une représentation, chargée d’être le relais de la politique décidée à Bruxelles dans le pays (et de faire remonter des informations du pays vers la Commission européenne). Classique. C’est ainsi dans tous les États membres. Mais le Brexit a changé la donne. D’État membre, le Royaume-Uni est devenu pays tiers. Exit donc la représentation de la Commission. À la place, vient une délégation de l’Union européenne, véritable ambassade, dirigée par un ambassadeur et plusieurs services, plutôt classiques dans une ambassade (politique, économique, culturel, et au besoin sécurité intérieure et/ou défense). La gestion des relations avec le Royaume-Uni a d’ailleurs migré en bonne partie. Elle est devenue un sujet de ‘relations extérieures’…

En refusant d’acter ce changement, et par ricochet, d’élever le chef de la délégation de l’UE (*) au rang d’ambassadeur, Londres refuse d’acter le divorce. Un geste où l’on pourra trouver des ressorts au niveau de la psychologie. Mais cette décision est avant tout politique. Et pour celui qui suit la politique britannique dans l’UE, ce n’est pas franchement une surprise. De tous temps, les Britanniques ont refusé de reconnaître un quelconque rôle à l’Union européenne au niveau de la politique étrangère ou de la défense, ou à ce qui pourrait s’apparenter à une petite once d’Union politique. En 2011 (à la création du SEAE), ils avaient ainsi bataillé ferme, durant des mois, pour refuser de reconnaître à l’UE de faire des déclarations au nom des Européens aux Nations unies. Tant qu’ils étaient présents, ils ont bloqué l’établissement d’un QG militaire permanent pour l’UE. Enfin, ils ont refusé d’incorporer la politique étrangère dans le traité de sortie de l’UE. Alors que tous les éléments étaient là pour un accord (lire : Brexmas. La politique étrangère et la défense, deux orphelines de l’accord).

(Nicolas Gros-Verheyde)

L'accréditation de l'ambassadeur britannique à Bruxelles retardée La première rencontre entre le nouvel ambassadeur britannique auprès de l'UE à Bruxelles, Lindsay Croisdale-Appleby, et le chef de cabinet du président du Conseil européen, Frédéric Bernard, prévue jeudi (28.01), a été reportée. Sine die. Un geste d'humeur vis-à-vis du refus britannique de rehausser la délégation de l’UE à Londres au niveau diplomatique. C'est « une mesure de réciprocité ».  confirme à B2 un officiel européen. NB : cette rencontre normalement formelle permet à un nouvel ambassadeur de prendre contact, mais surtout de remettre sa lettre de créance et d'enclencher le processus d'accréditation auprès de l'UE.

(*) Cette délégation n’est pas dirigée par n’importe qui. On retrouve à sa tête le Portugais Joao Vale de Almeida, qui a été l’ambassadeur de l’UE à Washington de 2010 à 2014 puis à New-York auprès de l’ONU jusqu’en 2019, et auparavant porte-parole adjoint (sous Santer) et chef de cabinet du président de la Commission (sous Barroso). Bref un homme chevronné.

Lire aussi : Comment associer le Royaume-Uni à la politique étrangère et de défense ? La réflexion reprend (v2)

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Les IED, outils robustes, menace continue au Sahel

Wed, 27/01/2021 - 17:02

(B2) Avec plusieurs morts dans l’opération Barkhane, coup sur coup entre fin décembre et début janvier, la menace des mines et autres engins explosifs artisanaux apparait en croissance. En fait, il n’en est rien.

Détection d’IED par des militaires de Barkhane (Crédit : EMA – DICOD – Archives B2)

Un chiffre plutôt régulier tous les ans

« Tous les ans, nous découvrons, décelons et empêchons l’explosion d’une grosse vingtaine d’IED posés par les groupes terroristes » indique le colonel Barbry, porte-parole de l’état-major des armées. Ce chiffre est « à peu près stable » d’une année sur l’autre. « Tous les ans, on déplore environ une dizaine d’attaques qui ne font pas tous des victimes. » Il n’y a « pas de recrudescence ni de pause » . Le véritable « pic des attaques a eu lieu en 2015 ». Depuis, il est en fait « en décroissance ».

L’ajout de produits pour doubler l’effet explosif

Ce qui change plutôt est la « valorisation » des engins posés, avec ce qu’on appelle « du « Home made exclusive » (HME). Autrement dit l’ajout de précurseurs chimiques ou autres produits (ex. nitrates…) à l’intérieur de l’engin qui augmentent l’effet de l’explosion. « En fonction de la charge mise, vous obtenez des dégâts proportionnels avec les matériels mis à l’intérieur. » Depuis 2013, on observe « l’ajout de Home made exclusive dans les IED ». Les charges peuvent être importantes : jusqu’à 40 kg. Sans automatiquement d’augmentation des doses d’explosifs.

Une fabrication locale éprouvée

Les systèmes des IED utilisés au Mali sont « basiques et rudimentaires », généralement « à pression ». La fabrication « reste robuste mais relativement simple » à placer. Mais il n’y a pas d’improvisation. Il y a des centres logistiques « locaux », et « nécessairement des artificiers » en mesure de fabriquer les IED sur place.

Un dispositif anti-IED

Les Français disposent d’un parc de 400 brouilleurs, mis en place depuis l’intervention en Afghanistan surtout. « Plus des deux tiers sont déployés notamment au Sahel. » Ces brouilleurs mettent en place une « bulle de sécurité », « particulièrement efficaces sur les RcIED », les engins IED radio-commandés, déclenchés par un téléphone portable par exemple (2). Mais ils peuvent beaucoup moins contre les engins explosifs sans télécommande, notamment contre les PP-IED, déclenchés par la pression (le passage d’un véhicule par exemple). Ce sont ces engins à pression que l’on « retrouve majoritairement » au Mali et au Sahel en général.

Des ouvertures d’itinéraire

Face aux IED plus rudimentaires, c’est la pratique d’une reconnaissance par un détachement d’ouverture d’itinéraire et de protection qui est utilisée avec des véhicules emblématiques Buffalo (1) et Souvim (Système d’OUVerture d’Itinéraires Minés). « Ce système d’ouverture de terrains minés permet de parcourir environ 150 km entre 8 et 10 heures. » Soit une vitesse de progression d’une petite dizaine de km/h au Sahel. Vitesse qui peut paraitre lente. Mais on est ici « sur un terrain abrasif rugueux et compliqué ».

Le renseignement humain vital

Le problème est que des engins peuvent être posés après le passage des véhicules de reconnaissance. Ce qui nécessite pour les armées d’avoir une « certaine organisation » et surtout de recourir au « renseignement humain ». Une « nécessité » dans « la traque pour la sécurité […] afin de remonter les chaines, de localiser les centres de fabrication, les plots logistiques et ceux qui les mettent en œuvre »…

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. Un véhicule militaire blindé à roues renforcé de type MRAP (résistant aux mines et protégé contre les embuscades), construit par Force Protection, une division de General Dynamics.
  2. Le plus récent des systèmes, le programme ‘Barrage’ dit actif-réactif avec goniométrie, est en cours de déploiement. Il devrait à terme remplacer les autres systèmes. Six ‘Barrage’ sont déjà déployés dans la bande sahélo-saharienne (BSS en terminologie militaire).

Ces réponses ont été données aux différents journalistes présents lors du point presse de la DICOD du 15.1, auquel participait B2 (via audioconférence).

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Les pirates adorent le Golfe de Guinée. La zone la plus dangereuse

Mon, 25/01/2021 - 18:39

(B2) Le dernier rapport publié par le MICA center est net : le Golfe de Guinée est une des zones les plus dangereuses au monde. Il a pris le relais dans le hit parade du danger des côtes somaliennes

Exercice anti piraterie à bord de l’aviso Premier Maitre en 2013 (Crédit : DICOD / EMA – Archives B2)

Ce centre d’observation de la piraterie maritime est établi à Brest au sein de la préfecture maritime depuis 2016. Il surveille une bonne partie des mers du Globe : Golfe de Guinée (GOG), Golfe d’Aden et Océan indien (MSCHOA) et les autres mers.

Un vol ou une attaque tous les trois jours

114 évènements ont eu lieu cette année, dans le Golfe de Guinée, selon le rapport annuel publié par le Mica Center début janvier. Ils se décomposent en 21 abordages (bateau piraté), 30 attaques, 18 approches et 45 vols (1). L’objectif des pirates demeure le même : rapines et otages humains qui seront ensuite échangés contre rançon. On reste sensiblement sur les mêmes chiffres qu’en 2019 : 111 évènements (26 piratages et 25 attaques). Ce qui confirme un haut niveau de risque, mais aussi un certain coup d’arrêt à la progression. (pour découvrir le Mica center voir notre reportage)

L’évolution du rayon d’action des pirates

Les pirates, qui concentraient leur action sur le fond du golfe jusqu’en 2019, sont désormais plus audacieux avec « certains raids confirmés sur plus de 400 nautiques et des abordages à plus de 100 nautiques des côtes » selon le rapport (*). Et la zone de chalandise s’étend désormais « du Ghana à la Guinée équatoriale ». Idem pour les actes de brigandage et de vol, pratiqués sur des navires au mouillage. Le risque s’étend désormais de la Guinée Conakry jusqu’à l’Angola. C’est une grande partie de la côte d’Afrique de l’Ouest qui est désormais concernée.

Un nombre de prises d’otages préoccupant

Le nombre d’actes d’enlèvements dans le golfe de Guinée, dont la progression était sensible depuis 2017, reste « préoccupant » insistent les gars du Mica Center. Au total, 142 personnes ont été prises en otages en 2020. Soit un chiffre sensiblement identique à celui de 2019 (146). Les prises d’otages se sont concentrées au printemps et à la fin de l’année. Si les trois premiers mois de 2020 ont été relativement calmes, le printemps a été agité avec un total de 65 otages enlevés entre avril et juillet et une recrudescence en novembre.

Une moyenne de 30 jours de détention

La moyenne du nombre d’otages par acte est de 5,6 avec un maximum de 14, constaté durant le mois de novembre. Les actes de kidnapping constituent 23 % de la totalité des événements. Les otages ne restent pas longtemps aux mains des pirates. L’objectif, pour eux, étant d’obtenir une rançon le plus rapidement possible. La durée moyenne de détention est de 30 jours cette année (hors cas record de 149 jours).

La zone la plus dangereuse

Conclusion : « Malgré les efforts du Nigéria et des pays États riverains, le golfe de Guinée demeure la zone la plus dangereuse du monde et les actes de piraterie s’y étendent désormais du large du Ghana jusqu’au large de la Guinée équatoriale » résume l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la marine française. Et les deux récentes attaques survenues en janvier, dont l’une s’est terminée par un abordage particulièrement violent (MV Mozart) le prouve.

(Nicolas Gros-Verheyde)

  1. un certain nombre d’attaques sont mises en échec. Ce qui est mettre au crédit de l’amélioration des procédures d’alerte entre marine marchande et garde-côtes et marine des pays riverains, comme à leur formation. Cela oblige les pirates à reconduire leurs actions à plusieurs reprises avant de parvenir à leurs fins.
Rapport Annuel Mica centerTélécharger Un porte conteneurs turc piraté dans le Golfe de Guinée (v3)

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Les camps des Fama à Mondoro et Boulikessi attaqués dans la nuit de samedi

Sun, 24/01/2021 - 22:50

(B2) Deux camps des forces armées maliennes (FAMa), situés tous deux à la frontière entre le Mali et le Burkina Faso (le poste G5 Sahel de Boulikessi et le camp FAMa de Mondoro), ont été attaqués, dans la nuit du 23 au 24 janvier. Des attaques complexes et simultanées de groupes armés terroristes non identifiés aux environ de 3h30 du matin

Une patrouille du groupement commandos montagne (GCM) à l’extérieur du camp de Boulikessi en novembre (DICOD / EMA – Archives B2)

L’information est venue de l’état-major français des armées comme des forces armées maliennes ce dimanche (24.01).

Les hélicoptères Tigre et deux Mirage en appui

Les FAMa ont « tout de suite pris l’ascendant sur leur adversaire et ont tenu leur position appuyés notamment par leur Tucano », un avion d’attaque léger de type A-29, affirme l’état-major français des armées. Mais cela n’a pas suffit. L’opération Barkhane a alors déclenché une patrouille d’hélicoptères Tigre, « afin d’appuyer les FAMa ». « Moins d’une heure après l’alerte », ils étaient sur place. Les Tigre ont « rapidement » engagé le combat sur une « colonne ennemie à Boulikessi, neutralisant une dizaine de GAT [groupe armés terroristes] à motos ». En parallèle, une patrouille de Mirage 2000 a survolé les deux emprises. Ce n’est qu’au petit matin, que l’ennemi s’est « débandé » selon les termes même des militaires.

Une trentaine d’assaillants tués

Au total, à Boulikessi, ce sont « plusieurs dizaines de GAT qui ont été neutralisés ». Une trentaine exactement, précise les FAMa. 2 pick-ups et 5 motos ‘ennemis’ ont également été détruits et 40 autres motos ont été saisies. À Mondoro, le bilan reste « à consolider ». Un chiffre est connu : la saisie de sept motos.

Plusieurs blessés dans les combats

Du côté des FAMa, le bilan est rude : 4 morts et 12 blessés à Boulikessi, 2 morts et 6 blessés à Mondoro. Un véhicule et une mitrailleuse détruits. Une évacuation médicale a été déclenchée de façon combinée par l’opération Barkhane et la Minusma. Parmi les blessés de Boulekessi, la Force Barkhane a pris en charge deux blessés. Les autres ont été pris en compte par la MINUSMa ou par les FAMa. Stabilisés à l’antenne de réanimation et de chirurgie de sauvetage (ARCS) de Gossi, ils ont été amenés à l’hôpital militaire de Gao en milieu de journée.

(NGV)

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Un porte conteneurs turc piraté dans le Golfe de Guinée (v3)

Sun, 24/01/2021 - 22:10

(B2) Le Mozart, un navire turc, a été pris d’abordage samedi (23.01) matin par des pirates au large de Sao Tomé e Principe. Assaut particulièrement violent. Les autorités d’Ankara sont en émoi

Le Mozart et une partie de son équipage (crédit : Boden)

Le porte-conteneurs battant pavillon libérien avait quitté Lagos et se trouvait alors à 100 miles au Nord-Ouest de Sao Tome e Principe en pleine mer, en direction du Cap, en Afrique du Sud. Selon les sources maritimes consultées par B2, il se trouvait alors à 1°04’13 » Nord et 5°14’17 » Est. Anciennement dénommé Pointe des Salines quand il appartenait à la CMA CGM, il est géré par la compagnie turque Boden Denizcilik AŞ, une filiale de Borealis Maritime, société établie à Hamburg, Londres et Istanbul.

Les deux dernières attaques recensées ont eu lieu à hauteur de Sao Tomé e Principe

Un mort, 15 otages

Après avoir stoppé le navire, les pirates — au nombre de quatre apparemment — ont pris d’assaut le navire. Les marins n’ont pas eu le temps de tous se réfugier dans la citadelle, ou du moins celle-ci a été forcée. Le détail n’est pas vraiment connu. Mais les pirates n’ont pas hésité. Ils sont repartis en prenant 15 membres de l’équipage en otage, de façon violente, en les battant. Un des marins, de nationalité azerbaïdjanaise, l’ingénieur en second du bord, a été tué dans l’attaque. Avant de partir, ils ont détruit une bonne partie des instruments de bord (sauf le système de navigation automatique). Le centre de surveillance maritime de Brest pour le Golfe de Guinée (MDAT-GoG) a été averti. Mais aucun moyen militaire n’était disponible à proximité pour venir en aide aux marins, selon nos informations.

Trois rescapés pour mener le navire à l’abri

Seuls trois marins ont pu en réchapper. Le quatrième capitaine du navire, Furkan Yaren, a été blessé à la jambe. Un autre a été blessé à l’estomac. À trois, ils ont réussi à conduire le porte-conteneurs au plus près jusqu’à Port-Gentil au Gabon. Furkan Yaren le raconte d’ailleurs sur un média twitter d’un ami. « Je ne sais pas où je vais. Les pirates ont démonté tous les câbles, rien ne fonctionne. Nous avons survécu, ils ont kidnappé nos amis en les battant. Seul le système de navigation fonctionne. Ils m’ont donné un itinéraire, j’avance en conséquence. Nous essayons d’amener le navire dans un endroit sûr. »

Gine Körfezi'nde korsanların saldırısına uğrayan Türk gemisinin 4. kaptanı Furkan Yaren, baskın anlarını ve yaşadıklarını anlattı. Bacağından yaralandığını aktaran Yaren, gemiyi güvenli bir limana götürmeye çalıştığını söyledi.
SoNDakika . Com pic.twitter.com/8RGQNHOQl7

— FanZin (@minimedya) January 23, 2021

Arrivée à Port-Gentil

Le navire est arrivé dimanche à 8h (GMT), a confirmé le ministre turc des Transports et des Infrastructures, Adel Karah Ismailoglu. La Turquie « a mobilisé toutes ses ambassades à l’ouest du continent africain afin de secourir l’équipage du navire attaqué » indique le ministre des Affaires étrangères, Mevlüt Çavuşolu, selon l’agence Anadolu. L’ambassadrice turque à Libreville, Nilüfer Erdem, n’a pas ménagé sa peine, accueillant les marins à leur arrivée au port.

L’ambassadrice turque sur le MV Mozart à son arrivée avec un des marins rescapés (le 4e capitaine) (crédit : amb. de Turquie Libreville)

Une autre attaque à la mi-janvier

Ce n’est pas vraiment une surprise (*) ni une première. Dans la nuit du 13 au 14 janvier, selon des sources maritimes, des pirates à bord d’une petite embarcation ont approché un porte-conteneurs, avec tirs à l’appui. Le Maersk Cardiff, battant pavillon de Singapour mais opéré par le Danois Maersk, était en route de Tema au Ghana vers le Cameroun. Il se trouvait alors à environ 120 miles au Sud-Sud Ouest de Brass (Nigéria) à 2°23’58 » Nord et 5°31″ Est. L’alarme a été déclenchée et tout l’équipage a été rassemblé dans la citadelle. Les pirates ont abandonné l’attaque. Le navire et l’équipage se sont déclarés sains et saufs et ont pu poursuivre leur route.

Un projet pilote européen

Le Golfe de Guinée devrait d’ailleurs devenir la première zone maritime d’intérêt européen. Les ministres des Affaires étrangères doivent le décider ce lundi (25.01) (lire Golfe de Guinée zone maritime d’intérêt européen. Premier projet pilote des présences maritimes coordonnées) .

(Nicolas Gros-Verheyde)

NB : sur les aspects généraux sur les risques dans le Golfe de Guinée font l’objet d’un article séparé, lire : Les pirates adorent le Golfe de Guinée. La zone la plus dangereuse

(*) L’attaque de ce week-end s’inscrit dans ce mouvement continu et n’est donc pas totalement atypique contrairement à ce qu’affirment quelques commentaires d’analystes.

(mis à jour) Les aspects statistiques sur le Golfe de Guinée ont été mis dans un papier séparé. Précisions sur la disponibilité des secours et sur l’accueil à Libreville.

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Joe Biden intronisé sur un air de Lady Gaga chantant l’hymne national

Wed, 20/01/2021 - 23:31

(B2) C’est sans doute un des moments clés, émouvants, de l’investiture du nouveau président américain, le Démocrate Joe Biden, et de sa vice-présidente Kamela Harris, ce mercredi (20.1)

Lady Gaga devant Joe Biden (images : CNN – sélection B2)

Quand Lady Gaga arrive en haut des escaliers, les descend, prend place, le parterre des personnalités, et le Capitole, et entonne l’hymne américain ‘The Star-Spangled Banner‘ (La Bannière étoilée), accompagné par l’orchestre des Marines, le temps suspend son vol.

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[Enjeux 2021] L’Europe, une responsabilité croissante après ‘l’attentat’ du Capitole

Tue, 19/01/2021 - 10:30

(B2) L’année 2021 n’avait même pas démarré que venait de Washington une nouvelle incroyable, l’invasion du Capitole, le saint des saints de la démocratie américaine, par une bande incontrôlée et violente. Cet évènement peut changer la donne ou, au moins, couronner une évolution déjà engagée

Le coup de froid sur l’Amérique oblige à réflexion (crédit : marine portugaise)

Encalminée par l’épidémie de Covid-19, une bonne partie du monde, et l’Europe en particulier, est comme atrophiée par ce coronavirus qu’elle peine à combattre. Alors que d’autres enjeux courent

Trois leçons de l’attentat du Capitole

Une attaque terroriste

L’attaque contre le Capitole le 6 janvier ne peut être ramenée à une farandole rocambolesque. C’est un évènement majeur à plus d’un titre. Les réactions à chaud en sont un témoignage (lire : Entre consternation et condamnation, les Européens atterrés par ‘l’insurrection’ au Capitole à Washington). Le moment choisi n’est pas anodin : en pleine certification des votes de Joe Biden, ce n’est pas juste une manifestation qui dégénère, mais une volonté délibérée de rompre le processus démocratique. Le mode d’action (plus organisé qu’il en a l’air, et très militaire) peut être assimilé plutôt qu’à un coup d’état, à un acte terroriste visant le siège du pouvoir. Nous sommes face à un évènement similaire à celui du 11 septembre 2001.

La menace d’extrême droite devient principale

Cet évènement clôt, en quelque sorte, la séquence ouverte en septembre 2001, après l’attentat contre les deux tours jumelles à New York et le Pentagone. Non pas que le terrorisme islamiste est éradiqué. Mais parce qu’une menace, tout aussi grande, pèse désormais sur les démocraties. De façon évidente. Une menace de mouvements extrême, de la droite nationale, rassemblant suprémacistes blancs et néonazis. Ce mouvement a toujours été surveillé de près par les renseignements, mais sous-estimé au plan politique. Cependant, il a déjà frappé fort ces dernières années en Norvège, en Allemagne, en Nouvelle-Zélande (1). Et il ne peut être mis à égalité (comme certains observateurs le font) avec l’extrémisme de gauche (qui n’a plus des velléités terroristes ou de coup d’état comme dans les années 1960-1970). Cet extrémisme est complexe car il a des racines profondes au cœur des sociétés occidentales, est empreint de théories du complot voire du négationniste, et n’hésite pas à passer à l’acte contre les communautés juives, musulmanes, étrangères et aussi contre les partis démocratiques (Norvège, USA). Purement endogène, il implique une réaction plus subtile qu’une intervention militaire ou la simple traque de criminels.

La solidité démocratique et militaire américaine atteinte

Outre les conséquences internes, cet acte a des conséquences externes. Les USA, gardiens du temple de la démocratie, sont atteints doublement, dans leur âme et leur honneur, dans leur dissuasion et leur force. Quelle valeur aura demain leur admonestation contre des régimes autoritaires ? Difficile de faire la leçon à la Biélorussie ou l’Iran par exemple… Les USA sont-ils si forts aujourd’hui, alors qu’ils sont incapables de défendre leurs propres institutions contre une horde, qui n’était pas puissamment armée ?  Ces questions peuvent trouver une réponse. Le simple évènement du Capitole est une faille sérieuse.

Un rééquilibrage mondial

Cet évènement sonne aussi la fermeture d’une autre séquence, celle de la toute puissance américaine.

Le multipolaire revient à la charge

La résurgence russe, l’émergence chinoise, suivie de celle de l’Inde, conduit à un rééquilibrage mondial. Moscou, Pékin, et dans une moindre mesure New Delhi ont aujourd’hui les moyens d’une diplomatie mondiale, tout autant que Washington. La question des vaccins contre le Covid-19 sera un test grandeur nature. Un pays a aujourd’hui vraiment le choix de se trouver des alliés si on le menace. La balance faite en Turquie entre OTAN et Russie le prouve. Cela réduit sensiblement le pouvoir extra-territorial américain qu’il s’agisse de la puissance dure (les armées), mi-dure (les sanctions ou les investissements) ou douce (commerce, culture, santé…). On est ainsi à l’aube d’un réel multipolarisme qui n’avait pu éclore réellement à la chute de l’URSS. Ce n’est pas l’évènement du Capitole qui déclenche le mouvement. Il le couronne, un peu comme la glace qui se brise, et révèle l’eau bouillante au-dessous.

Un rééquilibrage de fait entre USA et Europe ?

Dans cette nouvelle configuration, on pourrait assister aussi à une sorte de rééquilibrage naturel entre USA et Europe, que ce soit dans l’exemplarité démocratique ou au sein de l’Alliance Atlantique. L’évènement du Capitole interroge. Et si les USA faisaient défaut ? Et si les Européens ne pouvaient plus compter à 100% sur les USA ? La question revenait de temps à autre durant le mandat de Donald Trump. On pensait la page tournée. L’attaque du Capitole est une preuve que ce ne sont pas juste des questions conjoncturelles, mais une vraie évolution stratégique qui peut (ou doit) se produire.

Pour l’Europe, des responsabilités écrasantes

L’Europe n’a pas, là, quelques cartes à jouer. Elle a de vraies responsabilités. À elle de démontrer que son modèle démocratique, d’équilibre dans la société, de diplomatie mondiale, de maintien de la paix est le plus durable (cf. encadré). À elle de démontrer qu’on peut avoir une voix modérée, sans être faible, sans s’effacer. À elle de négocier fermement, mais sans outrances dans un monde qui, sous le poids de la crise du Covid-19, évolue sous deux tendances contradictoires : repli sur soi et interdépendance plus forte. À elle de surmonter le traumatisme de la perte d’un d’un pays-clés, le Royaume-Uni. À elle de s’intéresser enfin aux affaires mondiales, d’intervenir, sans s’ingérer.

Une quinzaine de zones de crises à suivre de près

Au plan géopolitique, plusieurs processus engagés interrogent car ils sont lourds de conséquences pour les Européens :

  1. La stabilisation de la Libye avec un cessez-le-feu qui devra être consolidé.
  2. Les relations avec la Turquie qui connaissent des hauts et des bas, avec une attitude pour le moins divergente d’Ankara des intérêts européens ces derniers mois (Syrie, Libye, Haut Karabagh, Méditerranée orientale, équipements militaires).
  3. Le conflit au Sahel, avec l’hypothèque qui pèse sur l’efficacité de l’opération française Barkhane, l’engagement des Européens et la transition gouvernementale au Mali (comme au Niger ou au Burkina Faso).
  4. La reprise ou l’abandon de l’accord sur le nucléaire iranien, avec la possible réintégration des USA dans l’accord ou la course en avant nucléaire.
  5. L’aboutissement (ou non) du processus de paix en Afghanistan et le retrait concomitant des pays de l’OTAN du pays, 20 ans après l’intervention de 2001.
  6. La reprise en main de sa propre sécurité par le gouvernement somalien et la diminution des forces sur place (Union africaine, USA, etc.).
  7. La suite du Brexit, avec un Royaume-Uni tenté par la compétition avec l’Europe, mais menacé d’un schisme interne rampant (séparatisme écossais, unitarisme irlandais…).
  8. Le sort des différents traités de désarmement qui sont en voie soit d’abandon (FNI, Ciel Ouvert), soit d’extinction (New Start) (Lire : Du TNP au TIAN, les traités pour le désarmement nucléaire sous la loupe).

Sans oublier

  1. Le conflit en Syrie qui ‘fête’ ses dix ans, avec un Bachar el-Assad toujours en place.
  2. La menace de l’État islamique qui n’a pas été complètement éradiquée au Moyen-Orient, notamment entre Irak et Syrie.
  3. La guerre dans l’Est de l’Ukraine et le processus en format Normandie initié par Français et Allemands qui patine.
  4. La stabilisation au Haut Karabagh conduite par les Russes.
  5. La situation au Moyen-Orient, avec les élections en Palestine en mai et juillet, le rétablissement des relations entre Israël et plusieurs pays arabes ou musulmans (Émirats arabes unis, Bahreïn, Maroc, Soudan) et une (hypothétique) reprise du processus de paix avec Israël.
  6. Le conflit en Éthiopie entre le gouvernement central et sa province Tigray, qui reste pour l’instant limité au plan national mais pourrait déstabiliser une région entière.
  7. La poussée islamiste et terroriste au Mozambique, nouvelle zone de crise.
  8. La situation aux USA, devenus aujourd’hui un foyer ‘potentiel’ d’instabilité.

Rester vigilant face à la crise non prévue

Ceci est ce qui est prévisible. Reste la surprise toujours possible. Les dernières années n’ont pas été avares de ces retournements de situation, de ces conflits qui éclatent ou qui se terminent. Il faut donc garder la porte ouverte à toutes les éventualités et être vigilant. La capacité de réaction aux crises ou aux évènements est un atout essentiel si l’Europe veut rester un acteur majeur. L’Europe est en fait à l’heure des choix : réagir et exister, ou se laisser enfoncer par les crises successives et s’effacer progressivement, lentement mais sûrement, dans ce qui ressemble davantage à une ‘lutte de Sumo’ qu’à une nouvelle guerre froide.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Une réflexion sur l’autonomie stratégique

Au-delà des mots, l’Union européenne a entamer une réflexion sur son autonomie stratégique et a commencé à se doter d’instruments. L’établissement d’un dispositif de contrôle des investissements étrangers, comme la discussion autour de la régulation d’internet ou sur la boussole stratégique qui débutent, en témoignent. La mise en place du fonds européen de défense et de la facilité européenne de paix seront particulièrement à suivre cette année aussi.

  1. La liste est longue pour n’en citer que quelques uns : à Oslo et Utøya (Norvège) contre le parti travailliste norvégien et le gouvernement en juillet 2011 (77 morts, 151 blessés) ; à Münich (Allemagne) en juillet 2016 (10 morts, 36 blessés) ; à Finsbury Park (Royaume Uni) contre une mosquée en juin 2017 (1 mort, 10 blessés) ; à Pittsburgh (USA), contre une synagogue en octobre 2018 (11 morts, 1 blessé) ; à Christchurch (Nouvelle-Zélande) contre des mosquées en mars 2019 (51 morts, 49 blessés) ; à Halle-sur-Saale (Allemagne) en octobre 2019 pour la Yom Kippour (2 morts, 2 blessés) ; à Hesse (Allemagne) contre des bars à chichas en février 2020 (11 morts, 6 blessés), etc.

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La Russie agacée par l’opération Irini et le fait savoir

Sun, 17/01/2021 - 22:12

(B2) L’approche amicale faite par une frégate grecque sur un navire marchand russe provoque la montée dans les tours de Moscou. Le ministère russe des Affaires étrangères parle d’incident et demande des clarifications

Une approche amicale…

Quand les marins de la frégate grecque Adrias (F-459 Adrias) s’approchent de l’Adler, un porte conteneur battant pavillon russe, début janvier, ils ne supposent pas que cela va devenir une question politique. Pour les gars de l’opération Irini, c’est un peu la routine. Une approche amicale. La 63e du genre. Une visite à bord, où les marins échangent des informations. « C’est utile pour les deux » dit-on au QG d’Irini. « Dans un laps de temps très court, l’officier en sait plus sur les trafiquants en Méditerranée et le capitaine du navire voit ceux qui patrouillent sur sa route. »

… montée en ‘incident’ à Moscou

Mais à Moscou, on ne l’entend pas de cette oreille. La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova tonne : « La Russie exige des explications de la Grèce pour le contrôle du navire battant pavillon russe en Méditerranée ». Nous devons « clarifier les circonstances de l’incident, dans lequel beaucoup de choses nous restent incompréhensibles » indique-t-elle dans un communiqué. En particulier, cela « nécessite des éclaircissements sur les normes juridiques internationales et les informations spécifiques [qui ont permis] d’inspecter un navire russe, ainsi de savoir si les procédures internationales d’inspection des navires en haute mer ont été suivies. »

Une mention d’une inspection…

Et d’ajouter : « Inspecter les navires en haute mer au large des côtes libyennes n’est possible que s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’ils transportent des armes ou du matériel connexe. Et cela nécessite de bonne foi le consentement préalable de l’État du pavillon ».

…démentie par l’opération Irini

En fait, il n’y a pas d’inspection, comme nous l’a confirmé un porte-parole de l’opération. Mais seulement une visite amicale. C’est-à-dire une visite effectuée avec l’accord préalable du capitaine, sans interpellation ni fouille du navire. Les moyens employés, via hélicoptère, peuvent apparaitre assez audacieux. C’est tout simplement un moyen de commodité.

Commentaire : après la Turquie qui avait de façon plus outrancière protesté contre l’action de l’opération Irini, voici maintenant la Russie qui entre dans la danse, de façon plus subtile certes, mais en mélangeant certaines informations. Il semble bien que l’opération européenne gêne les pourvoyeurs en armes des deux camps. Les frères ennemis turco-russes étant opposés en Libye, la première soutenant le gouvernement d’entente nationale de Tripoli, la seconde les hommes de Haftar basés à Benghazi.

(Nicolas Gros-Verheyde)

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